Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 124 V 380



124 V 380

65. Arrêt du 12 octobre 1998 dans la cause Caisse publique cantonale
vaudoise de chômage contre T. et Tribunal administratif du canton de
Vaud Regeste

    Art. 31 Abs. 3 lit. a, Art. 95 Abs. 1 und 4 AVIG: Rückforderung von
Kurzarbeitsentschädigungen; Verwirkung. Beginn der einjährigen Frist
für die Rückerstattungsforderung, wenn die betroffenen Arbeitnehmer wegen
ungenügender Überprüfbarkeit der Arbeitszeit nicht entschädigungsberechtigt
waren.

Sachverhalt

    A.- T. exploite une entreprise de chiffonnerie et de récupération, à
V. Ses deux fils travaillent comme employés au service de cette entreprise.

    T. a déposé, les 10 mars 1994, 20 juin 1994 et 20 septembre 1994,
des préavis de réduction d'horaire de travail pour ses deux employés. Ces
derniers ont alors perçu de l'assurance-chômage les indemnités demandées
pour la période du 20 mars au 15 décembre 1994.

    Le 18 octobre 1995, T. a déposé un nouveau préavis de réduction
de l'horaire de travail pour une durée indéterminée. L'Office cantonal
vaudois de l'assurance-chômage a fait partiellement opposition en ce sens
qu'il a autorisé la caisse à ne verser l'indemnité prétendue que jusqu'au
31 décembre 1995 (décision du 26 octobre 1995).

    B.- Le 18 décembre 1995, la Caisse publique cantonale vaudoise
de chômage a demandé à l'employeur de lui communiquer les relevés des
heures travaillées, ainsi que des congés payés et non payés accordés aux
deux salariés intéressés. Le 9 janvier 1996, T. a répondu qu'il ne tenait
aucun registre ou relevé des heures travaillées et des heures chômées. Il
a précisé que le travail prenait fin le matin déjà, vers 11h00 ou 11h30,
en raison de la diminution constante du volume de travail dans le secteur
d'activité de l'entreprise.

    Par décision du 17 janvier 1996, la caisse de chômage a réclamé à
T. la restitution, par 12'423 fr. 50, des indemnités versées de mars à
décembre 1994, au motif qu'il n'était pas en mesure d'établir (par exemple,
par des cartes de timbrage ou des rapports d'activité) un décompte exact
des heures travaillées ou perdues durant cette période.

    Statuant le 29 novembre 1996, l'Office cantonal de l'assurance-chômage
a rejeté le recours formé contre cette décision par T.

    C.- Saisi à son tour d'un recours de l'employeur, le Tribunal
administratif du canton de Vaud l'a admis par jugement du 28 août 1997 et
il a annulé la décision attaquée. Il a retenu que le droit de la caisse
de demander la restitution des indemnités en cause était périmé, parce
que la décision du 17 janvier 1996 avait été rendue plus d'une année
après la date du dernier versement à l'employeur (5 janvier 1995).

    D.- La Caisse publique cantonale vaudoise de chômage interjette un
recours de droit administratif dans lequel elle conclut à l'annulation
de ce jugement et à la confirmation de sa décision de restitution du 17
janvier 1996.

    T. conclut au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral de
l'industrie, des arts et métiers et du travail (OFIAMT; actuellement
l'Office fédéral du développement économique et de l'emploi) propose
de l'admettre.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Selon l'art. 95 al. 1 LACI, la caisse est tenue d'exiger du
bénéficiaire la restitution des prestations de l'assurance auxquelles il
n'avait pas droit. Elle exige de l'employeur la restitution d'indemnités
allouées en cas de réduction de l'horaire de travail ou d'intempéries
quand cette indemnité a été versée à tort.

    Aux termes de l'art. 95 al. 4, première phrase, LACI, le droit de
répétition se prescrit une année après que l'organe qui a payé a eu
connaissance des faits, mais au plus tard cinq ans après le versement de
la prestation. Nonobstant la terminologie légale, il s'agit de délais de
péremption (ATF 122 V 274 consid. 5a et la jurisprudence citée).

