Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 123 III 317



123 III 317

49. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 7 juillet 1997 dans la
cause C. contre X. S.A. (recours en réforme) Regeste

    Mietzinserhöhung; Begriff des orts- oder quartierüblichen Mietzinses
(Art. 269a lit. a OR; Art. 11 VMWG).

    Anwendung der verschiedenen in Art. 11 Abs. 1 VMWG vorgesehenen
Kriterien für die Bestimmung der orts- oder quartierüblichen Mietzinse
(E. 4a und b); Voraussetzungen für den Beizug von Statistiken
(E. 4c/cc). Erfordernis des vom Vermieter zu erbringenden Nachweises,
dass die Vergleichsmietzinse der Senkung des Hypothekarzinses angepasst
worden sind (Bestätigung der Rechtsprechung; E. 4d).

Sachverhalt

    A.- C. loue, depuis 1968, un appartement de sept pièces et demie,
d'une surface de 171 m2, avec deux balcons de 3,60 m2 chacun, au deuxième
étage d'un immeuble de la rue Liotard, à Genève. Le loyer annuel a été
fixé à 6'156 fr., par contrat de bail du 18 juillet 1972, puis a été
régulièrement augmenté. Par avis de majoration du 9 juin 1986, il a été
porté à 10'380 fr. A la suite d'une contestation élevée par le locataire,
les parties sont tombées d'accord pour l'arrêter à ce montant-là avec
effet au 1er mai 1987.

    En 1988, l'appartement en question a été vendu à X. S.A.

    B.- Par avis de majoration du 17 juin 1994, la bailleresse a déclaré
vouloir porter le loyer annuel de l'appartement à 22'500 fr. dès le
1er octobre 1994. Elle justifiait la hausse de loyer par référence
à l'art. 269a let. a, b et e CO. Le locataire n'a pas accepté cette
majoration et la tentative de conciliation a échoué.

    Le 15 novembre 1994, X. S.A. a ouvert action contre C. devant le
Tribunal des baux et loyers du canton de Genève en concluant à ce que
le loyer mensuel fût fixé à 1'850 fr., sans les charges. A l'appui de
cette conclusion, elle invoquait principalement le critère des loyers
comparatifs.

    Statuant le 15 avril 1996, la juridiction saisie a fixé le loyer annuel
de l'appartement loué par le défendeur à 22'500 fr. dès le 1er octobre
1994. Elle a considéré, en substance, que la bailleresse avait établi,
en produisant sept exemples d'appartements comparables à l'appartement
litigieux, que le loyer en cause n'excédait pas les limites des loyers
usuels dans le quartier.

    Par arrêt du 18 novembre 1996, la Chambre d'appel en matière de baux
et loyers du canton de Genève a rejeté l'appel interjeté par le défendeur
et confirmé le jugement de première instance.

    C.- Le défendeur interjette un recours en réforme au Tribunal
fédéral. Il conclut à la mise à néant de l'arrêt attaqué, à la constatation
du caractère disproportionné de l'augmentation de loyer litigieuse et,
partant, à l'annulation de celle-ci. A titre subsidiaire, il sollicite le
renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision dans le sens
des considérants. Plus subsidiairement, il requiert que la possibilité
lui soit offerte de prouver ses assertions.

    La demanderesse propose le rejet du recours et la confirmation de
l'arrêt entrepris.

    Le Tribunal fédéral admet partiellement le recours, annule l'arrêt
attaqué et renvoie la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision.

Auszug aus den Erwägungen:

                   Extrait des considérants:

Erwägung 4

    4.- Ne sont, en règle générale, pas abusifs les loyers qui se situent
dans les limites des loyers usuels dans la localité ou dans le quartier
(art. 269a let. a CO). Selon l'art. 11 Ordonnances sur le bail à loyer
et le bail à ferme d'habitations et de locaux commerciaux (OBLF, RS
221.213.11), les loyers déterminants pour le calcul des loyers usuels
dans la localité ou le quartier sont les loyers des logements et des
locaux commerciaux comparables à la chose louée quant à l'emplacement,
la dimension, l'équipement, l'état et l'année de construction
(al. 1). N'entrent pas en ligne de compte les loyers découlant du fait
qu'un bailleur ou un groupe de bailleurs domine le marché (al. 3). Les
statistiques officielles doivent être prises en considération (al.
4). Ces prescriptions correspondent à celles qui figuraient à l'art. 15
al. 1 let. a AMSL (seul le critère de la dimension y a été expressément
ajouté; cf. TOBLER, Der Schutz des Mieters vor missbräuchlichen
Mietzinsen, in: HANGARTNER (édit.), Das neue Mietrecht, St-Gall 1991,
p. 98), de sorte que la jurisprudence relative à cette norme demeure
valable pour l'interprétation des dispositions actuellement en vigueur.

