Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 125 V 339



125 V 339

53. Arrêt du 8 juin 1999 dans la cause SWICA Organisation de santé contre
Union Suisse et Tribunal des assurances du canton du Valais Regeste

    Art. 129 UVV; Art. 103 lit. a OG: Beschwerderecht der
Versicherer. Gegen die Verfügung eines Unfallversicherers steht dem
Privatversicherer kein Beschwerderecht nach Massgabe von Art. 129 UVV
oder Art. 103 lit. a OG zu.

Sachverhalt

    A.- R. est assurée auprès de la Mutuelle Valaisanne pour l'assurance
obligatoire des soins. Dans le cadre de son activité en qualité de
serveuse de restaurant, elle est aussi assurée contre les accidents
professionnels et non professionnels auprès de l'Union Suisse, Compagnie
générale d'assurances (ci-après: l'Union Suisse). Son employeur a conclu
auprès de la SWICA Organisation de santé (ci-après: la SWICA), pour
lui-même et ses employés, une assurance indemnité journalière pour perte
de gain en cas de maladie, d'accident ou de maternité (système Salaria),
régie par la Loi fédérale sur le contrat d'assurance.

    Le 27 février 1997, R. a été victime d'une agression sexuelle. Dans
un rapport médical initial du 12 juin 1997, le docteur H., médecin-chef à
l'hôpital d'arrondissement de X, a diagnostiqué une réaction dépressive,
de probables troubles mixtes de la personnalité et un état dépressif
récurrent. Par décision du 27 novembre 1997, l'Union Suisse a refusé
de verser à R. des prestations d'assurance-accidents. L'Union Suisse
a considéré que l'événement du 27 février 1997 ne constituait pas un
accident et que, de toute manière, une relation de causalité adéquate et
naturelle entre cet événement et l'atteinte à la santé de l'intéressée
faisait défaut.

    Par décision sur opposition du 13 janvier 1998, l'Union Suisse a
rejeté les oppositions formées contre sa décision par la SWICA et la
Mutuelle Valaisanne.

    B.- La SWICA a formé recours contre cette décision sur opposition
auprès du Tribunal des assurances du canton du Valais. Interpellée sur
sa qualité pour agir, elle a maintenu que celle-ci était donnée, dès lors
qu'elle avait avancé des indemnités journalières à son assurée et qu'elle
était ainsi atteinte dans ses intérêts par la décision sur opposition de
l'Union Suisse.

    Par jugement du 7 juillet 1998, l'autorité cantonale a déclaré
irrecevable le recours de la SWICA.

    C.- La SWICA interjette recours de droit administratif contre
ce jugement dont elle demande l'annulation, en concluant, sous suite
de dépens, à la recevabilité de son recours. En bref, elle persiste à
soutenir qu'elle a qualité pour recourir contre la décision sur opposition
de l'assureur-accidents.

    L'Union Suisse conclut, principalement, à l'irrecevabilité du recours
et, subsidiairement, à son rejet, sous suite de frais et dépens. L'Office
fédéral des assurances sociales se rallie aux considérants des juges
cantonaux. R. a renoncé à se déterminer.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- (Pouvoir d'examen limité; cf. ATF 123 V 242 s. consid. 1).

Erwägung 2

    2.- Aux termes de l'art. 104 LAA, le Conseil fédéral règle les
relations de l'assurance-accidents avec les autres assurances sociales
en ce qui concerne, en particulier, la détermination des obligations de
chaque assurance en cas d'accident et de maladie concomitants (let. c)
et le droit de recours des assureurs contre des décisions ressortissant
au domaine d'une autre assurance sociale (let. d). Le Conseil fédéral
a fait usage de cette délégation de compétence en édictant l'art. 129
OLAA. Selon l'al. 1 de cette disposition, lorsqu'un assureur-maladie ou
une autre assurance sociale prend une décision touchant à l'obligation de
l'autre assureur d'allouer des prestations, cette décision doit également
être notifiée à cet autre assureur. Ce dernier dispose des mêmes voies de
droit que l'assuré (al. 1). Si une autre assurance sociale fait opposition
ou forme un recours contre cette décision, l'opposition doit être notifiée
à l'assuré par l'assureur qui a rendu la décision et le recours notifié
à l'assuré par l'autorité de recours pour qu'il puisse se déterminer à
ce sujet. L'assuré peut intervenir comme partie. Les jugements rendus
déploient leurs effets également envers lui (al. 2).

