Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 124 II 543



124 II 543

53. Extrait de l'arrêt de la Ie Cour de droit public du 23 septembre 1998
dans la cause Etat de Genève contre hoirie de V.H. et Commission fédérale
d'estimation du 1er arrondissement (recours de droit administratif) Regeste

    Formelle Enteignung der Rechte von Flughafen-Nachbarn auf Schutz vor
Lärmimmissionen und vor Überflug; Verjährung der Entschädigungsansprüche.

    Teilentscheid über die Frage der Verjährung (E. 1).

    Grundlagen der Entschädigungsansprüche von Flughafen-Nachbarn
für Lärmimmissionen und Überflug im formellen Enteignungsverfahren;
Zusammenfassung der Rechtsprechung (E. 3).

    Bei formeller Enteignung der Rechte, welche die Nachbarn eines
öffentlichen Werkes vor Lärmimmissionen und vor überflug schützen, gilt
grundsätzlich eine Verjährungsfrist von fünf Jahren ab Entstehung des
Entschädigungsanspruchs (E. 4).

    Festlegung des Beginns des Fristenlaufes bei Entschädigungsansprüchen
für Lärmimmissionen im Hinblick auf die Voraussetzung der Spezialität
(E. 5a). Angesichts der verschiedenen Verfahren - formelles
Enteignungsverfahren, Entschädigungsverfahren für materielle Enteignung
infolge des Lärmzonenplans -, die im Zusammenhang mit dem Betrieb
des internationalen Flughafens Genf eröffnet worden sind, drängt sich
eine Sonderlösung für die Bestimmung des Fristablaufes auf (E. 5b-c);
übernahme dieser Lösung für den Entschädingungstatbestand des überflugs
(E. 5d). Missbräuchliche Anrufung der Verjährung (E. 7)?

    Der Zusprechung einer Entschädigung an die Nachbarn gestützt auf
das Bundesgesetz über die Enteignung stehen im vorliegenden Fall die
Bestimmungen des eidgenössischen Umweltschutzrechts nicht entgegen (E. 6).

Sachverhalt

    Les membres de l'hoirie de V.H. sont propriétaires en commun d'une
parcelle bâtie - une villa et deux garages - sur le territoire de la
commune de Bellevue, à proximité de l'Aéroport international de Genève.
L'administration des biens successoraux a été confiée à un exécuteur
testamentaire. Le 31 août 1992, ce dernier s'est adressé au Département
des travaux publics du canton de Genève (actuellement: Département de
l'aménagement, de l'équipement et du logement - ci-après: le département
cantonal) en demandant à l'Etat de Genève de lui payer une "indemnité pour
expropriation au sens de l'art. 44 LNA" de 784'700 fr. ou, subsidiairement,
de transmettre cette demande à la Commission fédérale d'estimation du 1er
arrondissement. Il invoquait les nuisances causées par l'exploitation de
l'Aéroport international de Genève ainsi que les restrictions découlant
du classement de la parcelle dans les zones A et B du plan des zones de
bruit de cet aéroport, entré en vigueur le 2 septembre 1987.

    Par lettre du 8 septembre 1992 adressée au Conseil d'Etat, le
Département fédéral des transports, des communications et de l'énergie
(actuellement: Département fédéral de l'environnement, des transports,
de l'énergie et de la communication - ci-après: le département fédéral)
a conféré à l'Etat de Genève le droit d'expropriation en relation avec les
nuisances auxquelles cette parcelle est exposée, et il a invité ce canton
à faire ouvrir, par le Président de la Commission fédérale d'estimation
compétente, une «procédure d'expropriation destinée uniquement à statuer
sur les prétentions à indemnités». Cette procédure n'a pas été ouverte
immédiatement. En effet, le 11 décembre 1992, le conseiller d'Etat chargé
du département cantonal a écrit au représentant de l'hoirie pour lui
proposer une suspension de la procédure jusqu'à ce que soient jugées des
causes connexes, pendantes devant le Tribunal fédéral. Sa lettre précisait
notamment: «Il est bien entendu que cette suspension n'entraînera pas
la prescription de votre demande, mais vise uniquement à prévenir une
multitude de procédures coûteuses, lesquelles pourraient être évitées selon
les décisions rendues par le Tribunal fédéral, qui feront jurisprudence
dans un sens ou dans l'autre». L'exécuteur testamentaire a écarté cette
proposition et il a demandé que la cause soit jugée rapidement. Le dossier
du département cantonal a été remis au président de la Commission fédérale
d'estimation du 1er arrondissement le 4 juin 1993.

    L'audience de conciliation, avec inspection locale, a eu lieu le
20 septembre 1994. L'instruction de la cause a ensuite été suspendue,
dans l'attente des arrêts du Tribunal fédéral dans d'autres affaires
concernant les nuisances ou les restrictions liées à l'exploitation de
l'Aéroport international de Genève (cf. notamment arrêt du 12 juillet
1995 publié aux ATF 121 II 317 [second arrêt Jeanneret]; décision du 10
octobre 1995 publiée aux ATF 121 II 350; arrêts du 24 juin 1996 publiés
aux ATF 122 II 337 et 349). L'instruction ayant été reprise, l'exécuteur
testamentaire a précisé, le 27 février 1998, les prétentions de l'hoirie:

    - 233'000 fr. en raison de la dévaluation de l'immeuble due au bruit
   (expropriation formelle);

    - 215'000 fr. en raison de la dévaluation due au survol (expropriation
   formelle);

    - 233'000 fr. pour expropriation matérielle;

    - 200'000 fr. en raison de l'atteinte au droit et au respect de la vie
   privée (art. 8 CEDH).

