Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 124 II 120



124 II 120

17. Extrait de l'arrêt de la Ie Cour de droit public du 18 février 1998
dans la cause X. contre Chambre d'accusation du canton de Genève (recours
de droit administratif) Regeste

    Art. 3 Ziff. 1 EUeR; Art. 12 Abs. 1 IRSG, Art. 79 IRSG, Art.  79a IRSG
und Art. 80a IRSG; Konkordat über die Rechtshilfe und die interkantonale
Zusammenarbeit in Strafsachen vom 5. November 1992.

    Unter dem Aspekt des EUeR stellen die Konkordatsbestimmungen
für die Schweiz als ersuchter Staat einen Teil der zur Erledigung der
Rechtshilfeersuchen in Art. 3 Ziff. 1 EUeR erwähnten, von den nationalen
Rechtsvorschriften vorgesehenen Formen dar.

    Wenn ein Kanton in Anwendung von Art. 79 IRSG mit der Leitung des
Verfahrens beauftragt worden ist, kann er gestützt auf Art. 3 und 4 des
Konkordats in einem andern Kanton direkt Verfahrenshandlungen anordnen
und durchführen (E. 4).

Auszug aus den Erwägungen:

                   Extrait des considérants:

Erwägung 4

    4.- La recourante soutient que l'ordonnance de perquisition et de
saisie du 21 mai 1996, confirmée par l'ordonnance entreprise, violerait
le Concordat sur l'entraide judiciaire et la coopération intercantonale
en matière pénale du 5 novembre 1992 (RS 351.71, ci-après: le Concordat).
Concrètement, elle estime que même si le canton de Genève a été désigné
comme canton directeur par l'Office fédéral de la police, les autorités
genevoises n'étaient pas habilitées à procéder à des perquisitions ou à des
saisies sur le territoire bâlois sans agir par l'entremise des autorités
de poursuite bâloises; prétendre le contraire reviendrait, selon elle, à
admettre que le Concordat de 1992 a modifié l'art. 80a de la loi fédérale
sur l'entraide internationale en matière pénale (EIMP, RS 351.1), dans
sa teneur de 1996, ce que le législateur fédéral n'aurait précisément pas
entendu faire. Elle demande en conséquence au Tribunal fédéral d'annuler
la perquisition ordonnée par le juge genevois sur territoire bâlois.

    a) La recourante invoque en substance une violation par la
Chambre d'accusation du principe, ancré à l'art. 2 disp. trans. Cst.,
de la primauté du droit fédéral sur le droit cantonal, ou ici
intercantonal. En soi, le moyen est recevable dans le cadre du recours de
droit administratif, puisque celui-ci peut être formé pour violation du
droit fédéral, et que cette notion inclut les droits constitutionnels des
citoyens (ATF 123 II 88 consid. 1a/bb p. 92; 122 IV 8 consid. 1a p. 11).

    b) Il est vrai que l'articulation des dispositions de procédure de
l'EIMP avec celles du Concordat, n'est pas évidente. Sans doute l'entraide
judiciaire doit-elle être exécutée par la partie requise "dans les formes
prévues par sa législation" (cf. art. 3 ch. 1 de la Convention européenne
d'entraide judiciaire en matière pénale [CEEJ, RS 0.351.1]). On ne saurait
toutefois en déduire, ou déduire des dispositions pertinentes de l'EIMP
(art. 12 al. 1, 79 al. 1, 79a et 80a), que dans un Etat fédéral comme la
Suisse, où l'organisation judiciaire, la procédure et l'administration
de la justice relèvent en principe des cantons (art. 64bis al. 2 Cst.),
l'entraide internationale en matière pénale serait pleinement soumise,
dans ses prolongements ou préalables cantonaux, à une application stricte
du principe de la territorialité (art. 355 al. 2 CP, principe "locus
regit actum").

    Comme le Tribunal fédéral l'a déjà souligné dans un contexte voisin,
les art. 352 ss du Code pénal suisse - que l'art. 79 al. 1, 2ème phrase
EIMP dit applicables par analogie en cas de délégation de l'exécution
d'une demande d'entraide internationale à une seule autorité cantonale
- ne représentent que des règles minimales (ATF 122 I 85 consid.
3b/cc p. 89). Rien n'empêche donc les cantons d'y déroger par voie
concordataire et autoriser les autorités judiciaires d'un canton à
ordonner et effectuer des actes de procédure directement dans un autre
canton (art. 3 ch. 1 du Concordat), en appliquant leur propre droit
de procédure (art. 4 du Concordat). Tout au plus doivent-elles aviser
préalablement, sauf cas d'urgence, l'autorité compétente du canton dans
lequel l'acte de procédure doit être accompli (art. 3 ch. 2 et 3 et
art. 24 du Concordat). L'un des buts poursuivis par le Concordat est de
lutter efficacement contre la criminalité en favorisant la coopération
intercantonale (art. 1er let. a du Concordat, ainsi que les art. 3 à 14
de son chapitre II). Il est manifeste que la coopération intercantonale
mise en place par le Concordat, qui lie le canton de Genève depuis le
2 novembre 1993 et celui de Bâle-Ville depuis le 1er février 1994, ne
saurait se limiter à la lutte contre la criminalité purement nationale,
à une époque marquée de plus en plus par une criminalité aux ramifications
internationales (ATF 122 I 85 consid. 3b/cc p. 89).

    c) En se fondant sur l'art. 2 ch. 1 du Concordat, qui précise
que celui-ci n'est applicable "que dans les procédures entraînant
l'application du droit pénal fédéral matériel", la recourante soutient
que cet instrument ne serait pas applicable dans le contexte de l'EIMP,
qui relèverait clairement du droit administratif.

