Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 122 I 81



122 I 81

14. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour Civile du 25 mars 1996 dans la
cause époux B. et D. contre époux L. (recours de droit public) Regeste

    Art. 2 übBest. BV; Art. 57 Abs. 5 OG, Art. 688 ZGB, Art. 64 und 65
des Genfer Einführungsgesetzes zum Zivilgesetzbuch (EGZGB); Grundsatz,
wonach die staatsrechtliche Beschwerde vorweg zu prüfen ist, Abstand
der Anpflanzungen.

    In der staatsrechtlichen Beschwerde ist vorfrageweise zu prüfen,
welches Recht - Bundesrecht oder kantonales Recht - auf die Sanktion der
Bestimmungen anwendbar ist, welche die Kantone in Anwendung von Art. 688
ZGB zum Abstand der Anpflanzungen erlassen haben (E. 1).

    Art. 688 ZGB enthält einen echten, zuteilenden Vorbehalt im Sinne
von Art. 5 ZGB, der die Kantone nicht nur dazu berechtigt, die Abstände
festzulegen, welche die Eigentümer für die Anpflanzungen einzuhalten haben;
vielmehr gibt er ihnen ausserdem das Recht, Sanktionen für die Verletzung
der Bestimmungen vorzusehen, die sie auf diesem Gebiet erlassen (E. 2).

Sachverhalt

    A.- Les époux B. et les époux D. sont respectivement propriétaires de
deux villas construites sur des parcelles sises côte à côte sur un terrain
en forte déclivité. Ce terrain est par sa partie inférieure contigu au
fonds des époux L., sur lequel ceux-ci ont construit une villa. Le long
et de part et d'autre de la limite rectiligne séparant la parcelle des
époux L. de celles des époux B. et D. se trouvent des arbres, arbustes
et buissons formant un boqueteau d'une largeur de quatre à six mètres et
d'une hauteur moyenne de six à huit mètres.

    Par jugement du 21 octobre 1994, le Tribunal de première instance
de Genève a condamné les époux L. à élaguer à leurs frais, jusqu'à une
hauteur de deux mètres, les plantations se trouvant à moins de deux mètres
des fonds voisins.

    Statuant sur appel le 15 septembre 1995, la Cour de justice du canton
de Genève a ordonné au Conservateur du registre foncier d'inscrire à la
charge des parcelles propriété respectivement des époux B. et D. la mention
de la déchéance des droits des propriétaires de ces fonds d'exiger une
quelconque restriction de hauteur ou de distance des plantations existant
actuellement sur la parcelle propriété des époux L.

    Le Tribunal fédéral a rejeté le recours de droit public formé par les
époux B. et D., qui ont également interjeté un recours en réforme contre
l'arrêt cantonal.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Selon l'art. 57 al. 5 OJ, lorsque la décision attaquée est en même
temps l'objet d'un recours en réforme et d'un recours de droit public,
il est sursis en règle générale à l'arrêt sur le premier jusqu'à droit
connu sur le second. Cette disposition est justifiée par le fait que,
si le Tribunal fédéral devait d'abord examiner le recours en réforme,
son arrêt se substituerait à la décision cantonale, rendant ainsi sans
objet le recours de droit public, faute de décision susceptible d'être
attaquée par cette voie; la jurisprudence déroge toutefois à ce principe
lorsque la décision sur le recours de droit public n'a aucune influence
sur le sort du recours en réforme, ou lorsque ce dernier paraît devoir être
admis même sur la base des constatations de fait de l'autorité cantonale,
critiquées dans le recours de droit public (ATF 120 Ia 377 consid. 1 et
les arrêts cités).

    Dans leur recours en réforme, les recourants reprochent à l'autorité
cantonale d'avoir violé le principe de la force dérogatoire du droit
fédéral (art. 2 disp. trans. Cst.). Ils estiment que la violation par
les intimés des règles cantonales sur la distance des plantations prises
en vertu de l'art. 688 CC ne peut être sanctionnée sur la base de règles
de droit cantonal, mais uniquement en vertu du droit fédéral (art. 641
al. 2 CC). Dans l'éventualité où ce point de vue ne serait pas suivi,
les recourants se plaignent parallèlement, par la voie du recours de droit
public, d'une application arbitraire de la loi genevoise d'application du
code civil et du code des obligations, du 7 mai 1981 (LACC), notamment des
art. 64 et 65 de cette loi, qui déterminent les distances des plantations
et la sanction de leur inobservation.