    Par écriture du 23 mars 1998, le département cantonal a invoqué la
prescription de ces prétentions, parce qu'elle n'ont été annoncées que
le 31 août 1992, alors qu'elles auraient dû l'être dans un délai de cinq
ans dès l'automne 1985.

    La Commission fédérale d'estimation a rendu sa décision le 28 avril
1998. Elle a écarté l'exception de prescription, qu'elle a considéré comme
tardive et au surplus mal fondée, car la prescription n'aurait pas commencé
à courir avant le 12 juillet 1995; elle a condamné l'Etat de Genève à
payer à l'hoirie une indemnité d'expropriation se montant globalement à
272'340 fr., avec intérêts au taux usuel dès le 1er janvier 1985.

    Agissant par la voie du recours de droit administratif, l'Etat de
Genève a demandé au Tribunal fédéral d'annuler la décision de la Commission
fédérale d'estimation. Il a fait valoir que cette autorité n'était pas
fondée à rejeter l'exception de prescription et, à titre subsidiaire,
il a soutenu que les conditions à l'octroi d'une indemnité en raison
des nuisances provoquées par l'exploitation de l'aéroport n'étaient pas
remplies. Le Tribunal fédéral a rendu un jugement partiel sur la question
de la prescription: il a rejeté le recours de droit administratif en tant
qu'il contestait le rejet, par la Commission fédérale d'estimation du
1er arrondissement, de l'exception de prescription soulevée par l'Etat
de Genève, et il a ordonné la poursuite de l'instruction sur le fond.

Auszug aus den Erwägungen:

                   Extrait des considérants:

Erwägung 1

    1.- a)  L'Etat de Genève, concessionnaire et exploitant de l'Aéroport
international de Genève jusqu'au 1er janvier 1994, s'est vu conférer le
droit d'expropriation dans la présente affaire par une décision prise
le 8 septembre 1992 par l'autorité fédérale compétente. Dans cette
procédure devant le Tribunal fédéral, l'Etat de Genève - au demeurant
toujours propriétaire du terrain sur lequel se trouve l'aéroport - doit
être considéré comme l'expropriant, ce qu'il ne conteste du reste pas;
il a donc qualité pour recourir (art. 78 al. 1 LEx [RS 711]; cf. consid. 2
non publié de l'arrêt publié aux ATF 121 II 317).

    b) Il se justifie de rendre à ce stade un jugement partiel sur la
question de la prescription. Cette question de principe doit également
être résolue dans un autre cas actuellement soumis au Tribunal fédéral
et il ressort du dossier qu'elle pourrait aussi se poser dans plusieurs
affaires concernant les nuisances de l'Aéroport international de Genève,
pendantes devant la Commission fédérale d'estimation ou actuellement
encore traitées - quand bien même les procédures ont été introduites,
pour certaines d'entre elles, il y a plusieurs années - par le département
cantonal, dans l'attente d'une saisine de cette commission. Si la question
de la prescription est d'emblée examinée par le Tribunal fédéral, par
ailleurs autorité de surveillance des commissions d'estimation (art. 63
LEx), cela peut être de nature à accélérer le traitement de ces différentes
procédures.

Erwägung 2

    2.-  Par la décision attaquée, la Commission fédérale d'estimation a
octroyé aux intimés, à la charge de l'Etat de Genève, une indemnité pour
"l'expropriation formelle des droits de voisinage (immissions)", arrêtée
à 143'340 fr., et une indemnité de 120'000 fr. en raison du survol de
la parcelle par les avions en phases d'atterrissage ou de décollage. Ces
deux montants forment ensemble une indemnité d'expropriation formelle au
sens des art. 16 ss LEx.

    La Commission fédérale d'estimation a refusé d'allouer aux intimés
une indemnité pour expropriation matérielle au sens de l'art. 44 de la
loi fédérale sur l'aviation (LA [RS 748.0] -- anciennement: loi fédérale
sur la navigation aérienne, LNA). Elle s'est fondée à ce propos sur la
jurisprudence établie dans d'autres affaires concernant le même aéroport
(cf. ATF 121 II 317 consid. 12 p. 343 ss; 122 II 17 consid. 7). Le
Tribunal fédéral n'a aucun motif de remettre en cause sa jurisprudence
sur la signification de l'expropriation matérielle dans ce domaine;
il n'a d'ailleurs pas à revoir la décision attaquée sur ce point, en
l'absence d'un recours de droit administratif principal ou d'un recours
joint des expropriés.

    Au sujet de la réparation réclamée en raison de l'ingérence de
l'autorité publique cantonale dans l'exercice du droit au respect de la
vie privée, la Commission a considéré que l'art. 8 CEDH ne constituait pas
en l'occurrence le fondement d'une indemnité distincte ou supplémentaire
(cf. ATF 121 II 317 consid. 5c p. 333); à défaut de recours des expropriés,
ce point n'est pas non plus litigieux.

