Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 125 V 135



125 V 135

20. Arrêt du 4 mars 1999 dans la cause S. contre Caisse nationale suisse
d'assurance en cas d'accidents et Tribunal administratif du canton de
Fribourg Regeste

    Art. 98a Abs. 1 OG: Richterliche Behörden als letzte kantonale
Instanzen. Bei dem die Gewährung der unentgeltlichen Rechtspflege
verweigernden Entscheid des Gerichtsschreiber-Berichterstatters des
Verwaltungsgerichts des Kantons Freiburg handelt es sich nicht um einen
Entscheid einer kantonal letztinstanzlichen richterlichen Behörde.

    Art. 58 Abs. 1 BV: Zugang zum Sozialversicherungsgerichtshof
des Verwaltungsgerichts. Die extra legem liegende Auslegung von
Art. 88 Abs. 2 Satz 2 des Gesetzes des Kantons Freiburg vom 23. Mai
1991 über die Verwaltungsrechtspflege (VRG; RSF 150.1) durch den
Sozialversicherungsgerichtshof des kantonalen Verwaltungsgerichts ist
mit Art. 58 Abs. 1 BV nicht vereinbar.

Sachverhalt

    A.- S. est en litige avec la Caisse nationale suisse d'assurance en
cas d'accidents (CNA) au sujet du montant de la rente d'invalidité qui lui
a été allouée depuis le 1er novembre 1996 pour une incapacité de gain de
25%, montant dont le calcul a été confirmé par la CNA dans une décision
sur opposition du 31 juillet 1997, compte tenu d'un gain annuel assuré de
40'878 francs. Le 4 novembre 1997, celui-ci a formé recours contre cette
décision devant le Tribunal administratif du canton de Fribourg, Cour des
assurances sociales, en concluant à titre principal, sous suite de dépens,
à l'allocation d'une rente mensuelle d'invalidité dès le 1er novembre
1996 s'élevant "à 1'006 fr. 20, plus l'allocation de renchérissement,
moins l'impôt à la source", compte tenu d'un gain annuel assuré de
48'297 francs. Par écriture du même jour, il a sollicité l'octroi de
l'assistance judiciaire gratuite et la désignation d'un avocat d'office.

    B.- Par décision du 20 avril 1998, statuant seul, le
greffier-rapporteur du Tribunal administratif du canton de Fribourg a
refusé l'assistance judiciaire requise, au premier motif que la condition
d'indigence n'était pas donnée. Sous la rubrique relative aux moyens
juridictionnels, il était indiqué qu'un recours de droit administratif
pouvait être déposé devant le Tribunal fédéral des assurances "contre le
présent jugement" dans un délai de dix jours dès sa notification.

    C.- Dans le délai utile, S. interjette recours de droit administratif
contre cette décision dont il demande l'annulation. Il conclut à titre
principal à l'admission de sa requête d'assistance judiciaire et à titre
subsidiaire au renvoi du dossier à l'autorité cantonale pour nouvelle
décision, le tout sous suite de dépens.

    La CNA conclut au rejet du recours, au motif que la cause au fond
est dépourvue de chances de succès.

    D.- A la demande du juge délégué, le Tribunal administratif du
canton de Fribourg s'est déterminé, par lettre du 27 octobre 1998, sur la
question de la compétence du greffier-rapporteur de rendre une décision
d'assistance judiciaire en unique instance cantonale. Les parties ont pu
présenter leurs observations sur cette écriture.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- a) Le Tribunal fédéral des assurances examine d'office sa
compétence (ATF 122 V 202 consid. 2, et les références), sans égard
aux conclusions prises par les parties (ATF 123 II 233 consid. 1). En
particulier, lorsqu'un litige ressortit à une autorité dont les décisions
sont sujettes à recours auprès d'une autorité supérieure, la seconde doit
décliner sa compétence aussi longtemps que la première n'est pas intervenue
(GRISEL, Traité de droit administratif, p. 831). Conformément à l'art. 102
let. d OJ (en corrélation avec l'art. 129 al. 3 OJ), le recours de droit
administratif n'est pas recevable lorsqu'est ouverte la voie de tout
autre recours ou opposition préalable. Il peut alors s'agir d'une voie de
recours cantonale; l'art. 98 let. g OJ dispose du reste que le recours
de droit administratif est ouvert contre "les décisions des autorités
cantonales statuant en dernière instance" (ATF 123 II 234 consid. 4). Il
en découle que seul un jugement cantonal de dernière instance peut être
attaqué par la voie du recours de droit administratif devant le Tribunal
fédéral des assurances.

