Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 121 III 64



121 III 64

18. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 28 février 1995 dans la
cause E. contre dame H. (recours en réforme) Regeste

    Verbot der Kumulierung der Entschädigungen für missbräuchliche
Kündigung des Arbeitsverhältnisses (Art. 336a OR) und für ungerechtfertigte
fristlose Entlassung (Art. 337c Abs. 3 OR).

    Eine ungerechtfertigte fristlose Entlassung, die unter Umständen
erfolgt ist, welche einer missbräuchlichen Kündigung entsprechen,
gibt keinen Anspruch auf beide der in Art. 336a und 337c Abs. 3 OR
vorgesehenen Entschädigungen. Gleich verhält es sich, wenn der Arbeitgeber
nacheinander eine missbräuchliche Kündigung und eine ungerechtfertigte
fristlose Entlassung ausgesprochen hat. In diesem Fall besteht lediglich
ein Anspruch auf eine Entschädigung gemäss Art. 337c Abs. 3 OR
(E. 2). Bemessungskriterien für eine solche Entschädigung (E. 3b und c).

Sachverhalt

    A.- Dame H. a été engagée le 1er mars 1990 en qualité de caissière
principale d'un cinéma propriété de E.; un salaire mensuel brut de 2'200
fr. avait été prévu, mais l'employée a toujours été payée "à la séance".

    Le 25 mars 1992, E. a résilié le contrat de dame H. pour le 31 mai
1992 en invoquant de multiples fautes professionnelles ainsi qu'un manque
de respect à son égard, griefs que l'intéressée a contestés.

    Le soir du 21 avril 1992, E. a signifié à dame H. son congé avec effet
immédiat; la caissière était accusée d'avoir falsifié la fiche du relevé
journalier des billets vendus.

    B.- Par jugement du 4 juillet 1994, la Ire Cour civile du Tribunal
cantonal neuchâtelois a alloué à dame H. deux indemnités pour congé
abusif (art. 336a CO) et pour résiliation immédiate injustifiée (art. 337c
al. 3 CO) atteignant 10'500 fr. chacune, soit l'équivalent de quatre mois
de salaire.

    C.- E. interjette un recours en réforme au Tribunal fédéral contre
le jugement du 4 juillet 1994 en tant qu'il admet l'allocation cumulée
d'indemnités pour congé abusif et pour résiliation immédiate injustifiée,
concluant à ce qu'il soit jugé qu'il ne doit que la première de ces deux
indemnités. Le recours est partiellement admis.

Auszug aus den Erwägungen:

                  Extrait des considérants:

Erwägung 2

    2.- a) Dans son message du 9 mai 1984 concernant l'initiative populaire
"pour la protection des travailleurs contre les licenciements dans le
droit du contrat de travail" et la révision des dispositions sur la
résiliation du contrat de travail dans le code des obligations (FF 1984
II 574 ss), le Conseil fédéral, à l'art. 337c de son projet, proposait
de reconnaître au travailleur licencié sans justes motifs le droit à une
indemnité pouvant atteindre douze mois de salaire (al. 3), cumulable avec
l'indemnité prévue en cas de résiliation abusive si les conditions en
étaient remplies (al. 4); il justifiait le cumul des sanctions, principe
déjà prévu à l'ancien art. 337c CO s'agissant du congé immédiat donné
au travailleur en raison d'un service militaire ou de protection civile
exécuté ou à exécuter, par le but différent assigné aux deux indemnités
considérées (ibidem, p. 636/637).

    Ce cumul ne fut pas admis par les Chambres fédérales, et l'al. 4 du
projet du Conseil fédéral ne figure pas dans le texte légal actuellement
en vigueur.

    BRUNNER/BÜHLER/WAEBER (Commentaire du contrat de travail, n. 10 ad
art. 337c CO), auxquels la cour cantonale se réfère, soutiennent cependant
que même si le législateur n'a pas voulu introduire expressément dans
la loi la notion de cumul des indemnités prévues aux art. 336a et 337c
al. 3 CO, il convient de considérer qu'il s'agit de créances fondées sur
des droits distincts. Ainsi, ajoutent-ils, en licenciant un travailleur
avec effet immédiat et de surcroît pour une cause reconnue abusive, un
employeur pourrait encourir une double sanction au titre des dispositions
susmentionnées. Engel (Contrats de droit suisse, p. 355) reprend cette
dernière phrase à son compte.