    En conséquence, il y a lieu de se prononcer exclusivement sur la
prescription des prétentions pour expropriation formelle.

Erwägung 3

    3.-  a) En vertu de l'art. 5 LEx, les droits résultant des dispositions
du code civil sur la propriété foncière en matière de rapports de voisinage
peuvent faire l'objet d'une expropriation et être supprimés ou restreints
temporairement ou définitivement. Cela s'applique en particulier au droit
du propriétaire de se défendre contre les immissions excessives ayant leur
origine sur un fonds voisin (art. 684 CC). Dès lors, si les immissions
proviennent de l'utilisation, conforme à sa destination, d'un ouvrage
d'intérêt public pour la réalisation duquel la collectivité disposait
du droit d'expropriation, le voisin ne peut pas exercer les actions
du droit privé, à raison du trouble ou en responsabilité, prévues à
l'art. 679 CC. La prétention en versement d'une indemnité d'expropriation
se substitue à ces actions et il appartient non plus au juge civil, mais
au juge de l'expropriation de statuer sur l'existence du droit ainsi que
sur la nature et le montant de l'indemnité (ATF 123 II 481 consid. 7a;
121 II 317 consid. 4; 120 Ib 76 consid. 5a; 119 Ib 348 consid. 4b; 106
Ib 241 consid. 3 et les arrêts cités).

    b) Le propriétaire foncier a en principe, en vertu de l'art. 667 al. 1
CC, le droit de s'opposer aux ingérences de tiers dans l'espace aérien sur
son fonds lorsqu'elles provoquent des atteintes ou des désagréments. Le
propriétaire d'un fonds voisin d'un champ d'aviation privé dispose des
actions de l'art. 679 CC à l'encontre du propriétaire de l'aérodrome
lorsqu'à l'atterrissage ou au décollage, les aéronefs suivent une route
traversant cet espace (survol). En revanche, le voisin d'un aérodrome
public au bénéfice d'une concession (aéroport) ne peut pas exercer les
actions du droit privé pour faire cesser les atteintes; la prétention en
versement d'une indemnité d'expropriation se substitue à ces actions,
à l'instar de ce qui est prévu en cas d'immissions de bruit excessives
(ATF 122 II 349 consid. 4b; cf. également ATF 123 II 481 consid. 8).

    c)  Il ne se justifie pas de réexaminer le fondement de cette
jurisprudence qui, dans les deux domaines précités - immissions excessives
(cf. art. 684 CC) et survol (cf. art. 667 al. 1 CC) - a pour résultat
d'enlever aux propriétaires dont les biens-fonds se trouvent à proximité
d'un aérodrome public les moyens de défense du droit privé. Les règles
applicables à ce propos ont été énoncées récemment par le Tribunal
fédéral, dans un arrêt de principe se référant à une pratique constante
en matière de routes nationales et de chemins de fer (ATF 121 II 317
consid. 4-8). Cette jurisprudence vient en outre d'être confirmée (ATF 123
II 481 consid. 7). Cela étant, dans les deux cas - immissions excessives
ou survol -, la question de la prescription des prétentions se pose a
priori de façon analogue.

Erwägung 4

    4.- a)  Dans le cas particulier - comme dans d'autres cas où
des voisins de l'Aéroport international de Genève ont demandé à être
indemnisés en raison des nuisances dues au trafic aérien -, le droit
d'expropriation n'a été conféré à l'Etat de Genève, par une décision
spéciale du département fédéral, qu'en relation avec les prétentions des
propriétaires de la parcelle concernée. L'Etat de Genève n'avait en effet
pas requis, préalablement et indépendamment de l'annonce de prétentions
par des propriétaires voisins, l'ouverture d'une ou plusieurs procédures
d'expropriation pour l'acquisition de tous les droits nécessaires à
la construction, à l'agrandissement ou à l'exploitation de l'aéroport
(cf. ATF 121 II 350 consid. 6b).

    La question litigieuse n'est pas de savoir si, après que la procédure
d'expropriation a été engagée, les demandes d'indemnité ont été produites
par les intéressés dans les délais prescrits aux art. 36 et 41 LEx (délais
de péremption, qui n'entrent pas en considération dans le cas présent -
cf. ATF 119 Ib 334 consid. 2c et les arrêts cités), mais bien de savoir
si l'ouverture de la procédure d'expropriation a été demandée en temps
utile par les membres de l'hoirie ou l'exécuteur testamentaire. La
jurisprudence prévoit en effet que, quand un propriétaire voisin d'un
ouvrage d'utilité publique prétend à une indemnisation selon la loi
fédérale sur l'expropriation parce qu'il ne dispose plus des actions de
l'art. 679 CC, et qu'il n'y a eu - comme en l'espèce - ni avis publics ni
avis personnels l'invitant à produire ses prétentions (art. 30 à 35 LEx),
ce propriétaire doit demander qu'une procédure d'expropriation soit ouverte
à la requête de la collectivité publique à qui incombe la réalisation
ou l'exploitation de l'ouvrage, si elle est déjà au bénéfice du droit
d'expropriation, ou il doit alors s'adresser à l'autorité compétente
pour conférer un tel droit, afin qu'elle astreigne la collectivité à
en faire usage. Un refus de mettre en oeuvre cette procédure doit être
signifié sous la forme d'une décision pouvant faire l'objet d'un recours,
le cas échéant devant le Tribunal fédéral en dernière instance (ATF 116 Ib
249 consid. 1; 110 Ib 368 consid. 1; cf. aussi ATF 119 Ib 348 consid. 2;
105 Ib 6 consid. 3 p. 11; HEINZ HESS/HEINRICH WEIBEL, Das Enteignungsrecht
des Bundes, Berne 1986, vol. I, p. 361/362).

