Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 120 V 58



120 V 58

8. Arrêt du 22 mars 1994 dans la cause B. contre SUPRA Caisse-maladie et
accidents pour la Suisse et Cour de justice du canton de Genève Regeste

    Art. 26 KUVG, Art. 26 Abs. 2 BVG, Art. 27 BVV 2: Überversicherung. Bei
Kumulation von Taggeldern der Krankenkasse und einer Invalidenrente der
beruflichen Vorsorge ist die Krankenkasse bei Überversicherung im Sinne
von Art. 26 KUVG gehalten, ihre Leistungen zu kürzen.

Sachverhalt

    A.- B., né en 1951, travaillait au service de l'entreprise T.
SA. Atteint dans sa santé depuis le mois de novembre 1987, il a été
totalement incapable de travailler à partir du 24 septembre 1990. Il a de
ce fait perçu des indemnités journalières de la SUPRA, Caisse-maladie et
accidents pour la Suisse, jusqu'au 30 septembre 1990 dans le cadre d'une
assurance collective conclue par son ex-employeur, puis au titre d'une
assurance individuelle de la perte de gain.

    Le 1er octobre 1991, B. a été mis au bénéfice d'une rente entière
de l'assurance-invalidité, assortie de trois rentes complémentaires,
à partir du 1er octobre 1990.

    En outre, depuis le 1er novembre 1990, la compagnie d'assurance
Winterthur lui alloue, pour le compte de la Fondation LPP de T. SA,
une rente entière d'invalidité, de 13'749 francs par an, au titre de la
prévoyance professionnelle.

    B.- Par décision du 19 février 1992, la SUPRA a fixé le montant de
la surassurance, pour la période du 24 octobre 1990 au 30 septembre 1991,
37'486 fr. 85; elle a établi à cet effet le décompte suivant:

    Indemnités journalières:          39'672 fr.

    Arriéré de rente de l'AI:         36'307 fr. 25

    Rente payée par la Winterthur:    12'870 fr. 65
                                       -------------

    Total:                            88'849 fr. 90

    Perte de salaire:                 51'363 fr. 05

    Surassurance:                     37'486 fr. 85

    Il était précisé que ce dernier montant avait été partiellement
compensé, jusqu'à concurrence de 37'195 francs, avec l'arriéré de rente
dû par l'AI.

    C.- B. a recouru contre cette décision devant la Cour de justice du
canton de Genève.

    Il faisait valoir, en substance, que la caisse-maladie n'était
pas en droit de compter, dans le calcul de la surindemnisation, la
rente d'invalidité qui lui était versée au titre de la prévoyance
professionnelle. Par conséquent, pour la période en cause, la
surindemnisation se limitait, selon lui, à 24'616 fr. 20. Il concluait,
dès lors, à ce que la SUPRA fût condamnée à lui verser, d'une part,
la somme de 15'055 fr. 80 au titre de solde, après compensation, des
indemnités journalières échues durant la période du 24 octobre 1990 au
30 septembre 1991 et, d'autre part, pour la période subséquente, des
indemnités égales à la différence entre son salaire hypothétique et le
montant de la rente de l'assurance-invalidité qu'il reçoit, cela jusqu'à
épuisement de la "somme assurée de 720 indemnités pleines".

    Par jugement du 28 janvier 1993, la Cour de justice a rejeté le
recours.

    Elle a considéré que les caisses-maladie étaient en droit de réduire
leurs prestations, lorsque celles-ci étaient en concours avec celles d'une
institution de prévoyance et que l'indemnisation était supérieure à la
perte de gain de l'assuré. Elle a fait observer que la caisse-maladie
était tenue, conformément à la jurisprudence, de prolonger la durée
de l'indemnisation proportionnellement à la réduction de l'indemnité
journalière, de sorte que l'assuré ne subirait en l'espèce aucun préjudice.

    D.- B. interjette un recours de droit administratif en reprenant ses
conclusions de première instance.

