Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 121 II 257



121 II 257

44. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public du 7 juillet 1995
en la cause A. contre Commission des recours en matière fiscale du canton
de Berne et Intendance des impôts du canton de Berne (recours de droit
administratif) Regeste

    Art. 6 EMRK; Art. 4 BV; Art. 89 Abs. 2 und 131 Abs. 1 BdBSt:
Rechtmässigkeit der Vollständigkeitsbescheinigung; Auskunftspflicht in
einem Steuerhinterziehungsverfahren; Aussageverweigerungsrecht in eigener
Sache und Unschuldsvermutung; Grundsatz "ne bis in idem".

    Der Steuerpflichtige kann gestützt auf Art. 89 Abs. 2 BdBSt
verpflichtet werden, eine Vollständigkeitsbescheinigung beizubringen. Im
Falle der Weigerung ist er gemäss Art. 131 Abs. 1 BdBSt strafbar (E. 3).

    Die im Verlauf eines Steuerhinterziehungsverfahrens gestützt
auf Art. 131 Abs. 1 BdBSt ausgesprochene Busse verletzt weder das
Aussageverweigerungsrecht in eigener Sache noch die Unschuldsvermutung
(E. 4).

    Die Zuwiderhandlungen gegen Art. 131 Abs. 1 und Art. 129 Abs. 1 BdBSt
können unabhängig voneinander verfolgt werden, ohne dass der Grundsatz
"ne bis in idem" verletzt wäre (E. 5).

    Bemessung der Busse im vorliegenden Fall (E. 6).

Sachverhalt

    A.- A. a procédé à divers placements et investissements auprès de
P. et de ses sociétés, en particulier de la société E. Ces montants n'ont
pas été déclarés à l'autorité fiscale. Informée de ces placements par
l'Administration fédérale des contributions, l'Intendance des impôts du
canton de Berne a réclamé à plusieurs reprises des précisions à A. En
guise de réponse, celui-ci a produit diverses pièces indiquant que les
investissements précités avaient été effectués par l'intermédiaire de la
banque S. A. n'avait jamais auparavant informé l'autorité fiscale qu'il
entretenait des relations d'affaires avec cet établissement. L'intéressé
a en outre admis que ses déclarations d'impôt contenaient une erreur dans
la fortune mentionnée. Le 7 juin 1991, l'Intendance des impôts a demandé
à A. de faire établir par la banque S. une attestation d'intégralité
concernant les années 1979 à 1990; elle l'a en outre informé qu'une
procédure pour soustraction fiscale était introduite à son encontre.

    Le 7 décembre 1992, après plusieurs rappels infructueux, l'Intendance
des impôts a infligé à A. deux amendes de 10'000 fr., la première pour
l'impôt d'Etat et la seconde pour l'impôt fédéral direct, sanctionnant son
refus de produire l'attestation d'intégralité requise. Le 21 avril 1993,
l'Intendance des impôts a en outre notifié à A. plusieurs décisions fixant
les impôts supplémentaires et les amendes concernant les impôts cantonaux
des années 1981 à 1992 et l'impôt fédéral direct des périodes 1985-1986 à
1991-1992. Ces décisions n'ont pas été contestées et sont entrées en force.

    A. a recouru auprès de la Commission des recours en matière fiscale
du canton de Berne (ci-après: la Commission cantonale) contre la décision
prise le 7 décembre 1992 par l'Intendance des impôts. Le 14 juin 1994, la
Commission cantonale a rejeté le recours en considérant notamment que le
contribuable engagé dans une procédure pour soustraction fiscale devait,
sous peine d'amende, fournir les renseignements demandés.

    Agissant par la voie du recours de droit administratif, A. demande
au Tribunal fédéral d'annuler la décision prise le 14 juin 1994
par la Commission cantonale dans la mesure où elle concerne l'impôt
fédéral direct, et de supprimer l'amende, éventuellement d'en réduire
le montant. Il invoque notamment, la violation de l'art. 131 al. 1 de
l'arrêté du Conseil fédéral du 9 décembre 1940 concernant la perception
d'un impôt fédéral direct (AIFD; RS 642.11), le non-respect de son droit
de ne pas témoigner contre lui-même et de la présomption d'innocence,
de même que celui du principe "ne bis in idem". L'amende serait en
outre disproportionnée et reposerait sur des allégations qui violerait
le principe de la présomption d'innocence.

    Le Tribunal fédéral a admis partiellement le recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                  Extrait des considérants:

Erwägung 3

    3.- Selon l'art. 131 al. 1 AIFD, toute personne astreinte à l'impôt
ou tenue de fournir des renseignements qui, sans que soit posé l'état de
fait de l'art. 129 AIFD, enfreint, intentionnellement ou par négligence,
les ordonnances officielles et les dispositions d'exécution prises en
vertu de l'arrêté du Conseil fédéral sur la perception d'un impôt fédéral
direct, concernant l'obligation, notamment, de remettre ou de produire
des livres, d'établir ou de remettre des attestations et d'autres pièces
justificatives, ainsi que de donner des renseignements, est frappé d'une
amende de 5 à 10'000 fr.

    Il faut donc examiner en premier lieu si le recourant, en ne produisant
pas l'attestation d'intégralité, a enfreint une obligation qui lui
incombait en vertu de la législation en matière d'impôt fédéral direct.

    a) aa) L'art. 89 al. 2 1ère et 2e phrases AIFD prévoit notamment:

    "L'autorité de taxation peut exiger, en outre, que le contribuable
   produise les livres, documents et pièces justificatives se trouvant en
   sa possession et qu'il remette des attestations et états présentant
   de l'importance pour sa taxation, qu'il doit se procurer ou établir
   lui-même.

