Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 125 III 425



125 III 425

72. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 14 septembre 1999 dans
la cause A. et consorts contre K. (recours en réforme) Regeste

    Kündigung eines landwirtschaftlichen Pachtvertrages (Art. 16 Abs. 1
LPG).

    Da Art. 266n OR im Falle der Kündigung eines landwirtschaftlichen
Pachtvertrages nicht anwendbar ist, braucht die Kündigung durch den
Verpächter dem Pächter und dessen Ehegatten nicht separat zugestellt zu
werden, auch wenn der Pachtgegenstand ein Wohnhaus umfasst, das diesen
als Familienwohnung dient.

Sachverhalt

    A.- A., B. et dame C. sont propriétaires en main commune de trois
parcelles. Leur mère, dame D., en a la jouissance en vertu d'un usufruit
au sens de l'art. 473 CC.

    Par contrat de bail à ferme du 26 février 1985, dame D. a remis à K.,
avec effet au 1er mai 1985, moyennant un fermage annuel de 12'000 fr.,
l'usage du domaine exploité sur ces trois parcelles et comprenant des
champs, un pâturage, un appartement ainsi qu'un rural.

    L'accord intervenu, d'une durée initiale de six ans, a été reconduit
tacitement par la suite.

    Le 2 mai 1986, K. a épousé P. et le couple s'est installé dans
l'appartement précité.

    Par pli recommandé du 11 mai 1994, B., agissant au nom de sa mère,
a résilié le contrat de bail à ferme pour le 1er mai 1997.

    B.- Le fermier et sa famille n'ayant pas quitté les lieux à
l'expiration du bail, A., B., dame C. et dame D. (ci-après: les demandeurs)
ont déposé, le 2 mai 1997, une requête d'expulsion dirigée contre K.

    Le défendeur a conclu au rejet de la requête en invoquant, entre
autres motifs, la nullité de la résiliation du bail, du fait que celle-ci
n'avait pas été signifiée par pli séparé à son épouse, bien qu'elle portât
notamment sur le logement de la famille du fermier.

    Par jugement du 13 février 1998, le Président du Tribunal civil du
district de X. a constaté la nullité de la résiliation du bail à ferme
et rejeté la requête d'expulsion.

    La Cour de cassation civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel
a rejeté le recours interjeté par les demandeurs contre ce jugement par
arrêt du 4 mars 1999. A son avis, la résiliation du bail était entachée
de nullité, en vertu des art. 266n et 266o CO, car elle n'avait pas
été communiquée séparément à l'épouse du fermier, lequel ne commettait,
au demeurant, pas d'abus de droit en se prévalant de cette nullité.

    C.- Agissant par la voie du recours en réforme, les demandeurs
invitent le Tribunal fédéral à constater que le bail à ferme a été
valablement résilié pour le 1er mai 1997 et à ordonner l'expulsion
immédiate du fermier, au besoin avec l'assistance de la force publique. A
titre subsidiaire, ils sollicitent le renvoi de la cause à l'autorité
cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants de l'arrêt
fédéral. Selon eux, l'art. 266n CO n'est pas applicable au contrat de
bail à ferme agricole, de sorte que le congé notifié par écrit au seul
fermier est parfaitement valable.

    Le Tribunal fédéral admet partiellement le recours, annule l'arrêt
attaqué et renvoie la cause aux autorités cantonales pour qu'elles statuent
sur le mérite de la demande d'expulsion, lesdites autorités n'ayant pas
examiné les autres motifs de nullité invoqués par le défendeur en plus
du motif retenu à tort par elles.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Extrait des considérants:

Erwägung 3

    3.- La cour cantonale considère que l'absence, dans la loi fédérale
sur le bail à ferme agricole du 4 octobre 1985 (LBFA; RS 221.213.2),
d'une disposition comparable à l'art. 266n CO, relatif à la forme du congé
donné par le bailleur lorsque le bail à loyer porte sur le logement de la
famille, résulte d'une lacune de la loi. A son avis, pour combler cette
lacune, il faut accorder au fermier la protection prévue par l'art. 266n
CO, si le bail à ferme agricole a également pour objet le logement occupé
par la famille du fermier. Les demandeurs soutiennent, au contraire, que la
prétendue lacune constitue, en réalité, un silence qualifié du législateur.

