Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 122 III 373



122 III 373

69. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 9 juillet 1996 dans la
cause L. contre banque X. (recours en réforme) Regeste

    Aus der Bezahlung eines falschen oder verfälschten Schecks sich
ergebender Schaden (Art. 1132 OR); Scheck mit Kartengarantie.

    Dispositive Natur von Art. 1132 OR; Risikoverteilung bei Euroschecks
(E. 2a und 2b).

    Zulässigkeit dieser Risikoverteilung unter Berücksichtigung von Art. 2
Abs. 2 ZGB, Art. 19 Abs. 2 OR und Art. 8 UWG (E. 3a).

    Verschulden des Ausstellers gemäss Art. 1132 OR, der seine
Euroscheck-Karte mit 32 Scheckformularen in einem abgestellten Fahrzeug
zurücklässt (E. 3b).

    Fehlendes Verschulden der bezogenen Bank, die verfälschte Euroschecks
einlöst, nachdem ihr der Kunde deren Diebstahl gemeldet hat (E. 4a und 4b).

Sachverhalt

    A.- Le 18 novembre 1986, L. a demandé à la banque X.  l'établissement
d'une carte eurochèque (ci-après: carte ec) et la remise de formulaires de
chèques. Ces pièces lui ont été délivrées avec des conditions d'utilisation
de la carte ec, qu'il a acceptées et dont il a reçu un nouvel exemplaire
en 1990.

    Le 10 octobre 1993, le véhicule de L., qui était garé en France, a
été forcé. Sa carte ec, contenue dans une fourre, son chéquier, qui se
trouvait dans son portefeuille, ainsi que son passeport ont été volés. L. a
déposé plainte et signalé le vol à la banque le lendemain. Dans les jours
suivants, le voleur a rempli 32 chèques d'un montant de 1'400 FF chacun,
en imitant la signature de L. et en inscrivant au dos des chèques le numéro
de la carte ec. Les 32 chèques ont été remis pour encaissement auprès
de diverses banques françaises qui les ont honorés. Ultérieurement, la
banque X. les a débités du compte de L. pour un montant total de 11'517
fr. 20. Invoquant les conditions d'utilisation de la carte ec ainsi
qu'une notice relative à la couverture des dommages en cas d'utilisation
abusive d'eurochèques par des tiers, la banque a indemnisé son client à
concurrence de 3'229 fr. 90.

    B.- Le 14 septembre 1994, L. a ouvert action contre la banque X. en
paiement de 8'287 fr. 30 avec intérêts. Ses conclusions ont été rejetées
par le Tribunal de première instance et, sur appel, par la Cour de justice
du canton de Genève. Le Tribunal fédéral a confirmé l'arrêt de la cour
cantonale.

Auszug aus den Erwägungen:

                   Extrait des considérants:

Erwägung 2

    2.- a) Selon l'art. 1132 CO, le dommage résultant d'un chèque faux
ou falsifié est à la charge du tiré si aucune faute n'est imputable
à la personne désignée comme tireur dans le titre; la faute du tireur
consistera notamment dans le fait de n'avoir pas veillé avec assez de soin
à la conservation des formulaires de chèques qui lui ont été remis. Cette
réglementation est de droit dispositif (cf. ATF 122 III 26 consid. 4a et
la doctrine citée).

    Les conditions d'utilisation de la carte ec, telles qu'elles ont
été remises par la défenderesse au demandeur, constituent l'annexe
1 à la Convention XV concernant la production, la distribution et
l'utilisation de la carte "eurochèque" (sic)(ci-après: la Convention XV)
du 1er novembre 1990 de l'Association suisse des banquiers (WIDMER,
in Kommentar zum schweizerischen Privatrecht, Bâle, n. 11 et 12 ad
art. 1104 CO; JÄGGI/DRUEY/VON GREYERZ, Wertpapierrecht, p. 313). Sous
le titre "I. Dispositions générales", elles imposent à l'ayant droit
d'une carte ec, laquelle peut servir de garantie eurochèque, de carte de
prélèvement d'argent comptant ou encore de carte de paiement (clause I.1),
et demeure propriété de la banque (clause I.4), l'obligation de conserver
avec soin et séparément la carte ec et les eurochèques (clause I.6b) ainsi
que d'annoncer immédiatement à la banque la disparition de la carte ec,
d'eurochèques ou du code ec (clause I.6g); elles précisent que la banque
est en droit de débiter sur le compte du titulaire de la carte tous les
montants résultant de l'utilisation de la carte ec (clause I.8). Sous le
titre "II. La carte ec comme carte de garantie des eurochèques", lesdites
conditions prévoient ce qui suit:

