Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 121 IV 18



121 IV 18

4. Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation pénale du 31 janvier 1995
dans la cause G. contre Procureur général du canton de Genève (pourvoi
en nullité) Regeste

    Art. 128 Abs. 1 StGB; Unterlassung der Nothilfe.

    Voraussetzungen der Strafbarkeit, allgemein.

    Unmittelbare Lebensgefahr ist gegeben, wenn jemand nach dem Konsum
einer Überdosis Heroin Gefahr läuft, in einigen Stunden zu sterben
(E. 2b/aa).

    Die Hilfeleistungspflicht besteht für jeden, der sich in der Wohnung
der gefährdeten Person befindet; aufgrund der Umstände genügte es,
telefonisch medizinische Hilfe zu holen (E. 2b/aa).

    Vorsatz (E. 2b/bb).

Sachverhalt

    A.- Le 23 juin 1993 vers 18 ou 19 heures, Marie reçut dans son
appartement à Genève G., qui apportait de l'héroïne qu'ils consommèrent
ensemble. Dès son arrivée, G. remarqua que Marie n'était pas dans son état
normal et celle-ci lui déclara qu'elle avait déjà consommé de l'héroïne
dans l'après-midi. Environ un quart d'heure après avoir prisé la drogue,
Marie fut saisie d'un malaise. G. ne fit pas appel à un médecin. Il
expliqua plus tard qu'il avait déjà vu une fois Marie s'endormir de cette
façon et qu'il savait qu'elle avait peur des médecins et souhaitait éviter
des frais.

    Vers 23 heures, B. arriva à son tour dans l'appartement et les deux
hommes tentèrent en vain de réveiller Marie en lui passant de l'eau sur
le visage et en lui donnant des claques. Il fut retenu que G., qui était
lui-même toxicomane, savait qu'une surdose d'héroïne pouvait entraîner
la mort et qu'il se rendait compte que Marie allait mal à la suite de
l'absorption d'héroïne, ayant observé que sa respiration était saccadée
et qu'elle avait les mains froides. Les deux hommes choisirent de ne pas
faire appel à un médecin et fumèrent ensemble de la drogue. Vers minuit,
G., qui tenait à ne pas manquer le dernier bus, quitta les lieux, en
laissant un message à l'attention de Marie et en donnant son numéro de
téléphone à B. pour le cas où un problème surviendrait.

    Marie décéda dans la nuit en raison de la surdose d'héroïne qu'elle
avait consommée, alors que l'issue fatale aurait pu être évitée si elle
avait reçu sans retard des soins médicaux.

    B.- Par arrêt du 29 avril 1994, la Cour correctionnelle avec jury
du canton de Genève a condamné G., pour omission de prêter secours et
infraction à la loi fédérale sur les stupéfiants, à la peine de douze
mois d'emprisonnement avec sursis pendant quatre ans, cette peine étant
complémentaire à une peine prononcée antérieurement.

    Statuant par arrêt du 2 novembre 1994, la Cour de cassation cantonale
a rejeté le pourvoi formé par le condamné.

    C.- Contre cet arrêt, G. s'est pourvu en nullité à la Cour de cassation
pénale du Tribunal fédéral. Invoquant une violation de l'art. 128 CP,
il conclut, avec suite de frais et dépens, à l'annulation de la décision
attaquée et sollicite par ailleurs l'assistance judiciaire.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- (Recevabilité)

Erwägung 2

    2.- a) Le recourant soutient que les faits constatés par l'autorité
cantonale ne constituent pas une omission de prêter secours au sens de
l'art. 128 al. 1 CP.

    La nouvelle teneur de l'art. 128 CP (RO 1989 p. 2451) est entrée
en vigueur le 1er janvier 1990 (RO 1989 p. 2456); les faits reprochés
au recourant ayant eu lieu postérieurement, la nouvelle disposition est
applicable (art. 2 al. 1 CP).

    Le nouvel article 128 CP prévoit notamment que celui qui n'aura pas
prêté secours à une personne en danger de mort imminent, alors que l'on
pouvait raisonnablement l'exiger de lui, étant donné les circonstances,
sera puni de l'emprisonnement ou de l'amende.

