Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 124 IV 102



124 IV 102

19. Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation pénale du 3 avril 1998
dans la cause T. contre Procureur général du canton de Genève (pourvoi
en nullité) Regeste

    Art. 140 Ziff. 1 Abs. 1 StGB, Art. 19 f. BetmG; gewaltsame Wegnahme
von Betäubungsmitteln, Raub.

    Der unrechtmässige Erwerb von Betäubungsmitteln begründet kein
rechtlich anerkanntes und geschütztes Eigentumsrecht. Der Raubtatbestand,
der einen Diebstahl voraussetzt, ist ausgeschlossen, wenn die
Betäubungsmittel rechtlich nicht Eigentum eines Dritten sind. Anwendbar
sind somit die Bestimmungen des BetmG, allenfalls in Konkurrenz mit den
Art. 111 ff. oder 180 ff. StGB (E. 2; Bestätigung der Rechtsprechung).

Sachverhalt

    A.- A la fin du mois de juillet 1996, T. a emmené L. et G., en vue
de se procurer de la drogue, au domicile de A., auprès de qui elle se
fournissait régulièrement en héroïne. Elle a présenté ses deux comparses
comme étant des clients potentiels, mettant ainsi A. en confiance. Elle
a ensuite rapidement quitté les lieux, sachant que L. et G. n'avaient
pas assez d'argent pour acheter de l'héroïne et qu'ils étaient décidés à
"braquer" A. Elle a attendu ses deux acolytes dans une voiture, tandis que
ceux-ci, menaçant A. au moyen d'un tournevis d'une vingtaine de centimètres
et d'un couteau suisse à lame pliable, emportaient 8 g d'héroïne, un
montant de 80 fr., ainsi qu'un "gameboy" et un "biper". T. a ensuite
conservé ces objets et partagé l'héroïne avec ses comparses.

    T. a acquis à plusieurs reprises de l'héroïne pour le compte de
tiers, auxquels elle revendait la drogue; il a été établi en particulier
qu'elle avait vendu ainsi à deux reprises un demi-gramme d'héroïne à des
toxicomanes d'Annemasse.

    B.- Par jugement du 14 mars 1997, le Tribunal de police de Genève a
condamné T., pour complicité de brigandage et vente d'un gramme d'héroïne,
à la peine de 4 mois d'emprisonnement avec sursis pendant 3 ans.

    Statuant sur appel de la condamnée, la Chambre pénale de la Cour
de justice, par arrêt du 20 octobre 1997, a confirmé ce jugement. La
cour cantonale a considéré en substance qu'il ne fallait pas suivre la
jurisprudence publiée à l'ATF 122 IV 179 ss et que la soustraction d'un
stupéfiant détenu illicitement pouvait donner lieu à un brigandage.

    C.- T. se pourvoit en nullité à la Cour de cassation pénale du
Tribunal fédéral. Se fondant sur l'ATF 122 IV 179 ss, elle soutient que
la cour cantonale a violé le droit fédéral en qualifiant les faits de
brigandage. Elle conclut à l'annulation de la décision attaquée avec
suite de frais et dépens, sollicitant par ailleurs l'assistance judiciaire.

    Le Procureur général conclut au rejet du pourvoi.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- (Recevabilité).

Erwägung 2

    2.- La recourante a notamment été condamnée pour complicité de
brigandage (art. 25 et 140 CP).

    La cour cantonale s'est référée expressément à l'art. 140 ch. 1 al. 1
CP, selon lequel se rend coupable de brigandage "celui qui aura commis un
vol en usant de violence à l'égard d'une personne, en la menaçant d'un
danger imminent pour la vie ou l'intégrité corporelle ou en la mettant
hors d'état de résister".

    Dans le droit actuel, le brigandage n'est consommé que si le vol a été
commis (FF 1991 II 971). Le brigandage est une forme aggravée du vol qui se
caractérise par les moyens que l'auteur a employés (CORBOZ, Les principales
infractions, art. 140 CP no 2; SCHUBARTH, Kommentar zum schweizerischen
Strafrecht, art. 139 CP no 8; GRAVEN, L'infraction pénale punissable,
2ème éd. Berne 1995, p. 84 no 52 let. B; Stratenwerth, Bes. Teil I,
5ème éd. Berne 1995, par. 13 no 112; REHBERG/SCHMID, Strafrecht III, 7ème
éd. Zurich 1997, p. 122). Pour retenir la qualification de brigandage,
il faut donc que les éléments du vol soient réunis.

