Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 122 IV 241



122 IV 241

36. Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation pénale du 27 septembre
1996 dans la cause Ministère public du canton de Vaud contre S. (pourvoi
en nullité) Regeste

    Art. 63 StGB; unhaltbar milde Strafe.

    Trotz nachfolgender Eheschliessung zwischen dem Opfer und dem Täter
und trotz gewisser entlastender Umstände ist eine - bedingt vollziehbare
- Gefängnisstrafe von 70 Tagen für versuchte Vergewaltigung, sexuelle
Nötigung und Diebstahl unhaltbar milde; sie stellt einen Missbrauch des
dem kantonalen Richter zustehenden Ermessens dar (E. 1).

Sachverhalt

    A.- Le 30 ou 31 octobre 1992, S. a rencontré une femme chez qui il
avait effectué des travaux de rénovation. Il ne l'avait pas revue depuis
lors. Il lui a demandé si elle l'invitait pour boire un verre. Elle a
accepté d'autant plus qu'elle désirait faire repeindre une chambre.

    Arrivés chez elle, ils ont bu de l'alcool. S. souffrait d'un éthylisme
chronique. Il était déjà sous l'influence de l'alcool au moment de la
rencontre.

    Peu après, l'homme s'est jeté sur son hôtesse, l'a couchée à terre,
l'a partiellement déshabillée et lui a tenu très fermement les bras et les
jambes en lui faisant mal, lui occasionnant des hématomes localisés. Il
a tenté de la pénétrer, en vain, car il était trop ivre pour avoir une
érection, ce qui a contribué vraisemblablement à le rendre violent.

    S. a obligé sa victime à se dévêtir complètement; sous l'emprise
de la peur, elle a obtempéré, tout en lui demandant de partir. Il l'a
caressée sur tout le corps, lui a léché le sexe et caressé le clitoris,
en étant couché sur elle. Il a commencé à se masturber; la femme lui a
ordonné de quitter les lieux, ce qu'il a fait.

    Les jours suivants, S. a téléphoné de nombreuses fois à la victime;
il lui a rendu visite, lui demandant si elle voulait l'épouser. Chaque
fois il était sous l'influence de l'alcool.

    La victime a constaté la disparition de son porte-monnaie, qui a été
retrouvé chez S., vidé de son contenu.

    Le 4 novembre 1992, sur le conseil de son médecin, la victime a
dénoncé les faits à la police, sans déposer plainte.

    Le 19 février 1993, S. a épousé sa victime, de 20 ans son aînée. Ils
ont divorcé le 11 avril 1995.

    S. avait été condamné en 1988 à une peine de 8 mois d'emprisonnement,
avec sursis, notamment pour attentat à la pudeur avec violence et vol.

    D'après une expertise psychiatrique, la responsabilité de l'accusé
pouvait être considérée comme seulement très légèrement restreinte.

    Le 11 septembre 1995, S. a été condamné par le Tribunal correctionnel
à une peine de 70 jours d'emprisonnement, sans sursis, pour vol,
contrainte sexuelle et tentative de viol, infractions commises en état
d'irresponsabilité fautive (art. 263 CP). Le tribunal a notamment tenu
compte de la responsabilité très légèrement restreinte de l'accusé et des
efforts qu'il entreprend pour se libérer de l'alcoolisme (réadaptation
dans une institution).

    B.- Le 4 décembre 1995, la Cour de cassation pénale du Tribunal
cantonal vaudois a partiellement admis le recours du Ministère public
cantonal - abandon de l'irresponsabilité fautive - et a admis le recours
joint du condamné, qui demandait le sursis.

    Cette autorité n'a pas appliqué l'art. 263 CP et a condamné l'accusé
pour vol, contrainte sexuelle et tentative de viol à une peine de 70
jours d'emprisonnement, avec sursis durant 3 ans; ce sursis était
toutefois subordonné à la condition que l'intéressé s'abstienne de
boissons alcooliques et reste soumis au suivi ambulatoire fourni par une
institution compétente.

    C.- Le Ministère public cantonal se pourvoit en nullité au Tribunal
fédéral. Il demande une peine plus sévère, sans sursis.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- a) Aux termes de l'art. 63 CP, le juge fixera la peine d'après la
culpabilité du délinquant, en tenant compte des mobiles, des antécédents
et de la situation personnelle de ce dernier.

    Le critère essentiel est celui de la gravité de la faute; le juge
doit prendre en considération, à cet égard, en premier lieu les éléments
qui portent sur l'acte lui-même, à savoir sur le résultat de l'activité
illicite, sur le mode d'exécution et, du point de vue subjectif, sur
l'intensité de la volonté délictueuse ainsi que sur les mobiles (ATF 118
IV 21 consid. 2b). L'importance de la faute dépend aussi de la liberté
de décision dont disposait l'auteur; plus il lui aurait été facile de
respecter la norme qu'il a enfreinte, plus lourdement pèse sa décision
de l'avoir transgressée et partant sa faute (ATF 117 IV 7 consid. 3a,
112 consid. 1 p. 114, avec la jurisprudence et la doctrine citées).

    Dans le domaine de la fixation de la peine, le Tribunal fédéral ne peut
admettre le pourvoi en nullité que si la sanction a été fixée en dehors
du cadre légal, si elle est fondée sur des critères étrangers à l'art. 63
CP, si les éléments d'appréciation prévus par cette disposition n'ont
pas été pris en considération ou enfin si la peine apparaît exagérément
sévère ou clémente au point que l'on doive parler d'un abus du pouvoir
d'appréciation reconnu à l'autorité cantonale (ATF 121 IV 3 consid. 1a,
193 consid. 2a et jurisprudence citée).

    b) En l'espèce, la peine de 70 jours d'emprisonnement (avec sursis)
infligée à l'intimé reconnu coupable de vol, contrainte sexuelle et
tentative de viol apparaît exagérément clémente pour les motifs qui
suivent.

