Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 123 V 137



123 V 137

24. Extrait de l'arrêt du 9 juillet 1997 dans la cause Office fédéral de
l'assurance militaire contre M. et Tribunal administratif du canton de
Genève Regeste

    Art. 6 MVG: Haftung der Militärversicherung für psychische
Störungen (Spätfolgen), die im Anschluss an einen im Dienst erlittenen
Unfall auftreten. Um zu entscheiden, ob zwischen dem Unfall und
den psychischen Störungen ein adäquater Kausalzusammenhang besteht,
sind dieselben Grundsätze anzuwenden, die von der Rechtsprechung im
Unfallversicherungsbereich entwickelt worden sind.

Auszug aus den Erwägungen:

                  Extrait des considérants:

Erwägung 2

    2.- L'assurance militaire a rendu sa décision le 12 août 1994, soit
postérieurement à l'entrée en vigueur, le 1er janvier 1994, de la loi sur
l'assurance militaire du 19 juin 1992. Aussi bien le Tribunal administratif
a-t-il examiné à juste titre la présente affaire à la lumière de cette loi
(art. 109 LAM) et non au regard de l'ancien droit (loi du 20 septembre 1949
[aLAM]; cf. ATF 122 V 30 consid. 1, 243 consid. 1).

Erwägung 3

    3.- a) Selon l'art. 5 al. 1 LAM, l'assurance militaire couvre toute
affection qui se manifeste et qui est annoncée ou constatée de toute
autre façon pendant le service. D'après l'art. 5 al. 2 LAM, l'assurance
militaire n'est pas responsable lorsqu'elle apporte la preuve:

    a. que l'affection est avec certitude antérieure au service, ou qu'elle
   ne peut pas avec certitude avoir été causée pendant ce dernier et

    b. que cette affection n'a pas avec certitude été aggravée ni accélérée
   dans son cours pendant le service.

    Si l'assurance militaire apporte la preuve exigée au deuxième alinéa,
lettre a, mais non pas celle exigée au deuxième alinéa, lettre b, elle
répond de l'aggravation de l'affection (art. 5 al. 3, première phrase,
LAM).

    Si l'affection est constatée seulement après le service par un médecin,
un dentiste ou un chiropraticien et est annoncée ensuite à l'assurance
militaire, ou si des séquelles tardives ou une rechute sont invoquées,
l'assurance militaire en répond seulement s'il est établi au degré de
vraisemblance prépondérante que l'affection a été causée ou aggravée
pendant le service ou seulement s'il est établi au degré de vraisemblance
prépondérante qu'il s'agit de séquelles tardives ou de rechute d'une
affection assurée (art. 6 LAM).

    Les rechutes et les séquelles tardives ont ceci en commun qu'elles
sont attribuables à une atteinte à la santé qui, en apparence seulement,
mais non dans les faits, était considérée comme guérie. Il y a rechute
lorsque c'est la même maladie qui se manifeste à nouveau. On parle de
séquelles tardives lorsqu'une atteinte apparemment guérie produit, au cours
d'un laps de temps prolongé, des modifications organiques ou psychiques
qui conduisent souvent à un état pathologique différent (ATF 105 V 35
consid. 1c; STEGER-BRUHIN, Die Haftungsgrundsätze der Militärversicherung,
thèse St-Gall 1996, p. 165; SCARTAZZINI, Les rapports de causalité dans
le droit suisse de la sécurité sociale, thèse Genève 1991, p. 136).

