Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 126 III 395



126 III 395

68. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 4 juillet 2000 dans la
cause dame A. contre X. S.A. (recours en réforme) Regeste

    Sexuelle Belästigung; Sorgfaltspflicht des Arbeitgebers (Art. 4 und
5 Abs. 3 GlG).

    Sexistische Sprüche sowie anzügliche und peinliche Bemerkungen fallen
unter den Begriff der sexuellen Belästigung im Sinne von Art. 4 GlG. Das
GlG regelt nur die Haftung des Arbeitgebers und nicht auch jene der Person,
welche die sexuelle Belästigung ausführt. Sorgfaltspflicht des Arbeitgebers
und Entlastungsbeweis (E. 7).

Sachverhalt

    X. S.A. (ci-après: X.) a engagé dame A. dès le 1er juillet 1992
en qualité de secrétaire-gestionnaire, chargée en outre d'assister le
président du conseil d'administration. A la fin de l'année 1994, dame
A. a été promue au poste de conseillère en entreprise. Invoquant la loi
fédérale du 24 mars 1995 sur l'égalité entre femmes et hommes (LEg;
RS 151.1), dame A. a sollicité, le 21 août 1996, l'adaptation de son
salaire. X. a refusé cette requête.

    Le 5 septembre 1997, X. a reproché à dame A. son attitude et
des réflexions négatives à l'encontre de la direction ainsi qu'un
manque de collaboration pour suppléer à la réceptionniste durant ses
vacances. Le lendemain, dame A. s'est plainte auprès du président du
conseil d'administration d'être la victime de mobbing et de harcèlement
sexuel, notamment de la part du directeur. Le 9 septembre 1997, le
président du conseil d'administration lui a annoncé qu'il chargera
la direction de l'ouverture d'une enquête à ce sujet. Le 16 septembre
1997, dame A. s'est adressée à l'Office cantonal de l'inspection et des
relations du travail (ci-après: OCIRT) pour dénoncer le mobbing dont elle
prétendait faire l'objet. Le 18 septembre 1997, dame A. a échangé, sur
le système informatique de l'employeur, avec deux collègues de travail,
divers messages personnels contenant des réflexions vulgaires. Informé de
ce fait, l'employeur a, par courrier du 19 septembre 1997, licencié dame
A. avec effet immédiat.

    Par jugement du 17 novembre 1998, le Tribunal des prud'hommes, saisi
d'une action de dame A. tendant notamment au paiement de 10'000 fr., à
titre d'indemnité pour tort moral, entre autres en raison du harcèlement
sexuel subi, ne lui a rien alloué à ce titre.

    Statuant sur appel de dame A., la Chambre d'appel de la juridiction
des prud'hommes du canton de Genève lui a également refusé, par arrêt du
8 novembre 1999, une indemnité pour tort moral.

    Le Tribunal fédéral a partiellement admis le recours en réforme
interjeté par dame A., lui allouant notamment, en vertu de l'art. 5 al. 3
LEg, la somme de 4'988 fr., avec intérêts.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Extrait des considérants:

Erwägung 7

    7.- a) Invoquant la violation par la cour cantonale des art. 5
al. 3 LEg et 33 de la loi fédérale du 13 mars 1964 sur le travail dans
l'industrie, l'artisanat et le commerce (ci-après: LTr; RS 822.11)
ainsi que de l'art. 49 CO, la demanderesse reproche, en substance, à la
cour cantonale d'avoir nié l'existence de harcèlement sexuel et de lui
avoir refusé une indemnité de 10'000 fr., qu'elle qualifie de manière
imprécise d'indemnité pour tort moral, laquelle engloberait la réparation
de plusieurs atteintes à sa personnalité.

    b) aa) Aux termes de l'art. 33 al. 1 LTr, invoqué par la demanderesse
conformément à l'art. 342 al. 2 CO, l'employeur doit avoir les égards
voulus pour la santé des femmes et veiller à la sauvegarde de la moralité.

    Selon l'art. 5 al. 3 LEg, lorsque la discrimination porte sur un cas
de harcèlement sexuel, le tribunal peut condamner l'employeur à verser
au travailleur une indemnité, à moins que l'employeur ne prouve qu'il
a pris les mesures que l'expérience commande, qui sont appropriées aux
circonstances et que l'on peut équitablement exiger de lui pour prévenir
ces actes ou y mettre fin. L'indemnité due sera fixée compte tenu de toutes
les circonstances et sera calculée sur la base du salaire moyen suisse
(cf. MARGRITH BIGLER-EGGENBERGER, in: Kommentar zum Gleichstellungsgesetz,
Bâle 1997, n. 40 ad art. 5 LEg). Aux termes de l'art. 5 al. 4 in fine
LEg, ladite indemnité n'excédera pas le montant correspondant à six mois
de salaire.

