Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 125 III 131



125 III 131

25. Extrait de l'arrêt de la Ie Cour civile du 23 décembre 1998 dans la
cause S. contre la banque X. (recours en réforme) Regeste

    Bürgschaft - öffentliche Beurkundung (Art. 493 Abs. 2 OR).

    Dem Formzwang unterliegende Elemente der Bürgschaftserklärung (E. 4).

    Bundesrechtliche Minimalanforderungen an die öffentliche
Beurkundung. Rolle der Urkundsperson bei der Annahme wesentlicher Klauseln
durch den Bürgen (E. 5).

Sachverhalt

    A.- La banque X. a accordé une limite de crédit de 100'000 fr. à J. &
S. S.A., qui disposait auprès d'elle d'un compte courant. Parallèlement,
J. et S., administrateurs de la société, ont signé l'acte suivant:
      «Acte en brevet no 1172

      CAUTIONNEMENT SOLIDAIRE PAR DEVANT Y., notaire à Z. (...)
      se présentent: 1.- J. (...), 2.- S. (...),

    lesquels, après avoir pris connaissance des conditions générales de la

    banque X. et des conditions de l'acte de cautionnement ci-annexé,
déclarent

    expressément les accepter sans réserve et se constituer conjointement
et

    solidairement CAUTIONS SOLIDAIRES de J. & S. S.A., (...), envers
la banque

    X. à Z., pour un montant total de

      CENT VINGT MILLE FRANCS (fr. 120'000.-) Il est ici consigné que
      J. et S. sont inscrits au Registre du  Commerce

    de Z. en qualité d'administrateurs d'une société anonyme.

      DONT ACTE

    délivré en brevet, après avoir été lu par le notaire aux comparants qui

    l'ont approuvé et signé, avec lui, séance tenante, à Z, le vingt-six

    février mil neuf cent huitante-sept.»

    La date du 26 février résulte d'une erreur; en réalité, l'acte a
été signé devant notaire le 27 février 1987. L'acte de cautionnement
annexé auquel l'acte en brevet se réfère est une formule préimprimée
de la banque X. J. et S. y déclarent notamment se constituer cautions
solidaires envers la banque et s'obliger à ce titre solidairement avec
J. & S. S.A., débitrice principale, pour la garantie de tous engagements
pris ou à prendre par elle en vertu d'ouverture de crédits, plus intérêts
contractuels et légaux, commissions et frais, jusqu'à concurrence de
120'000 fr. J. et S. ont signé l'acte préimprimé à Z. le 27 février
1987. Le sceau du notaire est apposé à moitié sur le verso de la formule
préimprimée et à moitié sur le recto de l'acte en brevet.

    La faillite de la société a été prononcée le 11 juin 1991. Le solde
débiteur du compte courant s'élevait alors à 98'938 fr., intérêts,
commissions et frais compris. La banque a introduit une poursuite
contre S. Elle a obtenu la mainlevée provisoire de l'opposition formée
par la caution.

    B.- S. a ouvert action en libération de dette. Pour sa part, la
banque a conclu à ce que la caution soit condamnée à lui payer la somme
de 98 938 fr., avec intérêts à 9,25% dès le 1er février 1993, et à ce que
l'opposition soit définitivement levée. Par jugement du 29 août 1997,
la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud a fait droit aux
conclusions de la défenderesse, sauf sur le taux des intérêts ramené à
5% et leur point de départ fixé au 9 février 1993. Statuant le 27 avril
1998, la Chambre des recours du Tribunal cantonal du canton de Vaud a
rejeté dans la mesure où il était recevable le recours formé par S. et
a confirmé le jugement de la Cour civile.

    C.- S. a déposé un recours en réforme que le Tribunal fédéral a rejeté
dans la mesure où il est recevable.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Extrait des considérants:

Erwägung 4

    4.- a) Selon l'art. 493 al. 2 CO, une déclaration de cautionnement
qui émane d'une personne physique et dépasse la somme de 2000 fr. doit
revêtir la forme authentique, conformément aux règles en vigueur au lieu
où l'acte est dressé. Avant d'aborder les autres moyens soulevés par le
demandeur, il convient de définir les éléments de la déclaration de la
caution qui revêtent la forme authentique en vertu du droit fédéral. En
d'autres termes, il s'agit d'examiner si, en l'espèce, les conditions
insérées dans la formule préimprimée doivent être couvertes par la forme
authentique et si l'acte en brevet, dont la qualité d'acte authentique
n'est pas mise en cause, contient tous les éléments nécessaires de la
déclaration de la caution. En effet, si les points réglés exclusivement
dans l'acte préimprimé ne sont pas essentiels et si l'acte en brevet suffit
à la perfection formelle du cautionnement, il ne sera pas nécessaire
d'examiner si la combinaison de la formule préimprimée et de l'acte en
brevet est conforme à la notion fédérale d'acte authentique. C'est le
droit fédéral matériel qui détermine le contenu minimal que la forme
authentique doit recouvrir pour que l'acte soit valable (ATF 113 II 402
consid. 2a p. 404; 106 II 146 consid. 1 p. 147; BRÜCKNER, Der Umfang des
Formzwangs beim Grundstückkauf, in RNRF/ZBGR 1994, p. 2).

    b) Selon la jurisprudence, la forme légale sera observée pour tous les
points objectivement et subjectivement essentiels de la déclaration de la
caution (ATF 119 Ia 441 consid. 2c p. 442; cf. également pour d'autres
contrats, ATF 113 II 402 consid. 2a p. 404; 106 II 146 consid. 1 p. 148
et les arrêts cités). Est objectivement essentiel l'engagement exprimé
par la caution de garantir à titre accessoire la dette d'autrui d'un
montant déterminé (TERCIER, Les contrats spéciaux, 2e éd., n. 5064,
p. 619; JÖRG SCHMID, Die öffentliche Beurkundung von Schuldverträgen,
n. 494 ss, p. 141 ss; SCYBOZ, Le contrat de garantie et le cautionnement,
in Traité de droit privé suisse, tome VII, 2, p. 85). En ce qui concerne
les points subjectivement essentiels, la forme spéciale n'est toutefois
requise que pour les clauses qui aggravent la position de la caution,
mais non pour celles qui améliorent sa situation dans son intérêt
exclusif ni pour celles qui complètent le contrat sur un point accessoire
(ATF 119 Ia 441 consid. 2c et les arrêts cités; PESTALOZZI, Kommentar
zum schweizerischen Privatrecht, Obligationenrecht I, 2e éd., n. 8 ad
art. 493 CO, p. 2510/2511; TERCIER, op.cit., n. 5064, p. 619; SCHMID,
op.cit., n. 502 ss, p. 143 ss; SCYBOZ, op.cit., p. 85/86; GIOVANOLI,
Berner Kommentar, n. 17 ad art. 493 CO).

    c) En l'espèce, la désignation de la dette garantie - indépendamment
de son caractère suffisamment précis ou non (cf. ATF 120 II 35 consid. 3;
TERCIER, op.cit., n. 5067, p. 620) - figure exclusivement dans la formule
préimprimée. En outre, celle-ci comprend des clauses en défaveur de
la caution, ainsi lorsque l'obligé renonce à la réalisation préalable
des gages sur les meubles et créances (ch. 2; art. 496 al. 2 CO) ou à
la réduction légale de la garantie prévue à l'art. 500 al. 1 CO (ch. 3)
(cf. SCHMID, op.cit., n. 506 et 510, p. 144; GIOVANOLI, op.cit., n. 17 ad
art. 493 CO; voir également DENIS PIOTET, La forme authentique simplifiée
du cautionnement dans la loi vaudoise et le droit privé fédéral, in JdT
1996 III [ci-après: op.cit. 1996], p. 3). Il s'ensuit que la cour de céans
ne peut se dispenser d'examiner si l'acte de cautionnement en deux parties
du 27 février 1987 respecte la notion fédérale de forme authentique.

Erwägung 5

    5.- a) Dans le second volet de son argumentation, le demandeur reproche
précisément à la cour cantonale d'avoir méconnu les conditions posées
par le droit fédéral en matière de forme authentique. La seule mention
des conditions préimprimées dans l'acte en brevet et leur annexion ne
constitueraient pas un lien matériel suffisant entre le document externe
et l'acte authentique. Invoquant l'avis de PIOTET (op.cit. 1996, p. 2 ss),
le demandeur critique la jurisprudence appliquée en l'espèce par la Chambre
des recours, selon laquelle le droit cantonal doit, pour satisfaire aux
exigences du droit fédéral, garantir une prise de connaissance du contenu
de l'acte, et non assurer que le notaire lise effectivement l'acte aux
parties ou le leur donne à lire. A suivre le demandeur, la participation
du notaire à l'adhésion de la caution aux clauses préimprimées n'a pas été
assurée en l'occurrence, du moment que l'acte en brevet ne fait état ni
d'une lecture de la formule préétablie par l'officier public à la caution,
ni d'aucune authentification de l'adhésion de la caution aux conditions
préimprimées essentielles. Au demeurant, l'acte en brevet n'indiquerait
pas expressément que la prise de connaissance dont il fait état a eu
lieu en présence du notaire. Pour le demandeur, la validité formelle du
cautionnement de février 1987 ne saurait être admise.

