Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 122 I 213



122 I 213

30. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public du 16 juillet 1996
dans la cause A. SA contre Tribunal administratif du canton de Genève et
Département de justice et police et des transports du canton de Genève
(recours de droit public) Regeste

    Art. 41ter Abs. 2 BV und Art. 2 MWSTV: Vereinbarkeit der Genfer
Billetsteuer (droit des pauvres, "Armensteuer") mit der Mehrwertsteuer.

    Obwohl die Armensteuer nach dem Genfer Steuergesetz vom 9. November
1887 gewisse Ähnlichkeiten mit der Mehrwertsteuer aufweist, namentlich
soweit sie ebenfalls Umsätze auf bestimmten Dienstleistungen belastet oder
vom Endverbraucher zu tragen ist, unterscheidet sie sich wesentlich von
ihr durch die Tatsache, dass sie eine besondere Verbrauchssteuer ist,
die ausschliesslich ganz bestimmte Dienstleistungen belastet, nämlich
Unterhaltungsanlässe, während die Mehrwertsteuer eine allgemeine Steuer auf
dem gesamten Inlandkonsum ist (mit Ausnahme der von der Steuer befreiten
oder ausgeschlossenen Leistungen). Die Armensteuer und die Mehrwertsteuer
sind somit nicht gleichgeartete Steuern im Sinne von Art. 41ter Abs. 2 BV
(E. 2 u. 3).

Sachverhalt

    A.- La société A. SA, à Genève, exploite en particulier le
cabaret-dancing "Y.".

    Par arrêt du 21 novembre 1995, le Tribunal administratif du canton de
Genève a rejeté le recours déposé par A. SA à l'encontre de la décision
prise le 28 février 1995 par le Département de justice et police et
des transports du canton de Genève (ci-après: le Département cantonal)
assujettissant le cabaret-dancing "Y." au paiement du droit des pauvres
prévu aux art. 443 ss de la loi générale genevoise du 9 novembre 1887 sur
les contributions publiques (ci-après: LCP). Le Tribunal administratif
a notamment considéré que le droit des pauvres n'était pas contraire aux
art. 41ter al. 2 Cst. et 2 de l'ordonnance du 22 juin 1994 régissant la
taxe sur la valeur ajoutée (OTVA; RS 641.201) car même s'il était, comme
la taxe sur la valeur ajoutée (ci-après: TVA), un impôt de consommation
supporté en principe par le consommateur, il s'en distinguait cependant
par ses caractéristiques de perception et par le fait qu'il était un
impôt spécial dont l'objet et le but étaient liés à la nature particulière
d'une activité économique, à savoir le divertissement.

    A. SA recourt au Tribunal fédéral et lui demande notamment, avec
suite de frais et dépens, d'annuler l'arrêt rendu le 21 novembre 1995
par le Tribunal administratif. Se fondant sur l'art. 41ter al. 2 Cst.,
elle prétend en particulier ne plus être assujettie au droit des pauvres
depuis l'entrée en vigueur de la TVA au 1er janvier 1995.

    Le Tribunal fédéral a rejeté le recours dans la mesure où il était
recevable.

Auszug aus den Erwägungen:

                  Extrait des considérants:

Erwägung 2

    2.- a) Selon l'art. 41ter Cst., la Confédération peut notamment
percevoir un impôt sur le chiffre d'affaires (taxe sur la valeur ajoutée)
(al. 1 lettre a) et des impôts de consommations spéciaux sur les
marchandises (al. 1 lettre b) qui peuvent frapper le pétrole, d'autres
huiles minérales, le gaz naturel et les produits résultant de leur
raffinage, ainsi que les carburants qui proviennent d'autres matières
(al. 4 lettre a), la bière (al. 4 lettre b), les automobiles et leurs
parties constitutives (al. 4 lettre c). Les chiffres d'affaires que la
Confédération frappe d'un impôt selon l'art. 41ter lettres a ou b Cst.,
ou qu'elle déclare exonérés, ne peuvent être soumis par les cantons et
les communes à un impôt du même genre (art. 41ter al. 2 Cst.). Ce dernier
principe est repris à l'art. 2 OTVA qui prévoit que ce que l'ordonnance
soumet à la TVA ou qu'elle déclare exonéré ne peut être soumis par les
cantons ou les communes à un impôt du même genre.

    b) L'autorité intimée a considéré que le droit des pauvres au sens
des art. 443 ss LCP n'était pas un impôt du même genre que la TVA,
de sorte que sa perception ne violait pas l'art. 41ter al. 2 Cst.

