Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 123 V 262



123 V 262

47. Arrêt du 5 décembre 1997 dans la cause A. contre Les Retraites
Populaires, Lausanne, et Tribunal des assurances du canton de Vaud Regeste

    Art. 23 BVG: Versicherungsprinzip.

    - Beitritt eines Arbeitnehmers zu einer Vorsorgeeinrichtung, während er
Bezüger einer halben Rente der Invalidenversicherung war. Verschlechterung
des vorbestandenen Gesundheitszustandes, welche zur Begründung einer
ganzen Rente der Invalidenversicherung führte.

    - Verneinung eines Anspruchs auf Invalidenleistungen der
obligatorischen beruflichen Vorsorge, weil dies dem Versicherungsprinzip
widersprechen würde.

Sachverhalt

    A.- A. a exploité un atelier de mécanique, en qualité d'indépendant,
à partir du 1er novembre 1984; il a renoncé à s'affilier à une institution
de prévoyance. En raison de l'apparition d'une tumeur au cerveau, sa
capacité de travail a été réduite dès le 1er avril 1988. Aussi la Caisse
cantonale vaudoise de compensation lui a-t-elle alloué une demi-rente
de l'assurance-invalidité dès le 1er avril 1989, par décision du 2
février 1990.

    Depuis le 1er janvier 1994, le prénommé est employé du garage
A. et S. et affilié aux Retraites Populaires au titre de la prévoyance
professionnelle obligatoire. A la suite d'une aggravation, en l'occurrence
une récidive de sa maladie, il est devenu totalement incapable de
travailler depuis le 9 mai 1994. Par décision du 31 octobre 1994,
la caisse de compensation l'a mis au bénéfice d'une rente entière
d'invalidité, à compter du 1er août 1994.

    A. a demandé aux Retraites Populaires de lui servir une pension
d'invalidité selon la LPP. L'institution a refusé, au motif que le
cas d'assurance était antérieur à l'affiliation à cette institution
de prévoyance.

    B.- Le 24 février 1995, A. a ouvert action devant le Tribunal des
assurances du canton de Vaud en concluant à ce que les Retraites Populaires
fussent condamnées à lui payer une rente d'invalidité d'un montant annuel
de 6919 fr. 80 dès le 1er août 1994.

    Par jugement du 13 mars 1996, la Cour cantonale a rejeté la demande.

    C.- A. interjette recours de droit administratif contre ce jugement
dont il requiert l'annulation, avec suite de dépens, en reprenant ses
conclusions formulées en première instance.

    L'institution de prévoyance intimée conclut au rejet du recours,
ce que propose également l'Office fédéral des assurances sociales (OFAS).

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- a) Ont droit à des prestations d'invalidité les invalides qui
étaient assurés lors de la survenance de l'incapacité de travail dont
la cause est à l'origine de l'invalidité (art. 23, 2e partie de la
phrase, LPP). Selon la jurisprudence, l'événement assuré au sens de
l'art. 23 LPP est uniquement la survenance d'une incapacité de travail
d'une certaine importance, indépendamment du point de savoir à partir de
quel moment et dans quelle mesure un droit à une prestation d'invalidité
est né. La qualité d'assuré doit exister au moment de la survenance de
l'incapacité de travail, mais pas nécessairement lors de l'apparition
ou de l'aggravation de l'invalidité. Cette interprétation littérale est
conforme au sens et au but de la disposition légale en cause, laquelle
vise à faire bénéficier de l'assurance le salarié qui, après une maladie
d'une certaine durée, devient invalide alors qu'il n'est plus partie
à un contrat de travail. Lorsqu'il existe un droit à une prestation
d'invalidité fondée sur une incapacité de travail survenue durant la
période d'assurance, l'institution de prévoyance concernée est tenue de
prendre en charge le cas, même si le degré d'invalidité se modifie après
la fin des rapports de prévoyance. Dans ce sens, la perte de la qualité
d'assuré ne constitue pas un motif d'extinction du droit aux prestations
au sens de l'art. 26 al. 3 LPP (ATF 118 V 45 consid. 5; RSAS 1997 p. 549
consid. 3b, 1994 p. 471 consid. 5a).

