Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 123 III 442



123 III 442

68. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile du 12 août 1997 dans la
cause G. et J.-Cl. B. contre P. B. (recours en réforme) Regeste

    Errungenschaft im Sinne von Art. 197 ZGB.

    AHV- und IV-Renten, deren Zweck im Ersatz von Erwerbseinkommen bei
Erreichen des Pensionsalters, bei Invalidität oder im Todesfall besteht,
fallen gemäss Art. 197 Abs. 2 Ziff. 2 ZGB in die Errungenschaft (E. 2d).

Sachverhalt

    Les époux B. se sont mariés en Allemagne en 1953, sans conclure
de contrat de mariage, et ont eu deux fils. Victime d'une sclérose en
plaques, le mari a dû cesser son activité il y a une vingtaine d'années;
il dépend aujourd'hui totalement d'une aide extérieure pour tous les
actes indispensables. Il perçoit une rente suisse de 6'202 fr.90 et une
rente allemande de 903,68 DM. L'aîné des fils a quitté le domicile de ses
parents à 21 ans, alors que le cadet y vit toujours. L'épouse est décédée
le 29 mars 1993 à Genève, sans laisser de testament. Au jour du décès,
le compte SBS du mari laissait apparaître un montant de 453'174 fr.78,
alors que le compte UBS de l'épouse présentait un solde de 24 fr.15. Les
époux avaient acheté un chalet le 26 décembre 1980.

    Le 17 septembre 1993, le fils aîné a ouvert action en partage contre
son père et son frère. En dernière instance cantonale, il a obtenu que le
montant des libéralités consenties à ce dernier soit arrêté à 367'900 fr.,
le rapport à la succession sur ces libéralités à 183'950 fr. et la part
lui revenant à:

    - 1/8 en propriété sur le chalet (32'500 fr.);

    - 1/8 en propriété sur la totalité de la valeur du mobilier garnissant
ledit chalet;

    - 1/8 du montant de 453'174 fr.78 inscrit au compte SBS du père,
soit 56'646 fr.85;

    - 1/8 du montant de 24 fr.15 inscrit au compte UBS de la mère, soit
3 fr.;

    - 1/8 de la valeur des libéralités s'élevant à 367'900 fr. consenties
au frère cadet, soit 45'987 fr.50.

    Par la voie du recours en réforme, le père et le frère cadet ont requis
le Tribunal fédéral d'ordonner la prise en compte de montants différents
pour certains postes ci-dessus (190'000 fr. pour les libéralités, 95'000
fr. pour le rapport, 43'947 fr.13 et 23'750 fr. pour la part revenant
au frère aîné, respectivement, sur le compte SBS et sur la valeur des
libéralités). Le Tribunal fédéral a rejeté le recours dans la mesure où
il était recevable et a confirmé l'arrêt cantonal attaqué.

Auszug aus den Erwägungen:

                   Extrait des considérants:

Erwägung 2

    2.- d) Les recourants soutiennent enfin que la cour cantonale a mal
appliqué l'art. 197 al. 2 ch. 2 CC en qualifiant d'acquêts les rentes
versées par l'assurance invalidité.

    Le Tribunal fédéral n'a jamais tranché la question de savoir si
les rentes AVS et AI sont des acquêts ou des biens propres. Un arrêt
du TFA du 27 février 1989 (ZAK, Zeitschrift für die Ausgleichskassen
1989, p. 397) qualifie une rente AVS d'acquêt sans soulever la question
posée. La grande majorité de la doctrine est d'avis qu'il s'agit d'acquêts
(H. DESCHENAUX/P.-H. STEINAUER, Le nouveau droit matrimonial, p. 272 s.,
282 ss; H. HAUSHEER/R. REUSSER/TH. GEISER, Berner Kommentar, n. 58 ad
art. 197; M. STETTLER/F. WAELTI, Droit civil IV, Le régime matrimonial,
n. 256 p. 138). Ces auteurs fondent leur opinion sur l'art. 197 al. 2
ch. 2 CC, qui prévoit que les acquêts comprennent notamment les sommes
versées par des institutions de prévoyance en faveur du personnel ou
par des institutions d'assurance ou de prévoyance sociale. Piotet, qui
exprime l'opinion minoritaire, soutient que ces sommes font partie des
biens propres. Il relève que le Message du Conseil fédéral relatif au
projet de loi (FF 1979 II 1288) ne mentionne pas expressément les rentes
AVS et AI, alors qu'il évoque les indemnités de l'assurance chômage. Selon
cet auteur, l'art. 197 al. 2 ch. 2 CC n'engloberait pas les sommes
versées par les assurances sociales, ces institutions ne figurant pas
expressément dans le texte de la disposition (PAUL PIOTET, Le régime
matrimonial suisse de la participation aux acquêts, p. 117 ss). A ce
propos, HAUSHEER/REUSSER/GEISER (op.cit., n. 60 ad art. 197 CC) relèvent
que les textes allemand et italien de l'art. 197 al. 2 ch. 2 CC mentionnent
expressément les sommes versées par les assurances sociales ("Leistungen
aus Sozialversicherungen", "Prestazioni di assicurazioni sociali"). Ils
expliquent en outre que, dans le texte français, l'adjectif "sociale" se
rapporte autant à l'institution d'assurance qu'à celle de prévoyance, et
ils rappellent le principe de l'équivalence des trois versions de la loi.

