Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 127 III 390



127 III 390

66. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 17 avril 2001 dans la
cause dame A. contre dame G., E., et F. et contre X. S.A. (recours en
nullité) Regeste

    Zulässigkeit der Nichtigkeitsbeschwerde (Art. 68 Abs. 1 lit. b OG).

    Der Nichtigkeitsgrund gemäss Art. 68 Abs. 1 lit. b OG erfasst weder die
unrichtige Anwendung andwendbaren Bundesrechts noch diejenige anwendbaren
ausländischen Rechts.

    Vertrag zugunsten Dritter (Art. 112 OR).

    Ein von Todes wegen errichteter Vertrag zugunsten Dritter erfordert
die Form einer letztwilligen Verfügung gemäss Art. 498 ff. ZGB (E. 2).

Sachverhalt

    A.- Dame A. allègue avoir découvert récemment, dans une maison
appartenant à sa mère dame B. décédée le 22 février 1983, des documents
anciens relatifs à des biens dont elle ignorait l'existence. Elle soutient,
sur la base de ces pièces, que sa mère, dont elle est l'unique héritière,
avait des droits sur deux comptes bancaires: un compte BL auprès de Y. à
Genève (devenue après fusion X. S.A.) et un compte N auprès de X. à Genève
(devenue après fusion X. S.A.).

    Le 16 juin 2000, dame A. a déposé auprès des tribunaux genevois une
requête en mesures provisionnelles dirigée contre dame G., E., et F. -
qui, semble-t-il, ont acquis la maîtrise des biens litigieux par voie
de succession - et contre X. S.A. Elle demandait en particulier que les
comptes litigieux soient bloqués à titre conservatoire et que la banque
la renseigne sur l'ensemble des opérations effectuées.

    Le compte BL a été ouvert par un contrat conclu à Genève le 29 juin
1955 entre C. (frère de dame B.) et la banque Y., à Genève. Ce document,
partiellement préimprimé et partiellement dactylographié, indique que le
compte est établi au nom de dame D. (mère de dame B.) et de dame B. Ce
contrat prévoit en principe la compétence des tribunaux genevois et
déclare applicable le droit suisse.

    C., ressortissant italien domicilié en Italie, est décédé à Gênes le
6 janvier 1972. Par testament, il avait institué son épouse héritière
universelle et avait accordé différents legs à dame B., que celle-ci a
reconnu avoir reçus.

    B.- Par ordonnance du 30 août 2000, le Président ad intérim du Tribunal
de première instance de Genève a, pour l'essentiel, autorisé la saisie
conservatoire des deux comptes litigieux et condamné X. S.A. à fournir à
dame A. tout renseignement concernant le compte BL ouvert le 29 juin 1955.

    Statuant sur le recours déposé par dame G., E. et F., la Cour de
justice du canton de Genève, par arrêt du 14 décembre 2000, a annulé
l'ordonnance attaquée et débouté dame A. de toutes ses conclusions. La
cour cantonale a estimé que le contrat du 29 juin 1955, soumis à la
législation suisse par élection de droit, constituait une stipulation
pour autrui à cause de mort, qui devait être considérée comme nulle,
parce qu'elle ne remplissait pas les exigences de forme du droit italien
en matière d'attribution pour cause de mort. En conséquence, elle a conclu
que la requérante n'était pas parvenue à rendre vraisemblables les droits
de sa mère sur les avoirs litigieux.

    C.- Dame A. interjette un recours en nullité au Tribunal fédéral,
soutenant que le droit italien a été appliqué à tort à la place du
droit suisse.

    Le Tribunal fédéral a rejeté le recours dans la mesure où il était
recevable.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Extrait des considérants:

Erwägung 1

    1.- a) Le recours en nullité n'est recevable que si le recours en
réforme n'est pas ouvert (art. 68 al. 1 OJ).

