Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 121 II 161



121 II 161

27. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit public du 14 juin 1995 dans
la cause W. contre hoirs M., commune de Morges et Tribunal administratif
du canton de Vaud (recours de droit public) Regeste

    Schutz einer Hecke, Verwaltungsgerichtsbeschwerde; Art. 18 Abs. 1
und 1bis NHG.

    Begriff des Biotops nach Bundesrecht; Verpflichtung zum Schutz von
Biotopen von regionaler und lokaler Bedeutung (E. 2b/bb).

    Zulässigkeit der Verwaltungsgerichtsbeschwerde gegen einen kantonalen
Entscheid, der sich auf kantonale Vorschriften zum Schutz von Biotopen
stützt (E. 2b/aa und 2b/cc).

Sachverhalt

    A.- Les hoirs M. sont propriétaires de la parcelle no 3435, dans la
zone de villas de la commune de Morges. En mars 1994, ils ont demandé à
la municipalité l'autorisation de construire trois maisons contiguës sur
leur terrain; selon le projet, la réalisation des travaux nécessiterait
l'abattage de trois arbres - un pommier, un noyer et un sorbier - ainsi
que la destruction d'une partie (quelques mètres) d'une haie se trouvant le
long d'une limite de la parcelle, en bordure d'une voie publique. Pendant
l'enquête publique, le propriétaire voisin W. a formé opposition. La
municipalité a écarté l'opposition et délivré le permis de construire,
en autorisant l'abattage des arbres et de la haie. W. a recouru contre
cette décision auprès du Tribunal administratif du canton de Vaud, en
faisant en particulier valoir que la nécessité de protéger les arbres et
la haie n'avait pas suffisamment été prise en considération. Le Tribunal
administratif a rejeté ce recours.

    Agissant par la voie du recours de droit public, W. a demandé au
Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt rendu par la juridiction cantonale. Le
recours a été rejeté, dans la mesure où il était recevable.

Auszug aus den Erwägungen:

                  Extrait des considérants:

Erwägung 2

    2.- a) Selon l'art. 97 OJ en relation avec l'art. 5 PA, la voie
du recours de droit administratif est ouverte contre les décisions
fondées sur le droit public fédéral - ou qui auraient dû l'être -, à
condition qu'elles émanent des autorités énumérées à l'art. 98 OJ et pour
autant qu'aucune des exceptions prévues aux art. 99 à 102 OJ ou dans la
législation spéciale ne soit réalisée. Le recours de droit administratif
est également recevable contre des décisions fondées sur le droit cantonal
et sur le droit fédéral, dans la mesure où la violation de dispositions
de droit fédéral directement applicables est en jeu (art. 97 al. 1, 98
let. g et 104 let. a OJ; ATF 120 Ib 27 consid. 2a, 224 consid. 2a, 287
consid. 3a et les arrêts cités). Il importe peu à ce propos que l'acte
de recours soit, le cas échéant, intitulé "recours de droit public"
(ATF 120 Ib 287 consid. 3d, 379 consid. 1a).

    b) Selon l'arrêt attaqué, les "haies vives", en tant que biotopes, sont
protégées en vertu des art. 21 ss de la loi cantonale sur la faune. Le
Tribunal administratif a ensuite retenu que si la haie située sur la
parcelle litigieuse devait être considérée comme "haie vive" au sens de
ces dispositions, une autorisation cantonale spéciale serait requise pour
l'atteinte provoquée par l'aménagement de la voie d'accès; à ce stade,
il a néanmoins laissé cette question indécise.

    aa) La loi cantonale sur la faune, du 28 février 1989, règle à
son chapitre III la conservation des biotopes. Aux termes de l'art. 21
al. 1 de cette loi (note marginale: "biotopes"), "le Conseil d'Etat prend
toutes mesures nécessaires pour maintenir les biotopes propres aux diverses
espèces indigènes, notamment par la conservation d'un nombre suffisant de
haies vives, boqueteaux, buissons, rideaux de verdure, clairières, zones
marécageuses et roselières". Quant à l'art. 22 de la loi sur la faune,
il dispose que "toute atteinte à un milieu qui risque de porter préjudice
à la faune locale doit faire l'objet d'une autorisation de la Conservation
de la faune qui fixe dans chaque cas les mesures conservatoires à prendre".

    Le Conseil d'Etat a adopté le 11 juin 1993 un règlement d'exécution
de la loi sur la faune; son art. 6 a la teneur suivante:

    "1 L'autorisation prévue à l'article 22 de la loi est nécessaire,
   notamment, pour toute modification, réduction importante ou suppression
   d'un des milieux mentionnés à l'art. 21 de la loi ainsi que pour toute
   atteinte à des prés maigres ou humides.

    2-3 (...)

    4 Les dispositions de la législation sur la protection de la nature
sont
   applicables de surcroît."

    bb) En vertu de l'art. 24sexies al. 4 Cst., la Confédération est
autorisée à légiférer sur la protection de la faune et de la flore,
soit, en particulier, sur la protection des biotopes (cf. THOMAS
FLEINER-GERSTER, Commentaire de la Constitution fédérale, art. 24sexies,
n. 33 ss). L'art. 18 al. 1 de la loi fédérale sur la protection de la
nature et du paysage (LPN; RS 451) dispose que "la disparition d'espèces
animales et végétales indigènes doit être prévenue par le maintien d'un
espace vital suffisamment étendu (biotopes), ainsi que par d'autres mesures
appropriées". L'art. 18 al. 1bis LPN énumère les biotopes qu'il y a lieu
de protéger tout particulièrement: les rives, les roselières et les marais,
les associations forestières rares, les haies, les bosquets, les pelouses
sèches et autres milieux qui jouent un rôle dans l'équilibre naturel ou
présentent des conditions particulièrement favorables pour les biocénoses.