    Par ces dispositions, le législateur s'est efforcé, d'une manière
générale, de coordonner les assurances sociales pour éviter, notamment,
la surindemnisation et faciliter les règlements de comptes lorsque deux
institutions intéressées ne parviennent pas à se mettre d'accord (ATF
115 V 425 consid. 1).

    Dans sa formulation en vigueur jusqu'au 31 décembre 1995, l'art. 129
OLAA avait pour but, en assurant la coordination des prestations entre
différents assureurs sociaux, de faire en sorte que la décision de
l'assureur-accidents au sujet de ses prestations puisse s'imposer
aux autres assureurs sociaux et que l'on évite ainsi des décisions
contradictoires à propos du même accident. Pour y parvenir, les assureurs
sociaux concernés se sont vus accorder les mêmes droits et moyens de
recours que les parties (ATF 115 V 425 consid. 1 précité). La formulation
actuelle de l'art. 129 OLAA a été introduite en même temps que la LAMal,
le texte de cette disposition étant au demeurant identique à celui de
l'art. 121 OAMal. Enoncée de manière plus claire, cette disposition ne
modifie pas fondamentalement le système de l'intervention en procédure des
autres assureurs concernés auxquels la décision de l'assureur-accidents
pourra dès lors finalement s'imposer (Pra 1997 no 30 p. 165 sv. consid. 2a
et c et les réf.; GYGI, Bundesverwaltungsrechtspflege, 2e éd. p. 183).

    Il n'en demeure pas moins que, compte tenu du but de coordination
rappelé ci-dessus, l'art. 129 OLAA, dans l'une et l'autre teneur,
n'a jamais concerné que le droit de recours des assureurs sociaux, à
l'exclusion des assureurs privés qui n'ont pas qualité de partie intéressée
au sens de cette disposition. Comme celle-ci ne sort pas du cadre légal
défini par l'art. 104 LAA, on ne voit pas, dans ces conditions, que la loi,
à défaut de l'ordonnance, puisse accorder davantage de droits aux assureurs
privés. Il en résulte que les prescriptions relatives à l'obligation de
notifier les décisions à un autre assureur, ainsi que celles déterminant
la légitimation à recourir ne concernent que les rapports entre assureurs
sociaux; elles ne valent pas pour les assureurs privés, qu'il s'agisse
par exemple de l'assureur en responsabilité civile du tiers responsable
ou de l'assureur privé intervenant pour dédommager à raison des pertes de
gain liées à l'accident (FRÉSARD, L'assurance-accidents obligatoire in:
Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], ch. 259 note 368).

    Comme la recourante n'est pas fondée à se prévaloir de ces
dispositions, le jugement qui lui dénie la qualité pour recourir n'est,
dans ce sens, pas contraire au droit fédéral.

Erwägung 3

    3.- La recourante soutient toutefois que sa légitimation à recourir
contre la décision de l'assurance-accidents découle directement des
dispositions de l'OJ, dès lors qu'elle est atteinte dans ses intérêts
par la décision litigieuse.

    a) Les principes relatifs à la qualité pour recourir devant le
Tribunal fédéral déterminent également la recevabilité du recours
devant l'autorité de première instance. En effet, en vertu de la force
dérogatoire du droit fédéral et conformément au principe de l'unité de la
procédure, la qualité pour agir devant les autorités administratives et
juridictionnelles cantonales dont les décisions sont sujettes au recours
de droit administratif ne peut être subordonnée à des conditions plus
strictes que celles qui régissent la qualité pour recourir au sens de
l'art. 103 let. a OJ et de l'art. 48 let. a PA, de même contenu (art. 98a
al. 3 OJ; ATF 123 V 114 sv. consid. 3 et les réf.; 125 II 13 consid. 2b).

    Il en résulte que la qualité de la SWICA pour recourir devant le
Tribunal cantonal des assurances du canton du Valais devra également être
examinée selon les principes découlant de l'art. 103 OJ.

    b) Conformément à l'article 103 let. c OJ, a qualité pour recourir
au Tribunal fédéral par la voie du recours de droit administratif toute
autre personne, organisation ou autorité à laquelle la législation fédérale
accorde le droit de recours.

