Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 127 III 543



127 III 543

92. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 14 juin 2001 dans la
cause Société Coopérative X. contre Z. (recours en réforme)

Regeste

    Architektenvertrag. Haftung des Architekten gegenüber der im Hinblick
auf die Erstellung eines Wohngebäudes aus den zukünftigen Miteigentümern
gebildeten Genossenschaft.

    Die Genossenschaft, welche gegen den Architekten gestützt auf Art. 97
OR wegen Nicht- oder Schlechterfüllung des Vertrages Klage führt, hat zu
beweisen, dass ihr ein Schaden entstanden ist. Da sie nicht Eigentümerin
des erstellten Gebäudes ist, muss sie eine Verminderung der ihr zustehenden
Ansprüche oder eine Erhöhung ihrer Schulden nachweisen (E. 2).

Sachverhalt

    A.- Plusieurs personnes, souhaitant construire un bâtiment d'habitation
et devenir propriétaires de leur logement familial, ont constitué à cette
fin, par des statuts adoptés le 6 décembre 1990, une société coopérative
appelée Société Coopérative X. (ci-après: la coopérative).

    La coopérative a conclu un contrat avec un ingénieur civil et un
contrat d'architecte avec Z. (ci-après: l'architecte), chargeant celui-ci
de l'étude et de la réalisation du bâtiment, y compris la direction
des travaux.

    La coopérative a signé, le 31 mai 1991, une promesse de vente en
vue d'acquérir une parcelle sur le territoire de la commune de W. Par
acte du 25 octobre 1991, la parcelle a été acquise par treize personnes,
à savoir douze membres de la coopérative et la coopérative elle-même pour
un treizième. La coopérative a ensuite cédé la part qu'elle avait acquise
à L. et J.

    Les travaux ont débuté en janvier 1992 et le bâtiment était en état
d'être habité dès la fin novembre 1992.

    Par acte notarié du 26 novembre 1992, l'immeuble a été constitué en
propriété par étages entre les treize copropriétaires, la coopérative ne
figurant pas au nombre de ceux-ci.

    En ce qui concerne la réalisation du bâtiment (comprenant treize
appartements et un parking souterrain), divers défauts de l'ouvrage ont
été invoqués.

    B.- Le 21 juin 1995, l'architecte a déposé devant la Cour civile
du Tribunal cantonal vaudois une demande en paiement dirigée contre
la coopérative, réclamant à cette dernière la somme de 50'538 fr. avec
intérêts à 5% dès le 8 décembre 1994, ce montant correspondant à un solde
d'honoraires demeuré impayé. En cours d'instance, l'architecte a réduit
ses conclusions à 40'470 fr. avec intérêts à 5% dès le 21 juin 1995.

    Dans sa réponse du 23 octobre 1995, la coopérative a conclu au
déboutement du demandeur et lui a réclamé, à titre reconventionnel, 300'000
fr. avec intérêts à 5% dès le 1er septembre 1995, somme correspondant
à des dommages-intérêts dont elle s'estimait créancière pour mauvaise
exécution du contrat.

    Par jugement du 29 août 2000, la Cour civile du Tribunal cantonal
vaudois a condamné Z. à payer à la défenderesse la somme de 6193
fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 16 novembre 1995. En substance, la
cour cantonale a rejeté la demande en dommages-intérêts présentée par
la coopérative, considérant que celle-ci n'avait pas prouvé avoir subi
elle-même un dommage. Se fondant sur une expertise, la cour cantonale a
déterminé le montant des honoraires dus à l'architecte et l'a réduit de
5000 fr. pour tenir compte d'une mauvaise exécution (défaut d'information
concernant l'exiguïté des places de stationnement, l'une d'elles étant même
inutilisable); elle est ainsi parvenue à la conclusion que l'architecte
avait perçu trop d'honoraires et l'a condamné à payer la différence.

    C.- La Société Coopérative X. exerce un recours en réforme au Tribunal
fédéral. Elle conclut à la réforme du jugement attaqué, demandant que
l'intimé soit condamné à lui payer la somme de 143'593 fr. avec intérêts
à 5% dès le 16 novembre 1997.

