Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 126 II 106



126 II 106

12. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public du 28 février 2000
dans la cause X. et Département de l'agriculture, de l'industrie et du
commerce du canton de Vaud contre Tribunal administratif du canton de
Vaud ainsi qu'association UNIA, syndicat du secteur tertiaire, et consorts
(recours de droit administratif) Regeste

    Art. 27 Abs. 2 lit. c ArG und Art. 41 Abs. 1 ArGV 2; sonntägliche
Öffnungszeiten von Geschäften.

    Ausnahme vom Sonntagsarbeitsverbot für Betriebe, die den Bedürfnissen
des Fremdenverkehrs dienen (E. 3).

    Definition des Fremdenverkehrs und Bedeutung des Begriffs "den
Bedürfnissen des Fremdenverkehrs dienen" (E. 4).

    Das "Shopping" stellt für sich allein nicht eine Form des
Fremdenverkehrs dar (E. 5).

Sachverhalt

    X. est le promoteur à Mendrisio d'un centre commercial qui regroupe,
sous l'enseigne "Foxtown", une quarantaine de boutiques répondant à la
définition de "magasins d'usine". Le centre "Foxtown" de Mendrisio, qui
est ouvert sept jours sur sept, réalise 50% de son chiffre d'affaires en
fin de semaine, soit 20% le samedi et 30% le dimanche.

    La Caisse Cantonale Vaudoise des Retraites Populaires, propriétaire
d'une parcelle dans la zone industrielle D de la commune de Villeneuve,
a reçu le 18 avril 1997 l'autorisation de transformer et d'agrandir le
centre multifonctionnel qu'elle y avait construit afin d'y installer un
centre "Foxtown". Le 28 avril 1997, elle a adressé au nom de X. une requête
pour un programme d'ouverture particulier du futur centre "Foxtown" de
Villeneuve au Département de l'agriculture, de l'industrie et du commerce
(actuellement: le Département de l'économie) du canton de Vaud (ci-après:
le Département cantonal), ladite requête tendant à faire confirmer que
le centre "Foxtown" était une entreprise d'une région touristique qui
satisfaisait aux besoins du tourisme et pouvait de ce fait employer du
personnel le dimanche, sans autorisation officielle. X. a présenté la même
demande directement au Service de l'emploi du canton de Vaud (ci-après:
le Service cantonal) le 11 juin 1997. Par décision du 22 juillet 1997,
le Service cantonal a rejeté la requête, en considérant que le centre
"Foxtown" ne satisfaisait pas aux besoins du tourisme au sens de l'art. 41
al. 1 de l'ordonnance II du 14 janvier 1966 concernant l'exécution de la
loi fédérale sur le travail dans l'industrie, l'artisanat et le commerce
(ci-après: l'ordonnance ou OLT2; RS 822.112).

    Le 7 octobre 1997, le Département cantonal a admis le recours de
X. contre la décision du Service cantonal du 22 juillet 1997 et reconnu
le caractère d'entreprise satisfaisant aux besoins du tourisme au sens
de l'art. 27 al. 2 lettre c de la loi fédérale du 13 mars 1964 sur
le travail dans l'industrie, l'artisanat et le commerce (ci-après:
la loi sur le travail ou LTr; RS 822.11) au centre "Foxtown" que X.
exploiterait à Villeneuve.

    L'association UNIA, syndicat du secteur tertiaire, et quatre consorts
(ci-après: les Associations) ont recouru contre la décision du Département
cantonal du 7 octobre 1997. Par arrêt du 17 février 1999, le Tribunal
administratif du canton de Vaud (ci-après: le Tribunal administratif)
a admis le recours et annulé la décision querellée.

    Agissant par la voie du recours de droit administratif, X. demande
au Tribunal fédéral de réformer l'arrêt du Tribunal administratif du
17 février 1999 en ce sens que le centre "Foxtown" de Villeneuve soit
considéré comme satisfaisant aux besoins du tourisme et puisse être ouvert
le dimanche. Il se plaint de violation du droit fédéral, en particulier des
art. 27 al. 2 lettre c LTr et 41 al. 1 OLT2, ainsi que d'excès et d'abus du
pouvoir d'appréciation dans l'application de ces dispositions. Il invoque
aussi la constatation manifestement incomplète des faits pertinents.