    Selon la jurisprudence, le délai de péremption d'une année de
l'art. 95 al. 4 LACI commence à courir dès le moment où la caisse de
chômage aurait dû connaître les faits fondant l'obligation de restituer,
en faisant preuve de l'attention que l'on pouvait raisonnablement exiger
d'elle (ATF 122 V 274 s. consid. 5a). Cette jurisprudence s'inspire des
principes développés à propos de la réglementation analogue figurant
à l'art. 47 al. 2 LAVS (ATF 122 V 275 consid. 5a; SVR 1997 ALV no 84
p. 256 consid. 2c/aa; voir à propos de l'art. 47 al. 2 LAVS: ATF 119 V
433 consid. 3a, 111 V 17 consid. 3). Elle vise un double but, à savoir
obliger l'administration à faire preuve de diligence, d'une part, et
protéger l'assuré au cas où celle-ci manquerait à ce devoir de diligence,
d'autre part. Elle est au demeurant en harmonie avec les principes
développés par le Tribunal fédéral des assurances à propos de l'art. 82
al. 1 RAVS, qui fixe le début du délai d'une année dans lequel la caisse
de compensation doit demander la réparation d'un dommage selon l'art. 52
LAVS dans des termes semblables à ceux figurant à l'art. 47 al. 2 LAVS
(voir, par exemple, ATF 121 V 240 consid. 3c/aa, 118 V 195 s. consid. 3a
et les références citées).

    D'après la jurisprudence rendue à propos de l'art. 47 al. 2 LAVS
(et donc aussi applicable en matière d'assurance-chômage; ATF 122 V
275 consid. 5b/aa), lorsque la restitution est imputable à une faute de
l'administration (par exemple, une erreur de calcul d'une prestation),
on ne saurait considérer comme point de départ du délai le moment où la
faute a été commise, mais bien celui auquel l'administration aurait dû,
dans un deuxième temps (par exemple, à l'occasion d'un contrôle comptable),
se rendre compte de son erreur en faisant preuve de l'attention requise. En
effet, si l'on plaçait le moment de la connaissance du dommage à la date
du versement indu, cela rendrait souvent illusoire la possibilité pour
une administration de réclamer le remboursement de prestations versées
à tort en cas de faute de sa part (ATF 110 V 304).

Erwägung 2

    2.- a) En matière de réduction de l'horaire de travail, le Tribunal
fédéral des assurances a jugé que ces principes ne sauraient sans plus être
transposés à la restitution d'indemnités allouées pour un membre du conseil
d'administration d'une société anonyme travaillant au service de celle-ci.
Etant donné l'effet de publicité de l'inscription au registre du commerce -
à la lecture duquel la qualité de membre du conseil d'administration est
reconnaissable - la caisse de chômage est réputée avoir eu connaissance
d'emblée de l'appartenance du travailleur audit conseil, qui est une
circonstance excluant le droit de l'intéressé à une indemnité en cas de
réduction de l'horaire de travail (cf. art. 31 al. 3 let. c LACI). Dans
cette éventualité, un report du point de départ du délai d'une année au
sens de l'arrêt ATF 110 V 304 n'entre pas en ligne de compte (ATF 122 V
274 ss consid. 5 et les références): le droit de restitution de la caisse
est périmé en ce qui concerne les indemnités versées plus d'un an avant
le prononcé de la décision de restitution (ATF 122 V 276 consid. 5b/bb).

    En l'espèce, la demande de restitution se fonde sur le fait que les
travailleurs concernés n'avaient pas droit à l'indemnité, parce que leur
horaire de travail n'était pas suffisamment contrôlable (art. 31 al. 3 let.
a LACI), situation qui ne relève pas du cas spécial envisagé par cette
jurisprudence. On ne peut donc pas tirer de celle-ci la conclusion que le
droit de la caisse était en l'espèce périmé pour les prestations versées
plus d'une année avant la décision de restitution.

    b) Selon les premiers juges, la caisse aurait dû procéder, tout au
long de la période d'indemnisation, aux vérifications nécessaires sur le
mode de contrôle des heures chômées. Elle aurait pu de cette manière se
rendre compte que les prestations avaient été versées indûment. En rendant
sa décision le 17 janvier 1996, soit plus d'une année après avoir opéré
son dernier versement, elle a agi hors du délai de péremption d'une année.

    La recourante objecte que, pendant de nombreuses années, l'OFIAMT n'a
pas imposé aux organes d'exécution l'obligation de pratiquer des contrôles
systématiques en matière de réduction de l'horaire de travail. Ce n'est
qu'en novembre 1994 qu'il a pris des mesures visant à renforcer la lutte
contre les abus, notamment par l'introduction d'une nouvelle formule dans
laquelle les travailleurs concernés étaient invités à confirmer par leur
signature leur accord sur l'introduction de la réduction de l'horaire
de travail. Aussi bien la caisse conteste-t-elle, en l'espèce, avoir
manqué à son devoir de diligence en ne procédant pas, dès le début, aux
vérifications nécessaires quant au nombre d'heures de travail perdues.
Selon elle, le délai d'une année a commencé à courir en janvier 1996,
au moment où elle a eu connaissance de toutes les circonstances propres
à fonder sa demande de restitution.