    a) La notion de loyer usuel dans la localité ou le quartier relève
du droit. Il s'agit d'une question que le Tribunal fédéral peut revoir
librement lorsqu'il est saisi d'un recours en réforme, raison pour laquelle
l'autorité cantonale doit indiquer exactement les critères de comparaison
utilisés par elle. Pour le reste, le juge du fait devra procéder à des
comparaisons concrètes, à la lumière des critères susmentionnés, en ayant
égard à l'évolution récente des loyers exigés pour les locaux retenus comme
éléments de comparaison. L'utilisation de statistiques suppose des données
chiffrées, suffisamment différenciées et dûment établies sur la situation,
l'agencement et l'état de la chose louée, comme aussi sur la période de
construction. Le fardeau de la preuve incombe au bailleur (ATF 114 II
361 consid. 3; voir aussi: ATF 122 III 257 consid. 4b p. 262; 108 II 130
consid. 3b p. 134; TERCIER, Les contrats spéciaux, 2e éd., n. 2005). Pour
pouvoir tirer des conclusions qui offrent quelque sécurité, il faut
disposer, en règle générale, de cinq éléments de comparaison au moins, qui
présentent, pour l'essentiel, les mêmes caractéristiques que le logement
litigieux quant à l'emplacement, la dimension, l'équipement, l'état et
l'année de construction (ATF 114 II 361 consid. 4b p. 364; WEBER/ZIHLMANN,
Kommentar zum Schweizerischen Privatrecht, Obligationenrecht I, 2e éd.,
n. 2 ad art. 269a CO; LACHAT/STOLL, Das neue Mietrecht für die Praxis,
2e éd., p. 212; LACHAT/MICHELI, Le nouveau droit du bail, 2e éd., p. 220;
ZIHLMANN, Das Mietrecht, 2e éd., p. 145; GRATZ, Mietzinsgestaltung, Zurich
1995, p. 82; GMÜR/THANEI, Mietzinserhöhung, Fachheft Mietrecht n. 3,
Zurich 1993, p. 19; TRACHSEL, Leitfaden zum Mietrecht, p. 63; d'un autre
avis: Commentaire de l'USPI, n. 19 ad art. 269a CO).

    b) Le défendeur loue un appartement de sept pièces et demie, d'une
surface de 171 m2, avec deux balcons de 3,60 m2 chacun, au deuxième étage
d'un bâtiment de la rue Liotard, qui a été construit en 1907. La Chambre
d'appel a comparé cet appartement avec sept autres logements qu'elle a
décrits dans son arrêt en reprenant les constatations faites à ce propos
par le Tribunal des baux et loyers. Trois de ces logements, comprenant
chacun sept pièces et ayant une surface de 160 m2, se trouvent dans un
immeuble sis au no 27 de la rue des Délices, qui a été édifié en 1902;
ils occupent le premier, le deuxième et le quatrième étages de cet immeuble
et leurs loyers annuels sont, respectivement, de 20'052 fr. pour les deux
premiers et de 29'016 fr. pour le troisième. Trois autres appartements,
comprenant chacun six pièces et demie pour une surface de 142 m2, ainsi
qu'un balcon de 6 m2, se situent aux deuxième, troisième et quatrième
étages d'un immeuble qui a été construit en 1905 au no 6 de la rue
du Château; leur usage a été concédé moyennant un loyer qui se monte,
respectivement, à 17'424 fr., 24'180 fr. et 18'600 fr. par an. Quant
au dernier appartement, qui se trouve au no 92 de la rue Saint-Jean,
au troisième étage d'un immeuble construit entre 1910 et 1920, ses six
pièces et demie couvrent une surface de 130 m2 et il en coûte 24'000
fr. par an à son locataire pour y habiter.

    aa) Les trois immeubles dans lesquelles se trouvent les appartements
retenus par la cour cantonale comme éléments de comparaison sont assurément
comparables à l'immeuble où se situe l'appartement du défendeur, pour ce
qui est de la période de construction. Ils ont, en effet, été construits
en 1902, en 1905 et durant la période comprise entre 1910 et 1920,
alors que l'immeuble de la demanderesse a été édifié en 1907. Les quatre
immeubles, qui datent tous des deux premières décennies de ce siècle,
sont donc comparables sous cet angle (LACHAT/STOLL, op.cit., p. 212/213;
LACHAT/MICHELI, op.cit., p. 220, note de pied 13; Commentaire de l'USPI,
n. 17 ad art. 269a CO).

    bb) Pour ce qui est de leur état d'entretien, les immeubles à comparer
avec celui de la demanderesse ne présentent pas de différences importantes
par rapport à ce dernier.