    En particulier, le contribuable indiquera à l'autorité de taxation,
à sa
   demande, les noms des personnes avec lesquelles il a conclu des affaires
   ou auxquelles il a fait des prestations appréciables en argent; il
   renseignera sur ses rapports contractuels avec ces personnes, ainsi
   que sur les prestations et prétentions réciproques qui en découlent."

    Introduite par la loi fédérale du 9 juin 1977 renforçant les mesures
contre la fraude fiscale entrée en vigueur le 1er janvier 1978, cette
disposition a précisé et renforcé les obligations de renseigner du
contribuable (GAUTHIER, Fraude fiscale et droit pénal. Remarques sur une
loi récente, in RPS 96/1979 p. 266-267). Elle a consacré le principe
d'une obligation générale de renseigner (MOSSU, Mesures contre la fraude
fiscale, Commentaire de la loi du 9 juin 1977, Zurich 1982, p. 16) et
devait permettre d'"astreindre le contribuable à donner tout renseignement
sur sa situation de revenu et de fortune, de même que sur ses prestations
et ses obligations vis-à-vis de tiers" (Message du Conseil fédéral à
l'appui de mesures propres à améliorer les finances de la Confédération
du 8 janvier 1975, FF 1975 I p. 360). Elle visait ainsi, notamment,
à établir la situation du contribuable afin de permettre à l'autorité
fiscale de se prononcer en toute connaissance de cause, c'est-à-dire
compte tenu de tous les éléments nécessaires à la fixation de l'impôt
effectivement dû (Archives 55 p. 137 consid. 2b p. 139; MOSSU, op.cit., p.
8-9). L'obligation imposée par l'art. 90 al. 5 AIFD aux personnes qui sont
ou ont été en rapport contractuel avec le contribuable de lui délivrer,
à sa demande, une attestation sur ce rapport et sur les prétentions et
prestations réciproques qui en découlent, constitue le corollaire de
l'obligation de renseigner de celui-là (MOSSU, op.cit., p. 15-16).

    bb) En l'espèce, le recourant ne conteste pas qu'il devait
produire certaines attestations bancaires. Il a d'ailleurs déposé
des attestations partielles de la banque S. qui concernaient cependant
exclusivement les versements non déclarés effectués auprès de P. et de ses
sociétés. L'intéressé prétend, en revanche, qu'il n'avait pas à produire
l'attestation d'intégralité.

    b) aa) L'attestation d'intégralité a pour but de faire apparaître
toutes les relations contractuelles entre la banque et le contribuable
(dépôts de titres, comptes-courants, comptes numérotés, carnets d'épargne,
etc.) durant les périodes de calcul déterminantes pour la procédure de
taxation ou pour soustraction d'impôt. L'Administration fédérale des
contributions en a réglé la formulation dans une circulaire interne du
11 février 1993.

    bb) La doctrine admet de manière générale la légalité de l'attestation
d'intégralité au regard des art. 89 al. 2 et 90 al. 5 AIFD. Elle la
distingue de la déclaration dite "négative", par laquelle une banque
devrait attester qu'elle n'a pas eu de rapports d'affaires avec un
contribuable; cette déclaration négative ne serait pas autorisée
(Mossu, op.cit., p. 68; KÄNZIG/BEHNISCH, Die direkte Bundessteuer,
Bâle 1992, vol. III, n. 36 et 37 ad art. 90; BODMER/KLEINER/LUTZ,
Kommentar zum schweizerischen Bankengesetz, Zurich 1993, n. 45a ad
art. 47; SCHWAGER, Das schweizerische Bankgeheimnis in Berücksichtigung
der Grundlagen, Zusammenhänge und Auswirkungen, thèse Fribourg 1972,
Zurich 1973, p. 110; CAMENZIND, Bankenbescheinigung und Bankgeheimnis
im steuerlichen Veranlagungsverfahren, in L'Expert-comptable suisse
9/1989 p. 388-389; IM OBERSTEG, Die Bescheinigungspflichten von Bank und
Kunde im Veranlagungsverfahren der direkten Bundessteuer, in Beiträge
zum schweizerischen Bankenrecht, Berne 1987, p. 413 et 418; BILL, Die
Auskunftspflicht Dritter im Steuerveranlagungs- und Einspracheverfahren,
Berne/Stuttgart 1991, p. 355 et 363 ss; Convention relative à l'obligation
de diligence des banques du 1er juillet 1992 [CDB], n. 46 à 49 ad art. 8
et n. 50 ad art. 9).

    Il ne fait pas de doute que l'attestation d'intégralité, telle que
la connaît la pratique, est de nature à établir avec clarté et sécurité
l'ensemble des relations d'un contribuable avec l'établissement bancaire
dont il est le client. Elle permet à l'intéressé de démontrer l'exactitude
des indications qu'il a données dans sa déclaration d'impôt, comme il
en a d'ailleurs l'obligation (Archives 55 p. 137 consid. 2c p. 140;
RIVIER, Droit fiscal suisse, l'imposition du revenu et de la fortune,
Neuchâtel 1980, p. 309; MASSHARDT/GENDRE, Commentaire IDN, Lausanne 1980,
n. 2 ad art. 89). A cet égard, le fait que l'attestation d'intégralité
porte sur l'ensemble des relations du contribuable avec sa banque est
seul susceptible d'exclure l'existence d'autres comptes non déclarés. Dès
lors, se fondant sur les art. 89 al. 2 et 90 al. 5 AIFD, l'autorité de
taxation est en droit d'exiger d'un contribuable la production d'une
telle attestation (MOSSU, op.cit., p. 67; BODMER/KLEINER/LUTZ, op.cit.,
n. 45a ad art. 47; CDB, loc.cit.; arrêt non publié du 7 juillet 1994 en
la cause C. contre VS, Commission cantonale de recours en matière fiscale,
consid. 3b).