    La recourante prétend que la Confédération a la compétence exclusive
de prélever des impôts de consommation frappant le chiffre d'affaires;
le droit des pauvres, qui est une contribution de ce type, serait du même
genre que la TVA et violerait par conséquent l'art. 41ter al. 2 Cst.,
question que le Tribunal fédéral examine librement.

Erwägung 3

    3.- a) aa) Entrée en vigueur le 1er janvier 1995 (art. 86 OTVA),
la TVA est un impôt général sur la consommation intérieure, qui, à la
différence de l'ancien impôt sur le chiffre d'affaires, frappe également
les services. Bien qu'aucune disposition légale ne l'impose, la TVA doit,
dans l'intention du législateur, être supportée par le consommateur final
dans la mesure où les conditions du marché le permettent. Cet impôt doit
respecter le principe de la neutralité concurrentielle et ne poursuivre
aucun fin incitative. Son produit est affecté à concurrence de 5 % à
des mesures en faveur des classes de revenus inférieures (cf. art. 41ter
al. 3 Cst. et 8 al. 4 Disp. trans. Cst.). Il s'agit d'une contribution
proportionnelle frappant les livraisons de biens et les prestations de
services, calculée sur le chiffre d'affaires des entreprises assujetties
à tous les stades du processus économique, avec déduction de l'impôt
préalable. Selon l'art. 27 al. 1 OTVA, elle est perçue au taux de 2 %
sur certaines livraisons de biens et prestations de services (lettre a)
et à 6,5 % sur toutes les autres opérations soumises à l'impôt (lettre b)
(cf. également art. 41ter al. 1bis et al. 3 Cst.; art. 8 al. 2 lettre e
et art. 8bis Disp. trans. Cst.; Bulletin officiel de l'Assemblée fédérale
1993, Conseil National, séance du 15 mars 1993, p. 337 ss; JEAN-MARC
RIVIER, L'interprétation des règles de droit qui régissent la Taxe à la
Valeur Ajoutée, in Archives 63 p. 355 ss, p. 356-358; ERNST HÖHN/KLAUS
A. VALLENDER, Commentaire de la Constitution fédérale de la Confédération
suisse, n. 14 et 33 ss ad art. 41ter). Outre la TVA, la Confédération peut
prélever des impôts de consommation spéciaux, soit des impôts indirects
qui frappent la consommation de certains produits (art. 41ter al. 1 lettre
b et al. 4 Cst.; HÖHN/VALLENDER, op.cit., n. 15 ad art. 41ter).

    bb) Le droit des pauvres est régi par les art. 443 ss LCP ainsi que
par les art. 28 ss du règlement genevois du 11 août 1993 concernant les
spectacles et les divertissements ainsi que la perception du droit des
pauvres. Il est dû sur tous genres de spectacles, sur toutes manifestations
artistiques, littéraires, musicales ou sportives, sur les conférences,
expositions, exhibitions, fêtes, dont l'entrée est payante de quelque
manière que ce soit, sur les bals et dancings, la musique dans les
établissements publics, sur les loteries et tombolas de tous genres, les
jeux divers et en général sur tous divertissements quelconques (art. 444
al. 1 LCP). Cette taxe est perçue par l'entreprise ou les organisateurs
responsables pour le compte du canton (art. 444 al. 2 LCP). Elle s'élève
en principe à 13 % de la recette brute versée par l'ensemble des clients,
spectateurs, auditeurs ou autres participants (art. 445 LCP). Lorsqu'il
est perçu un droit d'entrée, tout bénéficiaire d'entrée de faveur gratuite
est, en principe, astreint au paiement d'une taxe fixe (art. 446 al. 1
LCP). Pour les installations foraines, ou lorsqu'il n'est pas délivré de
billets d'entrée permettant un contrôle exact des recettes, la taxe peut
être convertie par le Département de justice et police en une somme fixe
payée par représentation ou séance, par semaine ou par mois (art. 447
LCP). Le produit de cette taxe, sous déduction des frais de perception
et de contrôle, est versé à raison de 70 % à l'Hospice général et de 30 %
à l'Etat pour être affecté à des activités et à des entreprises en faveur
de la santé publique et du bien-être social (art. 443 al. 1 LCP).