    b) Il appartient aux cantons de déterminer les modalités de la forme
authentique (art. 55 al. 1 Tit. fin. CC). Mais la notion même de forme
authentique et les conditions minimales auxquelles elle doit satisfaire
relèvent du droit fédéral (ATF 113 II 402 consid. 2a p. 404; 106 II 146
consid. 1 p. 147 et les arrêts cités). Ces conditions résultent du but
que le droit matériel fédéral assigne à la forme authentique (ATF 106 II
146 consid. 1 p. 147 et les arrêts cités; arrêt non publié du 23 août
1994 dans la cause 4P.83/1994, consid. 1, reproduit in RNRF/ZBGR 1997,
p. 281 ss). Faute de définition dans le code civil, il appartient à la
jurisprudence et à la doctrine de délimiter les contours de la notion
fédérale de forme authentique (Hans Huber, Die öffentliche Beurkundung als
Begriff des Bundesrechtes, in RNRF/ZBGR 1988, p. 229). Ainsi, le fait pour
la personne chargée de dresser l'acte d'authentifier une constatation dont
elle connaît l'inexactitude a été tenu pour incompatible avec la nature
même de la forme authentique (ATF 90 II 274 consid. 6 p. 282). De même,
le droit fédéral exige que l'identité de l'officier public résulte sans
équivoque de l'acte lui-même (arrêt non publié du 23 août 1994 dans la
cause 4C.119/1994, consid. 1, reproduit in RNRF/ZBGR 1997, p. 285 ss).

    La recherche des éléments essentiels de la forme authentique selon le
droit fédéral a également occupé les auteurs (cf. les listes de conditions
minimales dressées par PETER RUF, Notariatsrecht - Skriptum, p. 46 ss et
par Denis Piotet, La notion fédérale de l'acte authentique à l'épreuve
de la doctrine, in Mélanges en l'honneur de JACQUES-MICHEL GROSSEN
[ci-après: op.cit. 1992], p. 21 ss). En général, la participation active
de l'officier public à l'élaboration de l'acte est considérée comme une
exigence fondamentale de la forme authentique (PIOTET, op.cit. 1996, p. 4
et 1992, p. 21); cette participation ne peut consister uniquement en la
légalisation de la signature des parties, sans que l'officier public ne se
préoccupe du contenu matériel de l'acte (RUF, op.cit., p. 47; PIOTET, op.
cit. 1992, p. 21; HANS HUBER, Die öffentliche Beurkundung als Begriff des
Bundesrechtes, in RJB/ZBJV 1967, p. 267 ss; LIVER, in RJB/ZBJV 1959, p.
435; BECK, Berner Kommentar, n. 11 ad art. 55 Tit. fin. CC).

    c) Aux termes de l'art. 1er al. 2 de la loi d'application dans le
canton de Vaud de la loi fédérale révisant le titre vingtième du CO (RSV
3.5 B; ci-après: la loi d'application), l'acte de cautionnement pour lequel
la législation fédérale exige la forme authentique est délivré en brevet;
il peut être dressé sur une formule imprimée et se référer aux clauses
de celle-ci. En l'espèce, le notaire a rédigé l'acte en brevet sur une
feuille séparée qu'il a jointe à l'acte préimprimé par l'apposition de
son sceau chevauchant les deux documents. Selon la cour cantonale, cette
manière de procéder garantit l'unité matérielle de l'acte et n'est pas
contraire à la loi d'application. Il convient d'examiner au surplus si,
comme les juges précédents l'ont également admis, elle est conforme aux
exigences minimales du droit fédéral en matière de forme authentique.

