Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 121 I 173



121 I 173

24. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit public du 22 mai 1995 dans
la cause Walter Stürm contre Chambre d'accusation du Tribunal cantonal
du canton du Jura (recours de droit public) Regeste

    Art. 32 Abs. 4 lit. a und Abs. 5 OG.

    Die Weigerung, eine Eingabe an die angerufene oder zuständige
Rechtsmittelbehörde zu überweisen, stellt unter den gegebenen Umständen
keine Verfügung dar (E. 2).

    Die Rechtsmittelfrist ist gewahrt, wenn die Eingabe rechtzeitig einer
anderen Abteilung des Gerichtes zugeht, welches den Entscheid gefällt hat
(E. 3).

Sachverhalt

    A.- Walter Stürm, alors détenu aux prisons de Porrentruy en attente de
son jugement par la Cour criminelle du canton du Jura, a adressé quatre
requêtes au Président de cette juridiction, relatives à la restitution
de photographies et d'un agenda, à l'utilisation du téléphone, à des
promenades journalières en plein air et aux frais de transport des effets
du prévenu de Brigue à Porrentruy.

    Par quatre décisions séparées, le magistrat a rejeté les requêtes.

    Contre ces décisions, Stürm a adressé quatre mémoires intitulés
"recours ou prise à partie" à la Chambre d'accusation du Tribunal cantonal
du canton du Jura (ci-après: la Chambre d'accusation). Il a adressé un
cinquième mémoire à cette autorité, dans lequel il reprochait au Président
de la Cour criminelle d'avoir ouvert pour contrôle deux lettres qui
lui avaient été adressées par des autorités cantonales. Dans chacun de
ces mémoires, Stürm en demande la transmission à l'autorité compétente
pour en connaître, au cas où la Chambre d'accusation se tiendrait pour
incompétente.

    Dans cinq décisions séparées du 23 février 1995, la Chambre
d'accusation a déclaré les recours irrecevables, le droit jurassien ne
connaissant pas de recours à la Chambre d'accusation contre les décisions
de la Cour criminelle - une autre section du Tribunal cantonal - ou de son
Président. Elle a examiné s'il y avait lieu de transmettre les recours au
Tribunal fédéral comme objets de sa compétence en application de l'art. 32
al. 5 OJ; elle a estimé que ce n'était pas le cas, les actes de recours
n'ayant pas été adressés à l'autorité cantonale qui avait statué (la Cour
criminelle) mais à une autre autorité cantonale.

    Contre ces décisions, Stürm forme cinq recours de droit public
dans lesquels il déclare attaquer non pas le prononcé d'irrecevabilité,
mais le refus de transmettre au Tribunal fédéral les recours adressés à
la Chambre d'accusation. Il demande par ailleurs au Tribunal fédéral
de traiter ces mémoires directement comme recours de droit public. Le
Tribunal fédéral a déclaré irrecevables les recours en tant qu'ils étaient
dirigés contre les décisions de la cour cantonale; il a décidé de traiter
les cinq mémoires cantonaux comme recours de droit public, sur lesquels
il serait statué ultérieurement.

Auszug aus den Erwägungen:

                   Extrait des considérants:

Erwägung 1

    1.- Les différents recours posent les problèmes communs de la
recevabilité des recours dirigés contre les prononcés de la Chambre
d'accusation d'une part, et du respect du délai par la remise des actes
de recours à une autorité cantonale d'autre part. Il y a lieu de statuer
à ce sujet par un arrêt commun limité à ces questions.

Erwägung 2

    2.- Le recourant déclare en premier lieu vouloir attaquer les décisions
de la Chambre d'accusation de ne pas transmettre ses écritures au Tribunal
fédéral, pour y être traitées comme recours de droit public. En revanche,
il ne remet pas en cause les prononcés par lesquels cette dernière s'est
déclarée incompétente.

    a) Lorsqu'il n'est pas dirigé contre un acte législatif, le recours de
droit public ne peut être formé que contre une décision cantonale (art. 84
al. 1 OJ). Ne constitue une décision qu'un acte étatique qui touche la
situation juridique de l'intéressé, l'astreignant à faire, à s'abstenir
ou à tolérer quelque chose, ou qui règle d'une autre manière obligatoire
ses rapports avec l'Etat (ATF 120 Ia 325 consid. 3a, 22 consid. 2a et les
arrêts cités, spécialement 113 Ia 234 consid. 1). Or, le fait de ne pas
transmettre un mémoire à l'autorité de recours destinataire n'a pas d'effet
sur la situation juridique de son auteur, du moins lorsque la recevabilité
de ce mémoire n'en dépend pas (par exemple parce que sa recevabilité
dépendrait de sa remise à la poste dans un certain délai, par les soins
de l'autorité saisie; cf. aussi ATF 109 Ia 225 consid. 2a). Tel est le
cas en l'occurrence, où il s'agit exclusivement de savoir si le recours
a été remis à l'autorité cantonale qui a statué, au sens de l'art. 32
al. 4 let. a OJ (cf. ci-dessous consid. 3). De plus, il n'appartient pas
non plus à l'autorité cantonale, mais au Tribunal fédéral seul de statuer
sur la recevabilité des recours qui lui sont destinés.

    b) Au demeurant, le rejet d'une requête tendant à un acte matériel -
soit un comportement de l'autorité non constitutif de décision -, ne
peut lui non plus être tenu pour une décision susceptible de recours
(cf. art. 5 al. 1 let. c PA a contrario).

