Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 126 V 450



126 V 450

75. Arrêt du 14 décembre 2000 dans la cause Caisse de compensation SPIDA
contre 1. B. et 2. C. et Tribunal administratif du canton de Neuchâtel
Regeste

    Art. 52 AHVG; Art. 82 Abs. 1 AHVV; Art. 8a Abs. 1 SchKG: Verwirkung;
Schadenskenntnis. Präzisierung der Rechtsprechung zur Obliegenheit der
Ausgleichskasse, an der ersten Gläubigerversammlung teilzunehmen oder sich
vertreten zu lassen (BGE 121 V 240). Der Sorgfaltspflicht ist auch Genüge
getan, wenn die Kasse ein Protokoll der ersten Gläubigerversammlung und
den Bericht des Konkursbeamten verlangt.

Sachverhalt

    A.- La faillite de la société X SA, dont le siège était à Y, a été
prononcée le 15 février 1995. Le 31 mars 1995, s'est tenue la première
assemblée des créanciers. Daté du 29 septembre 1997, l'état de collocation
a été déposé le 3 octobre suivant et publié le même jour à la Feuille
officielle suisse de commerce.

    X SA était affiliée en qualité d'employeur auprès de la Caisse de
compensation SPIDA qui a produit dans la faillite une créance de 111'489
fr. 70 correspondant à des cotisations paritaires impayées et des frais.

    Le 22 octobre 1998, SPIDA a notifié des décisions en réparation du
dommage à B. et C., administrateurs de la société faillie.

    B.- A la suite de l'opposition des prénommés, SPIDA a ouvert action le
26 novembre 1998 devant le Tribunal administratif du canton de Neuchâtel
contre B., concluant au paiement de 108'069 fr. 70 sous réserve d'un
dividende de faillite éventuel. Le 2 décembre 1998, elle a ouvert action
contre C. en prenant les mêmes conclusions. Les demandes ont été jointes.

    Par jugement du 11 août 1999, le tribunal administratif a rejeté
les demandes au motif qu'elles étaient périmées. En bref, la juridiction
cantonale a considéré qu'au regard de l'attention raisonnablement exigible,
SPIDA pouvait connaître son dommage déjà lors de la première assemblée
des créanciers.

    C.- SPIDA interjette recours de droit administratif contre ce jugement
dont elle demande l'annulation. Elle conclut sous suite de frais et dépens
à l'admission de la demande, subsidiairement au renvoi de la cause à la
juridiction cantonale pour jugement sur ses prétentions.

    B. et C. ont conclu, sous suite de frais et dépens, au rejet du
recours. L'Office fédéral des assurances sociales ne s'est pas déterminé.

Auszug aus den Erwägungen:

                      Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- (Pouvoir d'examen limité; cf. ATF 125 V 34 consid. 1)

Erwägung 2

    2.- a) L'art. 82 RAVS règle la prescription du droit de la caisse de
compensation de demander la réparation du dommage. Un tel droit se prescrit
lorsque la caisse ne le fait pas valoir par une décision de réparation
dans l'année après qu'elle a eu connaissance du dommage et, en tout cas, à
l'expiration d'un délai de cinq ans à compter du fait dommageable (al. 1).
Lorsque ce droit dérive d'un acte punissable soumis par le code pénal à
un délai de prescription de plus longue durée, ce délai est applicable
(al. 2). En dépit de la terminologie dont use l'art. 82 RAVS, les délais
institués par cette norme ont un caractère péremptoire (ATF 121 III 388
consid. 3b, 119 V 92 consid. 3, 118 V 195 consid. 2b et les références).

    Par moment de la "connaissance du dommage" au sens de l'art. 82
al. 1 RAVS, il faut entendre, en règle générale, le moment où la
caisse de compensation aurait dû se rendre compte, en faisant preuve de
l'attention raisonnablement exigible, que les circonstances effectives
ne permettaient plus d'exiger le paiement des cotisations, mais pouvaient
entraîner l'obligation de réparer le dommage (ATF 121 III 388 consid. 3b,
119 V 92 consid. 3, 118 V 195 consid. 3a et les références).