    "1. Garantie

    Lorsque des eurocheques (sic) sont émis sur présentation d'une carte
ec, en

    Europe ou dans les pays riverains de la Méditerranée, et conformément
aux
   conditions a) à d) ci-après, la banque garantit à tout porteur légitime,
   selon les principes du droit de chèque, le paiement du montant des
   chèques jusqu'à concurrence du montant maximum de garantie eurocheque
   fixé par chèque au plan international pour chaque pays:

    a) Le nom de la banque, la signature et le numéro du compte apposés sur
   le chèque doivent correspondre à ceux de la carte ec.

    b) Le numéro de la carte ec doit être annoté au verso de l'eurocheque.

    c) La date d'émission de l'eurocheque doit être comprise dans la
durée de
   validité de la carte ec.

    d) Un eurocheque doit être présenté à la banque tirée dans un délai
de 8
   jours s'il est émis en Suisse et de 20 jours s'il est émis à l'étranger,
   à compter du lendemain de la date d'émission.

    2. Droit de débit de la banque

    Lorsque la banque paie un eurocheque, du fait que les conditions de
   garantie de la carte sont apparemment remplies, elle est autorisée
   à débiter le compte jusqu'à concurrence du montant garanti, même si
   un eurocheque a déjà été révoqué. Pour les montants supérieurs, les
   dispositions générales du droit de chèque sont applicables (art. 1100 ss

    CO).

    3. Couverture des dommages

    Un dommage doit être annoncé à la banque immédiatement après sa
   découverte, mais au plus tard 30 jours après réception de l'extrait
   de compte afférent à la période concernée. Le formulaire d'annonce
   de dommage doit être renvoyé à la banque dûment rempli et signé,
   dans les 10 jours suivant sa réception.

    Les dommages causés au titulaire du compte, en raison de l'utilisation
   abusive par des tiers d'eurocheques prétendument garantis par une carte
   ec, sont indemnisés par la banque sous déduction d'une retenue de 10%,
   pour le montant émis, au maximum cependant à concurrence du montant
   garanti fixé au plan international, par eurocheque, pour chaque pays
   émetteur. Sont également pris en considération les dommages résultant
   de falsifications ou de contrefaçons d'eurocheques et/ou de la carte
   ec. La prestation est limitée à 10 eurocheques par carte ec et par
   cas. La retenue n'est pas effectuée si l'ayant droit à la carte était
   en possession de sa carte ec au moment du paiement abusif des chèques.

    (...) Par l'acceptation de l'indemnité, le titulaire du compte cède ses
   prétentions découlant du cas de dommage à la banque."

    b) Ces dispositions dérogent à l'art. 1132 CO, en particulier lorsque
le tireur ne peut se voir imputer aucune faute. Ce dernier supporte ainsi
les dommages découlant de l'utilisation abusive des eurochèques garantis
par la carte ec, dans la mesure où la banque émettrice est autorisée
à débiter le compte de son client à concurrence du montant garanti
même si l'eurochèque a été révoqué, si - et la réalisation de cette
exigence en l'espèce n'est plus contestée devant le Tribunal fédéral -
les conditions formelles auxquelles la garantie des chèques est subordonnée
sont apparemment remplies. Mais la rigueur de cette clause est atténuée par
le fait que les banques indemnisent leurs clients des dommages résultant
de l'utilisation abusive à concurrence de 90% (voire de 100% si l'ayant
droit à la carte ec était en possession de celle-ci au moment du paiement
abusif des chèques) du montant de la garantie instaurée par le système
eurochèque, et ce pour 10 chèques. Il est constant en l'espèce que la
défenderesse a procédé à cette indemnisation.