    cc) Selon l'art. 90 al. 5 AIFD, les personnes qui sont ou ont été
en rapport contractuel avec le contribuable doivent lui délivrer, à
sa demande, une attestation sur ce rapport et sur les prétentions et
prestations réciproques qui en découlent. De plus, l'alinéa 6 du même
article prévoit que si le contribuable, malgré sommation, ne produit pas
cette attestation, l'autorité fiscale peut l'exiger du tiers. Toutefois,
le secret professionnel protégé légalement est réservé (art. 90 al. 6 3ème
phrase AIFD). Or tel est le cas du secret bancaire prévu par l'art. 47 de
la loi fédérale du 8 novembre 1934 sur les banques et les caisses d'épargne
(LB; RS 952.0). Par conséquent, seul le recourant pouvait - et devait -
faire remplir l'attestation d'intégralité par la banque S., la déliant
ainsi du secret bancaire (MOSSU, op.cit., p. 66-68). C'est dès lors à
bon droit que l'Intendance des impôts s'est adressée au recourant et non
directement à sa banque. Au surplus, l'intéressé admet avoir refusé de
demander à celle-ci de lui délivrer l'attestation en cause; il ne prétend
donc pas qu'elle se serait opposée à la remplir, malgré ses injonctions,
de sorte qu'il serait puni à tort en raison du comportement d'un tiers
(MOSSU, op.cit., p. 79).

    dd) Le recourant prétend que l'attestation d'intégralité qui lui a
été demandée porterait sur des périodes écoulées et violerait ainsi le
principe de la non-rétroactivité.

    Selon la jurisprudence, une norme a un effet rétroactif lorsqu'elle
s'applique à des faits entièrement révolus avant son entrée en vigueur
(ATF 107 Ib 191 consid. 3b p. 196; GRISEL, Traité de droit administratif,
Neuchâtel 1984, vol. I, p. 147; MOOR, Droit administratif, Berne 1994,
vol. I, p. 178).

    Ainsi qu'on l'a vu, l'attestation d'intégralité repose sur les art. 89
al. 2 et 90 al. 5 AIFD; ces dispositions sont entrées en vigueur le 1er
janvier 1978 dans leur forme actuelle. En outre, en vertu de l'art. 72
AIFD, l'Administration fédérale des contributions peut prendre des mesures
pour assurer une taxation et une perception correctes et uniformes de
l'impôt et déterminer la forme et le contenu des formules; cette dernière
disposition n'a pas subi de modification depuis 1940. Tous ces articles
sont donc entrés en vigueur bien avant la demande précitée de l'Intendance
des impôts du 7 juin 1991.

    Le recourant invoque les art. 957 ss CO et se plaint aussi que
l'autorité fiscale lui ait demandé des renseignements remontant à
1979. Cependant, dans la mesure où il n'est pas lui-même astreint à
tenir des livres au sens des articles précités, il ne saurait invoquer
le délai de dix ans prévu à l'art. 962 CO. La question de savoir si la
banque S. pourrait s'en prévaloir n'a pas à être examinée ici. En réalité,
l'Intendance des impôts a défini la période concernée par l'attestation
d'intégralité en se référant au délai de prescription de la procédure
cantonale en soustraction d'impôt (art. 182 al. 2 de la loi bernoise du
29 octobre 1944 sur les impôts directs de l'Etat et des communes). Pour
l'impôt fédéral direct, le droit d'engager la procédure en raison des
infractions fiscales prévues aux art. 132 et 133 AIFD s'éteint cinq ans
après la clôture de la période de taxation en question (art. 134 AIFD).

    En l'espèce, l'ouverture de la procédure en soustraction fiscale a eu
lieu le 7 juin 1991. Cette procédure concernait en premier lieu la période
de taxation 1985-1986 fondée sur les années de calcul 1983 à 1984. Au vu
du délai prévu à l'art. 134 AIFD, la prescription n'était donc pas acquise
et il en allait de même pour les périodes fiscales suivantes. Autorisée à
engager une procédure portant sur les années de calcul 1983 et suivantes,
l'Intendance des impôts pouvait, sans abuser de son pouvoir d'appréciation,
demander au recourant des renseignements se rapportant à ces années-là. En
revanche, pour les années 1979 à 1982, la demande de renseignements ne
se justifiait pas du point de vue de l'impôt fédéral direct.

    c) Le recourant a entretenu des relations d'affaires avec la banque
S. Il a en outre admis que ses déclarations fiscales contenaient une
erreur quant à la fortune déclarée et a accepté le redressement opéré tant
sur ses revenus que sur sa fortune. L'Intendance des impôts était donc
fondée à vérifier l'exactitude de l'ensemble des déclarations fiscales
en cause. Elle avait ainsi non seulement le droit, mais aussi le devoir
de réclamer à l'intéressé l'attestation d'intégralité. En ne donnant pas
suite à cette demande, le recourant a violé l'obligation de renseigner
imposée par l'art. 89 al. 2 AIFD, de sorte que les conditions objectives
de l'infraction de l'art. 131 al. 1 AIFD sont réalisées.