    En demandant, en pareil cas, l'ouverture d'une procédure
d'expropriation par la collectivité, le propriétaire invoque des
prétentions de droit public. Ces prétentions sont soumises en principe à la
prescription, même en l'absence de disposition légale expresse (ATF 105 Ib
6 consid. 3a). Le Tribunal fédéral a établi des règles à ce propos (faisant
acte, en quelque sorte, de législateur - cf. art. 1er al. 2 in fine CC)
dans un arrêt Brandenberger du 21 février 1979, en relation avec les
immissions de bruit excessives provoquées par l'exploitation d'une route
nationale: il a fixé à cinq ans la durée du délai de prescription et il a
dit que son point de départ était la date de la naissance de la prétention
à indemnité (ATF 105 Ib 6 consid. 3c-d). L'arrêt de principe posant ces
règles a été confirmé par la suite (cf. ATF 120 Ib 76 consid. 5a; 116 Ib
11 consid. 2b/ee, 249 consid. 2d; 108 Ib 485; cf. également ATF 116 Ia
46). Il n'y a aucun motif de renoncer à appliquer ces règles lorsque
les prétentions sont liées à l'exploitation d'un aérodrome public,
puisque l'indemnisation des propriétaires voisins, selon la loi fédérale
sur l'expropriation, n'est normalement pas soumise à des conditions
différentes de celles s'appliquant en matière de routes nationales et
de chemins de fer (ATF 121 II 317 consid. 5b). En particulier, il ne se
justifie pas de fixer un délai de prescription plus long. Le délai de
cinq ans est du reste souvent appliqué, en l'absence de réglementation
spéciale, à la prescription des créances de droit public (ATF 122 II 26
consid. 5; cf. consid. 2 non publié de l'arrêt publié aux ATF 108 Ib 485;
cf. également ATTILIO R. GADOLA, Verjährung und Verwirkung im öffentlichen
Recht, AJP/PJA 1995 p. 51/52).

    La naissance des prétentions à indemnité ne dépend en principe pas
de la connaissance qu'a le propriétaire voisin concerné de l'existence
de son droit; le point de départ du délai de prescription de cinq ans
est donc fixé de manière objective (cf. notamment à ce propos, pour la
prescription des créances de droit privé, ATF 118 II 447 consid. 2b;
106 II 134 consid. 2).

    b) Le délai de prescription est interrompu quand le propriétaire
concerné s'adresse - conformément à ce que prévoit la jurisprudence
(supra, consid. 4a) - à la collectivité publique titulaire du droit
d'expropriation, ou à l'autorité compétente pour conférer un tel droit,
afin de demander l'ouverture d'une procédure d'expropriation et d'annoncer
le cas échéant ses prétentions. Il intervient ainsi formellement, pour
la première fois, devant une autorité en vue de faire valoir ses droits
dans une procédure d'expropriation (cf. GADOLA, op.cit., p. 54; cf. aussi,
par analogie, art. 135 ch. 2 CO et ATF 118 II 479 consid. 3).

    En l'occurrence, la lettre du 31 août 1992 de l'exécuteur testamentaire
au département cantonal doit être considérée comme un acte propre à
interrompre la prescription; ce n'est du reste pas discuté dans le
présent recours de droit administratif. Encore fallait-il que le délai
quinquennal ne fût pas déjà échu à cette date-là, ou en d'autres termes
que la prescription ne fût pas déjà acquise. Or c'est précisément ce que
soutient l'Etat de Genève dans son recours de droit administratif.

Erwägung 5

    5.-  a)  La naissance de la prétention à indemnité en raison
d'immissions de bruit excessives (cf. art. 684 CC), point de départ du
délai de prescription (cf. supra, consid. 4a), correspond en principe au
moment à partir duquel sont remplies, cumulativement, les trois conditions
mises par la jurisprudence à l'octroi d'une indemnité d'expropriation,
à savoir l'imprévisibilité, la spécialité et la gravité (cf. ATF 123
II 481 consid. 7a; 121 II 317 consid. 5b; 119 Ib 348 consid. 4b et les
arrêts cités).

    Selon la jurisprudence, les propriétaires voisins de l'Aéroport
international de Genève peuvent se prévaloir de l'imprévisibilité si
eux-mêmes - ou une personne à laquelle ils ont succédé - ont acquis
l'immeuble litigieux avant le 1er janvier 1961 (ATF 121 II 317 consid. 5a
et 6b). En l'espèce, la parcelle litigieuse a été achetée par feu V.H.,
dont les intimés sont les héritiers, en 1953. La première condition est
donc remplie.