    a) Une véritable ou authentique lacune (lacune proprement dite) suppose
que le législateur s'est abstenu de régler un point qu'il aurait dû régler
et qu'aucune solution ne se dégage du texte ou de l'interprétation de la
loi. Si le législateur a renoncé volontairement à codifier une situation
qui n'appelait pas nécessairement une intervention de sa part, son inaction
équivaut à un silence qualifié. Quant à la lacune improprement dite, elle
se caractérise par le fait que la loi offre certes une réponse mais que
celle-ci est insatisfaisante. D'après la jurisprudence, seule l'existence
d'une lacune authentique appelle l'intervention du juge, tandis qu'il lui
est en principe interdit, selon la conception traditionnelle, de corriger
les lacunes improprement dites, à moins que le fait d'invoquer le sens
réputé déterminant de la norme ne soit constitutif d'un abus de droit,
voire d'une violation de la Constitution (cf. ATF 124 V 271 consid. 2a;
122 I 253 consid. 6a et les arrêts cités).

    Il convient, dès lors, de rechercher si c'est par inadvertance ou
à dessein que le législateur fédéral n'a pas posé de règle spécifique,
dans la LBFA, au sujet du logement de la famille et, en particulier,
de sa résiliation par le bailleur, alors qu'il l'a fait dans le code
des obligations pour le bail à loyer (art. 266n CO). Une telle démarche
implique que l'on interprète la loi spéciale. C'est le lieu de rappeler
que la loi s'interprète d'abord selon sa lettre. Toutefois, si le texte
n'est pas absolument clair, si plusieurs interprétations de celui-ci
sont possibles, il faut alors rechercher quelle est la véritable portée
de la norme ou de l'ensemble de normes entrant en ligne de compte,
en la dégageant de tous les éléments à considérer, soit notamment les
travaux préparatoires, le but et l'esprit des règles posées, les valeurs
qui les sous-tendent, ainsi que leur relation avec d'autres dispositions
légales. Pour rendre la décision répondant de manière optimale au système
et au but de la loi, le Tribunal fédéral utilise, de manière pragmatique,
une pluralité de méthodes, sans fixer entre elles un ordre de priorité
(ATF 125 II 238 consid. 5a p. 244 et les arrêts cités).

    b) aa) Aux termes de l'art. 1er al. 4 LBFA, le code des obligations
est applicable, à l'exception des dispositions relatives aux baux à
ferme portant sur des habitations ou des locaux commerciaux, de celles
relatives à la consignation du loyer et de celles relatives aux autorités
et à la procédure.

    L'art. 266n CO figure dans le chapitre premier -  intitulé
"Dispositions générales" (art. 253 à 268b CO) - du titre huitième du code
des obligations ("Du bail à loyer") et il ne règle pas la consignation du
loyer, qui est traitée dans le même chapitre (art. 259g à 259i CO). Cette
disposition ne fait donc pas partie des exceptions réservées par l'art. 1er
al. 4 LBFA.

    Il ne s'ensuit pas pour autant que l'art. 266n CO doive nécessairement
s'appliquer au bail à ferme agricole. A cet égard, il ne faut pas perdre
de vue que ce type de bail fait l'objet d'une réglementation spéciale,
laquelle a, en principe, le pas sur la réglementation générale que
constitue le code des obligations ("lex specialis derogat legi generali";
cf. ATF 123 II 534 consid. 2d et les références; voir aussi: TERCIER,
Les contrats spéciaux, 2e éd., n. 2231). Le texte français de l'art. 1er
al. 4 LBFA n'est pas suffisamment explicite, de ce point de vue, qui
déclare simplement le code des obligations applicable lorsque l'une des
exceptions susmentionnées n'est pas réalisée. En revanche, les versions
allemande et italienne de la même disposition accordent, comme il se
doit, la priorité à la loi spéciale ("Soweit dieses Gesetz ... keine
besondern Vorschriften enthält, gilt das Obligationenrecht (OR), ...";
"Nella misura in cui la presente legge ... non contiene disposizioni
speziali, si applica il Codice delle obbligazioni, ..."). L'art. 276a CO
en fait du reste de même (cf.

