Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 127 III 86



127 III 86

14. Extrait de l'arrêt de la Ie Cour civile du 19 décembre 2000 dans la
cause M. contre R. (recours en réforme) Regeste

    Art. 336 Abs. 1 lit. a OR; missbräuchliche Kündigung; Treuepflicht
des Arbeitnehmers.

    Ein zum Kader gehörender Arbeitnehmer, der wenige Monate nach der
Anstellung mit den Untergebenen über seine Meinungsverschiedenheiten
mit der Direktion spricht und gleichzeitig dem Arbeitgeber bekannt gibt,
dass er unter der neuen Direktion nicht arbeiten und seine Arbeitsstelle
verlassen will, zerstört die für jedes Arbeitsverhältnis unerlässliche
Vertrauensgrundlage und verletzt seine Treuepflicht. Die unter diesen
Umständen erfolgte Kündigung ist nicht missbräuchlich im Sinne von Art. 336
Abs. 1 lit. a OR (E. 2).

Sachverhalt

    L'établissement médico-social M. a engagé R. en qualité
d'infirmière-chef à partir du 1er août 1998 et a nommé une nouvelle
directrice en la personne de L. dès le 1er novembre 1998.

    R. a d'emblée contesté le style de direction adopté par L.  Lors d'une
séance du 2 novembre 1998, elle a demandé au comité de direction de
revenir sur la nomination de la nouvelle directrice, indiquant qu'elle
pensait ne pas pouvoir travailler avec celle-ci. A la directrice, chargée
de renouer le dialogue, l'infirmière-chef est restée sur ses positions
et lui a déclaré vouloir quitter son emploi.

    R. a également indiqué à l'équipe soignante qui lui manifestait
son soutien qu'elle ne faisait toujours pas confiance au comité et à
la nouvelle directrice et que, si rien ne changeait, elle quitterait
l'établissement une fois qu'elle aurait trouvé un poste intéressant
ailleurs. Jusque-là, elle continuerait à s'investir pleinement dans
son travail.

    Le 30 novembre 1998, M. a signifié à R. son licenciement pour le 31
décembre suivant. L'infirmière-chef s'y est opposée par écrit. M. lui a
indiqué que, par son attitude méfiante, voire hostile vis-à-vis du comité
et de la nouvelle directrice, l'infirmière-chef ne pouvait que mettre
en péril l'ambiance de travail de toute la maison et pousser l'équipe
soignante dans un conflit de loyauté.

    A la suite de la demande en justice déposée par R., le Tribunal
des prud'hommes de Lausanne a notamment condamné M. à verser à
l'infirmière-chef une indemnité de 7'500 fr. pour résiliation abusive,
ce qu'a confirmé la Chambre des recours du Tribunal cantonal vaudois par
arrêt du 1er mars 2000.

    Contre cet arrêt, l'établissement M. (la défenderesse) dépose un
recours en réforme au Tribunal fédéral.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Extrait des considérants:

Erwägung 2

    2.- La défenderesse se prévaut d'une violation de l'art. 336 al. 1
let. a CO, reprochant à la cour cantonale d'avoir reconnu l'existence
d'une résiliation abusive au sens de cette disposition.

    a) Selon le principe posé à l'art. 335 al. 1 CO, le contrat de
travail conclu pour une durée indéterminée peut être résilié par chacune
des parties. Ce droit fondamental de chaque cocontractant de mettre
unilatéralement fin au contrat est cependant limité par les dispositions
sur le congé abusif (art. 336 ss CO). En particulier, l'art. 336 al. 1
let. a CO qualifie d'abusif le congé donné par une partie pour une raison
inhérente à la personnalité de l'autre partie, à moins que cette raison
n'ait un lien avec le rapport de travail ou ne porte sur un point essentiel
un préjudice grave au travail dans l'entreprise. Cette disposition vise
le congé discriminatoire, fondé par exemple sur la race, la nationalité,
l'âge, l'homosexualité, les antécédents judiciaires ou encore la maladie,
la séropositivité (arrêt du Tribunal fédéral du 11 novembre 1993, publié
partiellement in: SJ 1995 p. 798, consid. 2a et les références citées;
ADRIAN STAEHELIN, Commentaire zurichois, art. 336 CO no 9). L'application
de l'art. 336 al. 1 let. a CO suppose premièrement que le congé ait été
donné pour un motif inhérent à la personnalité de la personne congédiée et,
deuxièmement, que ce motif n'ait pas de lien avec le rapport de travail
ou ne porte pas sur un point essentiel un préjudice grave au travail dans
l'entreprise (cf. MARIE-GISÈLE ZOSS, La résiliation abusive du contrat
de travail, thèse Lausanne 1996, p. 173). Les motifs de la résiliation
relèvent du fait et, partant, lient le Tribunal fédéral saisi d'un recours
en réforme (art. 63 al. 2 OJ; ATF 115 II 484 consid. 2b).