Erwägung 3

    3.- A l'appui de son avis selon lequel la répartition des risques
prévue par les conditions d'utilisation de la carte ec sont abusives et
contraires à l'ordre public, le demandeur invoque l'opinion de SCHÖNLE
(La responsabilité des banques et de leurs clients en cas d'utilisation
abusive et frauduleuse des nouveaux moyens électroniques de paiement et
de mauvais fonctionnement du système automatisé d'opérations bancaires,
in Les nouveaux moyens électroniques de paiement, Lausanne 1986, p. 65
ss, p. 84 ss). Selon celui-ci, la répartition des risques prévue dans les
conditions émises par les banques devrait s'analyser comme une remise de
dette concédée par le client à la banque sous la condition suspensive que
la banque, sans faute de sa part ou par faute légère, ne remarque pas la
falsification. Cette remise de dette devrait être considérée comme nulle
du moment que toutes les banques suisses l'exigent dans leurs conditions
générales et qu'aucun client ne peut obtenir un contrat bancaire qui lui
permette d'utiliser sa carte ec conformément aux art. 400 al. 1, 481 en
liaison avec l'art. 475 et 1132 CO. Les banques exerceraient ainsi leur
droit de préformuler le contenu du contrat d'une manière abusive au sens
de l'art. 2 al. 2 CC. L'argumentation de cet auteur a été développée en
relation avec les anciennes conditions d'utilisation de la carte ec, mais
est reprise par le demandeur, mutatis mutandis, à propos de la clause II.2
des nouvelles conditions générales émises en 1990 (pour une critique de
cette analyse, cf. OBERSON, Les moyens électroniques de paiement orientés
vers le particulier. L'exemple du système Eurochèque, thèse Lausanne 1992,
p. 443 s.). Se référant à FAVRE-BULLE (Le rôle du principe de la bonne
foi et de l'abus de droit dans le domaine des clauses abusives, in Abus de
Droit et Bonne Foi, Fribourg 1994), le demandeur soutient en outre que le
système de garantie de la carte ec tomberait sous le coup de l'art. 8 LCD
(RS 241) aux termes duquel agit de façon déloyale celui qui, notamment,
utilise des conditions générales préalablement formulées, qui sont de
nature à provoquer une erreur au détriment d'une partie contractante et
qui (a) dérogent notablement au régime légal applicable directement ou par
analogie, ou (b) prévoient une répartition des droits et des obligations
s'écartant notablement de celle qui découle de la nature du contrat. A ses
yeux, ce système de garantie, dérogeant à l'art. 1132 CO, présenterait
manifestement un caractère inéquitable par la répartition inégale des
risques prévue en cas de falsification de chèques. Les conditions générales
seraient par ailleurs trompeuses car, lors d'un vol d'eurochèques ou
d'une carte ec, elles imposeraient au souscripteur du contrat de chèque
un devoir d'avertissement permettant raisonnablement de croire que le
blocage effectif des chèques disparus empêcherait la banque de débiter le
compte, ce qui ne serait pas le cas. En autorisant la banque à se limiter
à vérifier l'apparence de la légitimation du porteur du chèque, alors même
qu'elle aurait la connaissance effective de l'illégitimité de celui-ci,
les conditions générales seraient enfin contraires à l'ordre public.

