Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 126 III 36



126 III 36

10. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 18 octobre 1999 dans la
cause Centre de gestion hospitalière contre La Mobilière Suisse (recours
en réforme) Regeste

    Art. 126 KVV; Verpflichtung des zivilrechtlich haftpflichtigen Dritten,
dem Leistungserbringer die Differenz zu bezahlen, welche zwischen dem für
ihn geltenden Tarif und dem mit gewissen Krankenversicherern vereinbarten
Tarif besteht.

    Mit der Einführung dieser Ausführungsbestimmung, welche
eine neue Verpflichtung zu Lasten des Haftpflichtigen und seiner
Haftpflichtversicherung schafft, hat der Bundesrat den Rahmen der ihm durch
Art. 79 Abs. 3 KKG delegierten Regelungskompetenz überschritten (E. 2).

Sachverhalt

    A.- Le 13 mars 1997, Odile Studer, qui circulait au guidon de son
cyclomoteur, a été renversée par une voiture conduite par sa détentrice,
Sandra Grohens, qui a obliqué à droite sans précaution. Elle a été
transportée en ambulance à l'Hôpital régional de Porrentruy (ci-après:
HRP), où elle a séjourné jusqu'au 5 avril 1997.

    Odile Studer était assurée contre le risque d'accidents, selon
les règles de la Loi fédérale sur l'assurance-maladie du 18 mars
1994 (LAMal; RS 832.10), par sa caisse-maladie, la Chrétienne sociale
suisse assurances. Sandra Grohens était assurée contre le risque de sa
responsabilité civile par La Mobilière Suisse.

    Le Centre de gestion hospitalière, établissement public de droit
cantonal, dont l'HRP est l'une des succursales, a réclamé à La Mobilière
Suisse la somme de 15'874 fr.10 en capital, représentant la différence
entre le tarif applicable aux assurances privées et le tarif conventionnel
réservé aux caisses-maladie affiliées à la Fédération jurassienne
des assureurs-maladie. Il s'est fondé, d'une part, sur une cession de
créance accordée par Odile Studer le 3 juin 1997 et, d'autre part, sur la
subrogation prévue par l'art. 126 de l'Ordonnance sur l'assurance-maladie
du 27 juin 1995 (OAMal; RS 832.102).

    La Mobilière Suisse a refusé de payer cette somme, faisant valoir
que la prétention ne reposait sur aucune base légale suffisante.

    B.- Le 2 avril 1998, le Centre de gestion hospitalière a ouvert action
contre La Mobilière Suisse en paiement de 15'874 fr.10 plus intérêts à 5%
dès le 25 mai 1997.

    Par jugement du 9 mars 1999, le Président du Tribunal du district de
Porrentruy a fait droit aux conclusions de la demande.

    Statuant sur appel de la défenderesse, la Cour civile du Tribunal
cantonal jurassien, par arrêt du 2 juin 1999, a réformé ce jugement et
débouté le demandeur de toutes ses conclusions.

    C.- Le Centre de gestion hospitalière exerce un recours en réforme
au Tribunal fédéral. Invoquant une violation des art. 43, 44, 47, 49,
79 LAMal et 126 OAMal, il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et
reprend ses conclusions sur le fond.

    Le Tribunal fédéral a rejeté le recours et confirmé l'arrêt attaqué.

Auszug aus den Erwägungen:

                   Extrait des considérants:

Erwägung 2

    2.- a) Le recourant agit tout d'abord en qualité de cessionnaire des
droits de la victime (cf. art. 164 al. 1 CO).

    Le cédant ne peut cependant transférer plus de droits qu'il n'en a
lui-même. Il faut donc s'interroger sur l'étendue des droits de la cédante,
à savoir la cyclomotoriste blessée.

    En cas de lésions corporelles, la partie qui en est victime a droit
au remboursement des frais et aux dommages-intérêts qui résultent de
son incapacité de travail totale ou partielle, ainsi que de l'atteinte
portée à son avenir économique (art. 46 al. 1 CO). Par remboursement des
frais, il faut entendre notamment le remboursement des frais hospitaliers
(OFTINGER/STARK, Schweizerisches Haftpflichtrecht, vol. I, Allg. Teil,
5e éd., n. 110 p. 282; ROLAND BREHM, Commentaire bernois, n. 10 à 13 ad
art. 46 CO).