    b) Il ressort de l'arrêt attaqué que la demanderesse a été licenciée
en raison du manque de confiance qu'elle a exprimé envers la nouvelle
direction mise en place par le comité directeur et également parce que
l'établissement médical craignait qu'en raison de son ascendant naturel sur
ses subordonnés et sur les autres cadres, l'infirmière-chef ne dresse une
partie importante du personnel contre la nouvelle directrice. Le Tribunal
fédéral s'est récemment demandé si les traits de caractère et les types
de comportements individuels pouvaient constituer des raisons inhérentes à
la personnalité au sens de l'art. 336 al. 1 let. a CO, laissant toutefois
la question ouverte (ATF 125 III 70 consid. 2c p. 74 et les références
citées). Ce problème se pose également dans le cas d'espèce compte tenu
des motifs de licenciement constatés, mais, comme dans l'arrêt précité,
il n'a pas à être résolu, puisque la seconde condition d'application de
l'art. 336 al. 1 let. a CO fait défaut.

    c) Il ne saurait en effet y avoir d'abus selon cette disposition
lorsque la raison justifiant le congé présente un lien avec le rapport
de travail, en particulier avec l'obligation de travailler et le devoir
de fidélité du travailleur (Message du Conseil fédéral du 9 mai 1984 in:
FF 1984 II 623; arrêt du Tribunal fédéral du 13 janvier 1992, publié in: SJ
1993 p. 357, consid. 1; STAEHELIN, op. cit., art. 336 CO no 10). En raison
de son obligation de fidélité, le travailleur est tenu de sauvegarder les
intérêts légitimes de son employeur (art. 321a al. 1 CO). A cet égard, le
comportement des cadres doit être apprécié avec une rigueur accrue, compte
tenu du crédit particulier et de la responsabilité que leur confère leur
fonction dans l'entreprise (arrêt du Tribunal fédéral du 11 octobre 1994,
publié in: SJ 1995 p. 809, consid. 3; ATF 104 II 28 consid. 1; STAEHELIN,
op. cit., art. 321a CO no 8; ULLIN STREIFF/ADRIAN VON KAENEL, Leitfaden zum
Arbeitsvertragsrecht, 5e éd., Zurich 1992, art. 321a CO no 4). Il a ainsi
été jugé qu'un cadre qui manifestait clairement son intention de changer
d'emploi aussi vite que possible peu après le début de son contrat de
travail conclu pour une durée de deux ans violait son devoir de fidélité
(ATF 117 II 560 consid. 3a). Il ne faut pas non plus perdre de vue que
les rapports de confiance sont à la base du contrat de travail (ATF 124
III 25 consid. 3a in fine) et que, si ceux-ci sont ébranlés ou détruits,
notamment en raison de la violation du devoir de fidélité du travailleur
(cf. STREIFF/VON KAENEL, op. cit., art. 321a CO no 8), ils peuvent même
aller jusqu'à légitimer la cessation immédiate des rapports de travail
(cf. ATF 116 II 145 consid. 6a p. 150).

    En l'espèce, la demanderesse occupait le poste d'infirmière-chef
auprès de la défenderesse. Alors qu'elle n'était en fonction que depuis
quelques mois, elle s'est d'emblée opposée à la nomination de la nouvelle
directrice par le comité directeur. Lors d'une séance du 2 novembre
1998, elle a annoncé qu'elle ne pensait pas pouvoir travailler avec cette
personne et elle a cherché à faire en sorte que le comité revienne sur sa
décision de nomination. A l'occasion d'une entrevue avec la directrice,
chargée de renouer le dialogue, elle est restée sur ses positions et lui
a déclaré vouloir quitter son emploi. Elle a ensuite répété à l'équipe
soignante qui lui avait adressé une lettre de soutien qu'elle ne faisait
toujours pas confiance au comité et à la nouvelle directrice et qu'elle
quitterait l'établissement une fois qu'elle aurait trouvé un poste
intéressant ailleurs.

    On peut considérer qu'un cadre qui fait état de ses dissensions avec
la direction auprès de ses subordonnés, alors que, par sa fonction, il est
chargé de représenter son employeur vis-à-vis de ceux-ci, viole son devoir
de fidélité. Ce cadre rompt également le lien de confiance indispensable
à toute relation de travail lorsqu'il annonce à son employeur, après
quelques mois d'activité, qu'il s'oppose à travailler avec la directrice
fraîchement nommée et qu'il ne modifie pas sa position bien que celle-ci
tente de renouer le dialogue, annonçant au surplus qu'il a l'intention
de quitter son emploi. La justification du congé ressortant de l'arrêt
attaqué est donc en relation directe avec les rapports de travail,
de sorte que le licenciement prononcé ne saurait être considéré comme
abusif au sens de l'art. 336 al. 1 let. a CO, contrairement à ce qu'a
retenu la cour cantonale. Il convient de préciser qu'il ne s'agit pas
ici de se demander si l'attitude de la demanderesse aurait justifié une
résiliation immédiate au sens de l'art. 337 CO, mais seulement d'examiner
si l'employeur pouvait librement faire usage de son droit de mettre fin
au contrat tel que garanti par l'art. 335 al. 1 CO.

    Comme les faits retenus par la cour cantonale ne laissent pas
apparaître l'existence d'un autre motif de congé abusif, la demanderesse
ne peut prétendre à une indemnité sur la base des art. 336 ss CO. L'arrêt
attaqué doit donc être annulé dans la mesure où il condamne la défenderesse
à verser à la demanderesse un montant de 7'500 fr. pour licenciement
abusif.