Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 123 V 113



123 V 113

19. Arrêt du 18 juin 1997 dans la cause Commune de V. contre Caisse de
compensation du canton de Fribourg et Tribunal administratif du canton
de Fribourg Regeste

    Art. 103 lit. a, Art. 98a Abs. 3 OG, Art. 84 Abs. 1 AHVG:
Beschwerdebefugnis einer Gemeinde. Eine Gemeinde ist befugt, gegen
eine den Erlass der Beitragspflicht betreffende Kassenverfügung einer
Ausgleichskasse Beschwerde zu führen, sofern sie aufgrund des kantonalen
Rechts zur vollständigen Bezahlung der Minimalbeiträge für den betroffenen
Versicherten verpflichtet ist.

Sachverhalt

    A.- Les 26 avril et 14 juin 1996, la Caisse de compensation du
canton de Fribourg a notifié à la Commune de V. plusieurs décisions par
lesquelles elle accordait la remise des cotisations à divers assurés et
imposait parallèlement le paiement de la cotisation minimum à la commune.

    B.- La Commune de V. a recouru auprès du Tribunal administratif du
canton de Fribourg.

    Par décision présidentielle du 4 octobre 1996, les recours ont été
joints et déclarés irrecevables, au motif que la commune n'avait pas
qualité pour recourir.

    C.- La Commune de V. interjette un recours de droit administratif en
concluant à l'annulation du jugement cantonal et au renvoi de la cause
au Tribunal administratif pour qu'il entre en matière sur les recours.

    La caisse de compensation s'en remet à justice, tandis que l'Office
fédéral des assurances sociales renonce à se déterminer.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Aux termes de l'art. 11 al. 2 LAVS, le paiement de la
cotisation minimum qui mettrait une personne obligatoirement assurée
dans une situation intolérable peut être remis, sur demande motivée,
après consultation d'une autorité désignée par le canton de domicile. Le
canton de domicile versera la cotisation minimum pour ces assurés. Les
cantons peuvent faire participer les communes de domicile au paiement de
ces cotisations.

    Dans sa loi d'application de la loi fédérale sur l'assurance-vieillesse
et survivants et de la loi fédérale sur l'assurance-invalidité du 9
février 1994 (RSF 841.1.1), le canton de Fribourg a désigné le conseil
communal comme autorité habilitée à donner un préavis et il a fixé que
le paiement de la cotisation minimum est à la charge de la commune de
domicile de l'assuré (art. 15).

Erwägung 2

    2.- Dans une jurisprudence ancienne, non remise en question à ce jour,
le Tribunal fédéral des assurances a jugé que la commune de domicile de
l'assuré, mis au bénéfice d'une remise de cotisations selon l'art. 11 al. 2
LAVS, n'est pas recevable à former recours contre la décision de remise
(arrêt M. du 29 décembre 1956, publié dans la RCC 1957, p. 226). Dans cet
arrêt, le tribunal avait nié à la commune la qualité de partie intéressée
en se fondant d'une part sur le texte des art. 84 LAVS et 32 RAVS et
d'autre part sur le fait que la commune ne pouvait être atteinte par la
décision que par ricochet.

    Le jugement attaqué se fonde précisément sur cette jurisprudence.

Erwägung 3

    3.- Les principes relatifs à la qualité pour recourir devant le
Tribunal fédéral déterminent également la recevabilité du recours
devant l'autorité de première instance. En effet, en vertu de la force
dérogatoire du droit fédéral et conformément au principe de l'unité de la
procédure, la qualité pour agir devant les autorités administratives et
juridictionnelles cantonales dont les décisions sont sujettes au recours
de droit administratif ne peut être subordonnée à des conditions plus
strictes que celles qui régissent la qualité pour recourir au sens de
l'art. 103 let. a OJ et de l'art. 48 let. a PA, de même contenu (ATF
114 V 95 sv. consid. 2a, 111 V 350 consid. 2b, 110 V 150 consid. 2c et
les références; DTA 1983 no 9 p. 41 consid. 2b; GRISEL, Traité de droit
administratif, p. 901 ch. 2; GYGI, Bundesverwaltungsrechtspflege, 2e éd.,
p. 151 ch. 2.2). Cette jurisprudence a été codifiée à l'art. 98a al. 3 OJ,
entré en vigueur le 15 février 1992.

    Il en résulte que la qualité de la Commune de V. pour recourir devant
le Tribunal administratif du canton de Fribourg devra être examinée selon
les principes découlant de l'art. 103 OJ et non au regard des dispositions
cantonales de procédure dans la mesure où celles-ci admettraient moins
largement cette qualité.

Erwägung 4

    4.- Selon l'art. 103 let. c OJ, a qualité pour recourir au Tribunal
fédéral par la voie du recours de droit administratif toute autre personne,
organisation ou autorité à laquelle la législation fédérale accorde le
droit de recours.

    En règle ordinaire, une copie de la décision de remise de cotisations
sociales, notamment en matière d'AVS, prise par la caisse de compensation,
est notifiée au canton de domicile de l'assuré; le canton peut attaquer
la décision conformément à la procédure prévue à l'art. 84 LAVS (art. 32
al. 3 RAVS). Dès lors que la loi n'étend pas à la commune de domicile
le droit de recours accordé au canton, celle-ci ne peut justifier de sa
qualité pour recourir en invoquant l'article 103 let. c OJ.

