Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 122 III 88



122 III 88

17. Extrait de l'arrêt de la Chambre des poursuites et faillites du 16
avril 1996 dans la cause Banque X. et Banque Z. contre V. (recours LP)
Regeste

    Abschlagszahlungen aus Miet- und Pachtzinsen im Falle mehrerer
Betreibungen von Grundpfandgläubigern (Art. 95 Abs. 2 VZG).

    Betreiben mehrere Grundpfandgläubiger den Schuldner auf Verwertung des
nämlichen Grundstückes, so kann derjenige unter ihnen, der sich darüber
ausgewiesen hat, dass seine Forderung vom Schuldner anerkannt oder
rechtskräftig festgestellt worden ist, nur im Einverständnis mit allen
anderen oder nach Aufstellung eines Kollokationsplanes Abschlagszahlungen
aus Miet- und Pachtzinsen erhalten, in welchem Stadium auch immer die
verschiedenen Betreibungen sich befinden.

Sachverhalt

    A.- En 1992, la banque X. a introduit deux poursuites en réalisation
de gage immobilier avec extension aux loyers contre V., pour des créances
garanties par des gages grevant deux immeubles. Les ordonnances prononçant
la mainlevée provisoire des oppositions formées par V. ont été attestées
définitives sous réserve d'une action en libération de dette.

    En 1993, la banque Z. a également requis contre V. une poursuite en
réalisation de gage immobilier avec extension aux loyers, pour une créance
garantie par un gage de rang postérieur grevant les mêmes immeubles.
L'ordonnance prononçant la mainlevée provisoire de l'opposition formée
par V. a été attestée définitive et libre d'action en libération de dette.

    En janvier 1995, la banque X. a engagé contre V. une nouvelle poursuite
en réalisation de gage immobilier avec extension aux loyers. L'ordonnance
prononçant la mainlevée provisoire de l'opposition formée par V. a été
attestée définitive et libre d'action en libération de dette.

    En mars 1995, la banque Z. a requis la vente des immeubles et demandé
la distribution des loyers encaissés. L'office des poursuites a établi
un tableau de distribution des produits des immeubles, dont l'avis de
dépôt faisait état de la distribution à la banque Z. d'un premier acompte
correspondant au total de la poursuite engagée par celle-ci.

    Agissant par la voie de la plainte à l'autorité cantonale de
surveillance, la banque X. a demandé l'annulation du tableau de
distribution; elle reprochait notamment à l'office d'avoir violé
l'art. 95 al. 2 de l'ordonnance du Tribunal fédéral sur la réalisation
forcée des immeubles (ORFI, RS 281.42) en omettant de fixer préalablement
l'existence et le rang de la créance garantie par gage au moyen d'un état
de collocation. L'autorité cantonale de surveillance a rejeté la plainte.

    La Chambre des poursuites et des faillites du Tribunal fédéral a admis
le recours de la banque X. contre la décision de l'autorité cantonale
de surveillance.

Auszug aus den Erwägungen:

                  Extrait des considérants:

Erwägung 1

    1.- a) L'art. 95 ORFI permet que des acomptes sur les loyers et
fermages perçus par l'office soient versés au créancier gagiste poursuivant
qui prouve que sa créance a été reconnue par le débiteur ou constatée par
prononcé définitif (al. 1); si plusieurs créanciers gagistes ont intenté
des poursuites par rapport au même immeuble et se trouvent dans ce cas,
des acomptes ne peuvent leur être payés que s'ils sont tous d'accord quant
à la répartition, ou, si l'un d'eux a formulé une objection, si l'existence
et le rang de la créance garantie par gage ont été préalablement fixés
au moyen d'un état de collocation (al. 2).

    L'autorité cantonale de surveillance a interprété cette disposition
en ce sens que, si un seul créancier gagiste poursuivant a prouvé que sa
créance a été reconnue par le débiteur ou constatée par prononcé définitif,
l'accord des autres ou l'établissement d'un état de collocation n'est
pas nécessaire pour le paiement d'un acompte à ce créancier. Constatant
qu'au moment où l'office a établi le tableau de distribution litigieux,
la recourante n'avait pas prouvé que le débiteur n'avait pas introduit
d'action en libération de dette, l'autorité cantonale a en conséquence
rejeté la plainte.