    Selon la description qu'en a faite la Chambre d'appel, l'immeuble
sis à la rue des Délices 27 a une toiture en bon état. L'ascenseur a été
remplacé en 1954 - il est donc plus vieux que l'ascenseur qui se trouve
dans l'immeuble en cause, lequel a été remplacé en 1986 - et la chaudière
en 1984. Les vitrages sont simples et les cuisines d'époque. Les salles
de bains sont équipées d'une baignoire encastrée avec des faïences à
mi-hauteur. L'état des appartements est considéré comme vétuste en ce qui
concerne les salles de bains et les installations électriques. L'immeuble
se trouvant à la rue du Château no 6 a été rénové dans les années
quatre-vingt mais ne possède ni ascenseur ni buanderie. Les vitrages
sont simples. Les salles de bains ont été rénovées mais les cuisines
sont anciennes. Enfin, l'immeuble sis au no 92 de la rue Saint-Jean se
trouve dans un état moyen; sa façade a été repeinte, mais la toiture et la
ferblanterie sont en très mauvais état. Ni l'ascenseur, ni la chaudière, ni
les alimentations en eau chaude et froide n'ont été remplacés. L'immeuble
n'a pas de buanderie. Il est équipé de vitrages simples. Les baignoires
sont presque toutes encastrées mais la hauteur du carrelage reste trop
basse. L'équipement sanitaire a été rénové sans inclure le remplacement
des colonnes.

    Il ressort de cette description qu'aucun des trois immeubles entrant
en ligne de compte n'a été modernisé de fond en comble et ne se trouve
dans un très bon état d'entretien, ce qui est également le cas, grosso
modo, de l'immeuble de la demanderesse.

    cc) S'agissant de la question de la dimension, les trois appartements
de sept pièces et les trois autres appartements de six pièces et demie
peuvent être comparés avec l'appartement loué par le défendeur. Certes,
le nombre de pièces revêt, en principe, une importance primordiale
(ZIHLMANN, op.cit., p. 146), ce qui exclut généralement toute possibilité
de comparaison entre des logements ne comprenant pas le même nombre de
pièces. Cependant, la dimension du logement et la répartition des volumes
constituent aussi des critères de comparaison déterminants (Commentaire
de l'USPI, n. 13 ad art. 269a CO; LACHAT/STOLL, op.cit., p. 213). De
ce point de vue, le fait que l'appartement litigieux a une demi-pièce,
respectivement une pièce, de plus que les appartements précités apparaît
moins décisif en l'occurrence que le critère de la surface, étant donné
les grandes dimensions des logements à comparer. Ce dernier critère,
s'il permet d'inclure dans la comparaison avec l'appartement de 171 m2
occupé par le défendeur les trois appartements de sept pièces dont la
surface est de 160 m2, voire, à la rigueur, les trois appartements de six
pièces et demie ayant une surface de 142 m2, exclut en revanche d'étendre
la comparaison au dernier appartement dont la surface n'est que de 130 m2.

    dd) Quant à l'équipement des appartements proposés comme éléments de
comparaison, le jugement de première instance, auquel se réfère la Chambre
d'appel, précise que les appartements de sept pièces ne sont pas équipés
d'une cuisine et d'une salle de bains modernes, que la peinture et les
papiers peints y sont défraîchis et que leurs installations électriques
sont vétustes. Il indique, par ailleurs, que l'état d'entretien des
trois appartements de six pièces et demie est qualifié de normal par le
régisseur, que leur salle de bains a été rénovée, mais que leur cuisine
est d'époque. L'appartement sis dans l'immeuble de la rue de Saint-Jean
est décrit, enfin, comme présentant un état d'entretien normal. Le vitrage
simple qui y a été installé entraîne certains inconvénients au niveau du
bruit. L'équipement sanitaire a été rénové, mais il n'a pas été procédé au
changement des colonnes. La salle de bains est équipée d'une baignoire
encastrée, mais le carrelage reste trop bas. Ainsi, on ne constate pas
de différences notables entre les appartements pris comme éléments de
comparaison et l'appartement litigieux pour ce qui est de leur équipement
respectif. Le contraire n'est d'ailleurs pas allégué.