    La deuxième condition, celle de la spécialité, n'était manifestement
pas encore remplie à la date de l'acquisition de l'immeuble par feu V.H. ni
au 1er janvier 1961. Elle l'a été à une date ultérieure, à savoir dès le
moment où les nuisances ont atteint une intensité excédant le seuil de ce
qui est usuel et tolérable; selon la jurisprudence, on doit se fonder à
ce propos sur les valeurs limites d'immission de la législation fédérale
sur la protection de l'environnement (valeurs limites déjà fixées par le
Conseil fédéral ou proposées par des experts dans le cadre de l'élaboration
de nouvelles prescriptions fédérales - cf. ATF 123 II 481 consid. 7c;
121 II 317 consid. 8c/aa; 119 Ib 348 consid. 5b). En cas de construction
d'une nouvelle installation publique (route nationale, voie de chemin de
fer, etc.), la condition de la spécialité peut être remplie dès la mise
en service de l'ouvrage ou son ouverture au trafic; la naissance des
prétentions est alors une conséquence directe de cette mise en service
(cf. ATF 108 Ib 485 consid. 3a). Dans d'autres cas, le dépassement des
valeurs limites d'immission ne se produit pas d'emblée, mais il est la
conséquence d'une augmentation du trafic ou d'une modification du mode
d'exploitation. Il faut alors déterminer, dans chaque situation concrète,
le moment à partir duquel la condition de la spécialité est remplie. Il
en va ainsi dans le cas de l'Aéroport international de Genève (cf. infra,
consid. 5b-5c).

    La condition de la gravité n'entre pas en considération pour
déterminer le moment de la naissance des prétentions à indemnité. Cette
troisième condition se rapporte au préjudice subi par le propriétaire
concerné en raison des immissions, une atteinte peu grave devant, selon
la jurisprudence, être supportée sans indemnité (cf. ATF 123 II 481
consid. 7d; 121 II 317 consid. 7; 119 Ib 348 consid. 5c et les arrêts
cités). C'est donc, en définitive, la condition de la spécialité qui
est décisive pour fixer le point de départ du délai de prescription de
cinq ans.

    b) aa)  Le Tribunal fédéral a déjà considéré, dans une décision du 10
octobre 1995 concernant l'Aéroport international de Genève, qu'il n'était
pas possible de déterminer avec précision le moment à partir duquel les
immissions provoquées par l'exploitation étaient devenues excessives;
il s'est demandé si la condition de la spécialité était déjà remplie au
cours des années 1960, voire au début des années 1970 (ATF 121 II 350
consid. 6b). La question traitée dans cette décision était celle de la
«prise de possession anticipée», par l'Etat de Genève, des droits de
propriétaires voisins de se défendre contre les immissions excessives,
car de cela dépendait la fixation du "dies aestimandi" pour l'indemnité
d'expropriation ainsi que du jour dès lequel cette indemnité portait
intérêt (ATF 121 II 350 consid. 5e et 6).

    En principe, les mêmes critères s'appliquent à la détermination du
jour de la "prise de possession anticipée", indépendante en l'occurrence
d'une décision de l'expropriant, d'une part, et à celle de la date de
la naissance des prétentions à indemnité, point de départ du délai de
prescription, d'autre part. Dans les deux cas, il s'agit du moment à
partir duquel la condition de la spécialité est remplie. En l'état,
le Tribunal fédéral ne dispose pas d'éléments concrets nouveaux qui lui
permettraient de fixer cette date de façon plus précise.

    bb)  Dans la décision précitée du 10 octobre 1995, le Tribunal fédéral
a tenu compte, pour fixer le "dies aestimandi", des particularités des
procédures ouvertes en vue de l'indemnisation éventuelle des voisins
de l'Aéroport international de Genève: il a retenu une date - ou une
période - unique pour toutes les causes dont il avait alors à connaître,
et il a choisi l'automne 1985 (ATF 121 II 350 consid. 6d). Il n'aurait
en effet pas été concevable de retenir une date antérieure à celle de
l'arrêt du Tribunal fédéral du 3 octobre 1984 (premier arrêt Jeanneret,
ATF 110 Ib 368) obligeant le canton de Genève à demander l'ouverture de
procédures d'expropriation permettant aux propriétaires touchés de faire
valoir leurs prétentions, quand bien même la condition de la spécialité
était déjà manifestement remplie auparavant.