    La recourante conteste cette interprétation sous l'angle d'une
interprétation tant grammaticale (fondée sur le texte allemand de l'art. 95
ORFI et sur la relation entre les deux alinéas de cette disposition) que
systématique de cette disposition (fondée sur sa position dans l'ordonnance
par rapport aux art. 85 ss et 97 ss, en particulier 114 de celle-ci),
de même que sous l'angle d'une interprétation téléologique (au regard des
principes posés par les art. 806 CC, 813 ss, en particulier 817 al. 1 CC,
ainsi que par les art. 157 al. 3 et 219 al. 3 LP). Elle soutient que le
paiement d'acomptes doit se faire en respectant le rang des créances qui
font l'objet d'une poursuite en réalisation de gage, ce qui nécessite -
sauf accord entre les créanciers gagistes poursuivants - l'établissement
d'un état de collocation.

    b) Dans un arrêt cité par la recourante, le Tribunal fédéral a exposé
qu'en cas de contestation sur la répartition provisoire du produit net des
loyers entre plusieurs créanciers gagistes qui ont intenté des poursuites
en réalisation de gage immobilier, l'art. 95 al. 2 ORFI prescrit de
dresser un état de collocation conformément à l'art. 157 al. 3 LP; cette
disposition renvoie à l'art. 219 al. 3 LP, qui prévoit que l'ordre des
créances est déterminé par les règles du droit civil sur le droit de
gage immobilier; selon l'art. 114 al. 2 ORFI, si plusieurs créanciers
gagistes ont requis la poursuite à des dates différentes, le créancier de
rang antérieur a droit par préférence (cf. art. 817 al. 1 CC) aux loyers
et fermages échus depuis la réquisition de poursuite, conformément à
l'art. 806 al. 1 CC (ATF 95 III 33 consid. 2). Cette jurisprudence, dont
il n'y a pas lieu de s'écarter, appelle des précisions sur la portée de
l'art. 95 al. 2 ORFI.

Erwägung 2

    2.- C'est à juste titre que l'autorité cantonale a constaté que le
passage de l'art. 95 al. 2 ORFI "Si plusieurs créanciers gagistes ... se
trouvent dans ce cas" (en allemand "Sind mehrere solche Betreibungen
von Grundpfandgläubigern ... hängig") se réfère à la condition posée par
l'al. 1, à savoir que le créancier poursuivant prouve que sa créance a
été reconnue par le débiteur ou constatée par prononcé définitif. Les
conclusions qu'elle a tirées de cette constatation sont en revanche
erronées. En effet, si seuls les créanciers poursuivants qui ont prouvé
que leur créance a été reconnue par le débiteur ou constatée par prononcé
définitif peuvent prétendre au paiement d'acomptes, un tel paiement suppose
l'accord de tous les créanciers gagistes poursuivants, que leur créance ait
ou non été reconnue ou définitivement constatée. Le texte allemand, plus
précis que le texte français, écarte tout doute à cet égard par l'emploi
de la formule "wenn und soweit sämtliche betreibende Grundpfandgläubiger
mit der Verteilung einverstanden sind" (et non "wenn und soweit alle mit
der Verteilung einverstanden sind"). Quant au texte italien de l'art. 95
ORFI, il est absolument univoque. L'al. 2 ne répète pas la condition,
qui découle déjà de l'al. 1, que seul le créancier poursuivant dont la
créance a été reconnue par le débiteur ou définitivement constatée peut
demander le paiement d'acomptes; il prévoit que des acomptes pourront
être versés à plusieurs créanciers qui ont intenté des poursuites en
réalisation de gage sur le même fonds ("A più creditori, che abbiano
promossa esecuzione in via di realizzazione del pegno sul medesimo fondo,
potranno essere versati degli acconti ...") lorsque tous sont d'accord
sur le mode de répartition de ceux-ci ("... ove tutti siano d'accordo sul
modo di ripartirli, ..."), ou, dans le cas contraire, lorsque l'existence
et le rang des créances garanties ont été fixés au moyen d'un état de
collocation dressé conformément à l'art. 157 al. 3 LP ("... o, in caso
contrario, ove l'esistenza ed il grado dei crediti garantiti siano stati
accertati mediante graduatoria allestita in conformità dell'articolo 157
capoverso 3 della LEF").

    L'art. 95 al. 2 ORFI ne peut ainsi être interprété qu'en ce sens qu'en
cas de pluralité de créanciers poursuivant le débiteur en réalisation
de gages grevant le même immeuble, celui d'entre eux qui a prouvé que
sa créance a été reconnue par le débiteur ou constatée par prononcé
définitif ne peut obtenir le paiement d'acomptes qu'avec l'accord de tous
les autres ou après l'établissement d'un état de collocation, quels que
soient les stades auxquels se trouvent les différentes poursuites, sous
réserve bien entendu des loyers et fermages encaissés durant la période
où ce créancier aurait seul engagé une poursuite (cf. art. 806 al. 1 CC
et 114 ORFI). Comme le relève pertinemment la recourante, un créancier
poursuivant ne saurait obtenir davantage sous la forme d'acomptes payés
avant la réquisition de vente dans la procédure préliminaire (art. 85 ss
ORFI) qu'après la réalisation (art. 97 ss, en particulier 114 ORFI). Le
recours est donc fondé sur ce point.