    La SUPRA conclut au rejet du recours. Invité à s'exprimer sur diverses
questions en relation avec les dispositions de l'OPP 2, l'Office fédéral
des assurances sociales (OFAS) a produit un préavis, après avoir soumis
le dossier à sa division de la prévoyance professionnelle.

    Ayant pris connaissance de cet avis de l'autorité fédérale de
surveillance, les parties ont présenté des observations et persisté dans
leurs conclusions.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Selon la jurisprudence, un assuré qui bénéficie d'une rente de
l'assurance-invalidité continue d'avoir droit aux indemnités journalières
pour perte de gain dues par sa caisse-maladie, conformément à l'art. 12bis
al. 3 LAMA. Autrement dit, la caisse-maladie ne peut supprimer ni
réduire ses prestations du seul fait que, de malade, l'assuré est devenu
invalide. La seule limite légale au droit de l'assuré de toucher les
indemnités journalières durant 720 jours dans une période de 900 jours
est l'interdiction de la surassurance (ATF 114 V 288 consid. 4b; RJAM
1978 no 323 p. 112 consid. 4 et les références).

    Dans ses observations sur le préavis de l'OFAS, la caisse intimée, se
fondant sur l'avis de Duc (Statut des invalides dans l'assurance-maladie
d'une indemnité journalière, SZS 1987, p. 179 ss), conteste vainement
cette jurisprudence. En effet, le Tribunal fédéral des assurances a
déjà eu l'occasion de s'exprimer au sujet de la thèse défendue par cet
auteur (ATF 114 V 288 consid. 4b), en renvoyant notamment aux motifs
d'un arrêt antérieur, certes déjà ancien, mais qui conserve toute sa
valeur (ATFA 1966 p. 193). Au demeurant, dans sa décision du 19 février
1992, la SUPRA n'a pas statué dans le sens de cette thèse, puisqu'elle a
reconnu son obligation de principe de verser à l'assuré - sous réserve de
surindemnisation - des indemnités journalières (réduites) pour la période
postérieure à la naissance du droit à une rente de l'assurance-invalidité.

    Quant au versement de prestations d'invalidité allouées par
une institution de prévoyance en vertu des art. 23 ss LPP et de ses
dispositions réglementaires pertinentes, il ne justifie pas davantage,
à lui seul, la suppression d'indemnités journalières d'assurance-maladie;
il en va de même pour les prestations résultant de la prévoyance plus
étendue au sens de l'art. 49 al. 2 LPP.

    Le litige porte ainsi uniquement sur le point de savoir s'il peut y
avoir surassurance au sens de l'art. 26 LAMA en cas de cumul d'indemnités
journalières versées par une caisse-maladie et d'une rente d'invalidité
de la prévoyance professionnelle.

Erwägung 2

    2.- a) Aux termes de l'art. 26 al. 1 LAMA, l'assurance ne doit pas
être une source de gain pour l'assuré. Constitue un gain d'assurance toute
prestation dépassant le montant intégral de la perte de gain, des frais
médico-pharmaceutiques et des autres frais entraînés par la maladie qui
ne sont pas couverts par ailleurs (art. 16 Ord. III).

    Lorsque, en plus de la caisse-maladie, des assureurs autres que des
caisses-maladie reconnues sont également tenus à prestations, la caisse
n'accorde ses prestations qu'au plus dans la mesure où, celles des autres
assureurs étant prises en considération, l'assurance n'est pas une source
de gain pour l'assuré (art. 26 al. 3 LAMA). Selon la jurisprudence du
Tribunal fédéral des assurances, sont réputées prestations imputables
d'autres assureurs celles qui sont comparables aux prestations de la
caisse-maladie, les autres assureurs pouvant être des compagnies privées,
en particulier l'assurance responsabilité civile de l'auteur d'un accident
(ATF 115 V 124 consid. 1a et les références).

