Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 122 III 488



122 III 488

86. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile du 22 novembre 1996 dans la
cause B. AG et P. SpA contre F. (recours de droit public) Regeste

    Art. 4 BV; Art. 190 Abs. 1 SchKG; Konkurseröffnung ohne vorgängige
Betreibung.

    Es ist nicht willkürlich, wenn dem Zessionar einer auf Art. 754 ff. OR
gestützten Forderung das Recht abgesprochen wird, die Konkurseröffnung ohne
vorgängige Betreibung gegen den zur Verantwortung gezogenen Verwaltungsrat
zu verlangen.

Sachverhalt

    A.- Du 17 décembre 1990 au 22 août 1991 - date de sa démission -,
F. a été l'administrateur unique avec signature individuelle de K. SA.

    B.- Le Tribunal de première instance du canton de Genève a prononcé
la faillite de cette société le 31 janvier 1992.

    En mai 1994, la masse en faillite de K. SA a cédé à B. AG, P. SpA et
à la banque X. sa prétention en responsabilité fondée sur les art. 754
ss CO, laquelle était portée à l'inventaire à hauteur de 3'646'718 fr.,
montant correspondant au découvert prévisible de ces créancières.

    Le 8 juillet suivant, ces dernières ont reçu à concurrence de,
respectivement, 2'242'580 fr., 634'471 fr. et 268'327 fr., un acte de
défaut de biens après faillite.

    C.- Par demande du 21 avril 1995, B. AG, P. SpA et la banque X. ont
ouvert action contre F. en paiement de 3'145'378 fr., représentant le
préjudice subi dans la faillite de K. SA. Cette procédure a été suspendue
jusqu'à l'issue du procès pénal dirigé contre F. pour diverses infractions.

    D.- Le 11 octobre 1995, les créancières cessionnaires ont notamment
requis la faillite sans poursuite préalable de F., en application de
l'art. 190 al. 1 ch. 1 LP. Elles lui ont en substance reproché un acte
frauduleux, à savoir la donation à ses enfants de sa propriété de C.

    Le 27 octobre 1995, le Président du Tribunal du district de Nyon a
rejeté cette requête.

    Statuant sur recours des requérantes, la Cour des poursuites et
faillites du Tribunal cantonal du canton de Vaud a confirmé ce jugement
le 18 avril 1996.

    E.- B. AG et P. SpA exercent un recours de droit public au Tribunal
fédéral. Elles concluent, principalement, à l'annulation de cet arrêt
et, "cela fait", au prononcé de la faillite sans poursuite préalable et,
subsidiairement, au renvoi de la cause pour nouvelle décision.

    Le Tribunal fédéral a rejeté le recours dans la mesure où il était
recevable.

Auszug aus den Erwägungen:

                  Extrait des considérants:

Erwägung 2

    2.- L'arrêt attaqué repose sur une double motivation. D'une part, la
Cour des poursuites et faillites a relevé que la cession de l'art. 260
LP ne confère aux créanciers qu'un droit d'action, lequel n'a pas
nécessairement pour corollaire le droit de requérir la faillite sans
poursuite préalable de l'administrateur recherché en responsabilité;
cette faculté ne peut en effet appartenir qu'à celui qui se prétend
titulaire d'une créance personnelle contre le débiteur, ce qui n'est pas
le cas du créancier cessionnaire exerçant l'action oblique de la société
faillie. D'autre part, elle a jugé que les requérantes n'avaient rendu
suffisamment vraisemblable ni l'existence ni la quotité de leur créance.

    Les recourantes s'en prennent à ces deux motifs, en sorte que, de
ce point de vue, leur recours est recevable (ATF 117 II 432 consid. 2a
p. 441 et la jurisprudence citée).