    Le Tribunal fédéral a rejeté le recours et confirmé le jugement
attaqué.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Extrait des considérants:

Erwägung 2

    2.- a) Selon les constatations cantonales - qui lient le Tribunal
fédéral en instance de réforme (art. 63 al. 2 OJ) -, les parties sont

convenues que l'intimé, en sa qualité d'architecte professionnel,
établirait les plans et dirigerait les travaux, moyennant une rémunération
que la recourante s'obligeait à lui payer. On se trouve donc en présence
d'un contrat d'architecte global.

    D'après la jurisprudence, lorsqu'un architecte est chargé d'établir
des plans, des soumissions ou des projets de construction, il se conclut
un contrat d'entreprise (art. 363 CO); s'il est chargé des adjudications
et de la surveillance des travaux, il s'agit d'un mandat (art. 394 CO);
si sa mission englobe des activités relevant des deux catégories, le
contrat est mixte et relève, suivant les prestations, du mandat ou du
contrat d'entreprise (ATF 114 II 53 consid. 2b; 110 II 380 consid. 2;
109 II 462 consid. 3c et 3d).

    Dans le cas du contrat complet (comme celui d'espèce), la jurisprudence
a posé qu'il fallait appliquer les règles du mandat pour ce qui concerne
la faculté de mettre fin au contrat (ATF 110 II 380 consid. 2; 109 II
462 consid. 3d). Elle a retenu la même solution en ce qui concerne la
responsabilité de l'architecte pour une mauvaise évaluation du coût des
travaux (cf. ATF 119 II 249 consid. 3b), bien qu'elle admette l'existence
d'un contrat d'entreprise lorsque l'architecte est chargé exclusivement
d'élaborer un devis écrit (ATF 114 II 53 consid. 2b). Cette évolution de
la jurisprudence (cf. également ATF 122 III 61 consid. 2) semble aller
dans le sens préconisé par une partie de la doctrine, qui voudrait que
la responsabilité de l'architecte global soit soumise exclusivement aux
règles du mandat (cf. PETER GAUCH, Le contrat d'entreprise, adaptation
française par Benoît Carron, n. 58 ss et les références citées, p. 19 s.).

    En l'espèce, la recourante se plaint notamment de certains défauts de
la construction qui seraient dus aux plans établis par l'architecte. Savoir
si les règles du contrat d'entreprise relatives à la garantie des défauts
(art. 367 ss CO) pourraient être applicables à l'architecte global
lorsque les manquements qui lui sont reprochés concernent les plans est
une question qui n'a pas été tranchée par la jurisprudence récente.

    Il faut cependant rappeler que le droit du maître à une réduction du
prix est un droit formateur, que seul le maître de l'ouvrage peut choisir
d'exercer ou non (cf. ATF 107 III 106 consid. 2). Or, comme la recourante,
qui est représentée par un avocat, se réfère expressément à l'art. 398
CO et à l'art. 97 CO, le Tribunal fédéral ne saurait exercer à sa place
un droit formateur alors qu'elle a manifestement choisi de se placer sur
un autre terrain juridique.

    b) Dès lors que la défenderesse, invoquant l'art. 97 CO, a opté pour
demander des dommages-intérêts en raison de l'inexécution ou de la mauvaise
exécution du contrat, toute discussion sur la qualification juridique de
l'accord ou sur l'étendue de l'obligation contractuelle de l'architecte
est vaine in casu pour les raisons qui vont être maintenant exposées.

    L'art. 97 al. 1 CO prévoit que lorsque le créancier ne peut obtenir
l'exécution de l'obligation ou ne peut l'obtenir qu'imparfaitement, le
débiteur est tenu de réparer le dommage en résultant, à moins qu'il ne
prouve qu'aucune faute ne lui est imputable.

    Sur la base d'une telle disposition, le demandeur doit, entre autres
conditions, apporter la preuve qu'un dommage lui a été causé (art. 8 CC;
WOLFGANG WIEGAND, Commentaire bâlois, 2e éd., n. 60 ad art. 97 CO; ROLF
H. WEBER, Commentaire bernois, n. 316 ad art. 97 CO).