    En l'espèce, il n'est pas litigieux que la victime était assurée contre
le risque d'accidents par sa caisse-maladie selon les règles de la LAMal
(cf. art. 1er al. 2 let. b LAMal). Dans le système de la LAMal, l'hôpital
doit fournir ses prestations selon un tarif (art. 43 al. 1 LAMal). Que
l'on adopte le système du tiers garant (art. 42 al. 1 LAMal) ou du tiers
payant (art. 42 al. 2 LAMal), le fournisseur de prestations ne peut pas
facturer à l'assuré davantage que le montant dû par la caisse-maladie
selon le tarif (système de la protection tarifaire: art. 44 al. 1 LAMal;
Message du Conseil fédéral, FF 1992 I p. 157s). Il était donc exclu - ce
qui n'est d'ailleurs pas contesté - que le recourant ait pu facturer à la
lésée davantage que ce qui a été pris en charge par sa caisse-maladie. En
conséquence, la victime n'avait aucun frais supplémentaire à assumer,
dont elle aurait pu demander le remboursement au responsable ou à son
assureur en responsabilité civile (art. 65 al. 1 LCR; RS 741.01).

    Dans la mesure où le recourant se fonde sur la cession d'une créance
inexistante, il ne peut qu'être débouté.

    b) aa) En second lieu, le demandeur base sa prétention sur l'art. 126
OAMal, qui prévoit que le tiers responsable doit, dans les limites
de son obligation de réparer le dommage, rembourser au fournisseur de
prestations l'éventuelle différence entre le tarif valable pour lui et
le tarif appliqué par l'assureur-maladie.

    La cour cantonale a retenu que cette disposition était dépourvue de
base légale suffisante. C'est de cette question qu'il convient maintenant
de débattre.

    bb) Comme le montre son préambule, l'OAMal est une ordonnance
d'exécution fondée sur l'art. 96 LAMal, lequel a la teneur suivante:
"Le Conseil fédéral est chargé de l'exécution de la présente loi. Il
édicte des dispositions à cet effet".

    Une ordonnance d'exécution a pour fonction de concrétiser
les dispositions légales et, le cas échéant, de combler des lacunes
d'importance secondaire, dans la mesure où l'exécution de la loi l'exige;
les normes d'exécution doivent cependant s'en tenir au cadre légal et
ne peuvent en particulier adopter des règles nouvelles qui limiteraient
les droits des administrés ou leur imposeraient de nouveaux devoirs,
même si ces règles sont compatibles avec le but de la loi (ATF 124 I 127
consid. 3b et les arrêts cités). Le Tribunal fédéral est compétent pour
contrôler la légalité d'une ordonnance du Conseil fédéral, c'est-à-dire
pour examiner si elle n'empiète pas sur la compétence du législateur en
violation du principe de la séparation des pouvoirs (cf. ATF 124 II 241
consid. 3, 581 consid. 2a; 123 II 472 consid. 4a).

    Comme l'observe le recourant, certains auteurs ont déjà signalé que
l'art. 126 OAMal leur paraissait dépourvu de base légale (ALFRED MAURER,
Das neue Krankenversicherungsrecht, Bâle 1996, p. 129 ss; GHISLAINE
FRÉSARD-FELLAY, Le droit de recours contre le tiers responsable selon
la LAMal, in: Recueil de travaux en l'honneur de la Société suisse de
droit des assurances, Lausanne 1997, p. 629). Il leur oppose cependant
l'opinion de l'OFAS, qui est probablement à l'origine de la disposition,
celle d'un auteur qui semble proche des caisses-maladie (ANDREAS
KUMMER, Obligation d'avance des prestations et recours, in: Organe
du concordat des assureurs-maladie suisseS (CAMS actuel) de mai 1998
p. 82 et 83), ainsi que celle de GEBHARD EUGSTER (Krankenversicherung,
in: Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht, Soziale Sicherheit, n. 401
p. 222). Les opinions invoquées par le recourant se fondent cependant
sur des considérations économiques: les hôpitaux publics sont largement
subventionnés par les collectivités et ces subventions doivent profiter
aux assurés obligatoires, mais non pas aux responsables des accidents
(et à leurs assureurs en responsabilité civile). Ces considérations n'ont
toutefois aucun rapport avec l'exigence d'une base légale pour fonder une
disposition d'exécution. Comme on l'a vu, une ordonnance d'exécution ne
peut pas créer des obligations qui ne sont pas prévues par la loi.