    Selon l'art. 139 ch. 1 CP, commet un vol "celui qui, pour se
procurer ou procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura
soustrait une chose mobilière appartenant à autrui dans le but de se
l'approprier". L'infraction doit donc avoir pour objet "une chose mobilière
appartenant à autrui". S'agissant d'une infraction contre le patrimoine,
la formule "appartenant à autrui" doit être comprise en ce sens que la
chose doit être dans la propriété d'autrui.

    Des stupéfiants peuvent appartenir par exemple à un pharmacien,
qui les aura acquis de manière licite. Il ne ressort cependant pas des
constatations cantonales que, dans le cas d'espèce, la drogue ait été
précédemment acquise de manière licite, de sorte que cette hypothèse peut
être écartée.

    Hormis les cas particuliers prévus par la loi (cf. art. 4 al. 1, 5
al. 1, 7 al. 1, 8 al. 5, 9 à 14a de la loi fédérale sur les stupéfiants
[LStup; RS 812.121]; art. 5 ss de l'ordonnance sur les stupéfiants [OStup;
RS 812.121.1]), l'acquisition et même la détention des stupéfiants
est interdite (art. 8 al. 1 LStup) et punissable (art. 19 ch. 1 al. 5
LStup). Dans cette mesure, la drogue est une chose hors commerce en
raison de son caractère dangereux pour la santé. Celui qui transgresse
l'interdiction peut se voir confisquer la drogue en tout temps, sans
aucune indemnité (art. 58 CP); il ne saurait s'y opposer en invoquant
l'art. 22ter al. 3 Cst. La jurisprudence en a déduit que l'acquisition
illicite de stupéfiants ne fonde pas un droit de propriété juridiquement
reconnu et protégé (ATF 122 IV 179 ss consid. 2c et d p. 182 ss).

    Il est vrai que cette jurisprudence a suscité des critiques dans
la doctrine (cf. KURT SEELMANN, Kein Diebstahl an Betäubungsmitteln
möglich? in Recht 15, 1/1997 p. 35 ss; DANIEL STOLL in JdT 1997 IV
p. 141). Les arguments de ces auteurs et de la cour cantonale n'apportent
cependant rien qui n'ait pas été pris en compte lors de l'adoption de
l'arrêt de principe publié à l'ATF 122 IV 179 ss.

    Contrairement à ce que soutient la cour cantonale, cette jurisprudence
ne crée pas une exigence extralégale concernant la personne du lésé;
il ne s'agit que d'interpréter les termes mêmes de la loi, à savoir
les mots "appartenant à autrui". L'idée que le droit pénal pourrait
protéger un patrimoine que le droit civil ne protège pas n'emporte
pas la conviction, parce qu'elle introduit même une contradiction à
l'intérieur du droit pénal, qui protégerait une acquisition qu'il réprime
par ailleurs et soumet à confiscation. Sous l'angle de l'ordre public,
il faut rappeler que l'acquisition de stupéfiants est punissable en
application de l'art. 19 ch. 1 LStup. Si elle donne lieu à une infraction
contre la vie ou l'intégrité corporelle ou à une infraction contre la
liberté, les art. 111 ss CP, respectivement les art. 180 ss CP, sont
également applicables. En l'occurrence, la contrainte (art. 181 CP)
pouvait manifestement être retenue en concours.

    La cour cantonale aurait aussi pu se demander si la recourante n'avait
pas joué un rôle de courtier (art. 19 ch. 1 al. 4 LStup; cf. ATF 118 IV
403 s. consid. 2a) ou à tout le moins de complice dans l'acquisition
illicite des stupéfiants (art. 25 CP et 19 ch. 1 al. 5 LStup).

    La cour cantonale a cependant violé le droit fédéral en retenant la
qualification de brigandage, alors que celle-ci suppose un vol et qu'il
n'est pas établi en l'espèce que cette drogue ait juridiquement appartenu
à autrui, qu'il s'agisse du détenteur ou d'un tiers.

    D'autres objets ont été simultanément soustraits, qui étaient
susceptibles d'appropriation privée et dont on doit admettre qu'ils
appartenaient à autrui; qu'ils soient ou non de faible valeur est sans
importance, puisque l'art. 172ter al. 1 CP ne s'applique pas au brigandage
(art. 172ter al. 2 CP). Il ne ressort cependant pas des constatations
cantonales que la recourante savait, au moment où elle a mis les auteurs
principaux en contact avec le lésé, que de tels objets seraient dérobés;
on ne peut donc pas dire que la qualification de complicité de brigandage
était de toute manière justifiée en raison de ces autres objets.

    Le Tribunal fédéral admet le pourvoi, dit que la décision attaquée
doit être annulée et la cause renvoyée à l'autorité cantonale pour qu'il
soit statué à nouveau (art. 277ter al. 1 PPF).

Erwägung 3

    3.- (Suite de frais)