    ee) Il faut également se reporter au jugement de première instance
pour examiner si, du point de vue de leur emplacement, les appartements
mentionnés par la demanderesse et l'appartement loué par le défendeur
sont comparables. Sans doute n'y trouve-t-on pas de constatation expresse
quant à la proximité entre les premiers et ce dernier. Toutefois, la seule
référence aux codes postaux, différents, des appartements entrant en ligne
de compte ne suffit pas pour exclure que ceux-ci se situent dans le même
quartier. Au demeurant, le défendeur ne démontre pas avoir déjà contesté,
devant les juridictions cantonales et dans le respect des prescriptions de
procédure applicables, que les appartements pris comme base de comparaison
se trouvent dans le même quartier que l'appartement loué par lui. Cela
étant, la proximité dans l'espace n'implique pas nécessairement l'existence
d'une situation comparable (cf. déjà RENÉ MÜLLER, Der Bundesbeschluss
über Massnahmen gegen Missbraüche im Mietwesen vom 30. Juli 1972, thèse
Zurich 1976, p. 179). D'autres facteurs doivent également être pris en
considération: infrastructure du quartier, présence de commerces, facilités
de transport, installations sportives, écoles, etc. L'arrêt attaqué n'en
dit mot, mais le défendeur ne soutient pas qu'il existerait, à cet égard,
des différences importantes entre les sept appartements retenus par la
cour cantonale et le sien. Au sujet de la situation des appartements du
point de vue des nuisances (bruit intérieur et extérieur, odeurs, p. ex.),
le jugement de première instance ne fournit que des indications sommaires;
on y apprend, en particulier, que l'appartement de la rue de Saint-Jean est
bien placé en terme de vue, cette qualité étant toutefois contrebalancée
par le bruit dû à la proximité des voies ferrées. En tout état de cause,
le défendeur ne soutient pas que la situation respective des différents
appartements interdirait toute comparaison dans le cas présent.

    c) L'arrêt attaqué mentionne sept objets de comparaison, ce qui serait
en soi suffisant au regard de la jurisprudence précitée, qui en exige un
minimum de cinq.

    aa) Dans son calcul, la cour cantonale a cependant ignoré totalement
le fait que six de ces sept objets de comparaison consistent en réalité
dans deux groupes comprenant chacun trois appartements sis dans le même
immeuble, ce dernier étant de surcroît géré par la même société. Comme
il n'est ni allégué ni constaté que les deux immeubles où se trouvent
ces appartements seraient soumis au régime de la propriété par étages,
il faut en déduire que seuls trois immeubles appartenant à des tiers
ont été proposés comme éléments de comparaison par la demanderesse. Or,
la comparaison avec trois immeubles, qui plus est appartenant chacun au
même propriétaire, ne permet pas de tirer des conclusions valables en ce
qui concerne le niveau général des loyers du quartier, même si chacun des
différents appartements se trouvant dans le même immeuble présente des
caractéristiques comparables. Il n'est donc pas possible d'en inférer que
les loyers exigés pour ces appartements correspondent aux loyers usuels
dans le quartier, au sens de l'art. 269a let. a CO. Par conséquent, comme
le nombre minimum d'objets de comparaison n'était pas atteint en l'espèce,
la Chambre d'appel a considéré à tort que la demanderesse avait réussi
à établir que le loyer litigieux se situait dans les limites des loyers
usuels dans le quartier.