    Ces principes de responsabilité correspondent dans les grandes lignes à
ceux de l'ancien droit (message concernant la loi fédérale sur l'assurance
militaire du 27 juin 1990, FF 1990 III 203; STEGER-BRUHIN, op.cit., p. 4
ss). La différence entre les conditions de la responsabilité selon l'art. 5
et l'art. 6 LAM réside notamment dans le fait que, dans le premier cas,
un lien de causalité adéquate entre l'affection et les influences subies
pendant le service est présumé, cette présomption ne pouvant être écartée
que par la preuve certaine de l'absence d'un tel lien, alors que dans le
second cas, l'existence de conséquences d'influences subies pendant le
service doit être établie avec un degré de vraisemblance prépondérante
(ATF 111 V 372 sv. consid. 1b), c'est-à-dire conformément à la règle de
preuve généralement appliquée en matière d'assurances sociales (voir par
exemple ATF 121 V 47 consid. 2a, 208 consid. 6b).

    b) Les premiers juges ont retenu que l'assurance militaire n'encourait
plus aucune responsabilité pour les troubles physiques (dorsalgies et
lombalgies) dont souffre l'assuré. A ce propos, ils ont considéré, sur
le vu des conclusions des experts, que l'aggravation de ces troubles
provoquée par la chute du 8 avril 1991 était certainement éliminée à
partir du mois d'octobre 1992, autrement dit que le statu quo ante était
rétabli à la même époque. Est litigieuse, en revanche, la responsabilité
de l'assurance pour les troubles psychiques dont souffre l'assuré. Ceux-ci
ont été diagnostiqués en février 1994 par le psychiatre V. Les experts
D. et L. attribuent à l'événement en cause une influence de 30 pour cent
sur ces troubles, compte tenu de l'état maladif préexistant. On se trouve
donc dans l'une des hypothèses envisagées à l'art. 6 LAM, à savoir celle
où l'assuré invoque des séquelles tardives, en l'occurrence une affection
psychique (ou l'aggravation d'une affection psychique préexistante)
en raison d'une atteinte à la santé physique qui s'est manifestée et qui
a été annoncée pendant le service (cf. ATF 111 V 373 sv. consid. 2b). Le
lien de causalité naturelle entre l'accident et cette aggravation doit être
considéré comme établi et n'est du reste pas contesté par le recourant.

    c) La causalité naturelle étant admise, il faut encore se demander
si le rapport de causalité peut être qualifié d'adéquat (ATF 111 V 375
consid. 2c; cf. SCARTAZZINI, op.cit., p. 301 sv.; LAURI, Kausalzusammenhang
und Adäquanz im schweizerischen Haftpflicht- und Versicherungsrecht,
thèse Berne 1976, p. 75 ss; STEGER-BRUHIN, op.cit., p. 88 ss).

    Selon une définition qui est la même dans tous les domaines du droit,
la causalité est adéquate si, d'après le cours ordinaire des choses et
l'expérience de la vie, le fait considéré était propre à entraîner un
effet du genre de celui qui s'est produit, en sorte que la survenance de
ce résultat paraît de façon générale favorisée par le fait en question
(ATF 122 V 416 consid. 2a, 121 V 49 consid. 3a, 121 III 363 consid. 5,
119 Ib 342 sv. consid. 3c et 345 consid. 5b). Cependant, pour décider
si la causalité est adéquate, le juge prendra en compte les objectifs de
la politique juridique poursuivis par la norme applicable dans le cas
concret. Aussi bien, les suites adéquates et inadéquates d'un accident
peuvent-elles être appréciées différemment en droit de la responsabilité
civile et en droit des assurances sociales (ATF 123 V 98, 123 III 110).

    En matière d'assurance-accidents, le Tribunal fédéral des assurances
a posé des règles qui visent à permettre de juger objectivement de la
causalité adéquate entre un accident assuré et des troubles psychiques
à l'origine d'une incapacité de travail ou de gain. Ces règles reposent
sur une classification des accidents en trois catégories (accidents de
peu de gravité, accidents de gravité moyenne, accidents graves). Lorsque
l'accident est insignifiant ou de peu de gravité (par exemple une chute
banale), l'existence d'un lien de causalité adéquate entre cet événement
et d'éventuels troubles psychiques peut être d'emblée niée. Inversement,
lorsque l'assuré est victime d'un accident grave, il y a lieu de considérer
comme établie l'existence d'une relation de causalité adéquate. Dans le
cas d'un accident de gravité moyenne, il faut, pour trancher la question
de la causalité adéquate, prendre en considération un certain nombre de
circonstances qui, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience
de la vie, sont de nature, dans le cas d'un accident de cette catégorie,
à entraîner ou à aggraver une incapacité de travail (ou de gain) d'origine
psychique (ATF 115 V 138 ss consid. 6, 407 ss consid. 5; voir aussi ATF
120 V 355 sv. consid. 5b, 117 V 366 ss consid. 6, 382 ss consid. 4b et c).