    Dans le cas d'espèce, ni l'art. 104 LAA, ni l'art. 129 OLAA ne donnent,
comme on l'a vu, la légitimation à recourir à l'assureur privé. En
revanche, c'est notamment en vertu de cette disposition de l'OJ que les
assureurs sociaux possèdent cette qualité (RUMO-JUNGO, Bundesgesetz über
die Unfallversicherung, 2e éd. ad art. 104 LAA, p. 336). La recourante,
à laquelle la législation fédérale n'accorde pas le droit de recours,
n'est dès lors pas fondée à invoquer à son profit cette disposition.

Erwägung 4

    4.- a) Aux termes de l'art. 103 let. a OJ, a qualité pour recourir
quiconque est atteint par la décision attaquée et a un intérêt digne
de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée. La jurisprudence
considère comme intérêt digne de protection, au sens de cette disposition,
tout intérêt pratique ou juridique à demander la modification ou
l'annulation de la décision attaquée que peut faire valoir une personne
atteinte par cette dernière. L'intérêt digne de protection consiste
ainsi en l'utilité pratique que l'admission du recours apporterait au
recourant ou, en d'autres termes, dans le fait d'éviter un préjudice de
nature économique, idéale, matérielle ou autre que la décision attaquée
lui occasionnerait. L'intérêt doit être direct et concret; en particulier,
la personne doit se trouver dans un rapport suffisamment étroit avec la
décision; tel n'est pas le cas de celui qui n'est atteint que de manière
indirecte ou médiate (ATF 123 V 115 sv. consid. 5a, 315 sv. consid. 3b
et les références).

    S'agissant de l'atteinte, il importe de distinguer entre les
destinataires de la décision contestée et les tiers. Le destinataire
est la personne dont la décision a pour objet de définir la situation
juridique: elle lui a imposé une obligation, une charge, supprimé un
droit, a déclaré son recours irrecevable. Il peut arriver qu'il y ait
plusieurs destinataires, même aux intérêts opposés. Suivant le contenu
de la décision, ils auront tous qualité pour recourir. La qualité de
destinataire n'est cependant pas toujours suffisante. Il n'est en effet
pas exclu que malgré cela, un tel recourant n'ait pas un intérêt digne de
protection, par exemple, parce qu'il a à sa disposition un autre moyen de
droit pour régler le fond de l'affaire, parce que l'admission du recours
ne porterait pas remède au préjudice réellement subi ou parce que le
recours vise les motifs de la décision et que son admission ne saurait
avoir pour effet d'entraîner une modification du dispositif (MOOR, Droit
administratif, vol. II ch. 5.6.2.1, p. 414 et les références).

    Lorsque le tiers agit à côté du destinataire de la décision, cela
constitue en réalité une intervention accessoire qui n'est en principe
pas admissible. Le tiers n'a normalement pas davantage qualité pour
attaquer une décision à la place du destinataire, sous réserve du cas
où le tiers a lui-même certains droits (GYGI, op.cit., p. 157 ss; GYGI,
Vom Beschwerderecht in der Bundesverwaltungsrechtspflege in: Recht
1986 p. 9 et 10). Au regard de la question de l'atteinte, la situation
des tiers est ainsi plus complexe. Pour eux, il n'y a, par définition,
aucune atteinte juridique, aucune diminution de leurs droits, aucune
aggravation de leurs obligations. Les effets préjudiciables de la décision
sont de fait. Pour déterminer à partir de quelle intensité ces effets
constituent une atteinte propre à léser un intérêt digne de protection,
il est nécessaire qu'une relation suffisante existe. Pour cela, il faut
qu'il y ait véritablement un préjudice porté de manière immédiate à la
situation personnelle du recourant.

    b) Dans le cas d'espèce, la décision du 27 novembre 1997 de l'Union
Suisse nie le droit de R. à des prestations d'assurance-accidents. Selon
les principes rappelés plus haut, l'assurée est la destinataire de
cette décision dont copie a été adressée seulement pour information à la
SWICA. Comme telle cette décision n'a pas pour effet d'imposer à la SWICA,
assureur privé, des effets obligatoires à l'égard de son assurée. La
recourante conserve toute liberté de décider vis-à-vis de R., dans une
procédure adéquate, si elle admet l'existence ou non d'un accident, de
déterminer l'étendue de ses prestations et, cas échéant, de verser les
indemnités journalières convenues contractuellement. Au demeurant, les
conditions d'indemnisation ne vont pas correspondre avec les prestations
de l'assureur-accidents, dès lors que selon les conditions particulières
propres à l'assurance Salaria, le barème de l'assureur privé diffère de
celui fixé par la LAA et ses ordonnances.