    bb) Au demeurant, même s'il fallait admettre exceptionnellement la
possibilité que les différents logements sis dans un immeuble appartenant
au même propriétaire ne soient pas traités comme un seul objet de
comparaison, les loyers exigés pour de tels logements ne pourraient pas
être traités de la même manière que ceux des logements appartenant à des
propriétaires distincts et ne se trouvant pas dans le même immeuble,
s'agissant de déterminer le niveau usuel des loyers. Ainsi, dans la
présente espèce, les sept objets de comparaison ne pourraient pas
être tenus pour suffisants sans plus ample examen, quand bien même on
voudrait tenir compte, d'une part, du fait qu'il n'existe plus beaucoup
d'appartements comparables à l'appartement litigieux sur le marché de la
location, la plupart d'entre eux ayant été vendus, et, d'autre part, de
ce que les deux groupes de trois appartements proposés par la demanderesse
comme objets de comparaison ne présentent aucune homogénéité interne quant
au niveau des loyers exigés pour ces logements. En effet, cette dernière
circonstance commande précisément une certaine prudence dans la prise en
compte de ces loyers. A cet égard, on relèvera, par exemple, que les loyers
annuels des appartements sis aux premier et deuxième étages de l'immeuble
de la rue des Délices 27 sont identiques (20'052 fr.), tandis que le loyer
de l'appartement sis au quatrième étage est nettement plus élevé (29'016
fr.), sans que l'on s'explique pour quelle raison un supplément pour la
différence d'étage n'a pas été imposé dans le premier cas. Par ailleurs,
si un tel supplément suffit sans doute à expliquer la différence entre
les loyers exigés pour les appartements se trouvant, respectivement,
au deuxième étage (17'424 fr.) et au quatrième étage (18'600 fr.) de
l'immeuble sis à la rue du Château 6, le loyer réclamé pour l'appartement
du troisième étage (24'180 fr.), dont les caractéristiques sont à peu près
les mêmes que celles des deux autres appartements ne s'explique guère d'un
point de vue objectif. Aussi, à supposer que, pour la détermination des
loyers usuels dans le quartier, il soit possible, à titre exceptionnel,
de prendre en considération séparément chacun des trois appartements sis
dans les deux immeubles précités, encore faudrait-il vérifier, eu égard
à ces différences de loyer inexpliquées, que les loyers de comparaison
ne soient eux-mêmes pas abusifs (cf. lettre d ci-dessous), examen auquel
la cour cantonale n'a pas procédé.

    cc) La cour cantonale souligne, dans son arrêt, que la statistique
officielle fait état d'un loyer mensuel moyen de 2'169 fr.90 pour un
appartement de sept pièces et demie situé dans un immeuble à loyers libres
construit avant 1951.

    L'utilisation de statistiques suppose des données chiffrées,
suffisamment différenciées et dûment établies sur la situation,
l'agencement et l'état de la chose louée, comme sur la période de
construction (ATF 114 II 361 consid. 3 p. 363). De telles données
font manifestement défaut en l'espèce, dès lors que la Chambre d'appel
mentionne une statistique officielle qui n'indique que le loyer moyen
de tous les appartements de sept pièces et demie se trouvant dans des
immeubles construits avant 1951 (selon LACHAT/MICHELI, op.cit., p. 220,
note de pied 13, à Genève, les statistiques retiennent notamment les
tranches d'âge suivantes: avant 1900, 1900-1920, 1921-1946, 1947-1960,
etc.), sans égard à leur situation, à l'agencement et à la dimension des
pièces, à l'état d'entretien et à l'équipement, ainsi qu'à l'année de
construction des différents appartements retenus pour l'établissement de
la statistique. En l'occurrence, celle-ci ne constitue pas une statistique
au sens de l'art. 11 al. 4 OBLF, dans la mesure où elle ne fournit pas
de données suffisamment différenciées sur les éléments essentiels pour
déterminer les loyers usuels dans le quartier ou la localité.

