Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 126 V 258



126 V 258

44. Extrait de l'arrêt du 14 juin 2000 dans la cause Fondation collective
de "Zurich" contre H. et UBS SA contre H. et Tribunal administratif du
canton de Neuchâtel Regeste

    Art. 39 Abs. 1 BVG; Art. 331c Abs. 2 OR (in der bis 31.  Dezember
1994 gültig gewesenen Fassung); Art. 331b OR: Zeitpunkt, in welchem
die Leistungen im Sinne dieser Bestimmungen "fällig" werden. Im
Obligatoriumsbereich kann der Anspruch auf eine Invalidenrente der
beruflichen Vorsorge nicht entstehen und damit auch nicht gültig abgetreten
werden, bevor der Anspruch auf eine Rente der Invalidenversicherung
entstanden ist.

Sachverhalt

    A.- H., administrateur unique de X SA (ci-après: la société), était
affilié depuis le 1er janvier 1985 à la Fondation collective LPP de
la Vita Compagnie d'assurances sur la vie, ultérieurement reprise par
la Fondation collective LPP de la Zurich Compagnie d'assurances sur la
vie (ci-après, indifféremment pour les deux fondations prénommées: la
fondation collective).

    Victime d'un accident en décembre 1990, H. a subi une incapacité de
travail partielle jusqu'à fin août 1993. Depuis le 1er septembre 1993,
il présente une incapacité de travail pour raison de maladie. Le 15
octobre 1993, il a sollicité des prestations de l'assurance-invalidité.

    Le 3 décembre 1993, la Zurich Vie a communiqué à la société le
détail du "droit aux prestations (de H.) en cas d'incapacité de gain",
soit en particulier une rente d'invalidité de 10'659 francs par an après
un délai d'attente de 12 mois, ce qu'elle a confirmé dans un certificat
d'assurance daté du 14 janvier 1994.

    Le 11 mai 1994, la fondation collective a requis la faillite de
la société, en faisant valoir une créance de 113'161 fr. 45 à titre
de primes, frais accessoires et intérêts arriérés. Le 15 juin 1994,
soit le jour même où devait avoir lieu l'audience du tribunal saisi
de la réquisition de faillite, la Société de Banque Suisse (ci-après:
SBS) a informé par télécopie la Vita Assurances qu'elle s'engageait
irrévocablement à verser la somme de 100'000 francs pour le compte de la
société. Sur quoi la fondation collective a retiré sa réquisition.

    Le lendemain, 16 juin 1994, la société et la SBS ont passé une
convention aux termes de laquelle, entre autres clauses, H. qui a signé
le contrat d'une part comme représentant de la société et d'autre part
en qualité de tiers garant (de même que son épouse), s'est engagé à céder
à la SBS la rente d'invalidité qu'il allait percevoir de la Zurich Vie.

    En date du 21 juin 1994, cet acte de cession a été notifié par la
SBS à la Zurich Vie, laquelle s'est déclarée disposée, par lettre du 18
décembre 1996, à accorder à titre exceptionnel à H. une rente d'invalidité
de 100% dès le 1er septembre 1994, bien que l'assurance-invalidité n'ait
pas encore rendu de décision. Elle précisait en outre ce qui suit: "Il
va sans dire que l'octroi de ces prestations ne signifie pas que nous
reconnaissons d'un point de vue juridique votre droit à celles-ci. Si le
degré d'invalidité reconnu devait être inférieur, nous décompterons les
prestations versées en trop des prestations futures."

    Le 23 janvier 1997, le mandataire de H. informa la Zurich Vie que son
client invoquait la nullité de la cession de créance datée du 21 juin 1994,
au motif qu'"en vertu de l'art. 39 LPP une cession faite antérieurement
à l'exigibilité de la créance est nulle." En conséquence, H. invitait
la compagnie à lui verser pour son propre compte les prestations qui lui
étaient dues.

    La Zurich Vie contesta ce point de vue par lettre du 7 février
1997 en soutenant que si la cession de créance était bel et bien datée
du 21 juin 1994, elle portait sur les prestations d'invalidité servies
par la compagnie à compter du 1er octobre 1994 seulement, soit dès leur
exigibilité et non avant. En dépit d'un nouvel échange de correspondance,
les parties ne sont pas parvenues à s'entendre.

