Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 123 IV 49



123 IV 49

7. Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation pénale du 20 février 1997
dans la cause Ministère public du canton de Vaud contre B. (pourvoi en
nullité) Regeste

    Art. 63 StGB; Strafzumessung.

    Bemessung der Strafe für sexuelle Handlungen mit Kindern. Fall, in
dem eine Gefängnisstrafe von fünf Monaten gegenüber einem in mittlerem
Grade vermindert zurechnungsfähigen Täter als unhaltbar milde erachtet
worden ist (E. 2).

Sachverhalt

    A.- Le 18 mai 1995 vers 16 heures, B., né le 4 septembre 1945, a
attiré une fillette (née le 18 juillet 1987), qu'il ne connaissait pas,
dans les toilettes publiques d'une gare, en prétextant qu'elle devait
l'aider en tenant son sac; il s'est enfermé avec elle dans une cabine
des WC. Il l'a d'abord serrée contre lui, puis l'a relâchée. Il a ensuite
sorti son pénis et baissé le pantalon et le sous-vêtement de l'enfant; il
s'est assis sur la cuvette, a attiré la fillette à lui pour poser, voire
frotter, son sexe contre le sien. Il a encore donné un baiser lingual à
la fillette, contraignant celle-ci à ouvrir la bouche. Il s'est levé et
a éjaculé dans la cuvette.

    Par le passé, B. a été condamné à cinq reprises, d'octobre 1965 à
novembre 1984, pour attentat à la pudeur des enfants.

    B. a été soumis à une expertise psychiatrique. L'expert a conclu qu'il
souffrait d'une faiblesse d'esprit, sous la forme d'un développement mental
incomplet, ainsi que de troubles de l'équilibre psychique, ce qui n'était
pas de nature à atténuer la faculté d'apprécier le caractère illicite
de l'acte, mais pouvait atténuer dans une moyenne mesure la faculté de
se déterminer d'après cette appréciation. Selon l'expert, il existe un
risque de nouveaux actes punissables; une hospitalisation serait inutile,
vu l'échec des tentatives précédentes; en revanche, un encadrement médical
ambulatoire est indispensable, dont les chances de succès ne seraient
cependant pas notablement amoindries par l'exécution d'une peine privative
de liberté; l'expertisé est capable de comprendre le sens d'une punition.

    B.- Par jugement du 17 juin 1996, le Tribunal correctionnel du
district d'Aigle a condamné B., pour actes d'ordre sexuel avec un enfant
et actes d'ordre sexuel commis sur une personne incapable de résistance,
à cinq mois d'emprisonnement et au paiement des frais de la cause. Il
a considéré que la responsabilité restreinte de l'accusé justifiait une
réduction de la peine d'un tiers.

    Statuant sur un recours du Ministère public portant sur la quotité
de la peine, la Cour de cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois,
par arrêt du 25 juillet 1996, a estimé que la responsabilité restreinte
de l'accusé justifiait une atténuation de la peine de l'ordre de 50%,
de sorte que la peine infligée, certes clémente, ne constituait pas un
abus du pouvoir d'appréciation.

    C.- Le Ministère public du canton de Vaud se pourvoit en nullité à la
Cour de cassation pénale du Tribunal fédéral contre cet arrêt. Invoquant
une violation de l'art. 63 CP, il soutient que la peine infligée, sur
la base des éléments retenus, est exagérément clémente et conclut à
l'annulation de la décision attaquée.

    L'intimé n'a pas formulé d'observations dans le délai imparti.

    Le Tribunal fédéral admet le pourvoi, annule l'arrêt attaqué et
renvoie la cause à l'autorité cantonale pour qu'il soit statué à nouveau.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- (Recevabilité).

Erwägung 2

    2.- a) Le recourant soutient que la peine, de 5 mois d'emprisonnement,
qui a été infligée à l'intimé est exagérément clémente et viole l'art. 63
CP.

    Cette disposition, tout en exigeant que la peine soit fondée sur la
faute, n'énonce pas de manière détaillée et exhaustive les éléments qui
doivent être pris en considération, ni les conséquences exactes qu'il faut
en tirer quant à la fixation de la peine; elle confère donc au juge un
large pouvoir d'appréciation, de sorte que, même si elle examine librement
s'il y a eu violation du droit fédéral, la Cour de cassation ne peut
admettre un pourvoi en nullité portant sur la quotité de la peine que si la
sanction a été fixée en dehors du cadre légal, si elle est fondée sur des
critères étrangers à l'art. 63 CP, si les éléments d'appréciation prévus
par cette disposition n'ont pas été pris en compte ou enfin si la peine
apparaît exagérément sévère ou clémente au point que l'on doive parler
d'un abus du pouvoir d'appréciation (ATF 122 IV 156 consid. 3b p. 160;
121 IV 3 consid. 1a p. 4, 193 consid. 2a p. 195; 120 IV 136 consid. 3a
p. 143 et les arrêts cités). Les éléments pertinents pour la fixation
de la peine ont été exposés de manière détaillée dans les ATF 117 IV 112
consid. 1 et 116 IV 288 consid. 2a, auxquels il convient de se référer.