    Selon l'autorité intimée, le droit des pauvres est un impôt de
consommation frappant un certain type de dépenses, soit celles de
divertissement. Il se distinguerait notamment de la TVA par son caractère
spécial: d'une part, il ne viserait qu'un secteur bien déterminé et limité
de l'activité économique, et, d'autre part, il ne serait pas un impôt
général destiné à financer l'activité de l'Etat mais une contribution
spéciale en faveur des plus démunis, mise à la charge de ceux qui peuvent
s'offrir des divertissements (cf. WALTER DIGGELMANN, Die Billetsteuer in
der Schweiz, thèse Zurich 1944, p. 16 ss; ERNST BLUMENSTEIN/PETER LOCHER,
System des Steuerrechts, 5ème éd., Zurich 1995, p. 198). Le droit des
pauvres se distinguerait par ailleurs de la TVA par ses modalités de
perception car il est monophase et non pas multiphase.

    b) La doctrine est partagée en ce qui concerne la compatibilité des
impôts sur les divertissements avec la TVA. Certains auteurs estiment,
comme la recourante, que tous les impôts de consommation qui portent
sur des transactions et que la volonté du législateur destine à être
répercutés sur le consommateur, sont des impôts "du même genre" au sens de
l'art. 41ter al. 2 Cst. (HÖHN/VALLENDER, op.cit., n. 22 ad art. 41ter). A
cet égard, les impôts sur les divertissements (appelés également "impôts
sur les billets") ont pour but de grever les spectateurs assistant à des
représentations divertissantes même si les lois créant de tels impôts
déclarent que c'est l'organisateur qui est contribuable. Dans la mesure où
l'intention du législateur est déterminante, il faudrait admettre que de
tels impôts sont du même genre que la TVA puisqu'ils prétendent frapper
le consommateur final (HÖHN/VALLENDER, op.cit., n. 32 ad art. 41ter;
apparemment du même avis, STEPHAN KUHN/PETER SPINNLER, Mehrwertsteuer,
Muri/Berne 1994, p. 36-37, Ergänzungsband, Muri/Berne 1994, p. 17;
cf. également JÜRG BRAND/JÖRG R. BÜHLMANN/HANS DERKSEN, Mehrwertsteuer
und kantonale/kommunale Billettsteuer im Lichte von Art. 41ter Abs. 2 BV,
in Revue fiscale 1996 p. 303 ss).

    D'autres auteurs affirment au contraire que les impôts sur
les divertissements sont compatibles avec la TVA (ULRICH CAVELTI,
Verfassungsrechtliche Probleme der Mehrwertsteuerverordnung, in
L'Expert-comptable suisse 1995, p. 1087 ss, p. 1088; MARKUS REICH,
Einführung in das Recht der Mehrwertsteuer, in ROLF H. WEBER/DANIEL
THÜRER/ROGER ZÄCH, Das Recht der Mehrwertsteuer, Zurich 1994, p. 12-13;
ALOIS CAMENZIND/NIKLAUS HONAUER, Handbuch zur neuen Mehrwertsteuer,
Berne 1995, p. 51-52).