    Le droit fédéral ne définit pas plus précisément la notion de
biotope. Les exigences de l'art. 18 LPN ne s'appliquent cependant
pas à tout milieu biotique offrant à un peuplement animal et végétal
bien déterminé des conditions d'habitat relativement stables (selon la
définition du Grand Robert de la langue française, rubrique "biotope");
le concept de biotope auquel se réfère la législation fédérale sur la
protection de la nature et du paysage se rapporte en effet à un "espace
vital suffisamment étendu", exerçant une certaine fonction (cf. ATF 116 Ib
203 consid. 4b). L'art. 18 al. 1ter LPN prévoit du reste que seules les
atteintes aux "biotopes dignes de protection" doivent en principe être
évitées (néanmoins, des mesures de compensation, de reconstitution ou de
remplacement peuvent, le cas échéant, être ordonnées lorsque l'atteinte
est justifiée par un intérêt prépondérant).

    La législation fédérale contient des prescriptions spéciales pour
les biotopes d'importance nationale (cf. art. 18a LPN, art. 16 et 17 de
l'ordonnance sur la protection de la nature et du paysage [OPN; RS 451.1]);
ces dispositions ne sont manifestement pas applicables en l'espèce. Les
cantons doivent cependant aussi veiller à la protection et à l'entretien
des biotopes d'importance régionale et locale (art. 18b LPN). Il leur
appartient, à cet effet, de désigner les "espaces vitaux suffisamment
étendus" dignes de protection (cf. art. 14 al. 3 et 4 OPN), et ils
disposent pour cette tâche d'une importante marge d'appréciation, car le
droit fédéral ne prévoit pas - comme il le fait notamment pour les forêts -
la protection de l'ensemble des biotopes (ATF 118 Ib 485 consid. 3a, 116
Ib 203 consid. 4b et 5g). Dans son principe, l'obligation de protéger les
biotopes d'importance régionale et locale découle néanmoins directement
et impérativement du droit fédéral (cf. ATF 116 Ib 203 consid. 3a et 5d).

    Cela étant, le droit fédéral n'exige pas des cantons qu'ils organisent
une procédure d'autorisation spéciale - telle l'autorisation de défricher,
au sens de l'art. 5 de la loi fédérale sur les forêts (LFo; RS 921.0)
- lorsque la réalisation d'une construction ou d'une installation
pourrait porter atteinte à un biotope protégé; la pesée des intérêts
prévue à l'art. 18 al. 1ter LPN peut s'effectuer dans le cadre de la
procédure d'autorisation ordinaire (cf. HANS-PETER JENNI, Rechtsfragen
zum Schutzobjekt Biotope und insbesondere Ufervegetation gemäss NHG und
angrenzenden Gesetzen, OFEFP Berne 1990, p. 12; cf. arrêt non publié du
4 octobre 1993, commune de L., consid. 7).

    cc) Les dispositions de la législation cantonale sur la faune
relatives à la conservation des biotopes (cf. supra, consid. 2b/aa)
sont, partiellement à tout le moins, des normes d'exécution des art. 18
ss LPN. L'énumération des biotopes figurant à l'art. 21 al. 1 de la loi
sur la faune correspond du reste à celle de l'art. 18 al. 1bis LPN;
en particulier, ces deux dispositions mentionnent les haies (la loi
vaudoise parle de "haies vives", formées d'arbustes en pleine végétation,
par opposition aux haies mortes, faites de branches sèches).

    Dans l'arrêt attaqué, le Tribunal administratif s'est référé à son
jugement du 10 septembre 1993, par lequel il avait annulé un permis de
construire accordé aux propriétaires intimés. Selon ce dernier jugement,
la suppression d'une partie de la haie sise sur la parcelle no 3435
nécessiterait une autorisation municipale et, éventuellement, une
autorisation de la section "conservation de la faune" en application
de l'art. 6 du règlement cantonal sur la faune, pour autant qu'une
telle décision soit exigée au regard de la nature, de la longueur et de la
surface du milieu touché (consid. 4b de l'arrêt du 10 septembre 1993). Dans
l'arrêt faisant l'objet du présent recours, le Tribunal administratif
a considéré que même si la municipalité n'avait pas soumis le nouveau
projet à l'examen de la section "conservation de la faune", en vue de
la qualification de la haie et d'une éventuelle décision au sujet de son
abattage, cet élément n'était pas déterminant, car l'autorisation spéciale,
pour autant qu'elle fût nécessaire, aurait très certainement été délivrée
(consid. 3b de l'arrêt attaqué). Pour ce qui concerne cette question,
la décision attaquée est en partie fondée sur des normes cantonales
d'exécution du droit fédéral directement applicable (cf. supra,
consid. 2b/bb; cf. arrêt non publié du 4 octobre 1993, commune de L.,
consid. 2d); la voie du recours de droit administratif est donc ouverte,
dans cette mesure.