    B.- H. a ouvert action devant le Tribunal administratif de la
République et canton de Neuchâtel contre la fondation collective le 29
août 1997, en concluant notamment à la constatation de la nullité de la
cession de créance du 21 juin 1994 "au sens de l'art. 39 LPP".

    La fondation collective a conclu au rejet de la demande. Elle a par
ailleurs dénoncé le litige à la SBS, ce que cette dernière a accepté,
en concluant à son tour au rejet de la demande de H.

    Par jugement du 16 décembre 1998, le tribunal administratif a donné
raison au demandeur et constaté la nullité de la cession de créance signée
le 21 juin 1994.

    C.- La fondation collective recourt contre ce jugement qu'elle
demande au Tribunal fédéral des assurances d'annuler, en concluant
notamment, sous suite de frais et dépens, à la constatation que la
cession de créance litigieuse est valable. H. conclut principalement à
l'irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet, sous suite de
frais et dépens. Invitée à se déterminer, UBS SA (qui a entre-temps succédé
à la SBS) a conclu à l'admission du recours de la fondation collective,
tout en renvoyant à son propre mémoire de recours.

    En effet, UBS SA a elle-même recouru contre le jugement du Tribunal
administratif neuchâtelois, en concluant notamment à la constatation
de la validité de la cession de créance du 21 juin 1994. H. a conclu au
rejet du recours, sous suite de frais et dépens, alors que la fondation
collective a conclu à son admission.

    L'Office fédéral des assurances sociales (OFAS) propose de rejeter
les deux recours, en se référant notamment à l'argumentation qu'il a
développée dans un préavis du 5 mai 1999 concernant une autre cause. Le
juge délégué a donné connaissance de ce préavis aux parties, qui ont pu
s'exprimer à son sujet.

Auszug aus den Erwägungen:

                   Extrait des considérants:

Erwägung 2

    2.- a) Les premiers juges ont considéré que le moment où les
prestations d'invalidité dues à l'intimé sont devenues exigibles au sens de
l'art. 39 al. 1 LPP correspond à l'échéance de la période de carence d'une
année fixée à l'art. 29 al. 1 let. b LAI en corrélation avec l'art. 26
al. 1 LPP (ATF 121 V 101 consid. 1c). En l'espèce, il s'agit du 1er
septembre 1994, soit 12 mois après le début de l'incapacité de travail
qui est à l'origine de l'invalidité assurée par la recourante. C'est
pourquoi, la cession de créance intervenue le 21 juin 1994 est nulle tant
sous l'angle de l'art. 39 al. 3 LPP que sous celui de l'art. 331c al. 2
in fine CO dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 1994.

    b) La fondation collective critique ce raisonnement qui reposerait sur
une confusion entre l'exigibilité du droit aux prestations de prévoyance
avec l'échéance de ces prestations. D'après elle, la version allemande
de l'art. 39 al. 1 première phrase LPP ("Der Leistungsanspruch kann
vor Fälligkeit weder verpfändet noch abgetreten werden.") rendrait
mieux le sens exact de la norme que la version française qui opérerait
une confusion entre l'exigibilité du droit aux prestations et celle des
prestations elles-mêmes. A l'appui de cette affirmation, elle invoque la
jurisprudence relative à la survenance du risque assuré selon le droit de
la LPP, à savoir la survenance de l'incapacité de travail dont la cause est
à l'origine de l'invalidité et non pas la naissance du droit à une rente de
l'assurance-invalidité selon l'art. 29 al. 1 let. b LAI (art. 23 LPP; ATF
118 V 95 et 117 V 331 consid. 3). En l'occurrence, c'est le 1er septembre
1993 qu'a débuté l'incapacité de travail de l'intimé due à la maladie et
c'est donc à cette date que le droit aux prestations (Leistungsanspruch)
est devenu exigible, ce que la Zurich Vie aurait reconnu dans son courrier
du 3 décembre 1993. Dès cette date, la recourante a libéré l'intimé du
service des primes et lui a reconnu le droit à une rente d'invalidité à
l'expiration du délai d'attente de 12 mois.

    L'argumentation de la recourante s'appuie en outre sur le message du
Conseil fédéral du 19 décembre 1975 à l'appui du projet de LPP (commentaire
de l'art. 40 du projet) qui considérerait que la cession du droit aux
prestations d'invalidité devient licite dès la survenance de l'invalidité.