    La doctrine discute également la question de savoir si le droit des
cantons et des communes de prélever des impôts sur les divertissements
ne dépendrait pas de l'usage effectif qu'a fait la Confédération
des compétences qui lui sont conférées par les art. 41ter Cst. et 8
Disp. trans. Cst. et si ce droit ne serait pas limité aux chiffres
d'affaires qui sont exclus du champ d'application de la TVA en vertu
des art. 8 al. 2 lettre b Disp. trans. Cst. et 14 OTVA (HÖHN/VALLENDER,
op.cit., n. 28 ss ad art. 41ter; CAMENZIND/HONAUER, op.cit., p. 52;
PESTALOZZI/GMÜR/PATRY, La taxe sur la valeur ajoutée, Tome 1, Partie II B,
Art. 2 OTVA; KUHN/SPINNLER, Mehrwertsteuer, p. 36-37, Ergänzungsband,
p. 17). Le Département fédéral des finances a d'ailleurs exprimé un
avis semblable dans son Commentaire de l'Ordonnance régissant la taxe
sur la valeur ajoutée (FF 1994 III p. 534 ss, p. 534-535; cf. également
l'Exposé des motifs du projet de réforme de la Constitution fédérale, p.
143-144 ad art. 113). Il faut toutefois relever que dans une prise de
position adressée le 3 mars 1995 au Département cantonal, l'Administration
fédérale des contributions a affirmé que le droit des pauvres n'était pas
un impôt du même genre que la TVA, les deux contributions se distinguant
par leur but et leur objet.

    c) Dans une jurisprudence déjà ancienne, le Tribunal fédéral a jugé
que, même s'il était également calculé sur le chiffre d'affaires, un
impôt minimum sur les recettes brutes, se substituant à l'impôt ordinaire
sur le bénéfice net et le capital lorsque ceux-ci n'expriment pas la
capacité contributive de l'entreprise en cause, n'était pas du même genre
que l'impôt fédéral sur le chiffre d'affaires en vigueur à l'époque et
qu'il ne violait pas l'art. 41ter al. 2 Cst. car le chiffre d'affaires
ne représentait dans ce cas que formellement, et non matériellement,
l'objet de l'impôt (ATF 96 I 560 consid. 5 p. 583).

    Le Tribunal fédéral a également jugé, en matière de taxe
professionnelle genevoise frappant en partie des chiffres d'affaires
qui étaient déjà soumis à l'impôt fédéral sur le chiffre d'affaires ou
en étaient expressément exonérés, qu'il fallait considérer par "impôt
du même genre" tout impôt de consommation dont la charge économique
est financièrement supportée par le dernier acquéreur (l'utilisateur)
et qui est calculé en fonction du prix de la marchandise. La compétence
fédérale de percevoir un impôt de consommation n'excluait pas la faculté
pour les cantons d'utiliser les chiffres d'affaires des entreprises pour
calculer un impôt cantonal, à la condition qu'ils ne cherchent pas par là
à en charger finalement aussi le consommateur en fonction du prix de la
marchandise. Tel n'était cependant pas le cas de la taxe professionnelle
genevoise qui était un impôt professionnel général et non pas un impôt
de consommation (Archives 49 p. 345 consid. 6 p. 356-357).

    Dans ce dernier arrêt, le Tribunal fédéral a accordé une importance
déterminante au report de l'impôt sur le consommateur et à son calcul fondé
sur le chiffre d'affaires. Les contributions en cause étaient toutefois de
nature essentiellement différentes, de sorte que ces critères relativement
généraux étaient suffisants. Lorsqu'il s'agit en revanche d'apprécier
deux impôts de consommation, il convient de se fonder sur des éléments
plus précis car la Constitution n'exclut pas de manière générale les
cantons de l'imposition des transactions touchées par la TVA et les impôts
de consommation spéciaux, ou exonérées de ces impôts, mais se contente
d'interdire la perception d'impôts du même genre (HÖHN/VALLENDER, op.cit.,
n. 21 ad art. 41ter). Le fait que l'impôt fédéral sur le chiffre d'affaires
qui ne frappait que la consommation de marchandises a été remplacé par
la TVA qui s'étend également aux services ne suffit donc pas à rendre le
droit des pauvres inconstitutionnel.