    Si l'on avait à déterminer le "dies aestimandi" dans la présente
affaire (au cas où une indemnité d'expropriation serait due, ce qui n'a
pas à être décidé dans le présent jugement partiel), les mêmes règles
pourraient s'appliquer: la parcelle des intimés se situe à proximité
directe d'un des biens-fonds au sujet desquels le Tribunal fédéral s'est
prononcé en 1995 (parcelle de l'hoirie H., cf. ATF 121 II 317 p. 323)
et elle est exposée à des immissions de bruit semblables (à propos de
l'intensité de ces immissions, cf. ATF 121 II 317 consid. 8c/cc). En
automne 1985, ces immissions étaient donc déjà suffisamment intenses,
au regard de la condition de la spécialité.

    c)  aa) Pour des raisons pratiques ou d'opportunité - notamment pour
tenir compte de la difficulté à déterminer le moment à partir duquel les
immissions de bruit de l'aéroport sont devenues excessives -, on pourrait
aussi choisir la fin de l'automne 1985 comme point de départ du délai
de prescription dans le cas particulier. Sur cette base, on pourrait
donc considérer comme prescrites les prétentions annoncées à l'autorité
fédérale ou cantonale à partir du 1er janvier 1991. Il n'y a cependant
pas lieu d'examiner plus avant la question de la détermination du point
de départ du délai de prescription selon les règles posées dans l'arrêt
Brandenberger (fin 1985 ou auparavant), car d'autres éléments objectifs,
liés aux particularités de la procédure par laquelle les propriétaires
voisins de l'Aéroport de Genève ont été admis à faire valoir leurs droits,
doivent aussi être pris en considération. Dans sa décision du 10 octobre
1995, le Tribunal fédéral s'était du reste également fondé sur de tels
éléments pour déterminer le "dies aestimandi" et le point de départ des
intérêts (cf. ATF 121 II 350 consid. 6d).

    Cela étant, l'enjeu, pour les expropriés, de la détermination du
"dies aestimandi", ainsi que celle du moment à partir duquel les intérêts
sont dus, n'est pas le même que celui lié au choix du point de départ
du délai de prescription. La solution élaborée par le Tribunal fédéral
dans sa décision du 10 octobre 1995 permettait, dans une certaine mesure,
de compenser par le versement d'intérêts la perte résultant du choix d'un
"dies aestimandi" relativement ancien et en tout cas antérieur à la date à
laquelle les propriétaires concernés avaient été invités à présenter leurs
prétentions au juge de l'expropriation (ATF 121 II 350 consid. 6d). En
revanche, la conséquence d'une inobservation du délai de prescription
est rigoureuse, puisqu'elle entraîne en principe le rejet pur et simple
des prétentions des expropriés.

    bb)  Au moment où les immissions de bruit sont devenues excessives,
on ne pouvait attendre des propriétaires voisins de l'Aéroport
international de Genève qu'ils connussent, même en faisant preuve de
la diligence nécessaire, la procédure suivant laquelle ils devaient
faire valoir leurs prétentions. Il était clair que la juridiction civile
n'était pas compétente et qu'il convenait d'agir devant une juridiction
administrative, cantonale ou fédérale. Une procédure selon la loi fédérale
sur l'expropriation pouvait entrer en considération, mais les intéressés
pouvaient alors escompter un avis de la collectivité publique, la procédure
d'estimation n'étant en principe ouverte qu'à la requête de l'expropriant
(cf. ATF 119 Ib 334 consid. 2a; 116 Ib 249 consid. 1a). En réalité,
aucune procédure d'expropriation formelle n'a été ouverte d'office et il
a fallu attendre plusieurs années, depuis la mise en service des avions
les plus bruyants et le développement sensible du trafic aérien, pour
que la situation juridique devienne plus claire.

    L'arrêt rendu par le Tribunal fédéral le 3 octobre 1984 dans la
cause Jeanneret (ATF 110 Ib 368, premier arrêt Jeanneret) constitue
un premier élément déterminant dans le sens d'une clarification de la
situation. Auparavant, les prises de position des autorités cantonales
et de l'administration fédérale sur des demandes d'indemnité de certains
propriétaires avaient pu créer une certaine confusion, en l'absence
aussi de jurisprudence fédérale (cf. notamment, à propos des refus de
différentes autorités d'ouvrir une procédure permettant une indemnisation
de propriétaires voisins de l'aéroport, ATF 110 Ib 368 p. 369/370). Par
ce premier arrêt Jeanneret, le Tribunal fédéral a énoncé de façon
non équivoque le principe selon lequel la possibilité de faire ouvrir
une procédure en expropriation matérielle pour les restrictions à la
propriété découlant du plan des zones de sécurité ou du plan des zones
de bruit d'un aéroport, voie prévue depuis 1974 dans la loi fédérale sur
la navigation aérienne (art. 44 LA), ne supprimait pas la possibilité
pour les propriétaires de demander, le cas échéant, l'ouverture d'une
procédure en expropriation formelle afin d'obtenir le versement d'une
indemnité selon les règles rappelées au consid. 3 ci-dessus (ATF 110 Ib 368
consid. 2d-e). Or, avant cet arrêt, l'Etat de Genève soutenait que cette
dernière voie n'était pas ouverte (cf. ATF 110 Ib 368 consid. 2 p. 372).

    cc)  L'injonction donnée ainsi par le Tribunal fédéral aux autorités
cantonales d'ouvrir le cas échéant des procédures d'expropriation formelle
n'est toutefois pas le seul élément déterminant, car la dualité des
voies disponibles pour demander une indemnité - expropriation formelle et
expropriation matérielle - ne permettait pas aux propriétaires concernés
de choisir d'emblée la procédure adéquate. A cela s'ajoute que le
délai imparti aux propriétaires pour faire valoir leurs prétentions en
expropriation matérielle a commencé à courir, dans le cas de l'Aéroport
international de Genève, peu après que le premier arrêt Jeanneret a été
publié (cet arrêt, notifié aux parties en février 1985, a été publié dans
un fascicule du recueil officiel paru au début de l'année 1986).