STUDER, Commentaire bâlois, 2e éd., n. 1 ad art. 276a CO), puisqu'il
soumet les baux à ferme agricoles à la LBFA, "en tant qu'elle contient des
dispositions spéciales" (al. 1), l'application du code des obligations,
sous réserve de certaines exceptions, ne devant intervenir qu'"au surplus"
(al. 2). La LBFA règle elle-même la question de la forme de la résiliation
du bail à ferme agricole à son art. 16 al. 1 ainsi libellé: "la résiliation
d'un bail à ferme ne vaut qu'en la forme écrite. L'intéressé peut demander
que le congé soit motivé." Cette disposition n'exige donc pas que le
bailleur donne le congé en utilisant une formule agréée par le canton
(art. 266l al. 2 CO), ni qu'il le communique séparément au locataire
et à son conjoint, contrairement à l'art. 266n CO. Or, cette dernière
disposition est placée, avec trois autres (art. 266l, m et o CO),
sous le titre marginal "IV. Forme du congé pour les habitations et les
locaux commerciaux." Son objet est ainsi le même que celui de l'art. 16
al. 1 LBFA, à savoir la forme de la résiliation du bail. Il est logique,
dans ces conditions, d'accorder la préférence à la norme qui s'applique
spécifiquement au type de bail considéré. De plus, la LBFA règle elle-même
la prolongation judiciaire du bail à ferme (art. 26 à 28) et elle ne
confère la qualité pour agir dans ce sens qu'à la "partie au bail" qui
a reçu le congé (art. 26 al. 1).

    Par conséquent, on ne peut pas tirer du texte de l'art. 1er al. 4
LBFA un argument décisif en faveur de l'applicabilité de l'art. 266n CO
à la résiliation d'un bail à ferme agricole. La logique voudrait plutôt
que la seconde disposition cédât le pas à la première, conformément au
principe lex specialis derogat legi generali, dont l'application n'est pas
exclue du seul fait que la loi spéciale est antérieure à la loi générale
(cf. ATF 123 II 534 consid. 2d p. 537).

    bb) L'interprétation historique de la LBFA elle-même (cf., à ce sujet:
CLAUDE PAQUIER-BOINAY, Le contrat de bail à ferme agricole: conclusion et
droit de préaffermage, thèse Lausanne 1990, p. 41 ss) n'est d'aucun secours
pour résoudre la question litigieuse: dans son message du 11 novembre 1981
concernant ladite loi (FF 1982 I 269 ss), le Conseil fédéral se borne à
relever que l'exigence de la forme écrite pour la résiliation d'un contrat
de bail à ferme a été reprise de la règle applicable à l'époque aux baux
à loyer tombant sous le coup de l'arrêté fédéral instituant des mesures
contre les abus dans le secteur locatif (op.cit., p. 292); de leur côté,
les Chambres fédérales n'ont pas soulevé la question du destinataire du
congé donné par le bailleur, mais se sont concentrées sur le problème de
la motivation du congé (cf. BO 1983 CE 439/440; BO 1985 CN 331 à 334).

    Cela étant, si l'on considère l'oeuvre du législateur dans une
perspective historique élargie, embrassant l'ensemble du droit du bail,
on est frappé de constater que l'occasion a été donnée à maintes reprises
aux Chambres fédérales d'introduire l'exigence de la double notification
du congé pour le bail à ferme agricole également, mais qu'il ne l'a
jamais saisie, ce qui, à l'évidence, ne saurait être le fruit d'une
inadvertance initiale ou d'un oubli à répétition. Ainsi, l'Assemblée
fédérale, lorsqu'elle a modifié, le 5 novembre 1984, les dispositions
du code civil relatives aux effets généraux du mariage notamment (RO
1979 II 1179), a introduit une telle exigence en matière de bail à loyer
(art. 271a al. 1 aCO), mais ne l'a pas étendue au bail à ferme, fût-ce au
moyen d'un simple renvoi. Cette dernière disposition, le Conseil national
la connaissait forcément quand il a débattu de la résiliation du bail à
ferme agricole, dans sa séance du 6 mars 1985 (BO 1985 CN 331 à 334); il
ne l'a cependant pas incorporée dans la disposition topique de la LBFA,
se contentant d'adhérer à la décision du Conseil des Etats y afférente,
lequel avait adopté, sur ce point, le projet du Conseil fédéral (BO 1983
CE 439/440). Le législateur fédéral n'a pas non plus jugé nécessaire de
régler spécifiquement la question du congé donné au fermier en cas de
bail à ferme agricole portant aussi sur un logement familial, lorsque,
dans le cadre de la révision du droit du bail arrêtée le 15 décembre 1989
(RO 1990 802), il a repris l'exigence de la double notification pour
le congé donné par le bailleur dans le nouveau droit du bail à loyer
(art. 266n CO), qu'il a expressément exclu l'application des dispositions
concernant le logement de la famille aux baux à ferme portant sur des
habitations ou des locaux commerciaux (art. 300 al. 2 CO; cf., sur ce
point, le consid. 3b/cc ci-dessous) et qu'il a procédé à une modification
partielle de la LBFA (art. 1er al. 4, 22a et 25b; RO 1990 831). De même,
l'adoption, le 4 octobre 1991, du projet de loi fédérale sur le droit
foncier rural (LDFR; RO 1993 1410, RS 211.412.11), dont une disposition
réserve pourtant l'art. 169 CC destiné à protéger le logement familial
(art. 40 al. 3), n'a pas conduit le législateur fédéral à insérer
dans ladite loi, ni dans la LBFA modifiée à cette occasion (art. 51),
l'exigence de la double notification du congé du bailleur relatif à un
tel logement compris dans une entreprise agricole. Enfin, les Chambres
fédérales ne sont pas davantage intervenues dans ce sens à l'occasion
de la modification partielle, le 26 juin 1998, de la LDFR et de la LBFA
(RO 1998 3009 et 3012).