    Par ailleurs, le recourant ne prétend pas qu'il aurait été
empêché contre sa volonté de fournir l'attestation d'intégralité
requise. Au contraire, il ressort du dossier qu'il ne l'a pas produite
intentionnellement, estimant ne pas avoir à donner de justification sur
d'autres éléments imposables que les placements effectués auprès de P. et
de la société E. C'est en vain - et non sans témérité - que le recourant
prétend se libérer en invoquant le fait que l'attestation d'intégralité
était rédigée en langue allemande. En effet, il n'a soulevé ce grief que
longtemps après la première demande de l'Intendance des impôts et il a
lui-même procédé en allemand devant le Tribunal fédéral. Au surplus,
l'Intendance des impôts lui a fourni, à sa demande, une traduction
adéquate de ladite attestation, de sorte qu'il ne saurait prétendre
n'en avoir pas compris le sens et le but. Il faut dès lors constater que
l'élément subjectif de la contravention prévue à l'art. 131 al. 1 AIFD
est également réalisé.

Erwägung 4

    4.- Le recourant invoque l'art. 6 par. 2 CEDH et prétend que la
sanction fondée sur l'art. 131 al. 1 AIFD et dirigée contre son refus
de produire l'attestation d'intégralité dans la procédure ouverte pour
soustraction fiscale, violerait son droit à ne pas témoigner contre
lui-même et la présomption d'innocence.

    a) Selon la jurisprudence récente, la procédure réprimant la
soustraction fiscale en matière d'impôt fédéral direct (art. 129 et 132
AIFD) est une procédure de caractère pénal (ATF 119 Ib 311 consid. 2e et
2f p. 316-317; 116 IV 262 consid. 3b p. 266-267). Selon la jurisprudence,
le droit de ne pas témoigner contre soi-même est un principe général de
la procédure pénale issu de l'art. 4 Cst. (ATF 109 Ia 166 consid. 2b
p. 167-168; 106 Ia 7 consid. 4 p. 8-9). Il permet à un accusé de
se taire sans qu'il en découle pour lui de désavantage. Cependant,
le Tribunal fédéral ne pouvant revoir la constitutionnalité du droit
fédéral (art. 114bis al. 3 Cst.), il ne peut se fonder sur le principe
constitutionnel précité pour déroger au système mis en place par l'arrêté
du Conseil fédéral concernant la perception d'un impôt fédéral direct
(ATF 119 Ib 311 consid. 3b p. 319 pour le principe "ne bis in idem").

    L'art. 14 ch. 3 lettre g du Pacte international du 16 décembre 1966
relatif aux droits civils et politiques (RS 0.103.2; ci-après: le Pacte
international) prévoit expressément que toute personne accusée d'une
infraction pénale a droit, en pleine égalité, à ne pas être forcée
de témoigner contre elle-même ou de s'avouer coupable. L'art. 6 CEDH
ne mentionne en revanche pas expressément un tel droit. La doctrine
admet toutefois qu'il se déduit de l'art. 6 par. 2 CEDH (VELU/ERGEC,
La Convention européenne des droits de l'homme, Bruxelles 1990, n. 561
p. 470; VILLIGER, Handbuch der Europäischen Menschenrechtskonvention,
Zurich 1993, no 488 p. 288). La Cour de justice des Communautés européennes
l'a cependant déduit des droits de la défense (art. 6 par. 3 CEDH; arrêt
du 18 octobre 1989 en la cause Orkem SA contre Commission de l'Union
européenne, 347/87, Recueil de la Jurisprudence de la Cour 1989, ch. 30
et 34 p. 3350-3351). La Cour européenne des droits de l'homme l'a fondé
sur l'art. 6 par. 1 CEDH (arrêt du 25 février 1993 en la cause Funke
contre France, Publication de la Cour européenne des droits de l'homme,
Série A, vol. 256-A, ch. 41-44).

    b) Les garanties issues des art. 6 CEDH et 14 du Pacte international
ne sont applicables que dans une procédure de caractère pénal.

    Selon l'art. 129 al. 1 AIFD, celui qui se soustrait totalement
ou partiellement à l'impôt en celant des éléments essentiels à la
détermination de l'existence ou de l'étendue de l'obligation fiscale ou en
donnant, intentionnellement ou par négligence, des indications inexactes
(lettre b), est passible d'une amende allant jusqu'à quatre fois le
montant soustrait. Ce montant doit être payé en plus de l'amende. Selon
la jurisprudence, celle-ci doit avoir un effet à la fois préventif et
répressif. Par ailleurs, les dispositions concernant la soustraction
fiscale s'adressent à tous les citoyens en leur qualité de contribuables
et visent à protéger le bien juridique que représente la prétention fiscale
de la collectivité publique. Les modalités de cette amende, de même que le
montant qu'elle peut atteindre (jusqu'à quatre fois le montant soustrait)
en font une peine à laquelle s'appliquent donc les garanties issues de
l'art. 6 CEDH (ATF 119 Ib 311 consid. 2e et 2f p. 316-318; cf. aussi
arrêt du 24 février 1994 en la cause Bendenoun contre France, Publication
de la Cour européenne des droits de l'homme, Série A, vol. 248, ch. 47;
arrêt du 21 février 1984 en la cause Öztürk contre Allemagne, op.cit.,
Série A, vol. 73, ch. 53).

    Bien que l'amende réprimant la soustraction fiscale selon l'art. 129
AIFD soit une sanction de caractère pénal, tel n'est en revanche pas le
cas du rappel d'impôt qui doit être payé en sus de cette amende. Selon
la conception actuelle dominante, celui-là ne représenterait pas
une prétention fiscale de nature différente de la créance primitive
d'impôt. En effet, il s'agirait de prélever, au cours d'une nouvelle
taxation, les impôts qui n'ont pas été perçus à tort. Le rappel d'impôt
ne serait ainsi rien d'autre qu'une révision en faveur du fisc de la
décision de taxation entrée en force et n'aurait en particulier pas de
caractère pénal (BLUMENSTEIN/LOCHER, System des Steuerrechts, 4ème édition,
Zurich 1992, p. 283 et 285; HÖHN, Steuerrecht, 7ème édition, Berne 1993,
n. 23-26 p. 593-594; cf. aussi ATF 98 Ia 22 consid. 2 p. 25).