    La partie lésée peut toutefois, en raison de circonstances spéciales,
acquérir la connaissance nécessaire avant le dépôt de l'état de
collocation. Ainsi, selon la jurisprudence, on peut exiger d'une caisse
qu'elle se fasse représenter à la première assemblée des créanciers, dès
lors que son devoir de diligence lui commande de suivre l'évolution de la
procédure de faillite (ATF 121 V 240 consid. 3c/aa et les références). S'il
apparaît à ce moment-là déjà qu'elle subira un dommage, le délai d'une
année commencera à courir. Même la connaissance d'un dommage partiel
est suffisante pour faire partir le délai prévu par l'art. 82 al. 1 RAVS
(ATF 121 V 243 consid. 3c/bb).

    b) La recourante ne remet pas en cause le bien-fondé des incombances
fixées par la jurisprudence précitée (ATF 121 V 240 consid. 3c/aa),
que le Tribunal fédéral des assurances a motivé comme suit:

    Bien qu'en règle générale, le créancier n'ait aucune obligation de
participer à l'assemblée des créanciers dans le cadre d'une procédure
de faillite, sa présence est une incombance dont le respect peut être
déterminant pour la sauvegarde de prétentions de droit public ou privé
élevées contre le failli. Au surplus, l'art. 52 LAVS oblige la caisse
de compensation, en qualité de créancière du droit à la réparation du
dommage, à faire valoir celui-ci dans les délais, par le biais d'une
décision. Selon la jurisprudence, on attend de la caisse qu'elle suive
l'évolution de la procédure de faillite et qu'elle prenne connaissance
du dépôt de l'état de collocation et de l'inventaire (ATF 116 V 75
consid. 3b). Ce sont là deux étapes de la procédure de faillite qui sont
annoncées publiquement (art. 232 et 249 LP). Il est donc logique que la
caisse se fasse représenter à l'assemblée des créanciers dans la faillite
de l'employeur affilié (voir aussi VSI 1995 p. 172 sv. consid. 4c).

    c) Aux termes de l'art. 8a de la Loi fédérale  sur la poursuite pour
dettes et la faillite (introduit par la modification du 16 décembre 1994,
entrée en vigueur le 1er janvier 1997), toute personne peut consulter
les procès-verbaux et les registres des offices de poursuites et des
offices de faillites et s'en faire délivrer des extraits à condition
qu'elle rende son intérêt vraisemblable.

    Selon cette disposition, le droit de consulter ne se limite pas aux
procès-verbaux des opérations dont tiennent procès-verbal les offices
des poursuites et les offices des faillites, aux procès-verbaux des
réquisitions et déclarations qu'ils reçoivent, ainsi qu'aux registres
qu'ils tiennent. Il s'étend à d'autres pièces telles les états de
collocation, états des charges, tableaux de distribution, procès-verbaux
des assemblées des créanciers, procès-verbaux des commissions de
surveillance, livres comptables et pièces justificatives notamment. Ce
droit de consulter appartient aussi bien aux personnes formellement parties
à une procédure d'exécution forcée et à celles concernées par une telle
procédure qu'à toute personne ayant un intérêt digne de protection, même
en dehors d'une procédure pendante (PIERRE-ROBERT GILLIÉRON, Commentaire
de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, ad art. 8a
no 6 et 7).

    Ainsi, lorsque la caisse de compensation est partie à la procédure
parce qu'elle a produit sa créance dans la faillite, un droit de
consultation des pièces ou de s'en faire remettre des copies découle
directement de l'art. 8a LP. Il n'y a dès lors pas d'obstacle à ce que, en
temps utile, elle requière et obtienne notamment copie du procès-verbal de
la première assemblée des créanciers et du rapport du préposé. Au regard
de l'obligation de diligence assignée à la caisse de compensation par la
jurisprudence précitée (cf. consid. 2b), il apparaît ainsi que cette
incombance peut être satisfaite sous cette forme, sans que la présence
ou la représentation par un tiers de la caisse de compensation soit
systématiquement exigée. C'est dans ce sens que peut être précisée la
jurisprudence publiée à l'arrêt ATF 121 V 240.

    d) Dans le cas particulier, la caisse recourante n'a pas assisté à la
première assemblée des créanciers et ne s'y est pas faite représenter. Elle
n'a donc pas eu directement connaissance du rapport du préposé. Cela
n'est cependant pas décisif dans le cadre de l'art. 82 al. 1 RAVS, dès
lors qu'il suffit de déterminer si, au regard de ses incombances, elle
aurait pu avoir connaissance de l'existence du dommage avant la date
du dépôt de l'état de collocation. Cette question peut être tranchée,
comme l'ont fait les premiers juges, en se référant au rapport écrit du
préposé figurant au dossier de la faillite, dont la recourante pouvait,
à tout le moins dès le 1er janvier 1997, demander et obtenir une copie.