    De manière générale, le devoir de protection de la personnalité du
travailleur par l'employeur est prévu à l'art. 328 CO, qui a été complété
lors de l'introduction de la LEg par la mention expresse de la protection
contre le harcèlement sexuel. Dans la mesure où la LEg constitue une
loi spéciale par rapport aux dispositions du Code des obligations et
où la réparation du même préjudice est prévue dans les deux lois, le
travailleur n'aura droit qu'à une seule indemnité pour la même atteinte
(MONIQUE COSSALI SAUVAIN, La loi fédérale sur l'égalité entre femmes et
hommes, in: Journée 1995 de droit du travail et de la sécurité sociale,
Zurich 1999, p. 75 in fine; cf. également MARGRITH BIGLER-EGGENBERGER,
op. cit., n. 42 ad art. 5 LEg).

    bb) Les remarques sexistes et les commentaires grossiers ou
embarrassants rentrent dans la définition du harcèlement sexuel (FF
1993 I p. 1219), prévu à l'art. 4 LEg, dont l'énumération n'est pas
exhaustive. Bien que les exemples cités dans cette disposition ne se
réfèrent qu'à des cas d'abus d'autorité, la définition n'exclut pas
d'autres actes portant atteinte à la dignité du travailleur et ne relevant
pas d'un abus d'autorité, mais contribuant à rendre le climat de travail
hostile, par exemple des plaisanteries déplacées (MONIQUE COSSALI SAUVAIN,
op. cit., p. 68; CLAUDIA KAUFMANN, in: Kommentar zum Gleichstellungsgesetz,
Bâle 1997, n. 17 ss ad art. 4 LEg).

    cc) Il sied de relever que la LEg ne traite que de la responsabilité
de l'employeur et non de celle de l'auteur du harcèlement sexuel,

    qui peut être tenu notamment de réparer le tort moral de la victime
en vertu des art. 41 ss CO. La LEg a introduit à l'art. 5 al. 3 un droit
supplémentaire, lequel permet au juge de condamner l'employeur à verser au
travailleur une indemnité, indépendamment du préjudice subi. L'employeur
peut se libérer en démontrant qu'il a pris les mesures que l'expérience
commande, qui sont appropriées aux circonstances et que l'on peut
équitablement exiger de lui pour prévenir le harcèlement sexuel ou y
mettre fin. Si l'employeur prouve qu'il a rempli son devoir de diligence,
il ne peut être condamné au versement de ladite indemnité (MARGRITH
BIGLER-EGGENBERGER, op. cit., n. 37 ad art. 5 LEg; MONIQUE COSSALI SAUVAIN,
op. cit., p. 69; CLAUDIA KAUFMANN, op. cit., n. 44 ss ad art. 4 LEg;
SABINE STEIGER-SACKMANN, Der Beweis in Gleichstellungsprozessen, in: Das
Bundesgesetz über die Gleichstellung von Frau und Mann, St. Gall 1996,
p. 117-118).

    c) En l'espèce, la cour cantonale a constaté que des histoires
osées circulaient parmi le personnel de la société, que le directeur
s'est une fois exclamé "toutes des salopes" en entrant au secrétariat,
qu'il a demandé à la demanderesse, en présence d'une nouvelle employée,
si elle était "lesbienne" et qu'un autre collaborateur s'est également
adressé à la demanderesse de manière grivoise. Tout en admettant que les
remarques du directeur étaient déplacées, la cour cantonale reproche à la
demanderesse d'avoir eu recours au même vocabulaire, de s'être abstenue
de dénoncer les faits aux administrateurs de la société pour obtenir que
le directeur cesse son comportement et de ne pas avoir ouvert action
en réparation contre le directeur personnellement. Elle considère en
outre que la dénonciation de la demanderesse à l'OCIRT s'est révélée en
définitive infondée au regard de l'ensemble des circonstances.

    d) Au vu des principes énoncés, la demanderesse n'était pas tenu
d'actionner le directeur personnellement, comme le suggère la cour
cantonale, mais pouvait s'en prendre à l'employeur en vertu de l'art. 5
al. 3 LEg. Par ailleurs, aucun élément de l'arrêt attaqué ne permet de
considérer la dénonciation à l'OCIRT comme infondée, ce point n'étant
du reste pas décisif dans l'examen de l'application des art. 33 LTr et
5 al. 3 LEg. En outre, la cour cantonale se contredit, puisqu'elle a
elle-même constaté que la demanderesse a avisé le président du conseil
d'administration du harcèlement et du mobbing subis. L'employeur
alerté se devait d'intervenir et de prendre des mesures pour mettre fin
aux comportements incriminés ou pour prévenir d'autres comportements
inadéquats. Or, il s'est borné à annoncer qu'il confierait l'ouverture
d'une enquête à la direction, laquelle

    faisait également l'objet d'accusations de la part de la
demanderesse. Cette mesure ne peut en aucun cas être qualifiée
d'appropriée. Quant au fait que la demanderesse avait recours au même
vocabulaire - encore faut-il que l'utilisation d'un tel langage n'ait pas
eu lieu dans un contexte a priori personnel, tel les messages échangés
entre les collègues de travail -, il ne saurait justifier l'admission
par l'employeur de remarques sexistes, grossières ou embarrassantes, en
particulier de la part d'un supérieur hiérarchique, dont le comportement
peut déteindre sur celui de ses subordonnés.

    e) En l'espèce, l'employeur n'a pas réussi à démontrer qu'il a rempli
le devoir de diligence, qui lui incombe. La demanderesse réclame la somme
de 10'000 fr., à titre de diverses atteintes à sa personnalité, examinées
séparément. Selon l'art. 63 al. 1 OJ, le Tribunal fédéral est lié par les
conclusions des parties, mais non par les motifs qu'elles invoquent. Il
convient par conséquent de lui allouer, en vertu de l'art. 5 al. 3 LEg,
un montant de 4988 fr., correspondant au salaire mensuel brut suisse
(valeur centrale) en 1996; (Office fédéral de la statistique, L'enquête
suisse sur la structure des salaires 1996, Domaine 3 Emploi et vie active,
Neuchâtel 1999, p. 19).