    Contrairement à l'opinion des premiers juges, il se justifie
d'appliquer les mêmes principes pour trancher la question de la causalité
adéquate requise par l'art. 6 LAM, en cas de troubles psychiques
consécutifs à un accident. L'appréciation de la causalité adéquate
obéit en effet aux mêmes impératifs de politique juridique dans les
deux assurances. Elle répond à la même nécessité de fixer - et cela
de manière identique - une limite raisonnable à la responsabilité
de l'assurance sociale, compte tenu de la multiplicité des causes
naturelles qui participent à la survenance du résultat (cf. ATF 122 V
417 consid. 2c, 117 V 382 consid. 4a; MEYER-BLASER, Kausalitätsfragen aus
dem Gebiet des Sozialversicherungsrechts, RSAS 1994, p. 82; SCARTAZZINI,
op.cit., p. 18 sv.). D'ailleurs, sous l'empire de l'ancien droit, la
jurisprudence se référait déjà, en ce domaine, aux principes applicables
dans l'assurance-accidents (ATF 105 V 231 consid. 4c). Pour ce qui
est du nouveau droit, le message du Conseil fédéral révèle, de manière
explicite, la volonté du législateur d'adopter, pour juger du caractère
adéquat de troubles psychiques consécutifs à un accident, les mêmes
solutions que celles dégagées par la jurisprudence dans le domaine de
l'assurance-accidents (message précité, FF 1990 III 234). L'argument des
premiers juges, selon lequel la responsabilité de l'assurance militaire
peut même être engagée lorsque l'assuré souffrait déjà de "troubles
déclarés auxquels le service ne fait qu'apporter une aggravation", ne
saurait d'aucune manière être décisif. En effet, l'assurance-accidents
répond aussi des atteintes à la santé qui ne sont que partiellement
imputables à l'accident (art. 36 LAA).

    d) Selon la jurisprudence rendue en matière d'assurance-accidents,
il convient, aux fins de procéder à une classification des accidents
(cf. let. c ci-dessus), non pas de s'attacher à la manière dont l'assuré
a ressenti et assumé le choc traumatique, mais bien plutôt de se fonder,
d'un point de vue objectif, sur l'événement accidentel lui-même (ATF
115 V 139 consid. 6, 407 sv. consid. 5). Vu sous cet angle, l'accident
incriminé - lourde chute sur le dos - était de gravité moyenne, cependant
à la limite d'un accident sans gravité.

    L'analyse des critères, également objectifs, posés par la jurisprudence
en ce qui concerne des troubles psychiques consécutifs à un accident de
gravité moyenne (ATF 115 V 140 consid. 6c/aa et 409 consid. 5c/aa) conduit
à admettre, en l'espèce, le caractère adéquat du lien de causalité entre
l'accident assuré et l'aggravation des troubles psychiques dont souffre
l'intimé. En effet, la durée de l'incapacité de travail due aux seules
lésions physiques - 18 mois à dire d'experts - a été particulièrement
longue vu les circonstances. En outre, l'accident, toujours selon les
experts, a entraîné des douleurs physiques persistantes, ainsi que
des complications (notamment une rechute), qui ont entravé le cours
de la guérison de manière anormalement longue. Deux, voire trois, des
critères posés par la jurisprudence, dont un (la durée de l'incapacité de
travail) revêt une intensité particulière, sont réalisés; en pareil cas,
la causalité adéquate doit être retenue, nonobstant la prédisposition
constitutionnelle de l'assuré (cf. ATF 115 V 140 sv. consid. 6c/bb,
409 consid. 5c/bb).