    Le Tribunal fédéral a rejeté le recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                  Extrait des considérants:

Erwägung 3

    3.- La loi sur le travail consacre le principe de l'interdiction de
travailler le dimanche à son art. 18 al. 1 1ère phrase (cf., au sujet
de la justification de ce principe, l'ATF 120 Ib 332 consid. 3a p.
333/334). Ce principe souffre cependant différentes exceptions. C'est
ainsi que l'art. 27 al. 1 LTr dispose qu'"en tant que leur situation
particulière le rend nécessaire, certaines catégories d'entreprises ou
de travailleurs peuvent être soumises par ordonnance à des dispositions
spéciales remplaçant en tout ou partie les articles 9 à 21, 23 à 25,
31, 34 et 36". Quant à l'art. 27 al. 2 lettre c LTr, il prévoit que de
telles dispositions peuvent être édictées notamment pour les entreprises
qui satisfont aux besoins du tourisme ou de la population agricole.

    C'est sur la base de l'art. 27 LTr que le Conseil fédéral a édicté
l'ordonnance, dont les art. 41 à 44 sont consacrés aux entreprises des
régions touristiques et des localités frontières. L'art. 41 OLT2 a la
teneur suivante:
      "1 Les entreprises des régions touristiques et des localités
      frontières

    qui satisfont aux besoins du tourisme, ainsi que leur personnel, sont

    soustraits à l'application des prescriptions suivantes de la loi:
      a. Les magasins, à l'article 10, 2e alinéa, et à l'article 19,
      1er et 2e

    alinéas;
      b. Les ateliers qui font et réparent des skis, les ateliers de

    réparation d'articles de sport ainsi que les laboratoires
photographiques,

    à l'article 17, 1er alinéa.
      2 Sont réputées régions touristiques celles que mentionne la
      législation

    fédérale sur l'encouragement du crédit à l'hôtellerie et aux
stations de

    villégiature.
      3 Les articles 42 à 44 de la présente ordonnance s'appliquent en
      lieu et

    place des prescriptions de la loi mentionnées au 1er alinéa."

    Par ailleurs, l'art. 44 OLT2, qui traite du travail du dimanche,
dispose que, dans les magasins, l'employeur peut, sans autorisation
officielle, ordonner de travailler le dimanche en tant que les
prescriptions sur la fermeture des magasins permettent d'exploiter ces
entreprises.

    Le présent litige se résume à savoir ce qu'il faut entendre par
entreprises "qui satisfont aux besoins du tourisme" et si le centre
"Foxtown" de Villeneuve correspond à cette définition, les deux autres
conditions soit le caractère touristique de la région et le respect
des prescriptions sur la fermeture des magasins étant incontestablement
remplies.

Erwägung 4

    4.- La législation applicable en l'espèce ne donne pas de définition du
"tourisme" ou du "touriste".

    Le dictionnaire Robert définit le tourisme d'abord comme le fait de
voyager, de parcourir pour son plaisir (pour se distraire, se cultiver,
etc.) un lieu autre que celui où l'on vit habituellement (même s'il s'agit
d'un petit déplacement ou si le but principal du voyage est autre). Il le
définit ensuite comme l'ensemble des activités liées aux déplacements des
touristes et, par extension, aux séjours des étrangers. En l'espèce, la
première des définitions précitées paraît déterminante, car elle permet de
cerner la notion de "satisfaction des besoins du tourisme". Elle comprend
les besoins qui sont inhérents à la nature humaine et que les touristes
doivent satisfaire où qu'ils se trouvent, comme les habitants du lieu
d'ailleurs, (tels que le besoin de nourriture et de boisson) ainsi que
les besoins qui sont propres aux touristes, c'est-à-dire ceux dont la
satisfaction leur permet de voyager pour leur plaisir, dans un but de
divertissement, de culture, etc. A ce dernier titre, on peut citer comme
exemple le besoin d'un guide de voyage ou d'un produit du terroir pouvant
faire partie des souvenirs de vacances.