Erwägung 3

    3.- a) Selon les faits retenus par les premiers juges et qui lient la
Cour de céans, l'inventaire établi par l'office des faillites (les 29 et
31 mars 1995), faisait apparaître un actif provisoire présumé de 822'637
fr. 20 dont 709'000 francs représentant la valeur cadastrale d'un immeuble
sis à Y. Les passifs, selon le bilan de la société faillie établi au
30 novembre 1994, étaient de 4'040'218 fr. 20. Les juges ont déduit
de ces faits que la caisse de compensation aurait pu alors se rendre
compte qu'elle allait subir un dommage, au moins partiel, d'autant que
l'immeuble était grevé d'hypothèques pour un montant de 1'400'000 francs
et que les salaires des 19 employés de la faillie (dont 110'707 francs
pour le seul mois de janvier 1995) constituaient des créances privilégiées
en 1ère classe.

    b) Contestant le fait qu'elle aurait pu alors se rendre compte de
l'existence d'un dommage, SPIDA soutient d'abord qu'elle était fondée à
considérer sa créance comme couverte dès lors que les actifs de la société,
au regard du bilan au 30 novembre 1994, étaient largement plus élevés que
ceux résultant de l'inventaire établi par l'office. Selon le rapport de
l'organe de révision toutefois, les postes débiteurs et travaux en cours
étaient surévalués et le principe de la tenue régulière des comptes était
violé, si bien que ce moyen n'est d'aucune utilité à la recourante, ce
d'autant moins qu'elle n'avait pas connaissance des comptes en question
à l'époque déterminante.

    SPIDA soutient ensuite que l'inventaire de l'office ne prend pas en
compte les créances pour travaux en cours dont elle pouvait s'attendre
à ce qu'elles couvrent ses prétentions restées en souffrance. Ce moyen
revient en réalité à reprocher aux premiers juges d'avoir procédé à une
constatation manifestement inexacte ou incomplète des faits (art. 105
al. 2 OJ). Il est cependant infondé. Certes dans ses comptes au 30
novembre 1994, la société faillie avait fait figurer des créances de
plusieurs centaines de milliers de francs pour des travaux en cours;
mais, comme on l'a vu, celles-ci étaient à la fois surévaluées et non
justifiées par des documents probants. La recourante ne saurait dès lors
se prévaloir de l'existence de ces créances. De toute manière, l'absence
de ces créances dans l'inventaire, même pour mémoire, était parfaitement
fondée, dès lors que, selon un document en possession de l'office, X SA
avait consenti une cession générale de toutes ses créances d'entrepreneur
en faveur de la Banque cantonale neuchâteloise. On ne voit pas dès lors en
quoi les premiers juges auraient failli dans la constatation des faits en
ne prenant pas en considération des créances de la société qui faisaient
l'objet d'une cession générale.

    C'est en vain finalement que la recourante prétend que la valeur de
l'immeuble pouvait lui donner à croire que l'existence d'un dommage
n'était ni connue ni certaine lors de la première assemblée des
créanciers. Le jugement entrepris expose de manière convaincante les
raisons pour lesquelles on ne pouvait raisonnablement s'attendre à ce
que la liquidation de l'immeuble laisse un solde suffisant pour couvrir
la totalité des créances privilégiées (1ère et 2ème classe).

    Comme le relève enfin SPIDA dans son écriture de recours, les
créances privilégiées produites avant la première assemblée des créanciers
s'élevaient à 365'444 fr. 25.

    Au vu de tous ces éléments, il apparaissait déjà lors de la première
assemblée des créanciers que la recourante subirait, de manière certaine,
un dommage. Par exception à la règle générale, elle était en mesure,
comme on l'a vu, d'en avoir une connaissance suffisante plus d'une année
avant la notification des décisions aux administrateurs, le 22 octobre
1998. Dans ces conditions, la péremption était effectivement encourue à
la date de cette notification.