Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 125 V 16



125 V 16

3. Arrêt du 5 février 1999 dans la cause UNIVERSA Caisse-maladie contre C.
et Tribunal administratif du canton de Genève Regeste

    Art. 31 Abs. 1 lit. a KVG und Art. 17 KLV: Durch schwere und
nicht vermeidbare Erkrankungen des Kausystems bedingte zahnärztliche
Behandlungen. In den in Art. 17 KLV aufgeführten Fällen gehen die Kosten
der Wiederherstellung (Zahnprothesen) zu Lasten der obligatorischen
Krankenpflegeversicherung.

Sachverhalt

    A.- Née en 1954, C. est affiliée à la caisse-maladie Universa. Elle
bénéficie de l'assurance obligatoire des soins médicaux, pharmaceutiques
et hospitaliers, avec une franchise annuelle de 300 francs (en 1997),
ainsi que d'assurances complémentaires.

    En 1997, elle a souffert d'une ostéomyélite des maxillaires. Les
frais d'assainissement dentaire, soit en particulier les extractions
nécessaires, et dont le coût s'élevait à 812 fr. 20, ont été supportés
par la caisse-maladie. En revanche, par décision du 5 septembre 1997,
Universa a refusé de prendre en charge les frais de reconstruction dentaire
qui ascendent, selon le devis du dentiste X, à 4'698 fr. 70. L'opposition
de l'assurée a été rejetée par décision du 3 octobre 1997.

    B.- Par jugement du 5 mai 1998, le Tribunal administratif du canton
de Genève a admis le recours de l'assurée et renvoyé le dossier à la
caisse-maladie pour nouvelle décision. Les juges cantonaux ont considéré
que la reconstruction dentaire entrait dans l'obligation de prise en
charge du traitement fixé par le législateur.

    C.- Universa interjette un recours de droit administratif contre ce
jugement dont elle demande l'annulation.

    C. n'a pas répondu au recours, alors que l'Office fédéral des
assurances sociales a renoncé à déposer des observations.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- a) Aux termes de l'art. 31 al. 1 LAMal, l'assurance obligatoire
des soins prend en charge les coûts des soins dentaires:
      a. s'ils sont occasionnés par une maladie grave et non évitable du

    système de la mastication, ou
      b. s'ils sont occasionnés par une autre maladie grave ou ses
      séquelles,

    ou
      c. s'ils sont nécessaires pour traiter une maladie grave ou ses

    séquelles.

    Selon l'art. 33 al. 2 LAMal, il appartient au Conseil fédéral de
désigner en détail les prestations prévues par l'art. 31 al. 1 LAMal. A
l'art. 33 let. d OAMal, l'autorité exécutive a délégué à son tour cette
compétence au Département fédéral de l'intérieur (DFI). Le DFI a fait
usage de cette sous-délégation aux art. 17 à 19a de l'ordonnance sur les
prestations dans l'assurance obligatoire des soins en cas de maladie du
29 septembre 1995 (OPAS; RS 832.112.31). Ces dispositions concrétisent
les cas dans lesquels les traitements appliqués relèvent des prestations
obligatoires.

    L'art. 17 OPAS (édicté en exécution de l'art. 31 al. 1 let. a LAMal)
renferme la liste des maladies graves et non évitables du système de
la mastication. L'art. 18 OPAS (édicté en application de l'art. 31 al. 1
let. b LAMal) énumère les autres maladies graves susceptibles d'occasionner
des soins dentaires; il s'agit de maladies qui ne sont pas, comme telles,
des maladies du système de la mastication, mais qui ont des effets
nuisibles sur ce dernier. Quant à l'art. 19 OPAS (édicté en exécution
de l'art. 31 al. 1 let. c LAMal), il prévoit que l'assurance prend en
charge les soins dentaires nécessaires aux traitements de certains foyers
infectieux bien définis. Enfin, l'art. 19a OPAS concerne les traitements
dentaires occasionnés par les infirmités congénitales.