    Le dommage juridiquement reconnu réside dans la diminution involontaire
de la fortune nette; il correspond à la différence entre le montant
actuel du patrimoine du lésé et le montant qu'aurait ce même patrimoine si
l'événement dommageable ne s'était pas produit (ATF 127 III 73 consid. 4a;
126 III 388 consid. 11a et les arrêts cités). Le dommage peut se présenter
sous la forme d'une diminution de l'actif, d'une augmentation du passif,
d'une non-augmentation de l'actif ou d'une non-diminution du passif
(cf. ATF 122 IV 279 consid. 2a; 121 IV 104 consid. 2c).

    Dire s'il y a eu un dommage et quelle en est la quotité est une
question de fait qui lie le Tribunal fédéral saisi d'un recours en
réforme (ATF 127 III 73 consid. 3c; 126 III 388 consid. 8a; 123 III
241 consid. 3a). C'est en revanche une question de droit de dire si la
notion juridique de dommage a été méconnue (ATF 127 III 73 consid. 3c;
120 II 296 consid. 3b).

    c) Comme la recourante n'est pas propriétaire de l'immeuble, les
imperfections techniques dont elle se plaint n'affectent pas la valeur
d'un bien qui soit à l'actif de son patrimoine.

    Il lui incombait donc de prouver son dommage d'une autre manière,
en établissant soit une diminution de ses créances, soit une augmentation
de ses dettes.

    Il est vrai que les rapports entre la recourante et ses membres
constituent pour l'intimé une res inter alios acta et qu'il n'est pas
question de statuer définitivement à ce sujet, les membres n'étant pas
parties à la présente procédure et n'ayant pas eu l'occasion de s'exprimer
et de fournir leurs moyens de preuve. Il n'empêche qu'il incombait à la
recourante, dans la présente procédure, d'établir son

dommage et, par voie de conséquence, de fournir tous les éléments propres
à cette démonstration.

    La coopérative aurait pu acheter l'immeuble, puis vendre ou louer
les appartements à ses membres. Dans une telle structure juridique, les
membres auraient été en mesure de faire valoir la garantie des défauts
(art. 205 al. 1, 259a al. 1 CO) et de provoquer ainsi, pour la recourante,
un gain manqué. Cette construction juridique doit cependant être d'emblée
écartée, puisqu'il est établi que la coopérative n'a pas acquis l'immeuble.

    On aurait aussi pu imaginer que les membres chargent la coopérative
de réaliser la construction en tant qu'entrepreneur général. Dans cette
hypothèse également, ils auraient pu faire valoir la garantie des défauts
(art. 368 CO) et provoquer un gain manqué pour la recourante. Il ne
ressort cependant pas de l'état de fait souverain que la défenderesse se
soit engagée à l'égard de ses membres à livrer les appartements achevés,
assumant à leur égard une obligation de résultat. En tout état de cause,
il n'est pas constaté - ce qui lie le Tribunal fédéral - que la recourante
aurait subi une perte sur des sommes qui lui étaient dues par ses membres.

    Selon l'état de fait cantonal, il apparaît plutôt que les membres
ont créé la société coopérative sans comprendre ou accepter toutes les
conséquences de cette construction juridique. Dans un premier temps,
les contrats ont été conclus au nom de la société coopérative, les
membres pensant probablement qu'ils agissaient tous ensemble. Au moment
d'acquérir la propriété, chaque membre a voulu agir en son propre nom,
rejetant l'existence de la personne morale distincte qu'ils avaient
créée. A l'égard de celle-ci - mais la recourante n'a rien établi de
précis - il semble que les membres se soient bornés à convenir qu'ils la
couvriraient de toutes les obligations découlant pour elle des contrats
qu'elle avait conclus. Il ressort cependant des constatations cantonales
que la recourante n'a pas prouvé que les imperfections alléguées l'auraient
privée d'une somme due par l'un ou l'autre des membres. Il s'agit là
d'une question d'appréciation des preuves, qui ne peut être revue dans
un recours en réforme (cf. ATF 126 III 189 consid. 2a et les références).

    La cour cantonale n'a donc pas méconnu la notion juridique de
dommage. Constatant qu'aucun préjudice n'était prouvé, elle n'a pas violé
le droit fédéral en rejetant l'action fondée sur l'art. 97 CO.