    Par ailleurs, la décision qui indique à tort la faculté de s'adresser à
une autorité incompétente ne lui attribue pas la compétence qui lui manque
(GRISEL, op.cit., p. 831 et les arrêts cités).

    b) En saisissant le Tribunal fédéral des assurances d'un recours
de droit administratif contre la décision par le greffier-rapporteur de
lui refuser le bénéfice de l'assistance judiciaire, le recourant s'est
conformé à l'indication des moyens juridictionnels qui figurent au bas de
la décision attaquée. Cette indication ne lie cependant pas l'autorité de
recours qui doit, comme on l'a vu, se prononcer d'office sur sa compétence.

Erwägung 2

    2.- a) Aux termes de la Loi du 24 avril 1990 d'organisation du Tribunal
administratif (LOTA; RSF 151.1) du canton de Fribourg, le Tribunal
administratif connaît, en dernière instance cantonale, de toutes les
contestations de droit administratif, y compris celles qui relèvent du
droit fiscal et du droit des assurances sociales (art. 1er al. 1 LOTA).

    Organisé en cours, le Tribunal administratif est composé de sept
juges et d'autant de suppléants, de quatre assesseurs auprès de la cour
fiscale et deux assesseurs auprès de la cour des assurances sociales et
de six assesseurs-suppléants (art. 5 LOTA), tous élus par le Grand Conseil
(art. 6 al. 1 LOTA).

    Le Tribunal administratif engage et nomme les greffiers et le
personnel de chancellerie (art. 14 al. 1 LOTA). Les tâches des premiers
nommés ne sont pas définies dans la LOTA, alors que la Loi fribourgeoise
du 22 novembre 1949 d'organisation judiciaire (abrégée ci-dessous LOJ;
RSF 131.0.1) le fait pour les greffiers du Tribunal cantonal et des
tribunaux de première instance. Selon l'art. 85 LOJ, le greffier assume la
direction du greffe, fait les écritures et tient en bon ordre les archives
de l'autorité à laquelle il est attaché (al. 1). Il collabore à la bonne
marche des affaires, assure la rédaction et l'expédition régulière des
jugements, décisions et autres actes émanant de l'autorité à laquelle il
est attaché et les signe (al. 2).

    Le Tribunal administratif a fixé directement, par voie réglementaire
(Règlement du Tribunal administratif du 26 février 1992; RSF 151.11)
les compétences et tâches du greffier, opérant une distinction entre
greffier-chef, greffiers-rapporteurs et greffiers adjoints.

    Selon l'art. 38 du règlement du Tribunal administratif, les
greffiers-rapporteurs de la Cour fiscale et de la Cour des assurances
sociales accomplissent les tâches principales suivantes:

    a. ils instruisent les affaires qui leur sont attribuées, présentent
les rapports y relatifs et rédigent les décisions correspondantes;

    b. ils tiennent les procès-verbaux des audiences et des séances de
la cour.

    Il en ressort qu'à l'exception de l'instruction des affaires, leurs
tâches ainsi définies ne diffèrent pas des attributions qui sont celles
du greffier.

    b) Le Code de procédure et de juridiction administrative (CPJA) du 23
mai 1991 du canton de Fribourg (RSF 150.1) fixe la procédure applicable
aux décisions à prendre par les autorités de la juridiction administrative
(art. 1er al. 1 let. b CPJA). Le Tribunal administratif est l'autorité
ordinaire de la juridiction administrative (art. 3 al. 1 CPJA).

    aa) Sous le titre II concernant la procédure, chapitre 2 relatif à la
procédure de recours, ch. 4 intitulé "Instruction du recours", l'art. 86
CPJA dispose que l'autorité de recours instruit elle-même les recours
dont elle est saisie (al. 1). Une autorité collégiale peut confier cette
tâche à son président, à un autre membre ou à une délégation (al. 2). Une
personne ne peut pas prendre part à l'instruction d'un recours formé
contre une décision au prononcé de laquelle elle a participé (al. 3).

    Dans ce cadre, sous le titre marginal "Attributions de l'autorité
déléguée", l'art. 88 CPJA prévoit que l'autorité déléguée à l'instruction
(art. 86 al. 2 et 87 al. 1 CPJA) prend toutes les décisions procédurales
utiles, sauf celles en matière d'effet suspensif et de mesures
provisionnelles (al. 1). Ses décisions ne peuvent pas faire l'objet d'un
recours auprès de l'autorité au nom de laquelle elle instruit le recours.
Sont exceptées les décisions relatives à l'assistance judiciaire gratuite
(al. 2).

    bb) Les règles de procédure et de compétence en matière d'assistance
judiciaire figurent sous le titre IV, chapitre 3, aux art. 142 ss
CPJA. C'est à l'autorité chargée de l'instruction sur le fond qu'il
incombe de statuer à bref délai sur la requête (art. 144 al. 1 CPJA).

    c) Il résulte des dispositions précitées que l'autorité déléguée à
l'instruction a compétence pour statuer seule sur les questions simples
relatives à l'administration des preuves. En revanche, dès que les
questions qui se posent en cours d'instruction revêtent, aux yeux du
législateur cantonal, une importance plus grande - suspension, mesures
provisionnelles - la décision incidente est alors de la compétence de la
Cour chargée du dossier. Si les décisions relatives à l'administration
des preuves rendues par l'autorité déléguée à l'instruction ne peuvent
faire l'objet d'un recours, ce qui se justifie notamment au regard du
principe de célérité, il n'en va pas de même de la décision en matière
d'assistance judiciaire qui, en cas de recours, doit être portée devant
la Cour du Tribunal administratif (art. 88 al. 2 deuxième phrase CPJA).