    En effet, l'art. 44 LA, qui règle la procédure concernant
l'expropriation matérielle liée à l'adoption des plans des zones de bruit
ou de sécurité des aéroports, dispose que l'intéressé doit faire valoir
ses prétentions dans les cinq années qui suivent la publication du plan
(al. 3). La publication, au sens de cette disposition, n'est pas celle du
projet de plan (projet "déposé publiquement" dans les communes - art. 43
al. 1 LA), mais celle du plan approuvé, qui lui confère force obligatoire
conformément à l'art. 43 al. 4 LA. Dans le domaine de l'expropriation
matérielle, la naissance des prétentions du propriétaire correspond en
principe à l'entrée en vigueur du plan; l'art. 44 al. 2 LA exprime du
reste cette règle en relation avec les zones de bruit ou de sécurité
(cf. ATF 121 II 317 consid. 12c/bb p. 347; 112 Ib 496 consid. 3e et les
arrêts cités). Le plan des zones de bruit de l'Aéroport international
de Genève, mis à l'enquête publique en tant que projet en 1979, a été
approuvé par le Conseil fédéral le 8 avril 1987. Cette décision a été
publiée dans la feuille officielle cantonale le 2 septembre 1987, ce qui a
provoqué l'entrée en vigueur du plan. L'avis officiel indiquait au reste,
en se référant à l'art. 44 LA, que "la restriction à la propriété foncière
par le plan des zones de bruit donn[ait] droit à une indemnité si elle
équiv[alait] à une expropriation" et que "les intéressés dispos[aient] d'un
délai de 5 ans à compter de la présente publication pour faire valoir leurs
prétentions"; ce délai parvenait ainsi à échéance le 2 septembre 1992.

    Quand bien même le premier arrêt Jeanneret donnait des indications sur
les objets respectifs de l'expropriation formelle et de l'expropriation
matérielle, le Tribunal fédéral y relevait également que ces deux
"restrictions de propriété" pouvaient avoir une origine commune, frapper
les mêmes fonds et se superposer en partie (ATF 110 Ib 368 consid. 2e). En
outre, la Commission fédérale d'estimation est compétente dans les deux cas
pour statuer sur les prétentions des propriétaires touchés (cf. art. 44
al. 4 LA). A ce stade du développement de la jurisprudence, la portée
véritable de l'art. 44 LA était encore difficile à cerner, spécialement
dans le cas de biens-fonds déjà bâtis - d'autant plus que les immissions
de bruit de l'aéroport auraient pu également justifier, éventuellement,
une révision des plans d'affectation cantonaux (cf. par exemple à ce
propos ATF 123 II 481 consid. 5-6) voire des mesures fondées directement
sur la loi fédérale sur la protection de l'environnement, entrée en
vigueur le 1er janvier 1985 (LPE; RS 814.01). Dans ces conditions,
jusqu'à l'échéance du délai de cinq ans courant dès la publication
de l'approbation du plan des zones de bruit - soit trois ans environ
avant le second arrêt Jeanneret du 12 juillet 1995, où la question de
l'expropriation matérielle a été traitée de façon plus approfondie (ATF
121 II 317 consid. 11-13; cf. également ATF 122 II 17 consid. 7b) -,
les propriétaires intéressés pouvaient légitimement avoir des hésitations
sur la voie à suivre pour soumettre leurs prétentions à la Commission
fédérale d'estimation. La situation juridique étant encore spécialement
complexe à cette époque, ils pouvaient penser que la procédure prévue
à l'art. 44 LA leur était également ouverte en tant qu'ils demandaient,
en sus ou indépendamment d'une indemnité pour expropriation matérielle,
une indemnité pour expropriation formelle.

    On ne saurait dès lors opposer la prescription à ceux des propriétaires
voisins de l'aéroport qui ont annoncé leurs prétentions, quel que soit
le fondement de celles-ci (expropriation matérielle ou expropriation
formelle), dans les cinq ans dès le 2 septembre 1987, ce délai étant
du reste le seul qui ait fait l'objet d'une publication officielle par
l'Etat de Genève, à défaut d'ouverture d'une procédure d'expropriation
ordinaire, avec avis publics selon l'art. 30 LEx après le premier arrêt
Jeanneret (cf. ATF 121 II 350 consid. 6b). C'est pourquoi, nonobstant
les incertitudes quant au point de départ du délai quinquennal depuis
la naissance des prétentions (fin 1985 ou auparavant - cf. supra,
consid. 5c/aa), il faut considérer que la prescription n'était pas acquise
avant le 2 septembre 1992.

    d)  La même solution pourrait s'appliquer à la prescription des
prétentions à indemnité en raison du survol de la parcelle. A tout
le moins, il faut considérer que la prescription n'était pas non plus
acquise avant le 2 septembre 1992 car, jusqu'à ce que la jurisprudence
fédérale traite de cet aspect particulier - la première fois dans l'arrêt
Tranchet et consorts du 24 juin 1996 (ATF 122 II 349) - les propriétaires
intéressés pouvaient partir du principe que l'indemnisation pour le survol
était étroitement liée à celle due en raison des immissions de bruit,
nonobstant l'inapplicabilité des trois conditions de l'imprévisibilité,
de la spécialité et de la gravité (ATF 122 II 349 consid. 4 p. 352 et 4b
p. 356). Les intimés ont d'ailleurs, au début de la présente procédure,
annoncé leurs prétentions de manière globale, sans en distinguer les
différents fondements (comme l'avaient du reste fait les expropriés dans
la cause Tranchet et consorts - cf. ATF 122 II 349 consid. 4 p. 352).