    Dans le cadre strict de l'art. 337c CO, l'opinion défendue par ces
auteurs paraît erronée. Il résulte en effet très clairement des débats
aux Chambres fédérales (BO CN 1985 p. 1130/1153; BO CE 1987 p. 352/354),
rappelés par TROXLER (Der sachliche Kündigungsschutz nach Schweizer
Arbeitsvertragsrecht, Zurich 1993, p. 123 ss) qu'une résiliation immédiate
sans justes motifs, à laquelle s'ajoute un élément abusif, n'entraîne pas
de sanction supplémentaire (ibidem, p. 132) et qu'il y a là un silence
qualifié de la loi (dans ce sens également: REHBINDER, Commentaire
bernois, n. 2 ad art. 336a CO, n. 13 ad art. 337c CO; STREIFF/VON
KAENEL, Arbeitsvertrag, Leitfaden zum Arbeitsvertragsrecht, 5e éd.,
n. 15 ad art. 336 CO, n. 4 ad art. 337c CO; BUDLIGER, Die Rechtsfolgen
der ungerechtfertigten fristlosen Entlassung durch den Arbeitgeber, in
ArbR 1990 p. 55 ss, spéc. n. 2.3 p. 70/71; PEDERGNANA, Überblick über
die neuen Kündigungsbestimmungen im Arbeitsrecht, in Recht 1989 p. 33 ss,
spéc. p. 46).

    Une résiliation immédiate injustifiée, même donnée dans des conditions
qui correspondent à une résiliation abusive, ne peut ainsi donner droit
aux deux indemnités prévues par les art. 336a et 337c al. 3 CO. Dans un
tel cas, le juge n'allouera qu'une indemnité fondée sur l'art. 337c al. 3
CO (REHBINDER, op.cit., n. 2 ad art. 336a CO; TROXLER, op.cit., p. 132;
PEDERGNANA, op.cit., p. 46; voir aussi: TERCIER, Les contrats spéciaux,
2e éd., n. 2919; STREIFF/VON KAENEL, op.cit., n. 4 ad art. 337c CO).

    b) Le législateur et les auteurs précités semblent n'avoir envisagé
que l'hypothèse d'un congé immédiat donné pour des motifs tout à la
fois injustifiés et abusifs. Or, en l'espèce, on est en présence de deux
résiliations séparées dans le temps.

    La première a été donnée le 25 mars 1992 pour le 31 mai
suivant. Considérée par la cour cantonale comme abusive au sens de
l'art. 336 al. 1 let. d CO, cette résiliation a été sanctionnée en vertu
de l'art. 336a CO par une indemnité équivalant à quatre mois de salaire. Ce
point n'est pas remis en cause par l'employeur.

    La seconde résiliation est intervenue le 21 avril 1992, soit près
d'un mois plus tard, dans le délai pendant lequel le contrat de travail
courait encore. Il n'est pas contesté qu'il s'est agi là d'une résiliation
immédiate sans justes motifs au sens de l'art. 337c CO, mais l'employeur
soutient qu'elle ne pouvait donner naissance à l'indemnité prévue par
l'al. 3 de cette disposition.

    Se justifie-t-il d'admettre en pareil cas le cumul des indemnités
instituées par les art. 336a et 337c al. 3 CO, et d'opérer ainsi
une distinction selon que les motifs de congés découlent d'une seule
déclaration de résiliation ou au contraire ont fait l'objet de deux
déclarations à des moments différents? On répondra par la négative à cette
question. La distinction envisagée serait en effet, d'abord, source de
complications inutiles, voire d'inégalités de traitement: à supposer,
par exemple, que la demanderesse ait été licenciée avec effet immédiat
à la fois parce qu'elle avait fait valoir ses droits et en raison de la
prétendue falsification du relevé des billets vendus, elle ne pourrait
prétendre que l'indemnité fondée sur l'art. 337c al. 3 CO; par contre, le
juste motif invoqué par l'employeur étant survenu après le licenciement
signifié pour un motif abusif, soit pendant le cours du délai de congé,
chacune des résiliations devrait être examinée séparément quant à ses
conséquences, ce qui permettrait de cumuler les indemnités des art. 336a
et 337c al. 3 CO.

    Une telle solution se heurterait en outre au fait que le congé donné
avec effet immédiat entraîne la cessation des rapports de travail en fait
et en droit même en l'absence de justes motifs (ATF 120 II 243 consid. 3b,
117 II 270 consid. 3b). Le contrat prend fin dans ce cas non pas en raison
de la résiliation abusive antérieure, mais en raison de celle signifiée
avec effet immédiat. Il y a alors absence de lien de causalité entre la
résiliation abusive et la fin du contrat. Il en découle logiquement que
les conséquences de la rupture du contrat de travail doivent être réglées
uniquement par l'art. 337c CO.