    Ce bref aperçu de l'évolution législative dans le domaine du bail
depuis les années quatre-vingt jusqu'à ce jour tendrait ainsi à accréditer
la thèse du silence qualifié plutôt que celle de la lacune proprement dite.

    cc) Le bien-fondé de cette thèse est confirmé indirectement par la
manière dont la question litigieuse a été réglée pour le bail à ferme
ordinaire.

    Selon l'art. 300 al. 2 CO, les dispositions relatives au logement de
la famille (art. 273a CO) ne sont pas applicables aux congés concernant
les baux à ferme portant sur des habitations ou des locaux commerciaux,
visés par son premier alinéa. La disposition citée ne mentionne pas
l'art. 266n CO, il est vrai. Cependant - outre que l'art. 298 CO rend
superflue pareille mention, puisqu'il règle lui-même la forme du congé
pour les habitations ou les locaux commerciaux affermés -, il va de soi
que si l'on exclut la possibilité pour le conjoint du fermier d'exercer les
droits de ce dernier en cas de congé (faculté réservée par l'art. 273a CO),
la notification séparée de la résiliation du bail au conjoint du fermier
(exigence posée par l'art. 266n CO) n'a plus aucun sens.

    La ratio legis de l'art. 300 al. 2 CO ressort clairement du message du
Conseil fédéral du 27 mars 1985 touchant la révision du droit du bail (FF
1985 I 1369 ss, 1457): le bail à ferme concerne l'activité économique du
fermier; c'est pourquoi, seul le fermier peut invoquer des droits contre le
congé (voir aussi, parmi d'autres: STUDER, in Commentaire bâlois, 2e éd.,
n. 3 ad art. 300 CO; TERCIER, op.cit., n. 2218; ENGEL, Contrats de droit
suisse, p. 221/222, lequel considère comme douteux le bien-fondé social de
cette distinction entre le bail à loyer et le bail à ferme sous cet angle).
Qu'un tel motif soit transposable dans le bail à ferme agricole est dans
l'ordre logique des choses. Comme le soulignent, en effet, STUDER/HOFER
(Le droit du bail à ferme agricole, p. 141), contrairement au bail à
loyer, le contenu essentiel du bail à ferme est l'utilisation agricole et
l'usage du seul logement ne revêt qu'un caractère accessoire. On voit mal,
du reste, pour ne citer qu'un seul exemple, ce qui pourrait justifier de
traiter différemment, s'agissant de la résiliation du logement familial
inclus dans le bail à ferme, le congé donné au fermier exploitant un
hôtel et celui donné au fermier exploitant une entreprise agricole.