    La recourante invoque encore l'art. 92 al. 1 ch. 10 LP qui dispose
que sont insaisissables les droits aux prestations de prévoyance et
de libre passage non encore exigibles à l'égard d'une institution de
prévoyance professionnelle et elle soutient qu'il ne fait pas de doute
qu'en l'espèce la rente allouée à l'intimé aurait pu être saisie avant
l'échéance du premier versement le 1er octobre 1994.

    Enfin, conclut-elle, tant le texte de l'ancien art. 331c al. 2 CO
que celui de l'actuel art. 331b CO ne se réfèrent pas à l'exigibilité des
prestations mais bien à celle de la créance en prestations, matérialisée
par le droit de l'assuré de recevoir, à leur exigibilité, les prestations
de l'institution de prévoyance, ce que marquerait encore mieux la version
allemande de l'art. 331b CO.

    c) L'argumentation d'UBS SA dans son recours de droit administratif
est calquée sur celle de la fondation collective.

    d) L'intimé soutient que l'institution de prévoyance n'ayant pas encore
formellement statué dans une décision au sens des art. 5 PA et 3 LPJA NE
(sic), il se trouve toujours "en attente" de son droit aux prestations
de cette institution.

    Il souligne que dans sa lettre du 18 décembre 1996, la recourante
précisait implicitement que si ce droit ne devait pas être reconnu
ou reconnu inférieur, les prestations déjà versées seraient sujettes
à restitution. Il ne disposait donc que de l'expectative d'un droit
aux prestations de l'institution de prévoyance mais pas encore d'un
droit aux prestations elles-mêmes. Or, dans le droit de la prévoyance
professionnelle, obligatoire et plus étendue, la cession d'un "droit
d'expectative" est nulle. Il réfute ensuite les divers arguments développés
dans le recours au sujet de l'interprétation du texte légal.

    D'après l'intimé, l'exigibilité survient lorsque le créancier a le
droit d'exiger la prestation du débiteur. Jusque-là, la créance existe mais
le créancier ne peut prétendre, ni exiger son exécution. En l'espèce, la
créance n'est devenue exigible que le 1er septembre 1994, soit à l'échéance
du délai de 12 mois depuis le début de l'incapacité de travail reconnue
par la recourante comme étant la cause à l'origine de l'invalidité assurée.

    e) Dans son préavis, l'OFAS soutient qu'en principe la créance en
prestations d'invalidité devient exigible dès que l'assurance-invalidité
a rendu sa décision, car cette dernière ouvre automatiquement un droit
de l'assuré à des prestations minimales obligatoires de la LPP.

    Toutefois, en l'espèce, l'institution de prévoyance ayant reconnu
à l'assuré un droit aux prestations réglementaires avant la décision de
l'assurance-invalidité, "l'exigibilité de la créance part du moment où
la caisse de pensions a pris position, ou, à tout le moins, au moment
de la survenance de l'invalidité (ce moment devant correspondre à la
décision de la caisse de pensions, en principe), mais en tout cas pas
depuis la survenance de l'incapacité de travail." En conséquence, c'est à
bon droit que les premiers juges ont considéré que la cession litigieuse
était nulle car antérieure à la survenance de l'invalidité de l'intimé.

    La recourante s'est déterminée sur ce préavis en alléguant qu'en
l'occurrence c'est le 3 décembre 1993, éventuellement le 14 janvier
1994 qu'elle a "pris position" et que c'est le 1er septembre 1993 qu'est
survenue l'invalidité donnant droit aux prestations en cause. Dans tous
les cas, ces dates sont antérieures au 21 juin 1994. UBS SA développe
une argumentation semblable.

Erwägung 3

    3.- a) D'une manière générale, est exigible, dans le langage juridique,
ce qui peut être aussitôt exigé, ce qui est dû sans terme ni condition. Il
en est ainsi d'une créance ou d'une dette dont le paiement peut être
immédiatement réclamé, au besoin en justice, sans attendre l'échéance
d'un terme ou l'avènement d'une condition (ATF 119 III 21 consid. 3c et
les références).