    En principe, la violation par le droit cantonal du principe de la force
dérogatoire du droit fédéral constitue une violation du droit fédéral qui
doit être invoquée dans le recours en réforme lorsque celui-ci est ouvert
(ATF 120 II 28 consid. 3, 119 II 183 consid. 3, 116 II 215 consid. 2b). Le
recours de droit public est donc en principe exclu (art. 84 al. 2 OJ). En
l'occurrence, il paraît toutefois judicieux de trancher préjudiciellement
dans le recours de droit public la question du droit applicable. En effet,
les moyens soulevés dans le recours en réforme ne sont recevables que si
la présente cause appelle l'application du droit fédéral; si en revanche
les prétentions des recourants relèvent exclusivement du droit cantonal,
c'est dans le recours de droit public qu'il y aura lieu d'examiner si la
cour cantonale a appliqué ce droit de manière arbitraire (cf. ATF 120 Ia
377 consid. 1).

Erwägung 2

    2.- Critiquant la jurisprudence cantonale à laquelle se réfère la Cour
de justice (SJ 1988 p. 75), les recourants soutiennent que le législateur
genevois a violé le principe de la force dérogatoire du droit fédéral en
adoptant l'art. 65 LACC. Cette disposition prévoit que le propriétaire
d'un fonds peut exiger la suppression notamment de plantations établies
sur le fonds voisin à une distance inférieure à celle fixée à l'art.
64 (al. 1), que toutefois, cette faculté cesse s'il a laissé s'écouler
trente ans après l'établissement de ces plantations (al. 2), et que
mention de la déchéance peut être faite au registre foncier sur le vu
de la reconnaissance écrite du propriétaire ou d'un jugement définitif
(al. 3). Selon les recourants, cette disposition est contraire à l'art. 641
al. 2 CC, qui régirait seul les conséquences d'une telle violation.

    a) L'art. 2 disp. trans. Cst. fait obstacle à l'adoption ou à
l'application de règles cantonales qui éludent des prescriptions de droit
fédéral ou qui en contredisent le sens ou l'esprit, notamment par leur
but ou les moyens qu'elles mettent en oeuvre, ou qui empiètent sur des
matières que le législateur a réglementé de façon exhaustive (ATF 119 Ia
348 consid. 2c et les arrêts cités). Le Tribunal fédéral vérifie avec un
plein pouvoir d'examen, et non sous l'angle restreint de l'arbitraire,
si la norme cantonale critiquée est compatible avec le droit fédéral
(ATF 120 Ia 89 consid. 2a et les arrêts cités).

    L'art. 688 CC prévoit que la législation cantonale peut
déterminer la distance que les propriétaires sont tenus d'observer
dans leurs plantations, selon les diverses espèces de plantes et
d'immeubles. Contrairement à l'opinion émise par les recourants, cette
disposition contient une réserve propre au sens de l'art. 5 CC, qui est
attributive (PIOTET, Le droit privé vaudois de la propriété foncière,
1991, n. 99; STEINAUER, Les droits réels, t. II, 2e éd., 1994, n. 1755 et
1830a; LIVER, Berner Kommentar, Band I/1, 1962, n. 32 ad art. 5; JAGMETTI,
in Schweizerisches Privatrecht, Band I, 1969, p. 251). Selon la doctrine
unanime, l'art. 688 CC autorise les cantons non seulement à déterminer
les distances que les propriétaires sont tenus d'observer pour leurs
plantations, mais aussi à arrêter les sanctions de la violation des règles
qu'ils posent dans ce domaine, en particulier en prévoyant un délai de
prescription (PIOTET, op.cit., n. 100 et les références, not. LINDENMANN,
Bäume und Sträucher im Nachbarrecht, 1980, p. 19/20, et MEIER-HAYOZ, Berner
Kommentar, Band IV/1/3, 1975, n. 74 ad art. 687/688). Certes, HAAB admet
que la violation des règles sur les distances des plantations peut être
sanctionnée par une action en cessation du trouble fondée sur l'art. 641
al. 2 CC (Zürcher Kommentar, Band IV/1, 1977, n. 16 ad art. 687/688);
il n'exclut toutefois pas que les cantons puissent adopter parallèlement
des règles de sanction, comme l'admettent d'autres auteurs (MEIER-HAYOZ,
op.cit., n. 75/76 ad art. 687/688).

    b) Il résulte de ce qui précède que le législateur genevois n'a pas
violé le principe de la force dérogatoire du droit fédéral en adoptant
des règles sanctionnant la violation des prescriptions cantonales sur les
distances des plantations et que c'est avec raison que la Cour de justice
s'est fondée sur l'art. 65 LACC pour statuer en la cause. Par conséquent,
en tant qu'il reproche à l'autorité cantonale une application arbitraire
du droit cantonal applicable en l'espèce, le recours est recevable au
regard de l'art. 84 al. 1 let. a et al. 2 OJ. Dirigé contre une décision
finale prise en dernière instance cantonale pour violation de l'art. 4
Cst. et déposé dans le délai légal, il est également recevable au regard
des art. 87 et 89 al. 1 OJ.