    A cet égard, il faut distinguer le document simplement annexé à la
suite de l'acte authentique (par exemple, un plan à un pacte d'emption;
cf. ATF 106 II 146) de celui incorporé à l'acte principal avant la
signature des parties (BRÜCKNER, Schweizerisches Beurkundungsrecht,
n. 1360, p. 388). En l'espèce, l'acte en brevet se réfère expressément
aux conditions préimprimées; matériellement, ces dernières précèdent l'acte
en brevet, comme la position du sceau notarial le démontre. Par ailleurs,
l'arrêt attaqué ne laisse apparaître aucun indice donnant à penser que le
notaire aurait failli à son devoir de véracité (cf. PIOTET, op.cit. 1992,
p. 26), en citant dans l'acte en brevet une formule préimprimée dont
il n'aurait pas eu connaissance au moment de l'instrumentation et en
reliant les deux documents par la suite. Au contraire, il ressort des
constatations de la Cour civile, reprises par la Chambre des recours,
que le notaire disposait bien de la formule préimprimée lors de
l'instrumentation de l'acte. L'incorporation a donc bel et bien eu lieu
lors de l'instrumentation du cautionnement. Au surplus, on ne voit pas quel
principe fondamental régissant la forme authentique s'opposerait, en soi, à
une telle intégration matérielle d'un acte préimprimé à un acte en brevet.

    d) Il reste à déterminer si le mode de procéder choisi par le notaire
et tenu pour conforme au droit cantonal assure, au regard du droit fédéral,
une participation suffisante de l'officier public à l'adoption des clauses
essentielles de l'acte de cautionnement par la caution.

    Sur la base de témoignages, la cour cantonale a retenu en fait que
tout l'acte de cautionnement - formule préimprimée et acte en brevet -
avait été lu aux parties par le notaire. Cette constatation est sans
pertinence pour juger si l'acte du 27 février 1987 respecte les exigences
minimales du droit fédéral en matière de forme authentique. A supposer que
la lecture de l'acte en entier par le notaire soit l'une de ces conditions,
encore faudrait-il que cette opération soit attestée dans l'acte lui-même
pour que la forme authentique soit respectée (arrêt non publié du 31
mai 1994 dans la cause 4C.367/1993, consid. 3a). Or, en l'espèce, la
formule utilisée dans l'acte en brevet - «Dont acte délivré en brevet,
après avoir été lu par le notaire aux comparants...» - atteste uniquement
une lecture de l'acte en brevet par le notaire et n'authentifie en aucune
manière que les clauses préimprimées ont également été lues aux cautions.

    Cela étant, le droit fédéral n'impose pas la lecture par le notaire
des conditions préimprimées, même PIOTET, pourtant critique à l'égard
de la jurisprudence vaudoise, en convient (op.cit. 1996, p. 3). S'il
a rangé la lecture de l'acte parmi les exigences raisonnables que les
cantons pouvaient ériger en éléments essentiels de la forme authentique,
le Tribunal fédéral ne l'a pas qualifiée de condition indispensable
participant de la notion même de forme authentique (arrêt non publié du
26 janvier 1981 dans la cause C 328/80, consid. 2c).

    En définitive, la question est de savoir si la mention, dans l'acte
en brevet, selon laquelle les cautions déclarent accepter les conditions
préimprimées «après [en] avoir pris connaissance» constitue une formule
garantissant une participation suffisante du notaire à l'adhésion de la
caution aux clauses préétablies. En soumettant le cautionnement à la forme
authentique, le législateur fédéral a cherché à préserver la caution de
décisions irréfléchies, à lui faire prendre conscience de la portée de son
engagement et à assurer une expression claire et complète de sa volonté
(ATF 93 II 379 consid. 4b p. 383; 90 II 274 consid. 6 p. 281 ss). Selon
PIOTET, ce but n'est garanti que si, pour le moins, le notaire a donné la
formule préimprimée à lire à la caution et a attesté de cette lecture,
qui doit porter sur chacune des clauses essentielles auxquelles il est
fait renvoi (op.cit. 1996, p. 3). En l'espèce, la formule critiquée par le
demandeur diffère quelque peu puisque le notaire certifie que les cautions
ont pris connaissance du contenu de l'acte préimprimé. Même si elle est
un peu moins précise que celle préconisée par Piotet, la formule utilisée
dans l'acte en brevet suppose que cette lecture silencieuse s'est déroulée
en présence du notaire, comme la cour cantonale le relève à juste titre. On
ne voit pas au surplus que l'officier public doive s'enquérir auprès de la
caution, après la lecture de chaque paragraphe de la formule préimprimée,
si elle en a bien saisi le sens. Dans ces conditions, il faut admettre
que le but de protection de la caution visé par la forme authentique est
suffisamment garanti par la formule choisie en l'occurrence.