Erwägung 5

    5.- a) Durant la procédure, l'intéressé a précisé que les produits
destinés à être vendus au centre "Foxtown" de Villeneuve sont des
vêtements (pour femmes et hommes), des chaussures, de la lingerie,
des bijoux, des parfums, des articles pour la maison et pour la table,
ainsi que des articles cadeaux. Il soutient qu'en offrant à prix réduit
une gamme importante de produits de marques renommées, le centre "Foxtown"
induit chez son visiteur une démarche de loisir qui répond à un besoin de
plus-value personnelle: atteindre des biens inaccessibles. Il considère
d'ailleurs que le centre "Foxtown" crée un nouveau tourisme davantage
qu'il ne satisfait les besoins d'un tourisme préexistant, le "shopping"
ou tourisme d'achat, dont il conviendrait de satisfaire les besoins,
ce qui ne serait possible qu'en recourant à la dérogation au principe de
l'interdiction du travail dominical.

    Il ressort ainsi des propres termes du recourant qu'il fait une
démarche inverse de celle du législateur. Ce dernier, qui a édicté des
normes pour protéger les travailleurs, est, en effet, parti de l'idée
qu'il existe certains besoins spécifiques des touristes qu'il convient de
satisfaire même au prix d'une dérogation au principe de l'interdiction
du travail dominical. Selon la jurisprudence, une telle dérogation
doit d'ailleurs s'interpréter restrictivement sous peine de vider le
principe général de son contenu (cf. SJ 1999 I p. 54 consid. 3c/bb). Or,
les activités du centre "Foxtown" nécessiteraient une interprétation
extensive de la notion du tourisme et de ses besoins pour justifier une
dérogation au principe de l'interdiction du travail dominical et empiéter
par conséquent sur la protection des travailleurs.

    b) Par ailleurs, on ne voit pas en quoi les produits en vente au centre
"Foxtown" de Villeneuve satisferaient des besoins propres aux touristes.
L'intéressé n'établit du reste pas que ces articles seraient des produits
du terroir ou de l'artisanat local qui, eux, répondraient à ce critère. Il
s'agit en fait de produits d'usage courant dont le rapport qualité/prix
serait avantageux. De tels articles se trouvent fréquemment sur le marché,
lorsqu'un vendeur baisse ses prix pour quelque raison que ce soit. Quant
au fait de se déplacer pour voir si l'on peut profiter d'une occasion,
même si l'on n'a pas absolument besoin des produits offerts à prix réduit,
il ne saurait répondre à la définition du "tourisme" rappelée ci-dessus,
car il l'étendrait au point de vider le principe de l'interdiction du
travail dominical de sa substance dans toutes les régions reconnues comme
touristiques, qui sont déjà nombreuses dans le seul canton de Vaud où se
pose le problème à résoudre en l'espèce.

    Il est vrai que le recourant critique cette définition, qu'il trouve
dépassée en raison de l'évolution des moeurs. Il produit d'ailleurs à
l'appui de sa thèse - selon laquelle le "shopping" constitue en soi un
genre de tourisme - un catalogue d'hiver d'un "voyagiste" suisse proposant
à ses clients de faire du "shopping" en Amérique du Nord (Etats-Unis et
Canada). Toutefois, le vocabulaire du marketing touristique convivial
et la définition des prestations offertes sur le marché ne sauraient
déterminer des critères valables pour la protection des travailleurs. Dès
lors, ils ne peuvent pas avoir d'influence sur l'interprétation qu'on
fait en Suisse de la législation suisse.

    c) Le Tribunal administratif a donc appliqué correctement les art. 27
al. 2 lettre c LTr et 41 al. 1 OLT2. En particulier, il n'a pas commis
d'excès ou d'abus de son pouvoir d'appréciation.

    Au demeurant, le recourant ne peut pas tirer valablement argument
du fait que le centre "Foxtown" de Mendrisio a été autorisé à ouvrir ses
boutiques le dimanche. Pour autant qu'une telle autorisation soit due à
une mauvaise application de la loi sur le travail, l'intéressé ne saurait
s'en prévaloir, car il n'y a pas de droit à l'égalité dans l'illégalité
(ATF 124 IV 44 consid. 2c p. 47).