    La recourante a ainsi la position d'un tiers dans ce litige propre
à l'assurance-accidents. Elle ne peut, par ailleurs, pas se prévaloir de
l'envoi à son adresse, le 13 janvier 1998, de la décision sur opposition
litigieuse avec indication des voies de recours pour se voir reconnaître
la qualité de destinataire (ATF 110 V 132 consid. 2c). Il y a donc lieu
d'examiner les conditions de la qualité pour recourir de la SWICA au
regard de cette situation procédurale particulière.

    c) La recourante a allégué, en cours de procédure, que son intérêt
digne de protection découle de l'obligation devant laquelle elle s'est
trouvée d'allouer des prestations. Toutefois, selon ses conditions
générales (C.G.A.), si parallèlement à la SWICA, la responsabilité
incombe à des tiers, la SWICA n'accordera aucune prestation. L'obligation
de la SWICA d'allouer des prestations n'existe que dans la mesure où la
responsabilité d'un tiers n'est pas ou n'est que partiellement engagée. En
cas d'obligation partielle du tiers, la SWICA n'accordera ses prestations
que dans la mesure où la couverture d'assurance n'entraîne pas une
surindemnisation de l'assuré (art. 29 let. a C.G.A.).

    De fait, la SWICA a versé 16'640 fr. 95 à titre d'indemnités
journalières à son assurée. Elle s'est ainsi acquittée de tout ou
partie de ses obligations découlant du contrat d'assurance. Il reste que
l'existence d'un préjudice, du moins au regard des faits établis et des
motifs invoqués, est des plus incertaine.

    Les dispositions des C.G.A. de la recourante doivent être interprétées
selon le principe de la confiance (art. 18 CO; ATF 117 II 621 consid. 6c).
Or, le titre marginal de l'art. 29 C.G.A., imprimé en lettres grasses
est rédigé de la manière suivante: "Que se passe-t-il en présence
d'un tiers responsable ou d'un tiers fournisseur de prestations?".
On doit ainsi comprendre que la SWICA opère une distinction entre
le tiers responsable de l'atteinte dommageable, en raison d'un chef
de responsabilité délictuel ou contractuel, et le tiers fournisseur
de prestations en vertu d'une autre cause, par exemple ex lege ou ex
contractu. Dans ce sens, l'assureur-accidents ne saurait être compris
comme tiers responsable visé à l'art. 29 let. a C.G.A. ainsi que le
soutient la recourante. Dès lors, le fait que l'Union Suisse alloue ou
non des prestations est sans influence sur la relation entre la SWICA
et son assurée au regard de cette disposition. Tenue contractuellement,
la SWICA n'est en effet pas fondée, pour le motif qu'elle invoque, à se
soustraire à ses obligations, parce que l'Union Suisse ne peut être que
fournisseur de prestations. La légitimation de la recourante n'est par
conséquent pas donnée, faute de préjudice.

    d) Les dispositions de l'art. 29 C.G.A. visent néanmoins à empêcher
une surindemnisation de l'assuré, en raison du principe indemnitaire
(art. 29 let. b C.G.A.). L'assuré victime d'un accident ne peut ainsi
cumuler les prestations de l'assureur social et de l'assureur privé de
telle manière qu'il en vienne à percevoir des indemnités journalières
dépassant au total son revenu.

    Dans le cas d'espèce, les effets de la décision de l'assureur-accidents
touchent, à son détriment, l'assurée R. Dès lors, si cette décision
est propre à causer finalement une atteinte de fait à la recourante,
le préjudice qu'elle subit ne découle toutefois qu'indirectement de la
décision litigieuse. En effet, la réduction des prestations que pourrait
opérer la SWICA pour éviter une surindemnisation n'est qu'un effet réflexe,
indirect de cette décision. En l'absence de préjudice porté de manière
immédiate à sa situation, la SWICA ne peut en réalité invoquer qu'un
effet indirect de l'atteinte, insuffisant au regard des exigences de l'OJ.

    Pour ces motifs, la qualité pour recourir contre la décision sur
opposition de l'assureur-accidents ne peut, au regard de l'art. 103 let. a
OJ, être admise. Partant, la SWICA n'était pas légitimée, comme assureur
privé, à recourir devant le Tribunal cantonal des assurances. La décision
des premiers juges refusant d'entrer en matière est ainsi conforme au
droit fédéral.

Erwägung 5

    5.- (Dépens)