    dd) L'art. 40 LDFR, sur lequel la cour cantonale fonde son
argumentation, n'infirme en rien ce qui précède (dans ce sens, au sujet de
l'arrêt présentement attaqué, cf. Yves Donzallaz, Pratique et jurisprudence
de droit foncier rural 1994-1998, n. 267). En vertu de cette disposition,
le propriétaire ne peut aliéner une entreprise agricole qu'il exploite
avec son conjoint ou une part de copropriété sur ladite entreprise
qu'avec le consentement de son conjoint (al. 1). S'il ne peut obtenir ce
consentement ou si ce dernier lui est refusé sans motif valable, il peut
saisir le juge (al. 2). L'art. 169 du code civil, destiné à protéger le
logement familial, est réservé (al. 3). Comme il appert de son texte même,
ainsi que des titres du chapitre ("Contrats d'aliénation") et de la section
("Restrictions générales du pouvoir de disposer dans les cas d'aliénation")
dans lesquels elle figure, la disposition citée ne vise que l'aliénation de
l'entreprise agricole et non la résiliation du bail à ferme agricole. Que
l'art. 169 al. 1 CC traite aussi de la résiliation du bail n'y change
rien. En effet, si l'art. 40 al. 3 LDFR réserve cette disposition,
c'est uniquement afin de rendre le consentement du conjoint également
nécessaire pour l'aliénation d'une entreprise agricole - dans le cas où
la condition de l'exploitation commune, au sens du premier alinéa de la
même disposition, n'est pas remplie - lorsque la famille risque de perdre
son logement (cf. Message du Conseil fédéral à l'appui de la LFDR, in FF
1988 III 889 ss, 908 et 957; DONZALLAZ, Commentaire de la loi fédérale
du 4 octobre 1991 sur le nouveau droit foncier rural, n. 390; STUDER, in
Das bäuerliche Bodenrecht, Kommentar zum Bundesgesetz über das bäuerliche
Bodenrecht vom 4. Oktober 1991, n. 21 ad art. 40 LDFR). Au demeurant,
les commentateurs récents de l'art. 169 CC sont d'avis que la résiliation
du bail à ferme agricole ne tombe pas sous le coup de cette disposition
(HAUSHEER/REUSSER/GEISER, Commentaire bernois, 2e éd. [1999], n. 33 ad art.
169 CC; BRÄM/HASENBÖHLER, Commentaire zurichois, n. 26 ad art. 169 CC). Il
n'y a donc pas de raison pour qu'il en aille autrement en ce qui concerne
l'art. 266n CO (anc. 271a CO), lequel n'est que le pendant de l'art. 169
CC, s'agissant de la résiliation du bail d'un logement familial.

    ee) D'une manière générale, la doctrine considère que le contrat de
bail à ferme agricole doit faire l'objet d'un traitement distinct par
rapport au contrat de bail (à loyer ou à ferme) ordinaire, dès lors que
le législateur fédéral a posé des règles spécifiques à son sujet (cf.,
parmi d'autres: HIGI, Commentaire zurichois, n. 62 ad art. 253a-253b CO;
LACHAT, Le bail à loyer, p. 77, n. 3.2; STUDER, in Commentaire bâlois,
n. 16 ad art. 253a-253b CO).

    Pour ce qui est du congé donné par le bailleur, la doctrine majoritaire
estime qu'il ne doit pas être communiqué séparément au fermier et à
son conjoint, même si l'entreprise agricole comprend une habitation qui
sert de logement à la famille du fermier (STUDER/HOFER, ibid.; STUDER,
in dernier op.cit., n. 4 ad art. 298 CO; HAUSHEER/REUSSER/GEISER, ibid.,
avec d'autres références; les mêmes, in Kommentar zum Eherecht, vol. I,
n. 33 ad art. 169 CC et 271a CO; DONZALLAZ, Pratique et jurisprudence...,
n. 265 à 268, va apparemment dans le même sens; cf. aussi, indirectement:
HEGNAUER/BREITSCHMID, Grundriss des Eherechts, 3e éd., n. 17.20,
et BRÄM/HASENBÖHLER, ibid.; d'un autre avis: DESCHENAUX/STEINAUER, Le
nouveau droit matrimonial, p. 99; NÄF-HOFMANN, Das neue Ehe- und Erbrecht
im Zivilgesetzbuch, 2e éd., n. 119; quant à VOLLENWEIDER, Le logement de
la famille selon l'article 169 CC: notion et essai de définition, thèse
Lausanne 1995, le passage de son ouvrage cité par la cour cantonale
(p. 89) ne l'est pas à bon escient, comme le soulignent avec raison
HAUSHEER/REUSSER/GEISER, Commentaire bernois, n. 33 ad art. 169 CC,
p. 388, puisqu'il a trait au problème - différent - du local mixte).