    Dans son préavis, l'office fédéral précise à ce propos que les
autorités d'exécution n'avaient pas toujours le temps, ni les moyens
de contrôler toutes les entreprises requérantes d'indemnités en cas de
réduction de l'horaire de travail. Les indemnités étaient ainsi versées
sans excès de formalités; l'administration de l'assurance-chômage exigeait
toutefois des employeurs qu'ils conservent pendant cinq ans les pièces
comptables et les relevés des heures perdues, pour le cas où un contrôle
approfondi serait effectué.

    c) Sur cette base, on peut retenir que l'administration n'était pas
obligée, en vertu d'instructions de l'autorité fédérale de surveillance,
de procéder pour chaque entreprise concernée à des contrôles réguliers
et systématiques. Légalement, elle n'y était pas non plus tenue. De
manière générale, de tels contrôles peuvent s'avérer compliqués,
voire disproportionnés. Ils pourraient aussi retarder le versement des
indemnités, au détriment des intérêts des travailleurs et des employeurs
concernés. Dans son message, le Conseil fédéral souligne d'ailleurs à
cet égard qu'il est pratiquement impossible de vérifier, dans chaque cas
particulier, s'il est ou non nécessaire d'introduire une réduction de
l'horaire de travail dans l'entreprise: cela exigerait la mise sur pied
d'une organisation particulière, avec un personnel nombreux et spécialement
qualifié; un tel examen, au demeurant, ne pourrait souvent pas être achevé
en temps voulu. Aussi bien a-t-on renoncé à donner dans la loi à l'autorité
cantonale compétente le pouvoir de mener des enquêtes dans l'entreprise
déjà au moment du dépôt du préavis de réduction de l'horaire de travail et
de l'examen des conditions dont dépend le droit à l'indemnité (cf. art. 36
LACI). En revanche, note le Conseil fédéral, il peut se révéler utile
de réexaminer certaines situations ultérieurement - c'est-à-dire une
fois versées les indemnités - afin de s'assurer qu'il y a bien eu perte
de travail à l'époque indiquée par l'employeur (message concernant une
nouvelle loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité
en cas d'insolvabilité du 2 juillet 1980, FF 1980 III 529 et 601).

    On conçoit dès lors que l'administration procède seulement à des
contrôles ponctuels ou par sondages, que ce soit en cours de période
d'indemnisation ou après coup seulement. En définitive, c'est à l'employeur
qu'il incombe de communiquer à l'administration, à la demande de celle-ci,
tous les documents et informations nécessaires à un examen approfondi
du droit à l'indemnité, lorsque des doutes apparaissent et qu'un tel
examen se révèle nécessaire. Du point de vue de la sauvegarde du délai
de péremption d'une année, on ne saurait, dans ces conditions, reprocher
à l'administration de n'avoir pas vérifié de manière approfondie - au
moment du dépôt du préavis ou en cours d'indemnisation - si toutes les
conditions du droit à l'indemnité étaient remplies. On ne voit donc pas
de motif de s'écarter, en l'espèce, des principes posés par l'arrêt ATF
110 V 304. Il faut en conséquence considérer, dans ce cas également, que
le début du délai coïncide avec le moment où l'administration, dans un
deuxième temps (par exemple, à l'occasion d'un contrôle ou à réception
d'informations propres à faire naître des doutes sur le bien-fondé de
l'indemnisation), s'aperçoit ou aurait dû s'apercevoir que les indemnités
ont été versées à tort, parce qu'une des conditions légales mises à leur
octroi faisait défaut.

Erwägung 3

    3.- Sur le vu de ce qui précède, il y a lieu d'admettre, dans le cas
particulier, que le délai d'une année a commencé à courir à réception de
la lettre du 9 janvier 1996, par laquelle l'employeur informait la caisse
qu'il ne tenait aucun décompte de la perte de travail pour laquelle il
avait demandé des indemnités. Auparavant, la caisse ne disposait d'aucun
indice ou élément lui permettant d'admettre que l'employeur n'était pas à
même de fournir le relevé des heures de travail prétendument perdues. En
rendant sa décision le 17 janvier 1996, elle a donc agi en temps utile.

    Il convient dès lors d'annuler le jugement attaqué et de renvoyer la
cause au tribunal administratif, afin qu'il examine les questions de fait
et de droit qu'il n'a pas abordées, compte tenu de la solution à laquelle
il est parvenu, et qu'il rende ensuite un nouveau jugement.