    L'art. 126 OAMal est classé, avec les art. 123 à 125, sous le titre
"Subrogation". Or, la subrogation est le transfert d'une créance par
le seul effet de la loi. Les art. 123 à 125 OAMal traitent d'ailleurs
effectivement de la subrogation de l'assureur dans les droits de
l'assuré. Dans le cas de l'art. 126 OAMal, on ne discerne aucune
forme de subrogation. Ainsi qu'on l'a vu précédemment (consid. 2a), la
personne assurée obligatoirement en vertu de la LAMal n'est pas tenue
de verser à l'hôpital une somme supérieure à celle qui sera couverte
par l'assureur-maladie sur la base du tarif prévu par l'art. 43 LAMal;
pour la différence de tarifs, il n'existe donc aucune dette de l'assuré
qui puisse fonder une créance en réparation à l'encontre du responsable
ou de son assureur en responsabilité civile. On ne voit ainsi pas quelle
personne pourrait avoir une créance de ce chef qui pourrait être légalement
cédée à l'hôpital en application de l'art. 126 OAMal.

    Cette dernière disposition précise que le responsable est tenu
"dans les limites de son obligation de réparer le dommage". Il en résulte
qu'elle n'a pas pour but d'étendre l'obligation qui incombe à ce dernier de
réparer le préjudice et, partant, l'obligation d'indemniser de l'assureur
en responsabilité civile, ce qui est conforme à sa nature de norme du
droit des assurances sociales.

    En définitive, l'art. 126 OAMal ne prévoit pas une subrogation au
sujet d'une créance préexistante, mais crée une obligation nouvelle, en
instituant un rapport juridique direct entre le fournisseur de prestations
et le responsable, dont on ne perçoit pas le fondement. Il faut rappeler
que l'hôpital a fourni ses prestations à la victime, qui est sa débitrice
dans les limites de la protection tarifaire (art. 42, 43 et 44 al. 1
LAMal), de sorte qu'il ne peut s'adresser directement à l'assureur-maladie
que si le système du tiers payant a été convenu (art. 42 al. 2 LAMal). En
revanche, l'hôpital n'a aucun rapport de droit avec le responsable et son
assureur en responsabilité civile. Le recourant en est in casu tellement
conscient qu'il a requis et obtenu une cession de créance. Cependant,
qu'il y ait cession de créance ou subrogation, ces mécanismes ne permettent
pas d'acquérir plus de droits que n'en avait la victime elle-même. Or,
celle-ci ne peut pas réclamer au responsable et à son assurance en
responsabilité civile (en vertu de l'action directe: art. 65 al. 1 LCR)
davantage que son dommage; elle ne saurait ainsi requérir le paiement
d'une différence de tarifs qui ne lui est pas opposable et dont elle ne
subit aucun préjudice. L'art. 126 OAMal crée donc une obligation nouvelle,
ce qui rend la disposition contradictoire, puisqu'elle dispose expressément
que le responsable n'est tenu que "dans les limites de son obligation de
réparer le dommage". Il semble que l'on ait voulu, en créant un rapport
juridique direct entre le fournisseur de prestations et le responsable,
obliger ce dernier à un versement supplémentaire dans le but d'alléger
les charges générées par les hôpitaux subventionnés. Un tel mécanisme ne
trouve aucun point d'appui dans la LAMal. Les dispositions citées par le
recourant ne permettent en rien de le déduire. L'art. 79 al. 3 LAMal charge
certes le Conseil fédéral d'édicter des prescriptions détaillées pour
l'exercice du droit de subrogation prévu en faveur de l'assureur-maladie
(art. 79 al. 1 LAMal), mais il n'est pas question, dans cette disposition,
d'une subrogation en faveur du fournisseur de prestations. En conséquence,
c'est à juste titre que la cour cantonale a constaté que la disposition
d'exécution était dépourvue de base légale.

    Si une telle obligation, conçue apparemment dans le seul intérêt
des hôpitaux subventionnés, était prévue par une loi, on pourrait douter
qu'elle relève du droit privé et puisse donner lieu à une "contestation
civile" susceptible d'un recours en réforme (cf. art. 46 OJ).