    a) Contrairement à la plus grande partie du droit de chèque, la
répartition des risques en cas de falsification des chèques n'a pas été
réglementée de manière uniforme par la Convention de Genève du 19 mars
1931. Si la Suisse a mis le dommage résultant d'un chèque faux ou falsifié
à la charge du tiré, sauf faute du tireur (art. 1132 CO), les divers
pays signataires de la convention ont réglé la question différemment en
tenant plus ou moins compte de l'existence d'une faute de l'un ou l'autre
des obligés (PETITPIERRE-SAUVAIN, FJS no 721, p. 1 et 9). En Suisse même,
la plupart des conditions générales des banques dérogent à l'art. 1132 CO
(HIPPELE, in Kommentar zum schweizerischen Privatrecht, Bâle, n. 6 s. ad
art. 1132 CO). Mais une clause dérogeant au régime légal applicable,
même si les dérogations deviennent la règle, ne tombe pas nécessairement
de ce simple fait sous le coup de l'art. 8 LCD ou du principe de la clause
insolite. En l'occurrence, il sied en outre d'observer que les eurochèques
remplissent largement la fonction de substituts de l'argent comptant. En
cas de perte ou de vol de numéraire, c'est pourtant le porteur malchanceux
qui supporte le dommage. Au premier abord, il n'y a rien de choquant
à prévoir une répartition des risques semblable pour les eurochèques.
On ne voit pas d'obstacle de principe à ce que le tireur et ayant droit à
la carte ec supporte une large responsabilité, dans un système fondé sur
la théorie de l'apparence, et qu'il réponde contractuellement de toute
falsification dont la survenance peut lui être imputée (cf. CANARIS, in
Grosskommentar zum HGB, 4e éd., Bankvertragsrecht, n. 847a). On hésitera
d'autant moins en l'espèce que ce risque est, d'une part, limité au montant
de la garantie des chèques (environ 300 fr. par chèque) et, d'autre part,
"réassuré" dans la mesure où la banque rembourse en principe à son client
le dommage subi jusqu'à concurrence de 90% du montant de la limite de
garantie accordée aux eurochèques; aussi le client ne supporte-t-il
normalement qu'un dommage limité à 10% des montants détournés, retenue
qui de surcroît tombe lorsque l'ayant droit à la carte était en possession
de celle-ci au moment du paiement abusif des chèques. Un tel système, qui
incite le client à la prudence en ce qu'il l'engage à conserver séparément
la carte et les eurochèques, n'apparaît pas abusif (CANARIS, op.cit.,
n. 855a). Le demandeur ne discute au reste pas la retenue de 10%, dont
il admet ce faisant la validité. La couverture du dommage est toutefois
limitée à 10 chèques. Cette restriction - que le demandeur qualifie
d'inadmissible - paraît elle aussi non abusive. Il appartient en effet au
client de décider combien de formulaires de chèques il emporte avec lui
et quel risque il accepte de courir en cas de vol ou de perte (CANARIS,
op.cit., n. 855a). La limite posée de 10 chèques (ce qui représente environ
3'000 fr.) ne constitue pas une atteinte inadmissible à la liberté du
commerce et de l'industrie. Le fait que la couverture du dommage n'est pas
illimitée ressort par ailleurs clairement de la clause II.3 des conditions
d'utilisation. A considérer le système de façon globale, il n'apparaît
ainsi pas qu'on est en présence d'une situation dans laquelle l'équilibre
du régime légal serait sensiblement compromis au sens de l'art. 8 let. a
LCD (cf. ATF 117 II 332 consid. 5a). Il n'apparaît pas non plus qu'on est
en présence d'une clause insolite au sens de l'art. 2 al. 2 CC (cf. ATF
119 II 443 consid. 1a et les références).

    b) Ces questions ne sont pas déterminantes dans le cas particulier. En
laissant sa carte ec avec 32 chèques (soit une valeur en l'espèce
d'environ 11'000 fr.), sans compter son passeport, dans un véhicule
parqué, le demandeur a clairement violé son devoir de diligence
(cf. REIFNER, Der abhanden gekommene Eurocheck, NJW 1987, p. 630 ss,
p. 634; KLINGNER-SCHMIDT, Die Rechtsstrukturen im ec-Service, Baden-Baden
1993, p. 182-183; BAUMBACH/HEFERMEHL, Wechselgesetz und Scheckgesetz, 19e
éd., n. 24a ad art. 4 DSchG, p. 545). On doit donc lui imputer une faute,
et ce déjà au regard seulement de l'art. 1132 CO. Le demandeur ne saurait
se disculper en invoquant simplement le fait que la carte était dans une
fourre et le chéquier dans un portefeuille; les véhicules qui font l'objet
d'une effraction sont en général complètement fouillés. Cette solution
s'impose d'autant plus en l'espèce que les conditions générales acceptées
par le client lui font obligation de conserver avec soin et séparément
la carte ec et les eurochèques, en indiquant de manière explicite que
la prise en charge du dommage par la banque est limitée à certains
montants (clause II.3), de sorte que le demandeur devait être conscient
des risques qu'il prenait en agissant comme il l'a fait. Sur ce point,
la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral.