    d) aa) Dans le cas particulier, il faut d'emblée constater que la
distinction opérée par une partie de la doctrine entre les prestations
expressément exonérées de la TVA (art. 15 OTVA) et celles qui sont exclues
du champ de l'impôt (art. 14 OTVA) - qui seules, selon ces auteurs,
pourraient être frappées d'un impôt sur les divertissements - est dénuée
de pertinence. Le régime de ces deux types de prestations est en effet
défini par le droit fédéral (art. 8 al. 2 let. b et c Disp. trans. Cst. et
art. 14-15 OTVA), de sorte qu'une distinction fondée sur une notion
restrictive et littérale de l'exonération ne se justifie pas; le fait
que l'impôt préalable soit ou non déductible ne saurait en effet être
retenu comme indication que la Confédération a fait ou non usage de ses
compétences constitutionnelles, excluant ou laissant ainsi subsister
un droit d'imposition des cantons et des communes (PETER SALADIN,
Commentaire de la Constitution fédérale de la Confédération suisse,
n. 203 ss et 214 ss ad art. 3; cf. également HÖHN/VALLENDER, op.cit.,
n. 32 ad art. 41ter; BRAND/BÜHLMANN/DERKSEN, op.cit., p. 304-307). Au
demeurant, une telle interprétation soulèverait notamment le problème de
savoir si les prestations fournies par des entreprises exemptées de la TVA
(art. 19 OTVA) pourraient être frappées d'un droit des pauvres du moment
qu'elles échappent de toute manière à la TVA.

    Il convient dès lors d'examiner si le droit des pauvres est en tant
que tel un impôt du même genre que la TVA dont la perception en sus de
cette dernière taxe serait prohibée par l'art. 41ter al. 2 Cst.

    bb)  Il n'est pas nécessaire de décider si, de manière générale,
le droit des pauvres - en tant qu'impôt sur les divertissements -
doit être classé dans la catégorie des impôts sur la dépense, comme
l'admet la doctrine de façon générale mais parfois avec des réserves
(cf. ERNST HÖHN, Steuerrecht, 7ème éd., Berne 1993, par. 2 n. 28 ss et
n. 34 ss, en particulier n. 36; BLUMENSTEIN/LOCHER, op.cit., p. 183 ss
et 198; DIGGELMANN, op.cit., p. 18 ss), ou dans celle des impôts de
consommation. L'autorité intimée a constaté à bon droit que le droit
des pauvres est un impôt sur un certain type de dépenses, à savoir les
divertissements, et qu'il s'agit d'un impôt de consommation destiné à
être supporté par le consommateur et calculé en fonction de la valeur de
la prestation. A cet égard, il présente incontestablement des analogies
certaines avec la TVA puisqu'il frappe également des chiffres d'affaires
obtenus lors de la fourniture de certains services et qu'il doit être
supporté par le consommateur. Il est par ailleurs sans importance que,
dans certains cas, il fasse l'objet d'un calcul forfaitaire ou que les
entrées de faveur gratuites soient également imposées. Des facilités de
perception peuvent en effet aussi être accordées en matière de TVA (art. 47
al. 3 OTVA). Le fait que le droit des pauvres ne soit pas répercuté dans
tous les cas pour son montant entier sur le consommateur n'est pas non
plus déterminant dans la mesure où le constituant fédéral a admis que
la TVA pouvait, selon les conditions du marché, être ou non reportée
sur ledit consommateur (Bulletin officiel de l'Assemblée fédérale 1993,
Conseil National, séance du 15 mars 1993, p. 338). Dans l'un et l'autre
cas, l'élément significatif est l'intention du législateur de reporter
l'impôt sur le consommateur et non son report effectif (cf. HÖHN/VALLENDER,
op.cit., n. 22 ad art. 41ter). En outre, les considérations émises
par certains députés genevois du siècle dernier qui voulaient imposer
plus lourdement les spectacles "malsains" n'infirment pas la volonté du
législateur cantonal de reporter le droit des pauvres sur le consommateur,
le texte de la loi étant suffisamment clair à cet égard (cf. par exemple
les art. 444 al. 2 et 446 al. 1 et 5 LCP); elles ne sauraient par ailleurs
conférer un caractère incitatif à cette contribution. Enfin, l'affectation
plus ou moins étendue du produit du droit des pauvres et de celui de la
TVA en faveur de personnes défavorisées ne contribue pas à les distinguer
de manière déterminante.

    cc) En revanche, le fait que le droit des pauvres est un impôt de
consommation spécial qui frappe uniquement certaines prestations de
service, soit les divertissements, alors que la TVA est un impôt général
qui frappe l'ensemble de la consommation interne du pays (à l'exception
des prestations exonérées ou exclues du champ de l'impôt) est un élément
significatif.