    Il existe donc un large consensus au sein de la doctrine pour
soustraire le bail à ferme agricole du champ d'application de l'art. 266n
CO.

    ff) L'interprétation téléologique de la LBFA ne conduit pas à un
autre résultat. A cet égard, on ne saurait suivre l'opinion de la cour
cantonale selon laquelle le caractère déterminant du bail à ferme agricole
réside dans l'existence du logement familial, qui l'emporte sur l'aspect
économique. Comme le relève à juste titre DONZALLAZ (dernier op.cit., n.
265), il ne va pas de soi que l'habitation constitue un élément essentiel
pour retenir l'existence d'une entreprise agricole. En outre, lorsque
l'habitation est jugée nécessaire à l'admission d'une telle entreprise,
c'est précisément au regard des finalités économiques visées par cette
dernière et au vu du type d'agriculture en cause.

    Selon l'art. 4 al. 1 LBFA, le bail à ferme agricole est un contrat par
lequel le bailleur s'oblige à remettre au fermier, moyennant un fermage,
l'usage d'une entreprise ou d'un immeuble à des fins agricoles et à lui
en laisser percevoir les fruits ou les produits. Il ressort de cette
définition légale du bail à ferme agricole que le fermier conclut un tel
contrat dans le but de pouvoir utiliser, par son activité, les possibilités
et qualités frugifères offertes par la chose affermée (PAQUIER-BOINAY,
op.cit., p. 104). Aussi est-ce non seulement sa place de travail, mais
encore les fondements de son existence économique et familiale que le
fermier trouve sur le bien-fonds qu'il a pris à ferme (STUDER/HOFER,
op.cit., p. 18). D'où la nécessité de renforcer sa protection. Tel était
le but principal assigné à la LBFA par le Conseil fédéral (cf. le message
ad hoc, in FF 1982 I 270 ss). Pour atteindre cet objectif, le législateur
a, entre autres mesures, fixé à neuf ans au moins la durée initiale du
bail à ferme portant sur une entreprise agricole (art. 7 al. 1 LBFA),
à une année le délai de congé minimal (art. 16 al. 2 LBFA) et à six ans
la durée maximale de la prolongation judiciaire du bail (art. 27 al. 4
LBFA). Sous cet angle, le fermier bénéficie donc d'une protection bien
supérieure à celle du locataire titulaire d'un bail à loyer portant sur
une habitation. En effet, le code des obligations ne prévoit aucune durée
initiale minimale pour ce type de bail (art. 255 CO), se contente d'un
délai de résiliation de trois mois (art. 266c CO) et limite à quatre ans la
durée de la (ou des deux) prolongation(s) judiciaire(s) du bail (art. 272b
al. 1 CO). La situation du conjoint du locataire apparaît ainsi nettement
moins favorable que celle du conjoint du fermier, de sorte que la nécessité
de protéger le logement familial ne s'impose pas avec la même force dans
le domaine du bail à ferme agricole que dans celui du bail à loyer.

    D'ailleurs, il ne faut pas perdre de vue que la notification séparée
du congé, imposée par l'art. 266n CO, vise à permettre au conjoint du
locataire d'exercer lui-même les droits du locataire en cas de congé,
en particulier de contester le congé ou de demander la prolongation du
bail (art. 273a al. 1 CO). Cela suppose que le locataire reste passif,
à réception du congé, ou s'abstienne volontairement, par esprit de
chicane ou pour d'autres motifs, d'exercer ses droits y relatifs (cf.
HAUSHEER/REUSSER/GEISER, Commentaire bernois, n. 9 ad art. 169 CC, p. 372).
Or, il paraît peu conforme à l'expérience de la vie d'imaginer, d'une
part, que le fermier puisse rester inactif par négligence à réception
d'un congé qui doit lui être notifié une année avant l'échéance du bail
et, d'autre part, que son conjoint puisse le contraindre indirectement
à poursuivre, à son corps défendant, l'exploitation de l'entreprise
agricole, en sollicitant lui-même la prolongation judiciaire du bail,
dont le fermier ne veut pas entendre parler.

    c) Force est, partant, d'admettre, au terme de cet examen, que
l'absence, dans la LBFA, d'une disposition topique analogue à l'art. 266n
CO ne constitue pas une lacune véritable, mais résulte d'un silence
qualifié du législateur fédéral.