    b) Il n'est pas contesté en l'espèce que la peine a été fixée dans
le cadre légal, en suivant les critères posés par l'art. 63 CP et sans se
laisser guider par des considérations étrangères à cette disposition. Le
recourant admet que l'autorité cantonale a énuméré tous les éléments qui
sont pertinents en l'espèce pour fixer la peine. Il soutient cependant
qu'il y a une discordance entre la motivation présentée et sa conclusion
chiffrée (cf. ATF 121 IV 49 consid, 2a/bb p. 57; B. Corboz, La motivation
de la peine, RJB 131/1995 p. 33), en ce sens que les éléments retenus
appellent logiquement une peine sensiblement plus élevée. Il fait donc
valoir que la peine est exagérément clémente au point de constituer un
abus du pouvoir d'appréciation.

    c) En suivant les conclusions de l'expert, l'autorité cantonale a
retenu que l'accusé était affecté d'un développement mental incomplet et
de troubles de l'équilibre psychique qui atténuaient dans une moyenne
mesure sa faculté de se déterminer d'après son appréciation (correcte)
du caractère illicite de l'acte. Il s'agit là de constatations de fait
qui lient la Cour de cassation. Elles conduisent à la conclusion que la
responsabilité de l'accusé est restreinte au sens de l'art. 11 CP.

    Lorsqu'il admet une responsabilité restreinte, le juge doit réduire
la peine en conséquence (ATF 118 IV 1 consid. 2 p. 4 s.), sans être tenu
toutefois d'opérer une réduction linéaire. Les juges de première instance
avaient admis une réduction de peine d'un tiers, qui a été portée à 50%
par la cour cantonale, dont la décision fait seule l'objet du pourvoi
(art. 268 ch. 1 PPF). Se référant à l'expertise, dont elle retient les
constatations de fait, la cour cantonale a insisté sur le retard mental
de l'accusé et a estimé, s'agissant d'une responsabilité moyennement
restreinte, qu'une réduction de peine de 50% était justifiée. On ne saurait
dire, sur la base des faits retenus, qu'elle a abusé sur ce point de son
large pouvoir d'appréciation.

    d) L'accusé a été condamné à plusieurs reprises pour des actes de même
nature, mais la dernière condamnation, datant de 1984, est suffisamment
ancienne pour que l'autorité cantonale n'ait pas abusé de son pouvoir
d'appréciation en considérant que les mauvais antécédents ne pouvaient
jouer en l'espèce qu'un rôle aggravant restreint dans la fixation de
la peine.

    e) En suivant le raisonnement adopté par la cour cantonale pour
justifier la peine, il faut se demander si une peine équivalent au
double de celle prononcée, soit dix mois d'emprisonnement, ne serait pas
exagérément clémente à l'endroit d'un accusé qui aurait commis les mêmes
actes en étant pleinement responsable.

    L'accusé, âgé de 49 ans, a abordé une fillette, âgée de 7
ans. Exploitant les bons sentiments de celle-ci, il l'a amenée perfidement,
sous prétexte qu'elle lui rende un service, en un lieu sordide, à savoir
des toilettes publiques. Il l'a enfermée avec lui dans une cabine, étant
précisé que le jeune âge de la fillette la rendait incapable de toute
résistance. Outre le baiser lingual, il a sorti son membre et l'a frotté
contre le sexe, qu'il a dénudé, de la fillette, s'excitant jusqu'à éjaculer
peu après. Cet acte s'apparente fortement à l'acte sexuel, étant rappelé
que celui-ci est consommé dès que l'homme introduit partiellement son
membre dans le vagin (ATF 107 IV 178 ss). La conjonction des sexes dénudés,
par sa signification et son caractère traumatisant pour une enfant, est
assurément plus grave que les actes (baisers et attouchements) qui ont
entraîné pour l'accusé, en tenant compte de sa responsabilité restreinte,
une peine de dix mois d'emprisonnement en 1984. Le risque de perturber
gravement la victime apparaît d'autant plus grand que les faits se sont
déroulés en un lieu sordide, avec un inconnu, dans un contexte dépourvu
de toute affection.

    Un tel comportement, par le mépris d'autrui qu'il implique, dénote
une faute lourde. D'emblée, on ne conçoit pas - contrairement à ce que
soutient l'autorité cantonale - qu'un homme pleinement responsable qui
adopterait le même comportement puisse être condamné seulement à une
peine de dix mois d'emprisonnement.