Erwägung 5

    5.- a) Aux termes de l'art. 103 let. a OJ, a qualité pour recourir
quiconque est atteint par la décision attaquée et a un intérêt digne
de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée. La jurisprudence
considère comme intérêt digne de protection, au sens de cette disposition,
tout intérêt pratique ou juridique à demander la modification ou
l'annulation de la décision attaquée que peut faire valoir une personne
atteinte par cette dernière. L'intérêt digne de protection consiste
ainsi en l'utilité pratique que l'admission du recours apporterait au
recourant ou, en d'autres termes, dans le fait d'éviter un préjudice de
nature économique, idéale, matérielle ou autre que la décision attaquée
lui occasionnerait (ATF 120 V 39 consid. 2b, 119 V 87 consid. 5b
et les références; cf. aussi ATF 121 II 174 consid. 2b, 119 Ib 183
sv. consid. 1c). L'intérêt doit être direct et concret; en particulier,
la personne doit se trouver dans un rapport suffisamment étroit avec la
décision; tel n'est pas le cas de celui qui n'est atteint que de manière
indirecte ou médiate (ATF 122 II 132 consid. 2b et la jurisprudence citée).

    Les collectivités publiques peuvent se prévaloir de l'art. 103 let. a
OJ si elles sont atteintes de la même manière que des administrés. A ces
conditions, une commune est dès lors recevable à agir en justice pour
sauvegarder son patrimoine administratif et financier, en particulier
si la décision lui impose une prestation pécuniaire, par exemple le
paiement d'une indemnité d'expropriation (ATF 118 Ib 616 consid. 1b;
GRISEL, op.cit., p. 905). En revanche, l'intérêt public à une application
correcte et uniforme du droit ne suffit pas (ATF 112 Ia 62 consid. 1b,
110 V 129 consid. 1).

    Conformément à ces principes, le Tribunal fédéral des assurances, dans
un arrêt rendu ce même jour, a nié la qualité pour recourir d'une autorité
communale d'assistance dans un litige en matière d'assurance-chômage
relatif à l'aptitude au placement d'un requérant d'asile obligé de quitter
la Suisse. Dans un tel cas, l'autorité communale, bien qu'elle ait
fourni des prestations d'assistance à l'assuré, n'a pas un intérêt digne
de protection direct et concret à l'annulation de la décision prise par
l'assurance-chômage: elle n'a pas un droit (indépendant) aux prestations
d'assurance litigieuses; en outre, l'avantage financier qu'elle pourrait
retirer à l'issue du litige dépendait en l'occurrence de conditions -
pratiquement irréalisables - liées à une cession de créance valable de
l'assuré ou à un versement en mains de tiers selon l'art. 124a OACI
(arrêt en la cause Fürsorgebehörde de la commune de Z.).

    b) En l'espèce, la situation est différente. La commune a pour
tâche de défendre ou de sauvegarder son patrimoine administratif et
financier. Par conséquent, il y a, pour elle, un intérêt de fait à
demander la modification ou l'annulation de la décision de la caisse
de compensation qui lui a été notifiée parce qu'elle l'oblige à des
prestations. La recourante ne défend pas en l'espèce uniquement un
intérêt public à l'application correcte du droit fédéral, mais aussi ses
intérêts financiers, dans la même mesure que le ferait un privé atteint
par cette décision. Dès lors, il s'agit sans conteste d'un intérêt
de nature pécuniaire au sens de la jurisprudence puisque, en vertu de
la législation cantonale, la commune de domicile est tenue de prendre
totalement à sa charge le paiement de la cotisation minimum des assurés
qui en sont dispensés, charge que le droit fédéral permet expressément aux
cantons de reporter sur les communes. Par ailleurs, cet intérêt financier
est immédiat, dès lors que la commune est débitrice d'une obligation qui
découle pour elle directement des décisions litigieuses.

    Au regard de l'article 103 let. a OJ, la qualité pour recourir
de la commune est donnée dès lors que les conditions permettant de
retenir l'existence d'un intérêt digne de protection sont réalisées. Ces
considérations amènent à retenir que la recourante est également légitimée
à recourir devant l'autorité cantonale (art. 98a al. 3 OJ).

    c) Le changement de la jurisprudence rendue en 1956 auquel conduit
cette solution découle en réalité de la modification du texte de
l'art. 103 OJ par la loi fédérale du 20 décembre 1968 (RO 1969 787, 793)
et de la jurisprudence y relative. Jusqu'alors, seul avait qualité pour
recourir celui qui invoquait une atteinte à des intérêts juridiquement
protégés, soit la violation d'une norme ayant pour but la protection
des droits subjectifs. La version nouvelle de l'OJ pose la condition de
l'intérêt digne de protection. La prise en compte d'effets-réflexes a
pour conséquence que l'accès légitime à la protection judiciaire est donné
lorsque le recourant établit que l'acte qu'il conteste lui fait supporter
un préjudice ou le prive d'un avantage dans sa situation propre et qu'il
prétend que cet acte est irrégulier (MOOR, Droit administratif, t. II
p. 409 ss). Elle a conduit à une extension de la qualité pour recourir,
ce qu'il y a lieu de prendre en considération dans le cas particulier.

    d) Il suit de là que le recours est bien fondé. La cause doit dès lors
être renvoyée au Tribunal administratif pour qu'il entre en matière sur les
recours de la commune, pour autant que - outre la qualité pour recourir -
les autres conditions de recevabilité de ces recours soient remplies.

Erwägung 6

    6.- (Frais)