    b) Le droit de la prévoyance professionnelle contient certaines
dispositions en matière de coordination avec l'assurance-maladie. C'est
ainsi que, aux termes de l'art. 26 al. 2 LPP, l'institution de prévoyance
peut stipuler, dans ses dispositions réglementaires, que le droit aux
prestations est différé aussi longtemps que l'assuré reçoit un salaire
entier. Se fondant sur cette disposition de la loi, ainsi que sur l'art. 34
al. 2 LPP qui lui donne mandat d'édicter des prescriptions afin d'empêcher
que le cumul de prestations ne procure un avantage injustifié à l'assuré
ou à ses survivants, le Conseil fédéral a autorisé les institutions
de prévoyance, à l'art. 27 OPP 2, à différer le droit aux prestations
d'invalidité jusqu'à épuisement des indemnités journalières, lorsque:

    "a. l'assuré reçoit, en lieu et place du salaire entier, des indemnités
   journalières de l'assurance-maladie équivalant à au moins 80 pour cent
   du salaire dont il est privé et que

    b. les indemnités journalières ont été financées au moins pour
moitié par
   l'employeur."

    L'art. 26 al. 2 LPP est une norme de coordination dans le temps qui
a pour but d'éviter que le paiement du salaire ou l'octroi de prestations
de remplacement grâce auquel l'employeur est libéré de son obligation de
verser le salaire - après la survenance de l'invalidité - ne procure à
l'assuré des ressources plus élevées que lorsqu'il était apte à travailler
(Message du Conseil fédéral à l'appui d'un projet de loi sur la prévoyance
professionnelle vieillesse, survivants et invalidité du 19 décembre 1975,
FF 1976 I 202). Le droit à une rente d'invalidité ne peut toutefois
être différé que si les dispositions internes (règlement, statuts) de
l'institution de prévoyance le stipulent expressément (MOSER, Die zweite
Säule und ihre Tragfähigkeit, thèse Bâle 1992, p. 206; NEF, Die Leistungen
der Beruflichen Vorsorge in Konkurrenz zu anderen Versicherungsträgern
sowie haftpflichtigen Dritten, SZS 1987, p. 30).

Erwägung 3

    3.- a) Le recourant soutient qu'en cas de concours entre les indemnités
journalières versées par une caisse-maladie et la rente d'invalidité de la
prévoyance professionnelle, ce sont les règles du droit de la prévoyance
professionnelle, plus spécialement les art. 34 al. 2 LPP et 24 al. 1 OPP
2 qui s'appliquent, à l'exclusion de l'art. 26 LAMA: la caisse de pensions
peut réduire les prestations d'invalidité et de survivants dans la mesure
où, ajoutées à d'autres revenus à prendre en compte, elles dépassent 90
pour cent du gain annuel dont on peut présumer que l'intéressé est privé
(art. 24 al. 1 OPP 2). Mais, si une caisse de pensions décide de ne pas
s'opposer à un tel cumul, la caisse-maladie ne saurait, quant à elle,
réduire ses prestations pour surassurance.

    De son côté, l'OFAS exprime l'avis que si le règlement de la caisse
de pensions ne contient pas de disposition sur la surindemnisation, alors
les prestations découlant de la LPP ont la priorité sur les indemnités
de la caisse-maladie; dans un tel cas, l'art. 26 LAMA est applicable,
à l'exclusion des dispositions sur la surindemnisation de l'OPP 2.

    Mais, poursuit l'OFAS, s'il existe une réglementation statutaire
conforme ou analogue à l'art. 27 OPP 2 et que l'institution de prévoyance
renonce à l'appliquer, la caisse-maladie n'est pas admise à invoquer
l'art. 26 LAMA pour réduire ses indemnités journalières; la caisse de
pensions, en renonçant à réduire ou à supprimer ses prestations, procure
à l'assuré un avantage dont la caisse-maladie ne saurait le priver; cela
reviendrait, dit l'office, "à reprendre d'une main ce que l'on donne de
l'autre" et irait, de surcroît, à l'encontre des dispositions potestatives
de l'OPP 2 en matière de coordination.