    D'après l'art. 17 OPAS, édicté comme on l'a vu en exécution de
l'art. 31 al. 1 let. a LAMal, l'assurance prend en charge, à condition
que l'affection puisse être qualifiée de maladie et dans la mesure où le
traitement de l'affection l'exige, les soins dentaires occasionnés par les
maladies graves et non évitables suivantes du système de la mastication:
      a. ...; b. ...; c. maladies de l'os maxillaire et des tissus mous:
         1. ...  5. ostéomyélite des maxillaires;
      d. ...; e. ...; f. ....

    b) Il n'est pas contesté que l'intimée a souffert d'une ostéomyélite
maxillaire, affection figurant sur la liste de l'art. 17 OPAS, sous let. c,
ch. 5. Il s'agit d'une maladie grave et non évitable du système de la
mastication qui justifie, au regard de l'art. 31 al. 1 let. a LAMal,
la prise en charge par l'assurance-maladie du traitement.

    Dans le cas particulier, conformément à ses obligations, la recourante
a pris en charge le traitement dentaire, soit l'assainissement. Le litige
porte en revanche sur les frais de reconstruction, soit en particulier
la confection et la pose de deux prothèses dont la recourante conteste
qu'elles soient encore nécessitées par le traitement de l'affection.

Erwägung 2

    2.- Dans deux arrêts du 30 avril 1998 (ATF 124 V 196 et RAMA 1998
KV 33 p. 282), le Tribunal fédéral des assurances a jugé que les soins
dentaires visés par l'art. 31 al. 1 let. c LAMal et 19 OPAS englobent
le rétablissement de la fonction masticatoire au moyen de prothèses
dentaires, lorsqu'il s'est révélé nécessaire de procéder à l'extraction
de dents. Il s'est fondé sur les considérants suivants: Sous le régime
de la LAMA, les mesures dentaires ne constituaient pas, en principe,
des traitements médicaux au sens de l'art. 12 al. 2 ch. 1 et 2 LAMA, de
sorte qu'elles n'étaient pas à la charge des caisses-maladie au titre de
l'assurance des soins médicaux et pharmaceutiques. Le caractère dentaire
de la mesure n'était pas supprimé par le fait que le traitement appliqué
à l'appareil masticateur constituait une mesure préalable et nécessaire
à la mise en oeuvre du traitement médical d'une maladie. C'est ainsi que
le Tribunal fédéral des assurances a jugé qu'une caisse-maladie n'était
pas obligée de rembourser à un assuré les frais d'extraction de dents
(et des frais de prothèses) préalable à une opération du coeur, afin de
supprimer des foyers septiques potentiels et prévenir tout risque oslérien
(ATF 116 V 114; voir aussi RAMA 1990 no K 836 p. 135).

    La ratio legis de l'art. 25 al. 1 let. b du projet de LAMal (FF 1992
I 251), devenu l'art. 31 al. 1 let. c du texte définitif, ressort de
manière non équivoque du rapport de la commission d'experts du 2 novembre
1990 (p. 50 de l'édition de l'Office central fédéral des imprimés et du
matériel) et du message du Conseil fédéral du 6 novembre 1991 concernant la
révision de l'assurance-maladie (FF 1992 I 139). La commission relevait
notamment que si les traitements dentaires proprement dits devaient
continuer à être exclus de l'assurance des soins, il convenait cependant
de mettre à la charge de celle-ci le traitement dentaire occasionné par une
maladie grave ou ses suites ou qui est nécessaire pour traiter une maladie
grave ou ses suites. A ce dernier propos, la commission envisageait,
à titre d'exemples, l'obligation de prendre en charge l'extraction
préalable de dents pour permettre une opération du coeur ou encore la
remise en état prothétique à la suite d'une radiothérapie. Pour sa part,
le Conseil fédéral se référait explicitement à l'arrêt ATF 116 V 114,
précité, et constatait à ce sujet que l'absence d'une base légale pour la
prise en charge des soins dentaires entraînait parfois des "conséquences
fort pénibles"; la nouvelle réglementation devait selon lui permettre de
remédier, pour certains cas, à une "lacune indéniable du système" (voir
aussi GEBHARD EUGSTER, Aspects des soins dentaires selon l'art. 31 al. 1
LAMal à la lumière du droit de l'assurance-maladie [traduction française
de BEAT RAEMY], in: Revue mensuelle suisse d'odontostomatologie, vol. 107
[1997] p. 119; voir p. 99 ss pour le texte original allemand de cette
étude, également publié dans LAMal-KVG, Recueil de travaux en l'honneur de
la Société suisse de droit des assurances, Lausanne 1997, p. 227 ss). Or,
dans l'affaire qui a donné lieu à cet arrêt, ce sont précisément les
frais des mesures prothétiques consécutives à l'extraction des dents qui
posaient problème, bien plus que le coût des extractions, relativement
peu important par rapport à celui des prothèses. Le législateur ne
pouvait ignorer cet état de choses et l'on comprendrait difficilement
qu'en édictant l'art. 31 al. 1 let. c LAMal, qui mentionne non seulement
le traitement d'une maladie grave mais également celui de ses séquelles,
il n'ait eu en vue que l'extraction des dents à titre curatif ou préventif
de foyers infectieux, et non les mesures prothétiques destinées à conserver
ou rétablir la fonction masticatoire (ATF 124 V 198 consid. 2c et d).