    Dans le domaine de la prévoyance professionnelle, on distingue entre
l'exigibilité d'une prestation qui se situe lors de la naissance du droit
à cette prestation selon les dispositions légales et réglementaires qui
lui sont applicables et l'exécution de la créance en prestations qui peut
être demandée dès que la créance en prestations futures n'est plus une
simple expectative mais peut être effectivement réalisée (ATF 117 V 308
consid. 2c; cf. aussi ATF 124 V 276).

    Cette distinction prévaut également dans l'application de l'art. 92
al. 1 ch. 10 LP (ancien art. 92 ch. 13), ce qui a par exemple conduit
la Chambre des poursuites et des faillites du Tribunal fédéral à juger,
à propos de la saisissabilité d'une prestation de libre passage, que bien
qu'exigible au sens du droit de la prévoyance professionnelle (en l'espèce
les anciens art. 27 LPP et 331a/b CO), une telle prestation n'était pas
encore exigible selon la LP (ATF 119 III 19 sv. consid. 3a).

    Or, c'est aussi de cette manière qu'il convient d'interpréter l'art. 39
al. 1 première phrase LPP, ainsi que l'ancien art. 331c al. 2 ou l'actuel
art. 331b CO. Il existe en effet une étroite parenté entre ces dispositions
et l'art. 92 al. 1 ch. 10 (ancien art. 92 ch. 13) LP, lesquels visent le
même but de protection des droits de l'assuré à l'égard des institutions
de prévoyance, comme le Tribunal fédéral l'a du reste souligné dans sa
jurisprudence (ATF 121 III 287 consid. 1 et les références; cf. aussi
ATF 124 III 214 consid. 2). Il s'agit en particulier d'empêcher, fût-ce
contre le gré de l'assuré, la cession de futures créances en prestations
de la prévoyance professionnelle, ce qui constitue une dérogation au droit
commun où la cession de créances futures est en principe valable, pour
autant que la créance soit déterminable au moment où elle prend naissance
(ATF 113 II 163).

    b) En l'espèce, les recourantes soutiennent que le moment où la
rente d'invalidité due à l'intimé est devenue exigible correspond à la
survenance de l'incapacité de travail dont la cause est à l'origine de
l'invalidité au sens de l'art. 23 LPP, à savoir le 1er septembre 1993.

    Or, il n'en est rien. En effet, le droit à la rente d'invalidité de
la prévoyance professionnelle ne peut naître avant le droit à la rente
de l'assurance-invalidité, du moins dans le régime obligatoire (ATF 123 V
270 ss consid. 2 et les références). Cela n'a d'ailleurs pas échappé à la
fondation collective et c'est bien pourquoi, dans sa lettre à l'intimé du
18 décembre 1996, elle ne s'est déclarée disposée à lui verser une rente
d'invalidité dès le 1er septembre 1994 qu'"à titre exceptionnel" et sans
lui reconnaître "d'un point de vue juridique" un droit aux prestations
d'invalidité. Elle se réservait en outre de "décompter" les prestations
versées en trop des prestations futures, si le degré d'invalidité reconnu
(par l'assurance-invalidité) devait être inférieur à 100%.

    Ainsi, tant que la décision de l'assurance-invalidité concernant le
droit de l'intimé à une rente n'a pas été rendue, le droit de celui-ci à
une rente d'invalidité de la prévoyance professionnelle n'existe qu'à titre
virtuel. En conséquence, bien que la fondation collective ait accepté de
lui allouer cette prestation dès le 1er septembre 1994 - à bien plaire
et sous réserve de restitution - la rente n'était pas, à cette date,
exigible au sens de l'art. 39 al. 1 LPP et de l'ancien art. 331c al. 2
CO. Et si elle ne l'était pas à cette date, elle ne l'était pas non plus
le 16 juin 1994, lors de la signature du contrat passé entre la société
et la SBS, ni le 21 juin 1994, date à laquelle la cession de créance a été
signée et notifiée à la Zurich Vie par la banque (cf. aussi, par analogie,
DTA 1995 no 22 p. 127).

    C'est dès lors avec raison que les juges cantonaux ont constaté la
nullité de cette cession de créance au regard des dispositions légales
précitées et qu'ils ont condamné la fondation collective à verser à
l'intimé les prestations qu'elle reconnaît lui devoir à partir du 1er
septembre 1994. Les deux recours sont infondés.