    Cette conception se retrouve à l'art. 129 AIFD dont le texte allemand
évite le terme de "Nachsteuer" qui, en relation avec certaines législations
cantonales, peut évoquer certaines fonctions pénales. En outre, la fixation
de ce montant ne se fait pas selon des critères de calcul particuliers
et ne fait pas l'objet d'une majoration. Le contribuable doit ainsi
s'acquitter de l'impôt primitivement dû qui n'a pas été taxé correctement
ou qui n'a pas été taxé du tout. Le rappel d'impôt n'a donc pas de
caractère pénal ou de réparation; il porte uniquement sur l'obligation
fiscale primitive qui ne s'est pas encore éteinte (KÄNZIG/BEHNISCH,
op.cit., n. 147 ad art. 129; BEHNISCH, Das Steuerstrafrecht im Recht der
direkten Bundessteuer, p. 152).

    c) Cependant, même si le rappel d'impôt n'est pas une peine au
sens de l'art. 6 CEDH, la procédure en soustraction fiscale, au cours
de laquelle il est fixé selon l'art. 129 al. 1 AIFD, a en revanche un
caractère pénal. Il faut dès lors se demander s'il est possible, au
sein d'une telle procédure, de contraindre le contribuable à fournir les
renseignements nécessaires à la détermination dudit rappel.

    aa) L'autorité compétente dans la procédure en soustraction fiscale
a les mêmes droits, obligations et pouvoirs que l'autorité de taxation
(art. 89 à 91 AIFD applicables par renvoi de l'art. 132 al. 2 AIFD). Elle
ne jouit notamment pas des pouvoirs d'investigation particuliers
appartenant à une autorité pénale, tel le droit d'interroger des témoins,
de procéder à des perquisitions ou d'ordonner des mesures de surveillance,
sous réserve toutefois du cas exceptionnel de l'intervention des organes
spéciaux d'enquête prévus à l'art. 139 AIFD. De plus, le fardeau de la
preuve est réglé de manière identique dans les deux procédures. Ainsi,
l'autorité fiscale doit apporter la preuve des éléments imposables alors
que le contribuable doit établir les faits permettant de diminuer ou de
supprimer sa dette fiscale (BLUMENSTEIN/LOCHER, op.cit., p. 351 avec les
références à la jurisprudence). Par ailleurs, le contribuable doit prouver
l'exactitude de sa déclaration d'impôt et de ses explications ultérieures;
il incombe en revanche à l'autorité fiscale d'apporter la preuve de
l'existence d'éléments imposables qui n'ont pas été annoncés (ATF 72 I 42
consid. 2 p. 46; RIVIER, op.cit., p. 309; HÖHN, op.cit., n. 16 p. 568 et
n. 28 p. 574). Si les preuves recueillies par l'autorité fiscale apportent
suffisamment d'informations révélant l'existence d'éléments imposables non
déclarés, il appartient à nouveau au contribuable d'établir l'exactitude
de ses allégations; il doit justifier l'origine des montants non déclarés
et il peut même être obligé de fournir des renseignements supplémentaires
sur les rapports contractuels mis à jour par l'autorité fiscale et sur
les prestations qui en découlent (art. 89 al. 2 2ème phrase AIFD).

    Le contribuable n'est cependant pas contraint de témoigner contre
lui-même car la preuve de l'existence d'éléments imposables non déclarés
ou de rapports contractuels avec certaines personnes incombe à l'autorité
fiscale. Il doit uniquement donner des indications concernant les
éléments non déclarés dont l'existence a déjà été établie par l'autorité
fiscale. Il est ainsi traité comme tout contribuable tenu à collaborer dans
la procédure de taxation. Le droit de ne pas témoigner contre soi-même
ne saurait ainsi être invoqué pour se libérer du fardeau de la preuve
d'établir la véracité de ce que l'intéressé a avancé dans sa déclaration
fiscale et pour échapper au contrôle de l'autorité fiscale (art. 89 al. 1
AIFD). A cet égard, un tel contrôle ne saurait être considéré comme une
violation de la présomption d'innocence dont bénéficie le contribuable.

    bb) Des obligations similaires à celles mises à la charge du
contribuable par l'art. 89 AIFD ne sont pas inhabituelles en droit
administratif. Elles imposent d'informer ouvertement et honnêtement les
autorités et existent du reste dans les législations d'autres Etats ou
de divers cantons. Le devoir de collaboration du contribuable compense
le fardeau de la preuve mis à la charge de l'autorité fiscale. Sans
cette obligation, celle-ci pourrait en effet être dans l'impossibilité de
procéder à une imposition conforme à la loi et à l'égalité de traitement,
en raison de la difficulté à réunir les preuves nécessaires concernant
la situation financière de l'intéressé. Le législateur aurait certes pu
prévoir d'autres moyens d'atténuer la rigueur du fardeau de la preuve mis
à la charge de l'autorité fiscale, comme par exemple l'affaiblissement
des exigences de preuve ou le renversement du fardeau de la preuve; le
devoir de collaboration est cependant la solution la plus "douce" (GYGI,
Bundesverwaltungsrechtspflege, 2ème édition, Berne 1983, p. 282 ss). Par
ailleurs, si l'on admettait que le contribuable puisse se taire dans
la procédure en rappel d'impôt, l'ensemble de la procédure de taxation
serait compromise; il suffirait en effet au contribuable d'invoquer sa
propre soustraction fiscale pour échapper à ses obligations et rendre
tout contrôle plus laborieux si ce n'est impossible (cf. KONFERENZ
STAATLICHER STEUERBEAMTER, Nachsteuer- und Steuerstrafrecht, Bericht
einer Expertenkommission an den Regierungsrat des Kantons Zürich vom
5. Januar 1994, Berne 1994, p. 102). Tel ne peut être ni le sens ni le
but des art. 6 CEDH et 14 du Pacte international.