    L'imposition de l'ensemble de la consommation interne suisse vise
des buts et des objets différents de ceux du droit des pauvres. La TVA
doit frapper le revenu des consommateurs au moment de son utilisation,
satisfaire aux exigences de la neutralité concurrentielle et tenir compte
de l'importance des services concernés dans la consommation globale;
ces éléments influencent son mode de perception multiphase et limité à la
valeur ajoutée à chaque stade du processus économique (Bulletin officiel
de l'Assemblée fédérale 1993, Conseil National, séance du 15 mars 1993,
p. 337 ss et 346). Le droit de pauvres vise en revanche une surimposition
de certaines dépenses, considérées comme caractéristiques d'un certain
niveau de vie, afin de faire participer de manière accrue les personnes
aisées aux coûts de la santé et du bien-être social (cf. DIGGELMANN,
op.cit., p. 18-19). Le fait que chacun cherche à se divertir n'enlève
pas au droit des pauvres son caractère spécial car, s'agissant d'un
impôt de consommation, ce caractère doit s'apprécier en premier lieu en
fonction de l'étendue des prestations imposées et non pas du cercle des
personnes assujetties. A cet égard, le droit des pauvres se distingue
également de l'ancien impôt fédéral sur le chiffre d'affaires qui était
un impôt général sur la consommation de marchandises et qu'au demeurant
les cantons ne sauraient prélever à l'avenir pour leur compte sans violer
l'art. 41ter al. 2 Cst. Le caractère spécial du droit des pauvres a en
outre pour effet qu'à la différence de la TVA, le principe de la neutralité
concurrentielle est limité au secteur économique concerné, soit celui
des divertissements. L'objet et le but restreints du droit des pauvres
permettent par ailleurs des modalités de perception relativement simples
sous la forme d'une contribution monophase perçue uniquement au dernier
stade de la distribution (cf., en matière de droit européen, la solution
fondée sur des considérations comparables retenue par l'arrêt du 19 mars
1991 en la cause NV Giant contre Commune d'Overisje, C-109/90, Recueil de
la jurisprudence de la Cour 1991, p. 1394 ss, n. 14 p. 1398, admettant la
compatibilité d'une taxe sur les spectacles et les divertissements avec
l'art. 33 de la Sixième Directive du Conseil 77/388/CEE du 17 mai 1977
en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives
aux taxes sur le chiffre d'affaires).

    Toutes ces différences sont suffisamment marquantes pour permettre
d'affirmer que le droit des pauvres n'est pas un impôt du même genre que
la TVA au sens de l'art. 41ter al. 2 Cst.

    e) Le droit des pauvres frappe des prestations de service, soit des
divertissements, et non pas des marchandises ou des biens qui font l'objet
d'une imposition spéciale de la Confédération. A cet égard, il n'est pas
non plus un impôt du même genre que ceux énumérés à l'art. 41ter al. 1
lettre b et al. 4 Cst. L'autorité intimée a admis à bon droit que la
Confédération avait une compétence constitutionnelle limitée à ces seuls
impôts, de sorte que le droit des cantons de percevoir d'autres impôts de
consommation spéciaux frappant des objets différents n'est en principe pas
limitée (SALADIN, op.cit., n. 60 et 76 ad art. 3). La question de savoir
si les cantons pourraient percevoir de multiples impôts spéciaux cantonaux
de consommation frappant soit des marchandises, soit des services, n'a pas
à être tranchée dans le cadre du présent recours car lors d'un contrôle
concret des normes, le Tribunal fédéral n'examine que le cas qui lui
est soumis et non pas des situations hypothétiques dans lesquelles la
recourante ne se trouve pas.

    f) Au vu de ce qui précède, il faut constater que l'arrêt attaqué a
confirmé l'assujettissement de la recourante au droit des pauvres sans
violer l'art. 41ter al. 2 Cst.