    La voie de la réforme n'est pas ouverte contre une décision sur
mesures provisionnelles, parce qu'elle ne statue pas sur la prétention
matérielle, mais seulement sur une protection provisoire (ATF 115 II 297
consid. 2). Il n'y a pas lieu d'examiner - comme cela a été soulevé -
s'il faudrait faire une exception pour la partie de la requête qui tend à
l'obtention de renseignements, parce que le recours doit de toute manière
(cf. ci-dessous) être rejeté.

    b) Interjeté par la partie qui a succombé dans ses conclusions
tendant à une protection provisoire et dirigé contre un jugement rendu en
dernière instance cantonale sur une contestation civile qui, en principe,
ne peut pas faire l'objet d'un recours en réforme, le recours en nullité
est ouvert.

    c) Il ne peut être formé que pour l'un des motifs énumérés à l'art. 68
al. 1 OJ.

    En l'espèce, la recourante soutient que le droit étranger a été
appliqué à la place du droit fédéral déterminant (art. 68 al. 1 let. b
OJ).

    Ce grief ne permet pas de faire valoir que le juge aurait mal appliqué
le droit suisse lorsque celui-ci est applicable ou qu'il aurait mal
appliqué le droit étranger lorsque celui-ci est applicable (POUDRET,
Commentaire de l'OJ, vol. II, n. 4 ad art. 68 OJ, p. 643).

    d) Déposé en temps utile (art. 69 al. 1 et art. 34 al.  1 let. c
OJ), dans la forme prévue par la loi (art. 71 OJ), le recours en nullité
est recevable.

    e) Hormis l'hypothèse de l'art. 68 al. 1 let. e OJ (qui n'entre pas en
considération ici), le recours ne peut tendre qu'au renvoi de l'affaire à
la juridiction cantonale pour qu'elle statue à nouveau (art. 73 al. 2 OJ).

    f) Par le renvoi de l'art. 74 OJ, l'art. 63 OJ est applicable par
analogie (POUDRET, op. cit., n. 2 ad art. 74 OJ).

    En conséquence, le Tribunal fédéral doit conduire son raisonnement
sur la base des faits contenus dans la décision attaquée, à moins que
des dispositions fédérales en matière de preuve n'aient été violées,
qu'il y ait lieu à rectification de constatations reposant sur une
inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou qu'il faille compléter les
constatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu
compte de faits pertinents et régulièrement allégués (art. 64 OJ; ATF
126 III 59 consid. 2a; 119 II 353 consid. 5c/aa). Dans la mesure où un
recourant présente un état de fait qui s'écarte de celui contenu dans la
décision attaquée, sans se prévaloir avec précision de l'une des exceptions
qui viennent d'être rappelées, il n'y a pas lieu d'en tenir compte. Il
ne peut être présenté de griefs contre les constatations de fait, ni de
faits ou de moyens de preuve nouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ).

Erwägung 2

    2.- a) Saisi d'une demande, le juge suisse doit procéder à une
qualification juridique des faits selon la lex fori (ATF 127 III 123
consid. 2c).

    En l'espèce, la cour cantonale, analysant le contrat signé le 29 juin
1955, est parvenue à la conclusion qu'il s'agissait d'une stipulation pour
autrui à cause de mort. Cette qualification relève entièrement du droit
fédéral, dont l'application ne peut donner lieu à un recours en nullité.

    b) La cour cantonale a estimé que la forme de cet acte juridique
était régie par le droit italien.

    La recourante le conteste. Elle produit un avis de droit qui conclut à
l'application de l'art. 93 al. 2 LDIP (RS 291), selon lequel la Convention
de La Haye du 5 octobre 1961 sur les conflits de lois en matière de forme
des dispositions testamentaires (RS 0.211.312.1) s'applique par analogie
à la forme d'autres dispositions pour cause de mort.

    Cette opinion ne peut pas être suivie. En effet, la LDIP est entrée en
vigueur le 1er janvier 1989. Or, dans l'interprétation de la disposition
transitoire de l'art. 196 LDIP, le Tribunal fédéral a déjà jugé que cette
loi ne régissait pas la forme d'un acte juridique passé avant son entrée
en vigueur (ATF 118 II 514 consid. 3a). Comme l'acte d'espèce a été signé
le 29 juin 1955, l'art. 93 al. 2 LDIP n'est pas applicable.

    c) Il reste que la Convention de La Haye déjà citée est entrée en
vigueur pour la Suisse le 17 octobre 1971. A son art. 8, elle prévoit son
application à tous les cas où le testateur est décédé après l'entrée en
vigueur de la Convention.