    b) Comme cela ressort du texte de l'art. 23 LPP, les prestations
sont dues par l'institution de prévoyance à laquelle l'intéressé est -
ou était - affilié au moment de la survenance de l'événement assuré. Dans
la prévoyance obligatoire, ce moment ne coïncide pas avec la naissance du
droit à la rente de l'assurance-invalidité selon l'art. 29 al. 1 let. b
LAI, mais il correspond à la survenance de l'incapacité de travail dont la
cause est à l'origine de l'invalidité. Sinon, il subsisterait dans bien
des cas des lacunes dans la couverture d'assurance, notamment lorsque
l'employeur - en raison justement de la maladie - résilie les rapports de
travail avant l'écoulement de la période de carence d'une année instituée
par l'art. 29 al. 1 let. b LAI. Ainsi donc, pour que la protection
d'assurance découlant du deuxième pilier ne soit pas dépourvue de son
efficacité, le risque d'invalidité doit également être couvert lorsqu'il
survient après une longue maladie, et cela indépendamment du maintien de
la couverture légale d'assurance; si l'institution de prévoyance a déjà
effectué le transfert de la prestation de libre passage, elle n'est pas,
pour autant, libérée de l'obligation éventuelle de verser ensuite une
rente d'invalidité. Les mêmes principes sont applicables en matière de
prévoyance plus étendue, à tout le moins en l'absence de dispositions
réglementaires ou statutaires contraires (ATF 120 V 116 sv. consid. 2b,
citant notamment l'arrêt ATF 118 V 98 consid. 2b, et les références).

    c) L'art. 23 LPP a donc aussi pour but de délimiter les responsabilités
entre institutions de prévoyance, lorsque le travailleur, déjà atteint dans
sa santé dans une mesure propre à influer sur sa capacité de travail,
entre au service d'un nouvel employeur (en changeant en même temps
d'institution de prévoyance) et est mis au bénéfice, ultérieurement, d'une
rente de l'assurance-invalidité: le droit aux prestations ne découle pas
du nouveau rapport de prévoyance; les prestations d'invalidité sont dues
par l'ancienne institution, auprès de laquelle l'intéressé était assuré
lorsque est survenue l'incapacité de travail à l'origine de l'invalidité.

    Cependant, pour que l'ancienne institution de prévoyance reste tenue
à prestations, il faut non seulement que l'incapacité de travail ait
débuté à une époque où l'assuré lui était affilié, mais encore qu'il
existe entre cette incapacité de travail et l'invalidité une relation
d'étroite connexité; dans ce cas seulement, la nouvelle institution est
libérée de toute obligation de verser une rente.

    La connexité doit être à la fois matérielle et temporelle. Il y
a connexité matérielle si l'affection à l'origine de l'invalidité est
la même que celle qui s'est déjà manifestée durant l'affiliation à la
précédente institution de prévoyance (et qui a entraîné une incapacité
de travail). La connexité temporelle implique qu'il ne se soit pas
écoulé une longue interruption de l'incapacité de travail; elle est
rompue si, pendant une certaine période, l'assuré est de nouveau apte
à travailler. L'ancienne institution de prévoyance ne saurait, en
effet, répondre de rechutes lointaines ou de nouvelles manifestations
de la maladie plusieurs années après que l'assuré a recouvré sa
capacité de travail. Mais une brève période de rémission ne suffit
pas pour interrompre le rapport de connexité temporelle. On ne saurait
considérer qu'une interruption de trente jours consécutifs suffit déjà
pour fonder la responsabilité de la nouvelle institution de prévoyance,
du moins lorsqu'il est à prévoir que la diminution ou la disparition des
symptômes de la maladie sera de courte durée. Cette interprétation de la
loi restreindrait de manière inadmissible la portée de l'art. 23 LPP,
notamment dans le cas d'assurés qui ne retrouvent pas immédiatement
un emploi et qui, pour cette raison, ne sont plus affiliés à aucune
institution de prévoyance. D'ailleurs, si l'on voulait s'inspirer des
règles en matière d'assurance-invalidité, on devrait alors envisager une
durée minimale d'interruption de l'activité de travail de trois mois,
conformément à l'art. 88a al. 1 RAI: selon cette disposition, si la
capacité de gain d'un assuré s'améliore ou que son impotence s'atténue,
il y a lieu de considérer que ce changement supprime, le cas échéant, tout
ou partie de son droit aux prestations dès qu'on peut s'attendre à ce que
l'amélioration constatée se maintienne durant une assez longue période;
il en va de même lorsqu'un tel changement déterminant a duré trois mois
déjà, sans interruption notable et sans qu'une complication prochaine
soit à craindre (ATF 120 V 117 sv. consid. 2c/aa et les références).

Erwägung 2

    2.- a) Selon l'art. 2 al. 1 LPP (en corrélation avec le ch. I de
l'Ordonnance 97 sur l'adaptation des montants-limites de la prévoyance
professionnelle; RO 1996 3037), sont soumis à l'assurance obligatoire
les salariés qui ont plus de 17 ans et reçoivent d'un même employeur un
salaire annuel supérieur à 23'880 francs L'assurance obligatoire commence
en même temps que les rapports de travail (art. 10 al. 1 LPP).