    cc) Il existe en droit administratif un grand nombre d'obligations qui
permettent notamment de confondre l'auteur d'une infraction et auxquelles
l'intéressé ne peut se soustraire en prétendant qu'il s'incriminerait
lui-même. Ainsi par exemple, l'art. 33 al. 3 de l'ordonnance du 27 août
1969 sur la construction et l'équipement des véhicules routiers (OCE; RS
741.41) impose à certains véhicules d'être équipés de tachygraphes. Bien
que cette obligation puisse le cas échéant permettre d'accuser le
conducteur de violation des prescriptions concernant la durée du travail
et du repos ou les limitations de vitesse, celui-là peut être amendé
s'il ne maintient pas le tachygraphe en fonction (art. 85 OCE). De plus,
en cas d'accident, il ne peut pas s'opposer à la remise de cet appareil
sous prétexte qu'il s'accuserait ainsi d'une infraction. Il en va de même
des devoirs incombant aux automobilistes en cas d'accident puisque même
si ceux-là servent notamment à déterminer les responsabilités pénales
des intéressés (art. 51 de la loi fédérale du 19 décembre 1958 sur la
circulation routière [LCR; RS 741.01]), leur violation est punissable en
vertu de l'art. 92 LCR. La peine attachée au refus de se soumettre à la
prise de sang (art. 91 al. 3 LCR) est un autre exemple particulièrement
explicite. Cette sanction concerne en effet la violation d'un devoir
ayant comme unique but de s'assurer que le conducteur en état d'ébriété
pourra être poursuivi et condamné. Malgré cette conséquence, le refus de
se soumettre à la prise de sang est punissable, ce qui est d'ailleurs
admissible au regard de la Convention européenne des droits de l'homme
(VILLIGER, op.cit., n. 488 p. 288 et les références citées). On peut
aussi citer les différentes dispositions en matière de protection de
l'environnement qui obligent l'exploitant d'installations à annoncer
les incidents qui y surviennent. Bien que le fait de causer une pollution
puisse conduire à l'ouverture d'une procédure pénale, l'Etat peut punir les
violations des devoirs d'annoncer afin de protéger l'équilibre écologique
(cf. par exemple l'art. 22 al. 3 en relation avec l'art. 71 de la loi
fédérale du 24 janvier 1991 sur la protection des eaux [LEaux; RS 814.20]).
De même, il doit être possible d'obliger le contribuable, sous peine de
sanction pénale, à fournir des renseignements sur ses rapports financiers
même s'il devait ainsi dévoiler une soustraction fiscale.

    dd) Au vu de ce qui précède, ni le droit de se taire ni la présomption
d'innocence issus de l'art. 6 CEDH ne s'appliquent à l'obligation de
collaborer faite au contribuable dans le cadre de l'établissement de
ses éléments imposables, que ce soit au moment de la taxation ou lors de
la détermination du rappel d'impôt dans une procédure pour soustraction
fiscale.

    d) En l'espèce, le recourant a déposé des déclarations d'impôt
incomplètes pour les périodes de taxation 1985-1986 à 1991-1992. L'autorité
fiscale a établi, par ses propres moyens, que l'intéressé n'avait pas
déclaré les investissements effectués auprès de P. et de la société
E. Soucieuse de procéder à un contrôle plus complet des déclarations
fiscales en cause, elle a demandé au recourant de fournir des précisions
au sujet de ces investissements. Le recourant ayant indiqué que
ceux-ci avaient été effectués par l'intermédiaire de la banque S.,
établissement dont il n'avait jamais fait mention auparavant dans ses
déclarations d'impôt, l'autorité fiscale l'a alors prié d'établir au
moyen de l'attestation d'intégralité, qu'il avait annoncé l'entier de ses
relations d'affaires avec cette banque. Ainsi qu'on l'a vu ci-dessus, le
fisc pouvait demander au contribuable de fournir la preuve de l'exactitude
de ce que lui-même affirmait et contrôler ses dires sans pour autant violer
le droit de ne pas témoigner contre soi-même et la présomption d'innocence.

    e) La jurisprudence des instances européennes mentionnées ci-dessus
(consid. 4a) n'est pas contraire à la solution retenue par le Tribunal
fédéral. En effet, la Cour européenne des droits de l'homme a admis
que les autorités douanières françaises avaient violé le droit à un
procès équitable en tentant, au moyen d'amendes et d'astreintes, de
contraindre une personne à fournir les preuves d'infractions dont les
autorités supposaient l'existence (arrêt du 25 février 1993 en la cause
Funke contre France, Publication de la Cour européenne des droits de
l'homme, Série A, vol. 256-A, ch. 41-44 p. 21-22). La Cour de justice des
Communautés européennes a adopté une position semblable en admettant que
"la Commission est en droit d'obliger l'entreprise à fournir tous les
renseignements nécessaires portant sur des faits dont elle peut avoir
connaissances et à lui communiquer, au besoin, les documents y afférents
qui sont en sa possession, même si ceux-ci peuvent servir à établir,
à son encontre ou à l'encontre d'une autre entreprise, l'existence d'un
comportement anticoncurrentiel". Cependant, "la Commission ne saurait
imposer à l'entreprise l'obligation de fournir des réponses par lesquelles
celle-ci serait amenée à admettre l'existence de l'infraction dont il
appartient à la Commission d'établir la preuve" (arrêt du 18 octobre 1989
en la cause Orkem SA contre Commission de l'Union européenne, 347/87,
Recueil de la Jurisprudence de la Cour 1989, ch. 34 et 35 p. 3351).