    Selon l'art. 190 al. 1 CP, le viol est passible d'une peine
de réclusion pour 10 ans au plus. Celui qui se rend coupable de
contrainte sexuelle sera puni de la réclusion pour 10 ans au plus
ou de l'emprisonnement (art. 189 al. 1 CP). Quant au vol, l'ancien
art. 137 al. 1 aCP prévoyait une peine de 5 ans de réclusion au plus
ou l'emprisonnement. En cas de concours, le juge condamne à la peine
de l'infraction la plus grave et en augmente la durée d'après les
circonstances (art. 68 al. 1 CP). Le législateur a ainsi montré que
les infractions en cause devaient être considérées de façon générale
comme graves.

    Certes, le condamné peut faire valoir des éléments atténuants. Il n'a
commis qu'une tentative de viol, sa responsabilité était très légèrement
diminuée en raison de son alcoolisme et la victime l'a épousé quelques
mois après les faits.

    D'après la cour cantonale, le mariage subséquent et la vie commune
de l'auteur et de sa victime constituent des éléments qui ôteraient à
la répression pénale une part importante de sa justification. Ce motif
n'est pas convaincant. En effet, le mariage subséquent de la victime et de
l'auteur d'un viol ne constitue pas une circonstance prise expressément
en compte par la loi pour libérer le violeur ou atténuer sa culpabilité;
l'autorité cantonale n'en disconvient d'ailleurs pas. Au contraire,
une telle union n'exclut pas la punissabilité de l'auteur puisque le
législateur a rendu punissable, sur plainte, la contrainte sexuelle et le
viol entre époux (art. 189 al. 2 et 190 al. 2 CP), s'écartant en cela de
la proposition du Conseil fédéral. Des débats parlementaires il ressort
que le viol, dans et hors mariage, est considéré comme un crime grave
(BO-CN 1990 p. 2254, 2255 et 2257 par exemple). Malgré l'opinion du
Conseil fédéral et du Conseil des Etats, les liens unissant l'auteur et
la victime n'ont pas été reconnus comme circonstance atténuante. Le fait
qu'un violeur devrait bénéficier d'un traitement de faveur parce qu'il
était marié à la victime ou parce qu'il l'avait épousée ultérieurement a
été déclaré inacceptable (BO-CN 1990 p. 2257, intervention Fankhauser). Il
serait faux de considérer qu'un mariage subséquent soit toujours le signe
d'un repentir; cela pourrait pousser l'accusé à épouser sa victime pour
améliorer sa position face au juge pénal, quitte à divorcer après le
jugement. En outre, cet avantage serait inaccessible à un auteur déjà
marié ayant commis un crime identique et faisant preuve d'un réel repentir.

    En plus de ces considérations générales, on ne saurait perdre de
vue ici que la victime elle-même a dénoncé l'intimé à la police (sur
le conseil de son médecin et sans déposer formellement une plainte),
que la vie commune s'est rapidement dégradée l'époux se montrant violent
voire menaçant, que le divorce a été prononcé au mois d'avril 1995 et
que la victime n'a finalement pas comparu comme témoin à l'audience du
Tribunal correctionnel, car elle ne voulait en aucun cas rencontrer son
ex-mari afin de ne plus être affectée dans sa santé reconnue fragile
par un médecin. Dans ces circonstances, force est d'admettre qu'on ne
saurait attribuer au mariage subséquent la valeur d'un pardon ou d'une
réparation propres à enlever à la répression pénale une part importante
de sa justification.

    Par ailleurs, la responsabilité très légèrement diminuée et le fait
que le viol en soit resté au stade de la tentative (à cause de l'absence
d'érection due à l'alcool) ne font pas non plus apparaître la faute
comme négligeable.

    c) Au stade de la fixation de la peine, l'autorité cantonale mentionne
le concours d'infractions mais n'y consacre aucun développement. Or,
il n'est pas contesté que l'accusé est reconnu coupable non seulement
de tentative de viol mais encore de contrainte sexuelle et de vol. Il
s'agit de trois actes délictueux passibles de la réclusion, donc d'une
certaine gravité.

    De plus, l'intimé avait été condamné en 1988 (à une peine de 8 mois
d'emprisonnement avec sursis et à une amende de 300 fr.) notamment pour
attentat à la pudeur avec violence. Le fait qu'il ait commis des actes
semblables quelques années plus tard montre qu'il ne s'est pas corrigé
malgré cette première sanction. Cet élément aggravant ne semble cependant
pas avoir été pris en considération par l'autorité cantonale.

    d) Avec raison, la juridiction cantonale de recours n'examine pas
dans le cadre de la fixation de la peine le très gros effort consenti par
le condamné pour se libérer de sa dépendance à l'alcool, mais en tient
compte pour l'octroi du sursis. Cependant, à la lecture de l'ensemble
de l'arrêt il apparaît que la cour cantonale s'est focalisée sur cet
effort de l'intimé (entrepris deux ans après les faits) au point que la
répression de la faute lui a paru secondaire face à l'octroi du sursis
jugé nécessaire pour aider le délinquant à se défaire de l'alcoolisme. Ce
raisonnement a conduit au prononcé d'une peine exagérément clémente,
en violation de l'art. 63 CP.

    e) Le pourvoi est admis, la décision attaquée est annulée et la cause
est renvoyée à l'autorité cantonale afin qu'une nouvelle peine soit fixée.

    La question du sursis étant désormais liée à la future sanction,
il n'est pas possible de l'examiner en l'état.

Erwägung 2

    2.- (Suite de frais).