Erwägung 4

    4.- Il faut encore examiner si, pour être restée inactive et n'avoir
pas fait bloquer les chèques après avoir été avisée par son client,
conformément aux conditions générales, du vol des formulaires eurochèques
et de la carte ec, la défenderesse a commis une faute engageant sa
responsabilité (cf. art. 1119 al. 3 CO; ATF 112 II 450; HIPPELE, op.cit.,
n. 8 ad art. 1132 CO).

    a) Il convient de distinguer l'utilisation de la carte ec comme carte
de garantie de chèque (annexe 1 à la Convention XV, titre II) et comme
moyen de prélèvement d'argent comptant et de paiement (annexe 1 à la
Convention XV, titre III).

    aa) Si la carte ec est utilisée comme moyen de retrait ou de paiement
conjointement avec le code ec dans un appareil automatique, elle peut
être électroniquement bloquée sans difficulté particulière (cf. annexe 1
à la Convention XV, clause III.9). La banque qui ne donnerait pas suite
à un tel ordre de blocage engagerait en principe sa responsabilité. On
n'est cependant pas en présence d'un pareil cas de figure en l'occurrence.

    bb) En revanche, utilisée comme moyen de garantie des eurochèques,
la carte ec suppose un maniement manuel. Les chèques dont elle garantit
le paiement - pour autant que certaines conditions formelles soient
réalisées - ne circulent en outre pas uniquement entre des banques ou
des établissements bancaires, mais sont également utilisés dans les
relations commerciales entre les particuliers, où ils remplacent le
numéraire, on l'a déjà relevé. Le cercle des destinataires est ainsi très
étendu. Cela exclut pratiquement tout blocage efficace, en particulier
à l'égard des porteurs qui ne sont pas des banques (WIDMER, op.cit.,
n. 22 ad art. 1104 CO; cf. aussi BAUMBACH/HEFERMEHL, op.cit., n. 24b
ad art. 4 DSchG). Ceux-ci ne sont en règle générale pas reliés par des
moyens électroniques avec les établissements bancaires qui émettent -
et bloquent - les cartes ec. Certes, il serait éventuellement possible de
notifier le blocage d'une carte ec à tous les établissements bancaires,
mais une telle opération serait lourde à mettre en oeuvre, compliquerait
le trafic des paiements et rendrait largement illusoire la fonction de
garantie de la carte ec. En effet, celui qui aurait payé un chèque faux
ou falsifié reçu de bonne foi courrait le risque de ne pas rentrer dans
ses fonds. Cela serait contraire au sens et au but de la garantie donnée
à ce papier-valeur, et ce d'autant plus qu'en Suisse la garantie ne vaut
pas uniquement envers le premier preneur, mais envers tous les porteurs
successifs (JÄGGI/DRUEY/VON GREYERZ, op.cit., p. 316 et les références
à la doctrine divergente en droit allemand; cf. aussi CANARIS, op.cit.,
n. 852). L'utilisation abusive des chèques et de la carte ec ne peut donc
être combattue efficacement par un blocage.

    b) En définitive, vu l'impossibilité d'empêcher effectivement la
transmission des eurochèques ou de bloquer la carte ec sauf lorsqu'elle
est employée comme moyen de retrait ou de paiement dans des appareils
automatiques, on ne saurait considérer l'inaction de la défenderesse comme
une faute engageant sa responsabilité. Quant à l'hypothèse d'un blocage
partiel ne concernant que les retraits d'argent liquide aux guichets des
banques ou des établissements bancaires (cf. REIFNER, op.cit., p. 635),
elle serait difficile à mettre en oeuvre et efficace uniquement dans les
cas où l'utilisateur abusif se présente lui-même au guichet pour obtenir
le paiement. La clause II.2 des conditions d'utilisation (imprimée en
gras) qui confère à la banque un droit de débit à concurrence du montant
garanti même si l'eurochèque a déjà été révoqué lorsque les conditions
de garantie de la carte sont apparemment remplies ne paraît enfin pas
abusive si l'on garde à l'esprit le rôle de substitut de l'argent comptant
que joue l'eurochèque dans les relations commerciales ainsi que le fait
que le tireur désigné dans le titre sera en règle générale finalement
indemnisé à concurrence de 90% de la limite de garantie fixée par le
système eurochèque, le nombre de formulaires de chèques qu'il conserve
dans un même endroit demeurant de sa responsabilité. Pour les mêmes
raisons, l'argument du demandeur selon lequel les conditions générales
seraient contraires à l'ordre public (art. 19 al. 2 CO) en ce qu'elles
permettraient à la banque de se limiter à "la vérification d'une apparence
au mépris d'une réalité d'un fait" doit être écarté.