    En l'espèce, le recourant a été contraint de produire l'attestation
d'intégralité uniquement lorsque les autorités fiscales connaissaient
déjà les relations contractuelles qui le liaient à la banque S., de
même d'ailleurs que les montants investis auprès de P. et soustraits
au fisc. Par conséquent, l'obligation imposée au recourant était tout
à fait admissible au regard de la jurisprudence précitée des instances
européennes.

    Il faut encore relever que, selon la Cour européenne des droits de
l'homme, l'art. 6 CEDH n'exclut pas un renversement du fardeau de la
preuve en défaveur de l'inculpé dans une procédure pénale, si l'Etat
tient compte de manière adéquate de la signification du comportement
punissable en cause et offre à l'intéressé la possibilité d'utiliser
largement les droits de la défense (Villiger, op.cit., n. 488 p. 288 et
les références citées). Dans le cas particulier, il ne s'agit cependant
pas d'un renversement du fardeau de la preuve mais plutôt de l'obligation
de collaboration imposée au contribuable de la même manière que dans la
procédure de taxation.

    f) Certes, la doctrine majoritaire est d'un avis différent de celui
soutenu par le Tribunal fédéral (cf. notamment: BLUMENSTEIN/ LOCHER,
op.cit., p. 402 et les références citées à la note 4; DONATSCH, Gedanken
zur Revision des kantonalen Steuerstrafrechts, Revue fiscale 47/1992
p. 464; KÄNZIG/BEHNISCH, op.cit., n. 37 ad art. 132). Il faut à cet égard
relever que même si les auteurs traitent des effets des garanties issues de
la Convention européenne des droits de l'homme sur la procédure en rappel
d'impôt, ils ne se concentrent que sur quelques aspects particuliers. Ils
ne procèdent pas à une analyse détaillée du droit de ne pas s'incriminer
en relation avec le rappel d'impôt et l'obligation de collaborer dans
la procédure de taxation, de même que de la jurisprudence des instances
européennes. Par ailleurs, il est vrai que le rapport de la commission
d'experts au Conseil d'Etat du canton de Zurich mentionné ci-dessus
(consid. 4c/bb) traite partiellement de la question mais il retient une
solution qui se fonde uniquement sur le critère purement formel consistant
à distinguer selon que la procédure en rappel d'impôt (dans laquelle le
contribuable serait tenu de collaborer) est liée ou non à la procédure
pénale pour soustraction fiscale (dans laquelle le contribuable pourrait
refuser de collaborer) [KONFERENZ STAATLICHER STEUERBEAMTER, op.cit.,
p. 37, 80, 87 et 102], ce qui n'est guère satisfaisant.

Erwägung 5

    5.- Le recourant se plaint encore d'une violation du principe "ne
bis in idem" consacré par l'art. 4 du Protocole no 7 à la Convention
de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (RS
0.101.07; ci-après le Protocole). Il prétend avoir été sanctionné pour son
refus de produire l'attestation d'intégralité, à la fois par la décision
attaquée et par la décision susmentionnée du 21 avril 1993 fixant les
rappels d'impôt et amendes.

    a) Selon l'art. 4 ch. 1 du Protocole, "Nul ne peut être poursuivi
ou puni pénalement par les juridictions du même Etat en raison d'une
infraction pour laquelle il a déjà été acquitté ou condamné par un jugement
définitif conformément à la loi et à la procédure pénale de cet Etat".

    L'application de ce principe suppose que la procédure soit dirigée
contre la même personne, qu'il s'agisse du même comportement condamnable,
que celui-ci ait fait l'objet d'une première procédure et que les biens
juridiquement protégés soient les mêmes (ATF 119 Ib 311 consid. 3c
p. 319-320). En outre, des procédures disciplinaires séparées sont
autorisées (VILLIGER, op.cit., n. 664 p. 395).

    b) L'art. 131 al. 1 AIFD réprime une violation des obligations de
procédure du contribuable. Le bien juridiquement protégé est la bonne
exécution de la taxation qui est mis en danger par le comportement
récalcitrant du contribuable. La sanction vise à contraindre celui-ci
à suivre les injonctions qui lui sont faites lorsqu'il n'obéit pas à
une obligation qui lui est prescrite par un acte administratif (MOSSU,
op.cit., p. 32; KÄNZIG/BEHNISCH, op.cit., n. 1 et 6 ad art. 131).

    L'art. 129 al. 1 AIFD protège la créance fiscale en tant que fortune
de la collectivité publique (Archives 59 p. 639 consid. 4b p. 645). Il
réprime la soustraction d'impôt en tant que telle.