    L'art. 1er al. 1 let. d OPP 2 prévoit cependant que les personnes
invalides au sens de l'AI à raison des deux tiers au moins ne sont
pas soumises à l'assurance obligatoire. Elles ne peuvent pas non plus,
contrairement à d'autres salariés exemptés de l'assurance (art. 1er al. 1
let. a, b, c et e OPP 2) être affiliées à titre facultatif selon la LPP
(art. 1er al. 3 et 4 OPP 2 a contrario). Cette exclusion a été décidée
par le Conseil fédéral sur la base de l'art. 2 al. 2 LPP, selon lequel
l'autorité exécutive "définit les catégories de salariés qui, pour
des motifs particuliers, ne sont pas soumis à l'assurance obligatoire"
(ATF 118 V 164 consid. 4a et les références).

    b) Les motifs qui sont à la base de l'art. 1er al. 1 let. d OPP
2 ont été exposés par l'OFAS dans son commentaire du projet d'OPP 2,
du mois d'août 1983. Certaines personnes invalides à raison des deux
tiers au moins ont encore la possibilité, par la mise en valeur de leur
capacité résiduelle de gain, de réaliser un salaire supérieur à la limite
de coordination de 23'880 francs (il était à l'époque prévu que la limite
serait de 16'560 francs). De telles personnes, déjà au bénéfice d'une
rente entière de l'assurance-invalidité (art. 28 al. 1 LAI), pourraient
ainsi prétendre une rente entière de l'institution de prévoyance (art. 24
LPP). Il s'est donc agi d'éviter qu'une institution de prévoyance ne doive
fournir des prestations pour un cas d'assurance survenu antérieurement à
l'affiliation. Il eût été contraire, en effet, à un principe fondamental
en matière d'assurances de couvrir un risque déjà réalisé.

    La clause de délégation de l'art. 2 al. 2 LPP confère un très
large pouvoir d'appréciation au Conseil fédéral pour déterminer quelles
catégories d'assurés doivent être exclus de l'assurance obligatoire. En
outre, le principe fondamental susmentionné n'est aucunement étranger
à l'esprit et au but d'une assurance obligatoire (cf. par analogie
l'art. 6 al. 1 LAI). On ne saurait, par conséquent, taxer d'illégale la
solution adoptée par le Conseil fédéral. Cette solution n'est du reste pas
critiquée en doctrine; certains auteurs en prennent acte sans la commenter;
d'autres se réfèrent, sans autres développements, aux explications de
l'OFAS (ATF 118 V 164 sv. consid. 4c et les références).

    c) A l'inverse, l'art. 1er al. 1 let. d OPP 2 ne permet pas d'exclure
de l'assurance obligatoire des personnes qui ont été frappées d'une
invalidité des deux tiers au moins et qui, ultérieurement, ont recouvré -
et mis à profit - leur capacité de gain (cf. art. 14 al. 4 OPP 2). Il en
est de même des invalides de naissance ou précoces qui parviennent, par
suite de disparition ou de diminution de l'invalidité, à s'insérer dans
la vie professionnelle. On rappellera à cet égard que, dans l'assurance
obligatoire des salariés en vertu de la LPP, les institutions de prévoyance
n'ont pas le droit d'instaurer des réserves qui seraient justifiées par
un état de santé déficient de leurs assurés, de telles réserves étant
en revanche admissibles dans le domaine de la prévoyance plus étendue,
ainsi qu'en matière de prévoyance facultative.

    Pour que l'on puisse considérer que la capacité de gain d'une
personne jusqu'alors invalide s'est améliorée dans une mesure permettant
un assujettissement à l'assurance obligatoire (pour les personnes à demi
invalides au sens de la LAI, les montants-limites fixés aux art. 2, 7,
8 et 46 LPP sont réduits de moitié; art. 4 OPP 2), il est nécessaire
que cette amélioration ait été d'une certaine durée et qu'aucune
aggravation prochaine ne soit à craindre. Sinon, même dans le cas
d'atteintes à la santé irréversibles, un engagement temporaire ou une
simple tentative de réadaptation, durant une courte période de rémission
de la maladie, suffirait à entraîner une affiliation à l'assurance et,
partant, le droit à des prestations d'invalidité de l'institution de
prévoyance. Cette conséquence contredirait à l'évidence le but recherché
par l'art. 1er al. 1 let. d OPP 2. On ne saurait au surplus admettre que
l'amélioration est réputée durable dès qu'elle a duré trois mois sans
interruption notable, comme le prévoit l'art. 88a al. 1 RAI - encore que
cette disposition réserve expressément l'hypothèse où une complication
prochaine est à craindre. Ce délai de trois mois au-delà duquel la rente
de l'assurance-invalidité doit, en principe, être réduite ou supprimée
ne peut être appliqué schématiquement quand il s'agit de décider de
l'assujettissement d'une personne à la LPP. Pour trancher cette question,
on tiendra compte, bien plutôt, des circonstances du cas particulier,
notamment de la nature de l'affection, du pronostic du médecin et des
motifs qui ont conduit à l'engagement de l'intéressé. Aussi ne saurait-on
conclure au rétablissement de la capacité de gain d'une personne invalide
lorsqu'une tentative de réinsertion professionnelle, d'une durée même
supérieure à trois mois, est essentiellement motivée par des considérations
d'ordre social et qu'il apparaît improbable qu'elle aboutisse à une
véritable réadaptation (ATF 118 V 166 sv. consid. 4e et les références).