    L'entraide internationale, qu'elle soit régie par la CEEJ ou par
l'EIMP, relève certes de ce que l'on peut qualifier, dans l'optique
de la CEEJ, d'un droit administratif international (cf. ATF 123 II 419
consid. 1a p. 421) ou, dans l'optique de l'EIMP, d'un droit interne à
vocation transnationale. Il n'en demeure pas moins que cette coopération
administrative internationale appelle toujours, en particulier à l'occasion
du contrôle de la double incrimination, la vérification par l'Etat
requis que l'infraction motivant la commission rogatoire est punissable
selon son droit pénal matériel (art. 5 ch. 1 let. a CEEJ, et déclarations
faites par la Suisse en application de l'art. 5 ch. 2 CEEJ; art. 64 al. 1
EIMP). Il faut donc considérer que la mise en oeuvre du droit de l'entraide
internationale entraîne, ne serait-ce qu'indirectement, l'application du
droit pénal fédéral matériel au sens de l'art. 2 ch. 1 du Concordat.

    d) Il découle de ce qui précède que depuis le 1er février 1994
(dans les relations entre les cantons de Genève et de Bâle-Ville) et,
de manière générale, dans les relations intercantonales depuis le 3
septembre 1996 (date d'entrée en vigueur du Concordat pour le canton
du Tessin, dernier des 26 cantons à avoir adhéré à cet instrument),
le Concordat et les règles de procédure qu'il institue se substituent,
dans la mise en oeuvre du droit de l'entraide internationale, aux règles
minimales correspondantes de droit fédéral posées par l'EIMP. Autrement
dit, envisagées dans l'optique de la CEEJ, les règles concordataires
font comme telles partie, pour la Suisse en qualité d'Etat requis, des
"formes prévues par sa législation" au sens de l'art. 3 ch. 1 CEEJ. Dans
le système de l'EIMP, il faut admettre qu'au-delà de sa lettre, l'art. 12
al. 1 EIMP réserve également les dispositions contraires du Concordat du 5
novembre 1992 (notamment son chapitre II), dont les règles font désormais
partie des "propres règles de procédure" que les autorités cantonales
doivent appliquer en matière d'entraide internationale. Prévue à l'art. 79
al. 1 EIMP, l'application par analogie des art. 352 à 355 CP n'empêche donc
nullement l'application directe des règles pertinentes du Concordat, car
celui-ci consacre, comme le Tribunal fédéral l'a déjà relevé, une brèche
dans le principe de la territorialité (cf. ATF 122 I 85 consid. 3b/cc
précité); de même, la délégation par l'Office fédéral à une autorité
cantonale de l'exécution de l'entraide (art. 79a EIMP) et le droit de
l'autorité cantonale d'exécution de procéder "aux actes d'entraide admis"
(art. 80a al. 1 EIMP), conformément "à son propre droit de procédure"
(art. 80a al. 2 EIMP), englobent nécessairement la prise en considération
du droit concordataire, qui apparaît de nature à renforcer l'efficacité
de l'entraide internationale accordée par la Suisse à des Etats étrangers.

    e) Ce rôle de relais joué par le droit concordataire dans la mise
en oeuvre du droit national et international de l'entraide judiciaire
ne consacre nullement une violation du principe de la primauté du
droit fédéral sur le droit intercantonal. La priorité accordée aux
règles concordataires plus favorables que le droit fédéral à l'entraide
internationale constitue bien plutôt le pendant du principe qui veut que,
dans le domaine de l'entraide internationale, c'est - sous réserve de
la protection des droits fondamentaux, art. 1a et 2 EIMP, ATF 123 II
595 consid. 7c p. 616 ss - la règle la plus favorable à l'entraide qui
prime, que celle-ci soit internationale ou, pour ce qui est des règles
internes d'un Etat fédéral comme la Suisse, que cette règle soit fédérale
ou intercantonale (cf. ATF 122 II 140 consid. 2 p. 142). Le législateur
avait d'ailleurs envisagé lui-même ce développement, en considérant,
dans son message du 29 mars 1995 concernant la révision de l'EIMP,
que le Concordat "devrait encore renforcer la portée de l'article 79
EIMP, puisqu'un juge pourra procéder à des mesures d'exécution dans un
autre canton" (FF 1995 III 1, p. 12 ch. 222a). Contrairement à ce que
soutient la recourante, le juge d'instruction genevois était donc fondé
à agir directement dans le canton de Bâle-Ville. Dans la mesure de sa
recevabilité, le moyen invoqué doit donc être rejeté.