    Envisageant le cas d'un congé donné avec effet immédiat qui soit
non seulement injustifié, mais également abusif, Tercier (op.cit.,
n. 2919) est d'avis que le juge doit, dans cette hypothèse, allouer une
indemnité fondée sur l'art. 337c al. 3 CO, dont le montant correspondra
à celui de l'indemnité prévue à l'art. 336a CO, un cumul étant exclu,
sauf avec l'indemnité fondée sur l'art. 337c al. 1 CO. Il n'y a aucune
raison de s'écarter de cette solution lorsque l'employeur a fait valoir
en deux temps un motif abusif de résiliation et un juste motif au sens de
l'art. 337 CO. Une nuance doit cependant être apportée sur ce point. Dans
la détermination du montant de l'indemnité selon l'art. 336a CO - auquel
celui de l'indemnité fondée sur l'art. 337c al. 3 CO devrait équivaloir
selon l'auteur précité -, il n'est en effet pas possible de prendre en
considération le fait que les rapports de travail ont en réalité pris fin
non en raison du congé abusif, mais de la résiliation avec effet immédiat,
puisque celle-ci est postérieure au licenciement abusif. C'est alors
seule l'indemnité de l'art. 337c al. 3 CO qui entrera en ligne de compte,
la résiliation abusive pouvant être prise en considération au nombre de
"toutes les circonstances" dont le juge doit tenir compte pour fixer le
montant de l'indemnité. On peut encore ajouter que la situation est toute
différente de celle qui se rencontre en cas de résiliation d'un contrat
de travail en temps inopportun au sens de l'art. 336c CO (ATF 120 II 124).

    En considérant que la demanderesse avait droit tant à une indemnité
pour congé abusif qu'à une indemnité pour licenciement immédiat injustifié,
la cour cantonale a violé le droit fédéral. La seule indemnité qui entre
en ligne de compte en l'espèce est celle de l'art. 337c al. 3 CO.

Erwägung 3

    3.- b) Le défendeur soutient qu'il ne doit verser que l'indemnité
déterminée par la cour cantonale sur la base de l'art. 336a CO. C'est à
tort que la demanderesse tente de tirer avantage de cet argument, sur le
plan de la procédure. Savoir sur quelle base juridique une indemnité est
due à la demanderesse en raison de la résiliation du contrat de travail
est une question de droit soumise au libre examen du Tribunal fédéral. Ce
dernier peut rechercher librement dans quelle mesure et en vertu de
quelles dispositions le montant total de 21'000 fr. est fondé. Il est
limité seulement par l'accord du défendeur de payer à titre d'indemnité
10'500 fr. correspondant à quatre mois de salaire à 2'625 fr. et par le
maximum légal de six mois de salaire, soit 15'750 fr.

    c) L'indemnité prévue à l'art. 337c al. 3 CO est due, sauf cas
exceptionnels, pour tout congé immédiat injustifié (ATF 120 II 243
consid. 3e, 116 II 300 consid. 5a). La jurisprudence a précisé que,
l'atteinte portée par un tel licenciement aux droits de la personnalité
du travailleur étant à la base de son octroi, ladite indemnité doit
être proportionnée à la mesure de l'atteinte considérée (ATF non publié
X. contre M. du 22 février 1994, consid. 8a). Son montant est fixé
librement par le juge en fonction de toutes les circonstances; le pouvoir
d'appréciation qui est reconnu de la sorte à l'autorité cantonale conduit
le Tribunal fédéral à ne substituer sa propre appréciation à celle de
l'instance inférieure qu'avec une certaine retenue. Il n'interviendra que
si la décision s'écarte sans raison des règles établies par la doctrine et
la jurisprudence en matière de libre appréciation ou s'appuie sur des faits
qui, en l'occurrence, ne devaient jouer aucun rôle ou encore ne tient,
au contraire, pas compte d'éléments qui auraient absolument dû être pris
en considération; le Tribunal fédéral sanctionnera, en outre, les décisions
rendues en vertu d'un tel pouvoir d'appréciation lorsqu'elles aboutissent à
un résultat manifestement injuste ou à une iniquité choquante (ATF 119 II
157 consid. 2a in fine, 118 II 50 consid. 4, 116 II 145 consid. 6a). La
faute concomitante du travailleur (ATF 120 II 243), son âge, sa situation
sociale, le temps qu'il a passé au service de l'employeur constituent
quelques-uns des nombreux critères - dont aucun n'est déterminant en
soi - qui doivent être pris en compte lors de la fixation de l'indemnité
de l'art. 337c al. 3 CO (ATF 116 II 300 consid. 6; STREIFF/VON KAENEL,
op.cit., n. 8 ad art. 337c CO; REHBINDER, op.cit., n. 9 ad art. 337c CO).