    Ces dispositions, applicables d'une manière générale à toutes les
procédures administratives, le sont en conséquence également dans les
procédures relatives à des litiges d'assurance sociale. Dès lors, et dans
la mesure où le Tribunal administratif soutient dans ses déterminations
qu'il n'y a pas de recours cantonal contre la décision d'assistance
judiciaire prise par le greffier-rapporteur, il propose une application de
la loi cantonale en totale contradiction avec le texte clair du CPJA. Dans
cette mesure également, la pratique instaurée par voie réglementaire
interne qui confie au greffier la faculté de statuer en unique instance
cantonale et sans recours sur toutes les questions relatives à l'assistance
judiciaire est également contraire au texte de la loi.

    d) En réalité, le Tribunal administratif soutient qu'en raison
des exigences du droit fédéral, il se justifie de déroger à la loi
d'organisation judiciaire et de procédure cantonale. En d'autres termes,
il propose d'interpréter les dispositions du CPJA dans le sens que, dans
les litiges relatifs aux assurances sociales, il n'y a pas de recours
cantonal en matière d'assistance judiciaire.

Erwägung 3

    3.- L'art. 98a al. 1 OJ prévoit que les cantons instituent des
autorités judiciaires statuant en dernière instance cantonale, dans la
mesure où leurs décisions peuvent directement faire l'objet d'un recours
de droit administratif devant le Tribunal fédéral. Cette disposition
exige ainsi - pour les décisions susceptibles d'un recours de droit
administratif - une autorité judiciaire cantonale.

    Savoir quels sont les tribunaux dans le canton de Fribourg est une
question qui relève du droit cantonal. Selon l'art. 59 de la Constitution
fribourgeoise, l'administration de la justice est exercée par les tribunaux
reconnus par la Constitution et la loi. Par ailleurs, l'art. 65 de la
Constitution fribourgeoise qui crée un Tribunal administratif, précise que
la loi en règle l'organisation (al. 4). Les juges du Tribunal administratif
sont élus pour cinq ans selon les dispositions applicables à l'élection
des juges du Tribunal cantonal (al. 2), soit nommés individuellement par
le Grand Conseil (art. 60 Cst. frib.), et soumis à la haute surveillance
du pouvoir législatif (art. 65 al. 3 Cst. frib.).

    Le greffier-rapporteur ne figure pas parmi les autorités judiciaires
cantonales désignées par la loi. De plus, si, selon une délégation qu'il
n'y a pas lieu d'examiner ici, un règlement interne lui a donné des
compétences en matière d'instruction, il n'est en aucune manière devenu
une autorité judiciaire statuant en dernière instance cantonale en matière
d'assistance judiciaire, dès lors que, selon la loi, ses décisions sont
précisément sujettes à recours (art. 88 al. 2 CPJA).

    Ainsi donc, la décision litigieuse du 20 avril 1998 ne constitue pas un
jugement d'une autorité judiciaire cantonale de dernière instance au sens
de l'art. 98a al. 1 OJ. Il s'ensuit que le recours de droit administratif
porté devant le Tribunal fédéral des assurances contre cette décision
est en l'état irrecevable.

Erwägung 4

    4.- L'interprétation extra legem de l'art. 88 al. 2 deuxième
phrase CPJA proposée par la Cour des assurances sociales du Tribunal
administratif, est également contraire à l'art. 58 al. 1 Cst., le droit
cantonal prévoyant l'accès à la Cour du Tribunal administratif (ATF 124
I 263 consid. 5b/aa). Elle a pour effet, sans que rien ne le justifie,
de soustraire au magistrat cantonal l'examen des conditions d'octroi
de l'assistance judiciaire lorsque l'instruction est confiée à un
greffier. Or, dans le cadre de l'art. 108 al. 1 let. f deuxième phrase
LAA, la solution consistant, à l'intérieur du Tribunal administratif,
à porter la décision en matière d'assistance judiciaire devant la Cour
de la juridiction cantonale, n'est pas contraire aux principes exposés
dans l'arrêt ATF 110 V 56 ss consid. 3 et 4.

Erwägung 5

    5.- a) Le dossier doit en conséquence être retourné à la Cour des
assurances sociales du Tribunal administratif du canton de Fribourg pour
qu'elle examine la suite à donner au recours déposé contre la décision
du 20 avril 1998 et statue comme autorité judiciaire de dernière instance
cantonale.

    b) (Dépens)