    Il s'agit d'un délit d'omission (TRECHSEL, Kurzkommentar StGB, art. 128
no 4; JOSÉ HURTADO POZO, Droit pénal, partie spéciale I, Fribourg 1988
p. 167 no 373; LAURENT MOREILLON, Omission de porter secours, RPS 112
(1994) p. 237), qui réprime une mise en danger abstraite (TRECHSEL,
op.cit., art. 128 no 4; MOREILLON, op.cit., p. 238; REHBERG/SCHMID,
Strafrecht III, 6e éd., p. 41), sans exiger de résultat (TRECHSEL, op.cit.,
art. 128 no 4; REHBERG/SCHMID, op.cit., p. 41; MOREILLON, op.cit.,
p. 237). Cette disposition met à la charge de toute personne qui est
en mesure de le faire l'obligation générale de porter secours à autrui
en cas d'urgence (FF 1985 II 1048; STRATENWERTH, Bes. Teil I, 5e éd.,
p. 90 no 61; REHBERG/SCHMID, op.cit., p. 40; HURTADO POZO, op.cit., p.
167 no 373; MOREILLON, op.cit., p. 243 et 245), sans créer une position
de garant (MOREILLON, op.cit., p. 238, 245 et 250; CORBOZ, L'homicide par
négligence, SJ 1994 p. 214 s. et les références citées; cf. également:
REHBERG/SCHMID, op.cit., p. 44; HURTADO POZO, op.cit., p. 169).

    Le secours qui doit être prêté se limite aux actes que l'on peut
raisonnablement exiger de l'auteur compte tenu des circonstances (FF 1985
II 1048; STRATENWERTH, op.cit., p. 93 no 70; REHBERG/SCHMID, op.cit.,
p. 43; HURTADO POZO, op.cit., p. 168 no 378; TRECHSEL, op.cit., art. 128 no
12; MOREILLON, op.cit., p. 246). Seuls sont exigés les actes de secours qui
sont possibles (TRECHSEL, op.cit., art. 128 no 12; HURTADO POZO, op.cit.,
p. 167 no 375; REHBERG/SCHMID, op.cit., p. 43; MOREILLON, op.cit., p. 247)
et qui peuvent être utiles (TRECHSEL, op.cit., art. 128 no 5; MOREILLON,
op.cit., p. 245). Il s'agit de prendre les mesures commandées par les
circonstances, et un résultat n'est pas exigé (MOREILLON, op.cit., p. 247).

    L'obligation de prêter secours n'existe que si la personne qui en a
besoin se trouve en danger de mort imminent (FF 1985 II 1048). La cause du
danger de mort est indifférente (FF 1985 II 1048; HURTADO POZO, op.cit.,
p. 167 no 373; TRECHSEL, op.cit., art. 128 no 11; MOREILLON, op.cit.,
p. 243). En ce qui concerne la notion de danger de mort imminent, la
doctrine propose d'appliquer les principes dégagés au sujet des mêmes
termes figurant à l'art. 129 CP (HURTADO POZO, op.cit., p. 167 no 374;
MOREILLON, op.cit., p. 244; moins affirmatif STRATENWERTH, op.cit.,
p. 92 no 68). Il faut donc la probabilité sérieuse d'une mort prochaine
(cf. ATF 111 IV 51 consid. 2, 106 IV 12 consid. 2a) ou, si l'on préfère,
que le risque de mort apparaisse si proche que la vie de la personne ne
tient plus qu'à un fil (STRATENWERTH, op.cit., p. 92 no 68). Par exemple,
on considère que celui qui est frappé d'une crise cardiaque se trouve en
danger de mort imminent (FF 1985 II 1048; HURTADO POZO, op.cit., p. 167 no
374; STRATENWERTH, op.cit., p. 92 no 68; op.cit., p. 42). Sous l'empire de
l'ancien droit, la jurisprudence cantonale avait appliqué l'art. 128 CP
à celui qui abandonne une personne prise d'un malaise à la suite d'une
consommation excessive de stupéfiants (Repertorio di giurisprudenza
Patria 113 (1980) p. 161). L'infraction est intentionnelle (ATF 116 IV
19 consid. 3 i.f.; STRATENWERTH, op.cit., p. 94 no 74; REHBERG/SCHMID,
op.cit., p. 44; HURTADO POZO, op.cit., p. 169 no 379; TRECHSEL, op.cit.,
art. 128 no 14; MOREILLON, op.cit., p. 248) et suppose une conscience du
danger de mort imminent (FF 1985 II 1050; STRATENWERTH, op.cit., p. 94
no 74; REHBERG/SCHMID, op.cit., p. 44; HURTADO POZO, op.cit., p. 169 no
379; TRECHSEL, op.cit., art. 128 no 14; MOREILLON, op.cit., p. 248) et,
plus largement, des conditions qui fondent l'obligation de porter secours,
savoir notamment de sa propre capacité de le faire (STRATENWERTH, op.cit.,
p. 94 no 74). Un auteur relève que le dol éventuel suffit (MOREILLON,
op.cit., p. 248).