Erwägung 3

    3.- Concernant la première motivation, les recourantes prétendent qu'en
cas de dommage direct, les parties lésées disposent - indépendamment de
toute cession au sens de l'art. 260 LP - d'une créance directe contre les
organes de la société anonyme qui les autorise à plaider en leur propre
nom et, le cas échéant, à requérir la faillite sans poursuite préalable
des responsables. Elles soutiennent en outre que le créancier cessionnaire
des droits de la masse obtient tant la cession du droit d'exécution forcée
portant sur sa prétention que tous les autres moyens prévus par celui-ci.

    a) Les actions et omissions à raison desquelles les administrateurs
sont recherchés en responsabilité sont soumises à l'ancien droit si elles
sont intervenues avant le 1er juillet 1992 (ATF 122 III 324 consid. 2).

    b) En l'espèce, la critique des recourantes - qui se bornent à opposer
leur propre appréciation à celle de l'autorité cantonale - ne répond
manifestement pas aux exigences de motivation posées par l'art. 90 al. 1
let. b OJ, en sorte qu'elle est irrecevable (ATF 120 Ia 369 consid. 3a
p. 373 et les références).

    Au demeurant, le grief serait mal fondé. Dans sa jurisprudence publiée
aux ATF 117 II 432 ss, le Tribunal fédéral a abandonné l'opinion selon
laquelle le créancier cessionnaire des droits de la masse peut faire
valoir, d'une part, les prétentions de la société contre ses organes
responsables (art. 260 LP) et, d'autre part, des prétentions personnelles
pour son dommage indirect (art. 756 al. 2 aCO). Il a considéré que le
droit d'action que confèrent aux créanciers les art. 753/754 aCO n'a
pas un caractère individuel. Dans une procédure d'exécution générale et
collective, l'administration de la faillite - qui exerce en premier lieu
l'action en responsabilité (art. 756 al. 1 aCO) - ne se fonde pas sur le
droit personnel de chacun des créanciers, mais sur l'ensemble de leurs
prétentions. Le créancier cessionnaire agit de même, mais le montant
obtenu à l'issue du procès sert prioritairement à couvrir sa créance.

    L'art. 756 al. 2 aCO n'est qu'un cas d'application de l'art. 260 LP
(ATF précité consid. 1b/ee et ff p. 439/440). La cession au sens de cette
dernière disposition est un mandat procédural (ATF 56 III 70) qui autorise
le créancier à faire valoir les droits litigieux, c'est-à-dire à conduire
le procès (Prozessführungsrecht) à la place de la masse, en son nom propre
et à ses risques et périls (ATF 113 III 135 consid. 3a p. 137 et les
arrêts cités). Le cessionnaire ne devient pas titulaire de la prétention
(ATF 61 III 1 consid. 2 p. 3; AMONN, Grundriss des Schuldbetreibungs-
und Konkursrechts, 5e éd., § 47, n. 26, p. 380; JAEGER, Commentaire de
la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, tome II,
p. 379). Sous cet angle, les recourantes ne sont aucunement titulaires
de la prétention en responsabilité; elles ne sauraient dès lors être
reconnues comme créancières selon l'art. 190 al. 1 LP.

Erwägung 4

    4.- Nonobstant l'avis de l'autorité cantonale, la prétention du
créancier en réparation de son dommage direct subsiste. En effet, la
jurisprudence publiée aux ATF 117 II 432 ss n'a pas supprimé la distinction
entre dommage direct et indirect du créancier, mais uniquement la double
nature de son action (cf. sur la question: supra, consid. 3b et ATF 122
III 176 consid. 7a et b p. 189 à 193). Contrairement à ce que soutiennent
les recourantes, l'arrêt attaqué ne procède pas sur ce point d'un défaut de
motivation (art. 4 Cst.), mais d'une interprétation inexacte de l'arrêt sur
lequel il se fonde. Quoi qu'il en soit, le Tribunal fédéral a récemment
précisé que, lorsque l'organe a violé une norme - comme l'art. 725 aCO
- destinée à protéger tant la société que les créanciers, l'action de
l'ensemble des créanciers en réparation de leur dommage indirect exclut,
dès l'ouverture de la faillite, les actions concurrentes des créanciers en
réparation de leur propre dommage direct. De telles prétentions ne trouvent
place que si d'autres normes visant la protection exclusive des créanciers
sont violées ou si l'organe recherché engage sa responsabilité personnelle
en vertu d'une culpa in contrahendo (ATF précité, consid. 7c p. 193 à 195).