    Les textes des langues officielles sont équivalents. Lorsque ceux-ci
diffèrent l'un par rapport à l'autre, il y a lieu de déterminer au moyen
des méthodes d'interprétation usuelles lequel des textes exprime le
sens véritable de la disposition (ATF 76 IV 237 consid. 5 p. 240). La
loi s'interprète en premier lieu d'après sa lettre (interprétation
littérale). La méthode d'interprétation littérale se détruit elle-même
dès le moment où les trois textes officiels présentent des divergences
ou même seulement des nuances importantes pour l'application du droit
(H. Deschenaux, Le titre préliminaire du Code civil, in Traité de droit
civil suisse, t. II,1, p.77). Si le texte légal n'est pas absolument
clair, si plusieurs interprétations de celui-ci sont possibles, le juge
recherchera la véritable portée de la norme en la dégageant de sa relation
avec d'autres dispositions légales, de son contexte (interprétation
systématique), du but poursuivi, singulièrement de l'intérêt protégé
(interprétation téléologique), ainsi que de la volonté du législateur
telle qu'elle ressort notamment des travaux préparatoires (interprétation
historique) (ATF 122 III 469 consid. 5a, p. 474 et arrêts cités). Ceux-ci
ne seront toutefois pris en considération que s'ils donnent une réponse
claire à une disposition légale ambiguë et qu'ils ont trouvé expression
dans le texte même de la loi (ATF 122 III 324 consid. 7a et arrêts cités).

    Selon le message, dont le sens est identique et clair dans les
trois langues, le but des institutions d'assurance ou de prévoyance
sociale mentionnées à l'art. 197 al. 2 ch. 2 CC est de remédier à
l'influence de l'âge, de l'invalidité, de la maladie, des accidents
sur l'aptitude à exercer une activité lucrative, et les prestations de
ces institutions tendent notamment à remplacer la rémunération tirée
d'une telle activité. Ce but justifie de traiter ces prestations comme
acquêts par analogie avec le produit du travail (FF 1979 II p. 1288(fr),
1231(it), 1307 (d)). DESCHENAUX/STEINAUER (op.cit., p. 273) et Hausheer
(in: Kommentar zum schweizerischen Privatrecht, Zivilgesetzbuch I,
éd. HONSELL/VOGT/GEISER, n. 19 ad art. 197) soulignent que les prestations
mentionnées se substituent au revenu du travail qui fait défaut. Or les
rentes AVS et AI ont justement pour but de remplacer le revenu du travail
manquant du fait de l'âge, de l'invalidité ou du décès. Il apparaît
dès lors que ce sont les versions italienne et allemande de la loi qui
expriment le véritable sens de la norme en faisant clairement des rentes
AVS et AI des acquêts. Que le message (loc.cit.) mentionne explicitement
les prestations de l'assurance chômage alors que les autres assurances
sociales n'y sont pas énumérées nommément ne signifie nullement que la
disposition en cause n'englobe pas les rentes AVS et AI. Le message
mentionne l'assurance chômage à part pour préciser qu'elle doit être
assimilée aux sommes versées par les assurances sociales. C'est une
clarification nécessaire car, en cas de chômage, l'origine de l'absence
de revenu du travail n'est pas l'âge, la maladie, la vieillesse, etc.,
mais le manque de travail.