Erwägung 3

    3.- La présente espèce se distingue du cas jugé le 30 avril 1998 (ATF
124 V 196), dès lors qu'est en cause une maladie grave et non évitable du
système de la mastication (art. 31 al. 1 let. a LAMal) et non le traitement
dentaire nécessaire à celui d'une autre maladie grave et de ses séquelles
(art. 31 al. 1 let. c LAMal).

    a) La disposition de l'art. 31 al. 1 let. a LAMal ne figurait pas
dans le projet de loi du Conseil fédéral soumis à la délibération du
Parlement. Elle fut introduite à l'initiative de la Commission du
Conseil des Etats et approuvée par les Chambres. La ratio legis de
cette disposition est triple. Le but premier est de libérer l'assuré
de l'obligation d'assumer les coûts d'un traitement dentaire lorsqu'il
souffre précisément d'une maladie grave et non évitable du système
de la mastication. Le deuxième objectif est d'exclure du catalogue des
prestations obligatoires toute maladie du système de la mastication pouvant
être évitée par une bonne hygiène buccale et dentaire. Dans ce sens,
sont visées la carie et la parodontite. Enfin, le cercle des prestations
non obligatoires pour les assureurs a été étendu: non seulement les formes
évitables de caries et de parodontite s'en trouvent exclues mais aussi
toute autre maladie évitable du système de mastication qui n'est pas de
nature grave (EUGSTER, op.cit., trad. française, p. 118 avec les réf.).

    En vertu de l'art. 2 al. 1 LAMal, on entend par maladie toute atteinte
à la santé physique ou mentale qui n'est pas due à un accident et qui
exige un examen ou un traitement médical ou provoque une incapacité
de travail. Liée à la notion de nécessité de traitement médical, la
définition de la maladie suppose une atteinte d'une certaine ampleur ou
la menace sérieuse d'une telle atteinte. Dans le cas des soins dentaires,
il y aura atteinte à la santé lorsque l'assuré ne peut pas accomplir
de façon satisfaisante des fonctions essentielles comme broyer, mordre,
mastiquer et articuler.

    A la lettre, l'art. 31 al. 1 let. a LAMal renvoie à la notion de
maladie définie ci-dessus. La disposition ne s'applique toutefois qu'à
une maladie du système de la mastication et présente une différence
d'importance par rapport au système ordinaire: la prise en charge par
l'assurance obligatoire des soins n'aura pas lieu chaque fois qu'il
y a atteinte d'une certaine ampleur mais seulement en cas de maladie
grave, selon la liste exhaustive qu'en a dressée le DFI à l'art. 17
OPAS. Une interprétation conforme à sa ratio legis de la disposition
précitée postule dès lors que le traitement vise à soigner et guérir,
mais aussi, par conséquent, à rétablir la fonction essentielle atteinte
par la maladie grave du système de la mastication. Le traitement de
l'affection comme telle l'exige. Au demeurant, on ne voit pas pourquoi, en
cas de soins dentaires apportés à raison d'une atteinte grave au système
de mastication, il en irait différemment que pour les soins donnés aux
séquelles d'une maladie grave (ATF 124 V 196). Ainsi, le rétablissement
de la capacité de mastication, visée à l'aide de moyens prothétiques,
fait partie du traitement complet de la maladie grave et non évitable au
sens des art. 31 al. 1 let. a LAMal et 17 OPAS, raison pour laquelle on
ne saurait lui contester le caractère de prestation obligatoire.

    b) Dans le cas d'espèce, la maladie grave et non évitable du système
de la mastication dont souffre l'intimée postule un traitement comprenant
également le rétablissement de la fonction atteinte, soit la reconstruction
dentaire. Le jugement querellé, qui réserve encore l'examen par la
recourante de l'efficacité ainsi que du caractère approprié et économique
du traitement, s'avère conforme au droit fédéral.