    b) aa) En l'espèce, il a été retenu en fait - d'une manière qui lie
la Cour de cassation - que Marie avait consommé une quantité excessive de
stupéfiants et que, alors qu'elle se trouvait en compagnie du recourant,
elle avait besoin de soins médicaux urgents qui lui auraient sauvé
la vie, mais que, faute de les avoir reçus, elle est décédée. Elle se
trouvait donc, alors qu'elle était en compagnie du recourant, dans un
état exigeant des soins médicaux urgents sans lesquels elle risquait,
en quelques heures et sans autre intervention, de perdre la vie. Elle
se trouvait ainsi objectivement en danger de mort imminent au sens de la
définition rappelée ci-dessus.

    Le recourant, qui se trouvait avec elle dans son appartement, avait
donc l'obligation de lui prêter secours et ce d'autant plus qu'il lui
avait fourni une partie de l'héroïne qu'elle avait consommée. Le fait
qu'un tiers soit ensuite arrivé dans l'appartement n'y change rien; dans
une telle situation, l'obligation de prêter secours incombait à chacun
d'eux aussi longtemps que le danger subsistait, c'est-à-dire tant que les
mesures nécessaires n'avaient pas été prises, le cas échéant par l'autre
(STRATENWERTH, op.cit., p. 92 no 69; HURTADO POZO, op.cit., p. 167 no 375).

    Le secours commandé par les circonstances consistait en l'espèce
à appeler un médecin ou une ambulance. Un simple appel téléphonique
suffisait. Cette mesure était possible; elle pouvait être raisonnablement
exigée du recourant étant donné les circonstances; elle était de nature
à remédier utilement à la situation.

    Or, d'un point de vue objectif, le recourant n'a appelé aucune aide
médicale, de sorte qu'il n'a pas prêté le secours qui était dû dans les
circonstances d'espèce.

    bb) Sous l'angle subjectif, il ressort des faits retenus que le
recourant a examiné l'état de Marie et qu'il a décidé de ne pas appeler
une aide médicale, ce qui revenait à laisser cette personne sans soins
contrairement à ce que requérait manifestement son état. En décidant de
ne pas appeler d'aide médicale, le recourant a agi intentionnellement;
il a décidé de ne prêter en réalité aucun secours à cette personne.

    Que Marie lui ait dit précédemment qu'elle avait peur des médecins et
souhaitait éviter des frais ne l'exonérait pas de son obligation légale;
il ne prétend d'ailleurs pas qu'il aurait su ou cru que cette personne
souhaitait mettre fin à ses jours.

    Quant à la conscience du danger de mort imminent, la cour cantonale
a retenu que le recourant, qui est lui-même toxicomane, savait qu'une
surdose d'héroïne pouvait avoir une issue mortelle, qu'il avait constaté
que Marie allait mal après avoir absorbé de nouveau de l'héroïne, que
l'on ne parvenait plus à la réveiller, que sa respiration était saccadée
et qu'elle avait les mains froides. En présence de tels éléments, la cour
cantonale a retenu qu'il avait conscience qu'elle se trouvait en danger
de mort imminent, même s'il espérait qu'elle s'en sorte. Déterminer, à
la suite d'une appréciation des preuves, les représentations subjectives
d'une personne relève des constatations de fait qui lient la Cour de
cassation (ATF 120 IV 117 consid. 2a, 119 IV 222 consid. 2, 118 IV
167 consid. 4); eu égard aux constatations de fait qu'elle a retenues,
l'autorité cantonale n'a pas violé le droit fédéral en admettant que
l'auteur avait agi intentionnellement. Dans la mesure où le recourant
prétend que son état et les circonstances ne lui permettaient pas d'avoir
conscience du danger de mort imminent qui menaçait Marie, il s'écarte
des constatations de fait cantonales, ce qui n'est pas admissible dans le
cadre d'un pourvoi en nullité (ATF 119 IV 202 consid. 2b, 309 consid. 7b,
315 consid. 2, 115 IV 38 consid. 3a, 106 IV 338 consid. 1).

    Au vu des faits retenus - qui lient la Cour de cassation -, la
condamnation du recourant pour omission de prêter secours au sens de
l'art. 128 al. 1 CP ne viole pas le droit fédéral.

Erwägung 3

    3.- (frais judiciaires).