    Comme C. est décédé le 6 janvier 1972, la Convention de La Haye est
en principe applicable.

    Il est cependant douteux que la stipulation en cause puisse être
qualifiée de disposition testamentaire au sens de la Convention de La Haye.

    Si l'on répond négativement à cette question, le juge aurait dû
probablement, en raison des biens en Suisse, s'inspirer de l'art. 24 de
l'ancienne loi fédérale sur les rapports de droit civil des citoyens
établis ou en séjour (LRDC; cf. ATF 118 II 514 consid. 3c; 96 II 79
consid. 9a p. 98), qui concerne de façon générale les dispositions
de dernière volonté, les pactes successoraux et les donations à cause
de mort. Que l'on applique l'art. 1er de la Convention de La Haye ou
l'art. 24 LRDC, le problème n'en est pas modifié dans le cas d'espèce.

    d) Le droit international privé suisse prévoit que plusieurs lois
sont applicables à la question de la forme des attributions pour cause
de mort; il suffit que l'acte soit valable à la forme selon l'une des
lois énumérées pour que le juge suisse doive en reconnaître la validité.

    S'agissant d'un ressortissant italien qui était domicilié en Italie
au moment de l'acte et qui a eu son dernier domicile en Italie, il est
évident que le juge suisse devait prendre en considération le droit
italien, que l'on applique l'art. 1er de la Convention de La Haye ou
l'art. 24 LRDC. C'est donc à juste titre que la cour cantonale a examiné
le droit italien, parce qu'elle aurait dû tenir l'acte pour valable à la
forme s'il avait été valable en droit italien.

    Le droit italien était donc bien applicable en vertu du droit
international privé suisse et il n'est pas exact de dire qu'il a été
appliqué en lieu et place du droit suisse.

    Savoir si le droit italien a été bien ou mal appliqué est une question
qui ne peut donner lieu à un recours en nullité (POUDRET, op. cit.,
n. 4 ad art. 68 OJ).

    e) Il reste que l'autorité cantonale, qu'elle applique l'art. 1er de la
Convention de La Haye ou l'art. 24 LRDC, aurait également dû se demander
si l'acte était valable à la forme selon le droit interne suisse, en tant
que loi du lieu où l'acte a été passé. En effet, si l'acte était valable à
la forme selon le droit interne suisse, sa validité aurait dû être admise.

    Il est possible que la cour cantonale n'ait pas examiné la question,
parce que la réponse lui paraissait par trop évidente. A supposer qu'elle
ait perdu la question de vue, il s'agirait d'une violation du droit
international privé suisse, conduisant à ne pas appliquer le droit suisse
dans un cas où il devait être appliqué. Il ne s'agit cependant pas d'une
application du droit étranger à la place du droit suisse. On se trouve en
présence d'une pure violation du droit fédéral, laquelle ne peut donner
lieu à un recours en nullité (POUDRET, op. cit., n. 4 ad art. 68 OJ).

    f) De toute manière, l'examen de la validité formelle de l'acte selon
le droit interne suisse n'aurait pas modifié l'issue du litige.

    Une stipulation pour autrui mortis causa exige la forme requise pour
une donation à cause de mort (RAINER GONZENBACH, Commentaire bâlois,
2e éd., n. 8 ad art. 112 CO; GAUCH/SCHLUEP/SCHMID/REY, Schweizerisches
Obligationenrecht, Allgemeiner Teil, 7e éd., no 4035; ENGEL, Traité des
obligations en droit suisse, 2e éd., p. 421).

    Selon l'art. 245 al. 2 CO, les donations dont l'exécution est fixée
au décès du donateur sont soumises aux règles concernant les dispositions
pour cause de mort.

    On ne voit pas comment un acte, partiellement préimprimé et
partiellement dactylographié, pourrait répondre aux exigences de forme
des art. 498 ss CC.

    L'acte est donc également nul à la forme selon le droit interne
suisse. La prise en considération de ce droit par la cour cantonale
n'aurait donc eu aucune incidence sur la querelle.

    g) Contrairement à ce que soutient la recourante, la nullité formelle
d'une disposition pour cause de mort peut être invoquée en tout temps
par voie d'exception (art. 521 al. 3 CC; ATF 89 II 87 consid. 6 p. 94).