    Les biens protégés par les art. 131 al. 1 et 129 al. 1 AIFD sont
donc différents, de sorte que chaque infraction peut être sanctionnée
séparément sans que le principe "ne bis in idem" ne soit violé. De même,
le comportement réprimé n'est pas le même. En effet, la violation
d'obligations de procédure au sens de l'art. 131 al. 1 AIFD ne se
confond pas avec la soustraction de l'art. 129 al. 1 AIFD, les deux
infractions pouvant être cumulées ou réalisées chacune indépendamment
de l'autre (cf. le texte de l'art. 131 al. 1 in fine AIFD qui précise:
"sans que soit posé l'état de fait de l'art. 129"). Il convient cependant,
lors de la répression ultérieure d'une infraction selon l'art. 129 al. 1
AIFD, de tenir compte de la sanction infligée en application de l'art.
131 al. 1 AIFD (KÄNZIG/BEHNISCH, op.cit., n. 25 ad art. 131).

    c) Dans le cas particulier, l'autorité intimée a confirmé l'amende
infligée au recourant selon l'art. 131 al. 1 AIFD, alors même qu'il
avait fait précédemment l'objet d'un rappel d'impôt et d'une amende
en application de l'art. 129 al. 1 AIFD. Cependant, tant les biens
protégés par ces deux dispositions que les comportements sanctionnés sont
différents. Même si l'autorité de taxation a mentionné la "récalcitrance"
du recourant dans une lettre du 2 mars 1993 accompagnant les projets de
décisions d'impôts supplémentaires, cela ne signifie pas qu'elle ait
réprimé une seconde fois le comportement du recourant. Au demeurant,
il n'est pas interdit de tenir compte des antécédents d'un délinquant
lors de la fixation d'une peine (art. 63 CP). Dans le cas particulier,
l'amende infligée au recourant a été fixée à une demi-fois l'impôt
soustrait, ce qui paraît modéré. Dès lors, le principe "ne bis in idem"
n'a pas été violé et le grief du recourant doit être écarté.

Erwägung 6

    6.- A titre subsidiaire, le recourant prétend que la quotité de
l'amende qui lui a été infligée pour son manque de coopération aurait
été fixée arbitrairement.

    a) L'amende doit être arrêtée dans chaque cas selon une appréciation
adéquate, de sorte que tous les aspects particuliers, tels que l'importance
de la faute et les circonstances personnelles, notamment financières,
du contribuable soient pris en compte. L'amende doit représenter
une sanction efficace, et non pas seulement une mesure "bagatelle"
(Archives 56 p. 137 consid. 3a p. 139-140). En outre, selon la Circulaire
no 10 de l'Administration fédérale des contributions du 9 décembre 1987:
Instructions concernant la poursuite et la répression de la soustraction
d'impôt consommée, de la tentative de soustraction et d'autres infractions,
"L'amende minimale ne devrait en règle générale pas être inférieure à
50 francs. Si le contribuable commet une nouvelle infraction au cours
de la période fiscale suivante, le taux de l'amende sera doublé. Il
est recommandé d'infliger des peines plus élevées aux contribuables
récalcitrants." (Archives 56 p. 356).

    b) L'autorité intimée a astreint le recourant au paiement d'une amende
représentant le montant maximum autorisé par l'art. 131 al. 1 AIFD. Elle
s'est fondée, d'une part, sur le fait qu'il avait menacé de délocaliser
son entreprise et de quitter le canton de Berne, et, d'autre part,
sur son comportement qui permettait de supposer qu'il aurait soustrait
d'autres éléments de fortune et de revenu. A cet égard, il faut préciser
que l'art. 131 al. 1 AIFD vise uniquement la violation d'obligations de
procédure et non la répression d'une soustraction d'impôt, au demeurant
non établie. Au surplus, le second motif invoqué par l'autorité intimée
viole la présomption d'innocence dont bénéficie le recourant car aucune
preuve ne permettait d'établir l'existence d'autres soustractions d'impôt.

    Il ne fait en revanche pas de doute que le recourant a cherché à
influencer la procédure à son avantage, essentiellement par les pressions
qu'il a voulu exercer par l'intermédiaire du maire de sa commune et
du délégué à la promotion économique du canton de Berne. Ce fait doit
donc être retenu à sa charge. L'intéressé prétend aussi n'avoir pas
compris le but de la procédure et se plaint de la contrainte qu'aurait
exercée l'Intendance des impôts en le menaçant, dans une lettre du
25 novembre 1991, de procéder à une taxation d'office. Cependant il
a lui-même invoqué la possibilité d'une telle taxation pour justifier
son refus de produire l'attestation d'intégralité; ses griefs sont donc
particulièrement mal fondés. Par ailleurs, le fait qu'il ait perdu les
investissements effectués auprès de P. n'est pas non plus un motif de
réduction de l'amende; celle-là n'est en effet pas liée au succès des
opérations financées par les montants soustraits. Enfin, l'amende doit
tenir compte de la situation financière du contribuable; elle ne saurait
être modeste car la sanction doit être efficace. Il suffit à cet égard de
mentionner les revenus déclarés du recourant: en 1985-1986: 346'792 fr.;
en 1987-1988: 616'157 fr.; en 1989-1990: 904'368 fr.

    Il faut en revanche relever que l'autorité n'a pas tenu compte
des éléments favorables au recourant. D'une part, il n'était pas,
semble-t-il, un récidiviste, l'amende en cause apparaissant ainsi comme
exceptionnelle; d'autre part, il était en droit de mettre en doute la
légalité de l'attestation d'intégralité puisqu'il n'existait alors aucune
jurisprudence sur cette question.

    c) Au vu de tous ces éléments, le montant de l'amende infligée
au recourant apparaît comme trop élevé. L'autorité intimée devra donc
réexaminer la quotité de la sanction en tenant compte aussi bien des
éléments à charge que de ceux à décharge. Elle veillera aussi à entendre
personnellement le recourant et à assurer, à sa demande, la publicité
du procès. Il devient dès lors inutile d'examiner plus avant si cette
autorité a, ainsi que le prétend l'intéressé, violé ces deux garanties
de procédure lors de sa première décision.