    d) Pour le reste, la cour cantonale ne pouvait pas se contenter
de mentionner les objets de comparaison et de les décrire. Elle aurait
dû procéder à des comparaisons concrètes avec l'appartement litigieux,
en fonction des critères fixés à l'art. 11 al. 1 OBLF, et tenir compte,
ce faisant, de l'évolution récente des loyers des appartements retenus
comme éléments de comparaison (ATF 114 II 361 consid. 3 p. 363; 108
II 135 consid. 1 p. 137; 106 II 356 consid. 5d p. 363). A cet égard,
la demanderesse invite le Tribunal fédéral à renoncer à sa jurisprudence
exigeant des bailleurs la preuve que les loyers de comparaison ont réagi
à la baisse du taux d'intérêt hypothécaire. Elle cite, à l'appui de sa
requête, un arrêt genevois qui préconise l'abandon de la jurisprudence
fédérale, entre autres motifs, parce qu'elle revient à corriger une donnée
de fait - l'état du marché - au moyen de données relevant d'un calcul
des coûts et qu'elle imposerait, de surcroît, au bailleur une preuve
quasiment impossible à rapporter. Ces motifs ne sont certes pas dénués de
toute pertinence, notamment sous l'angle économique en ce qui concerne
le premier d'entre eux. Il n'en demeure pas moins que la jurisprudence
actuelle, fermement établie, correspond à l'esprit de la législation
relative à la protection contre les loyers abusifs, laquelle a précisément
pour but d'éviter que le bailleur obtienne un rendement excessif de la
chose louée. Or, il serait contraire à ce but de prendre comme éléments de
comparaison, pour juger du caractère abusif d'un loyer donné, des loyers
qui sont eux-mêmes abusifs parce que les bailleurs concernés ne les ont
pas adaptés à l'évolution des facteurs de baisse. L'art. 11 al. 3 OBLF va
d'ailleurs dans ce sens, en tant qu'il exclut la prise en considération des
loyers découlant du fait qu'un bailleur ou un groupe de bailleurs domine le
marché. Il en ressort clairement que la détermination des loyers usuels ne
saurait obéir aux seules lois du marché. Au demeurant, même si l'on fait
abstraction de la distorsion pouvant exister entre l'offre et la demande
de logements, le fait de s'en tenir purement et simplement à l'état du
marché à un moment donné peut également aboutir à un résultat choquant:
ainsi, à supposer qu'une baisse du taux hypothécaire de référence doive
prendre effet entre le moment de la notification de l'augmentation de
loyer litigieuse et l'entrée en vigueur de celle-ci, il ne serait pas
admissible de faire abstraction de cette baisse dans l'examen des loyers
comparatifs et de s'en tenir au niveau auquel se situaient ces derniers
au moment de la notification de la hausse de loyer contestée. Quant aux
difficultés de preuve évoquées dans l'arrêt cité par la demanderesse,
qu'il ne faut d'ailleurs pas exagérer, elles ne sauraient justifier
une entorse au système légal, tel qu'il a été voulu par le législateur
fédéral. Partant, une modification de la jurisprudence actuelle en la
matière ne s'impose pas.

    On cherche en vain, dans l'arrêt attaqué, des indications au
sujet de l'évolution des loyers des appartements pris comme objets
de comparaison. Il est pourtant notoire que le taux hypothécaire a
sensiblement baissé ces dernières années, après une période de hausse,
ce qui aurait dû conduire à une réduction des loyers des appartements en
question. Or, la cour cantonale n'indique pas depuis quand ces appartements
sont loués, ni de quelle manière leurs loyers respectifs ont évolué dans
un passé récent.

    En outre, les juges précédents n'ont pas procédé à des comparaisons
de prix concrètes, mais se sont bornés à entériner la méthode de calcul
appliquée par l'autorité de première instance, c'est-à-dire à diviser le
loyer global de chacun des sept appartements entrant en ligne de compte
par le nombre de pièces s'y trouvant, pour obtenir un prix unitaire. Or,
la référence à un tel prix (en fonction du nombre de pièces, du prix au m2
ou d'autres facteurs) n'est admissible que s'il existe des statistiques
fiables pour tous les objets de comparaison, ce qui n'est pas le cas
en l'occurrence. A ce défaut, l'autorité cantonale ne saurait faire
l'économie d'une comparaison concrète, à l'aide des critères mentionnés
à l'art. 11 al. 1 OBLF, entre les logements retenus par elle à cette fin
et l'appartement litigieux. En particulier, lorsque le nombre d'objets
de comparaison est limité, la détermination du loyer usuel nécessite une
pesée soigneuse des avantages et des inconvénients inhérents à chacun
de ces objets, tant il est vrai que, même si ceux-ci présentent des
caractéristiques communes, ils n'ont jamais une valeur identique sur
le marché de la location. Une telle recherche n'a pas été effectuée en
l'espèce, et la simple description des appartements retenus comme éléments
de comparaison ne saurait en tenir lieu.

    e) Au terme de cet examen, il apparaît, pour les raisons sus-indiquées,
que la demanderesse n'a pas produit un nombre suffisant d'objets de
comparaison, même si l'on prend en considération séparément chacun des
exemples qu'elle a fournis. Dans ces conditions, il s'impose de renvoyer
la cause à la cour cantonale afin qu'elle examine les autres facteurs
(relatifs) de hausse invoqués par la bailleresse pour justifier, en partie,
la majoration de loyer litigieuse.