    Une telle peine, pour une personne pleinement responsable, évoque
ce que l'on rencontre habituellement pour une banale infraction contre
le patrimoine. Si l'on tient compte de la hiérarchie des intérêts
juridiquement protégés (ATF 120 IV 136 consid. 3b p. 144), il faut
relever que l'on se trouve en présence d'une atteinte grave à la liberté
et à l'honneur sexuel avec mise en danger du développement d'un mineur,
ce qui montre déjà, vu les intérêts lésés, que l'appréciation de la cour
cantonale n'est pas satisfaisante.

    Si l'on examine également l'éventail légal de la peine (cf. B. Corboz,
La motivation de la peine, RJB 131/1995 p. 26), il faut noter que
l'art. 191 CP prévoit une peine maximum de dix ans de réclusion, qui
peut être augmentée de moitié (art. 68 ch. 1 CP) en raison du concours
avec l'art. 187 ch. 1 CP. Sous cet angle également, compte tenu des
possibilités légales, il apparaît que la cour cantonale, pour un accusé
pleinement responsable, a fixé la peine à un niveau extrêmement bas.

    Une brève comparaison avec les cas soumis à la Cour de cassation ces
dernières années confirme cette appréciation. Certes, toute comparaison
est discutable, en raison des nombreux paramètres qui interviennent dans la
fixation de la peine (ATF 120 IV 136 consid. 3a p. 144). Il faut d'ailleurs
faire preuve de retenue lorsqu'on prend en considération des condamnations
prononcées sous l'empire de l'ancien droit. Il est d'autre part évident
que les cas sont plus graves lorsque l'auteur a agi à plusieurs reprises,
qu'il y a plusieurs victimes ou qu'il a abusé d'un rapport d'autorité. Sous
ces réserves, un bref tour d'horizon révèle les condamnations suivantes:

    - l'auteur commet à plusieurs reprises des actes d'ordre sexuel avec
un enfant de 4 ans et 11 mois; il est condamné à deux ans et demi de
réclusion; un pourvoi en nullité du Ministère public est admis dans un
sens aggravant (ATF 120 IV 194 ss);

    - un maître d'école commet à plusieurs reprises des actes d'ordre
sexuel avec plusieurs élèves; il est condamné à 5 ans et demi de réclusion
et son pourvoi est rejeté (ATF 120 IV 6 ss).

    - un moniteur de sport a fait subir à plusieurs reprises des actes
d'ordre sexuel à deux de ses élèves âgés de moins de 16 ans; il est
condamné à 6 ans de réclusion et son pourvoi est rejeté (ATF 119 IV
309 ss).

    - l'auteur commet un abus sexuel par la violence sur une jeune fille
de 15 ans et demi; il est condamné à trois ans et demi de réclusion et
son pourvoi est rejeté (arrêt du 12 juin 1991 dans la cause 6S.108/1991).

    - un maître de théâtre amateur, sa responsabilité étant légèrement
restreinte, commet des actes analogues à l'acte sexuel sur un garçon de
13 ans; il est condamné à 2 ans et demi de réclusion et le pourvoi est
rejeté (arrêt du 12 mars 1990 dans la cause 6S.56/1990).

    - l'auteur commet l'acte sexuel avec la fille de son amie, consentante,
qui n'a pas encore 16 ans; il est condamné à deux ans d'emprisonnement
et le pourvoi est rejeté (arrêt du 5 juin 1984 dans la cause Str.234/1994).

    Il apparaît d'emblée que le cas d'espèce, en raison de l'âge de la
victime et de l'absence de consentement, est plus grave que le dernier cas
cité, jugé il est vrai sous l'empire de l'ancien droit. Il se rapproche
plutôt du premier cas cité, mais il apparaît moins grave, surtout parce
que l'auteur n'a agi qu'à une seule reprise. Il faut relever que les
cas cités ne permettent pas de déduire que la peine prononcée était la
moins lourde qui puisse être compatible avec le droit fédéral. Même en
tenant compte de ces correctifs, il résulte de cette comparaison que
les faits retenus en l'espèce conduisaient à s'attendre, pour un accusé
pleinement responsable, à une peine se situant aux alentours de 18 à
30 mois de privation de liberté, étant rappelé que le juge dispose d'un
large pouvoir d'appréciation.

    En retenant en l'espèce qu'un homme pleinement responsable aurait été
condamné à 10 mois d'emprisonnement et que l'accusé, compte tenu de sa
responsabilité restreinte, devait être condamné à 5 mois d'emprisonnement,
la cour cantonale a tiré une conclusion choquante des faits retenus et elle
a ainsi violé l'art. 63 CP, en abusant de son pouvoir d'appréciation. Le
pourvoi doit donc être admis.

Erwägung 3

    3.- (Suite de frais).