Erwägung 3

    3.- a) Ainsi que les premiers juges l'ont fait observer, il ne s'agit
pas de déterminer quelle institution de prévoyance répond en l'espèce du
cas d'assurance (cf. les arrêts ATF 120 V 112, 118 V 35, 95, 158 et RSAS
1994 p. 469), mais de décider si l'aggravation de l'incapacité de gain
peut donner lieu à des prestations d'invalidité selon la LPP, alors que
le recourant n'était pas assuré lors de la survenance de l'invalidité
initiale. Dès lors, la jurisprudence régissant la répartition de la
responsabilité entre institutions de prévoyance en cas de passage de
l'une à l'autre s'applique-t-elle par analogie?

    b) En l'occurrence, les juges cantonaux ont admis, à juste titre,
que le recourant pouvait être affilié à l'institution de prévoyance
intimée à l'époque où avait débuté son activité auprès du garage A. et S.,
le 1er janvier 1994, car son degré d'invalidité n'était alors que de 50%
(art. 1er al. 1 let. d OPP 2; ATF 118 V 164 ss consid. 4). Ils ont ensuite
examiné le point de savoir si la condition d'assurance était réalisée;
tel aurait été le cas si le demandeur avait été assuré en vertu de la
LPP lors de la survenance de l'incapacité de travail dont la cause est
à l'origine de l'invalidité (ATF 118 V 98 sv. consid. 2b). En outre,
ils ont retenu, à juste titre, qu'on était en présence de l'aggravation
d'une atteinte préexistante, et non d'une nouvelle affection.

    A la lumière des principes développés dans l'arrêt ATF 118 V 45
consid. 5 (confirmé in ATF 118 V 98 sv. consid. 2b et RSAS 1997 p. 547 ss,
1994 p. 469) et en transposant au présent cas la jurisprudence de l'arrêt
ATF 120 V 112, les premiers juges ont considéré que si le recourant avait
été salarié jusqu'au 31 décembre 1993, c'est l'ancienne institution de
prévoyance à laquelle il aurait, par hypothèse, été affilié jusqu'à cette
date qui aurait eu à répondre du cas d'assurance; en d'autres termes, la
responsabilité de la seconde institution aurait été exclue. Or, ont-ils
poursuivi, cette exclusion doit aussi s'appliquer à l'éventualité où,
comme en l'espèce, il n'existait pas de rapport de prévoyance; le système
légal ne tend pas, en effet, à garantir dans tous les cas des prestations
de la prévoyance professionnelle, mais à distinguer les risques assurés par
une institution donnée de ceux qui ne le sont pas. Dans ces conditions,
le recourant n'étant pas assuré lorsque est survenue l'incapacité de
travail dont la cause est à l'origine de l'invalidité (art. 23 LPP),
la demande ne pouvait qu'être rejetée.

    c) Le raisonnement de la Cour cantonale est le seul compatible avec les
principes rappelés ci-dessus et c'est avec raison que cette juridiction a
transposé au cas d'espèce la jurisprudence de l'arrêt ATF 120 V 112. Par
ailleurs, s'il est vrai que la systématique de la loi prétérite la personne
de condition indépendante ou non-active qui prend un emploi salarié, alors
qu'elle est handicapée, il est cependant loisible à celle-ci de pourvoir
elle-même à sa prévoyance professionnelle, par exemple en souscrivant
l'assurance facultative prévue à l'art. 4 LPP. En revanche, la prise en
charge par l'intimée de l'invalidité résultant de l'aggravation de la
maladie, ainsi que le préconise le recourant, contreviendrait au principe
d'assurance clairement affirmé à l'art. 23 LPP.

    On précisera toutefois que le travailleur invalide à 50% qui bénéficie,
postérieurement à la survenance de cette invalidité partielle, de la
prévoyance professionnelle obligatoire - comme c'est le cas du recourant
en l'espèce - aura en revanche droit aux prestations d'invalidité si la
part restante de sa capacité de gain disparaît en raison d'une atteinte
à la santé indépendante de celle qui est à l'origine de la première
invalidité partielle.