    Dans ces conditions, il ne se justifie pas d'examiner plus avant
les particularités de l'indemnité d'expropriation allouée en relation
avec le survol d'une parcelle - pour, en quelque sorte, la constitution
d'une servitude de passage au bénéfice de l'exploitant de l'aéroport
(ATF 122 II 349 consid. 4b p. 356) -, et leurs conséquences éventuelles
sur la prescription.

    e)  L'exécuteur testamentaire, au nom des propriétaires intimés, a
précisément agi avant le 2 septembre 1992. La prescription n'était donc
pas acquise lorsque l'ouverture de la procédure d'expropriation formelle
a été demandée.

Erwägung 6

    6.-  Il n'existe pas, en l'état, de plan d'assainissement de
l'Aéroport international de Genève, au sens des art. 16 ss LPE et 13 ss
de l'ordonnance sur la protection contre le bruit (OPB; RS 814.41). Les
valeurs limites d'exposition au bruit des aéroports nationaux, sur
la base desquelles on détermine les seuils et les objectifs d'une
procédure d'assainissement, n'ont du reste pas encore été fixées (cf.
art. 40 al. 1 OPB). Le délai d'assainissement, en principe de quinze
ans dès l'entrée en vigueur de l'ordonnance sur la protection contre
le bruit (art. 17 al. 3 OPB), n'a donc pas encore commencé à courir, en
vertu de la règle spéciale de l'art. 48 let. a OPB (cf. ATF 124 II 293
consid. 21a p. 338). Dans ces conditions, le paiement d'une indemnité pour
expropriation de droits de voisinage peut ici entrer en considération,
la situation n'étant pas comparable à celle d'une route nationale pour
laquelle une procédure d'assainissement a été engagée (cf. ATF 123 II 560
consid. 4). Le problème des immissions de bruit d'un aérodrome existant
doit également être distingué de celui des nuisances provoquées par
de nouvelles installations aéroportuaires réalisées dans le cadre d'un
agrandissement; en pareil cas, il peut être prématuré, pour un propriétaire
foncier voisin, d'annoncer ses prétentions à indemnité pour expropriation
formelle avant que le projet d'agrandissement, accompagné d'un éventuel
assainissement, ne soit définitivement adopté (ATF 124 II 293 consid.
21a p. 337). Dans le cas particulier, les normes du droit fédéral sur
l'environnement en matière d'assainissement n'excluent pas, en l'état,
une décision du juge de l'expropriation sur les prétentions des intimés.

Erwägung 7

    7.-  Dans la décision attaquée, la Commission fédérale d'estimation a
considéré que l'Etat de Genève avait soulevé l'exception de prescription de
façon manifestement tardive, compte tenu de son attitude tout au long de
la procédure. Il n'y a pas lieu de se prononcer sur cette argumentation
dans la présente cause. Il suffit de noter qu'en principe, il n'est
pas nécessaire que la prescription soit invoquée d'emblée (cf. par
exemple, en procédure civile, ATF 123 III 213 consid. 4-5; 119 III 108),
mais que des circonstances spéciales justifient parfois la réplique (ou
contre-exception) de l'abus de droit au sens de l'art. 2 al. 2 CC (cf. ATF
113 II 264 consid. 2e; 112 II 231 consid. 3e; 108 II 278 consid. 5b; 76
II 113 consid. 5; cf. KARL SPIRO, Die Begrenzung privater Rechte durch
Verjährungs-, Verwirkungs- und Fatalfristen, vol. I Berne 1975, p. 213 ss;
PIERRE ENGEL, Traité des obligations en droit suisse, 2e éd. Berne 1997,
p. 802/803; GADOLA, op.cit., p. 55/56).

    Si les intimés étaient intervenus auprès des autorités après le
2 septembre 1992, c'est notamment sous cet angle qu'il aurait fallu
examiner la façon dont l'Etat de Genève a réagi à leurs prétentions,
en proposant d'emblée une suspension de la procédure avec une remarque
sur la prescription (il est écrit, dans la lettre du 11 décembre 1992
adressée aux intimés par le Président du département cantonal, que "cette
suspension n'entraînera pas la prescription de [leur] demande"), puis en
se déterminant sur le fondement d'une éventuelle indemnité, et enfin en
soulevant l'exception de prescription après l'échéance du dernier délai
qui lui avait été fixé par la Commission fédérale pour présenter ses
observations, plusieurs années après l'ouverture de la procédure. Ces
questions n'ont pas à être traitées en l'espèce.