    Les recours se révèlent donc irrecevables en tant qu'ils sont dirigés
contre le prononcé de la Chambre d'accusation refusant de transmettre
les mémoires de Stürm au Tribunal fédéral.

Erwägung 3

    3.- Le recourant demande aussi au Tribunal fédéral de traiter
directement comme recours de droit public les recours qu'il avait adressés
à la Chambre d'accusation; il avait déjà envisagé dans ces derniers une
telle qualification pour l'hypothèse où les recours cantonaux seraient
déclarés irrecevables.

    Selon l'art. 32 al. 4 let. a OJ, qui s'applique tout particulièrement
au recours de droit public (BGE 121 I 93, consid. 1), le délai de recours
est considéré comme observé lorsqu'un mémoire qui devait être adressé
au Tribunal fédéral l'a été en temps utile à l'autorité cantonale qui
a statué.

    Il est à juste titre incontesté que les recours qui ont été adressés
à la cour cantonale à l'encontre des décisions du Président de la Cour
criminelle, l'ont été dans le délai de trente jours prévu à l'art. 89
al. 1 OJ. Il y a donc lieu d'examiner d'une part si ces écrits doivent
être considérés comme des "mémoires qui doivent être adressés au tribunal
[fédéral]" et d'autre part, le cas échéant, s'ils ont été remis "à
l'autorité cantonale qui a statué".

    a) D'après la jurisprudence constante, le Tribunal fédéral qualifie
d'office les recours qui lui sont destinés, sans s'en tenir aux
expressions inexactes dont auraient pu se servir leurs auteurs (ATF 120
Ib 381 consid. 1a et les arrêts cités), même lorsque ces écrits ont été
adressés à une autorité incompétente (cf. en particulier les art. 32 et
107 OJ). Le "mémoire qui devait être adressé au tribunal" s'entend donc
aussi de celui pour le traitement duquel le Tribunal fédéral est compétent
en vertu de la loi (à côté de celui que son auteur voulait expressément
adresser au Tribunal fédéral).

    En l'occurrence, les mémoires de Stürm doivent être donc traités
selon l'art. 32 al. 4 let. a OJ, dès lors qu'on peut envisager de
les considérer comme des recours de droit public, selon l'appréciation
pertinente de la cour cantonale, et à la demande du recourant.

    b) Lorsque l'autorité cantonale qui a statué est un tribunal comportant
plusieurs sections (lato sensu), il y a lieu de déterminer si la remise
de l'acte à une autre section que celle qui a statué suffit à sauvegarder
le délai de recours en application de l'art. 32 al. 4 let. a OJ.

    D'une manière générale, la jurisprudence du Tribunal fédéral considère
qu'une autorité cantonale abuse du formalisme en considérant qu'un délai
cantonal n'est pas respecté par la remise de l'acte à une autre section
d'un même tribunal, les deux sections n'étant que des subdivisions d'une
seule autorité (ATF 113 Ia 96 consid. 2 et les arrêts cités, notamment 101
Ia 323; cf. aussi EGLI, La protection de la bonne foi dans le procès, in
Juridiction constitutionnelle et juridiction administrative, Zurich 1992
p. 235 et l'arrêt non publié qui y est cité - note 58). Il ne saurait en
aller autrement pour le respect du délai de droit fédéral, prévu pour le
dépôt d'un recours de droit public (art. 89 et 32 al. 4 OJ). Cette solution
répond aussi au but de l'art. 32 al. 4 let. a OJ - introduit lors de
la révision de cette loi - qui tend à empêcher un excès de formalisme,
tout en parant aux risques qui seraient liés à une réglementation selon
laquelle le délai serait respecté par la remise de l'acte auprès de
n'importe quelle autorité en Suisse; en effet, dans la situation prévue
par la loi, la constatation du dépôt de l'acte et son acheminement au
Tribunal fédéral ne présentent pas de difficultés particulières.

    En l'espèce, la Chambre d'accusation et la Cour criminelle constituent
deux sections d'un même tribunal (cf. art. 9 de la loi jurassienne sur
l'organisation judiciaire, du 26 octobre 1978). Il en résulte qu'en tant
que recours de droit public, les mémoires de Stürm adressés à la Chambre
d'accusation du Tribunal cantonal jurassien ont été déposés à temps. Il
conviendra de statuer ultérieurement à leur sujet.