    b) En l'espèce, il sied tout d'abord de constater que l'institution
de prévoyance n'a pas différé le droit à la rente d'invalidité jusqu'à
épuisement des indemnités journalières de l'assurance-maladie. Cela
s'explique soit par l'absence de règle idoine dans les dispositions
internes de la fondation, soit par le fait que la condition d'un
financement par l'employeur faisait défaut (du moment que l'assuré était
passé de l'assurance collective dans l'assurance individuelle; art. 27
let. b OPP 2). L'hypothèse envisagée - de manière tout à fait abstraite
- par l'OFAS, selon laquelle une institution de prévoyance pourrait, de
cas en cas, renoncer à faire usage d'une réglementation statutaire qui,
pourtant, l'autoriserait à différer le droit aux prestations d'invalidité,
n'apparaît pas plausible en l'espèce. Ni les parties ni les premiers
juges ne l'envisagent d'ailleurs. Il n'y a donc pas lieu de s'arrêter à
cette hypothèse.

    c) Cela étant, le point de vue du recourant est erroné dans la mesure
où il soutient que les règles du droit de la prévoyance professionnelle
s'opposent à l'application de l'art. 26 LAMA. Lorsque l'institution de
prévoyance n'a pas prévu, dans son règlement, de différer le droit à la
rente en vertu des art. 26 al. 2 LPP et 27 OPP 2, elle est tenue d'allouer
ses prestations en priorité. Elle l'est aussi, de la même manière, lorsque
son règlement contient une disposition conforme à l'art. 27 OPP 2, mais que
les conditions d'application de cette norme ne sont pas remplies. Dans un
cas comme dans l'autre, elle ne saurait, contrairement à ce que soutient
le recourant, se prévaloir de l'art. 24 OPP 2 pour éventuellement réduire
la rente d'invalidité. Les indemnités journalières ne sont pas, en effet,
des revenus "à prendre en compte" au sens de l'art. 24 al. 1 et 2 OPP 2
(MAURER, Bundessozialversicherungsrecht, pp. 224 et 226). On notera, en
outre, que la règle de base en matière de surindemnisation dans la LPP,
c'est-à-dire l'art. 34 al. 2 LPP, est muette sur les rapports avec la LAMA.

    Il apparaît ainsi que les conséquences d'un cumul des prestations
ici en cause ne sont pas réglées par le droit de la prévoyance
professionnelle. C'est donc bien l'art. 26 LAMA qui est applicable en
tant que règle générale de coordination, comme l'admet d'ailleurs la
doctrine unanime (MOSER, loc.cit., p. 206; NEF, loc.cit., p. 30; RIEMER,
Verhältnis des BVG [Obligatorium und freiwillige berufliche Vorsorge]
zu anderen Sozialversicherungszweigen und zum Haftpflichtrecht, SZS 1987,
p. 126 s.; MAURER, op.cit., p. 226).

    d) Certes, si une institution de prévoyance renonce à adopter une
réglementation analogue à l'art. 27 OPP 2, elle alloue d'une certaine
manière des prestations qui vont au-delà des obligations minimales que
lui impose la loi. Mais, sous l'angle de l'art. 26 LAMA, ce fait est
sans importance, car cette norme légale s'applique indifféremment aux
prestations de la prévoyance obligatoire et à celles de la prévoyance
plus étendue (RIEMER, loc.cit., p. 127).

    Une telle renonciation n'équivaut pas non plus à l'allocation de
prestations à titre bénévole, lesquelles n'entrent pas en considération
dans le calcul de la surindemnisation au sens de l'art. 26 al. 3 LAMA (ATF
107 V 232 consid. 1 in fine). Si le règlement de l'institution ne prévoit
pas la possibilité de différer le droit à la rente, les prestations sont
dues en vertu de la loi et des dispositions réglementaires applicables
au cas particulier. L'institution reste "tenue à prestation" au sens de
l'art. 26 al. 3 LAMA.

    e) A la lumière de ce qui précède, la caisse intimée était en droit -
et même était tenue - de réduire ses prestations pour surassurance. Quant
au calcul de la surassurance, il n'est pas discuté et il n'apparaît au
demeurant pas critiquable.

    Cependant, comme le font observer avec raison les premiers juges,
lorsque les prestations sont réduites pour éviter une surindemnisation au
sens de l'art. 26 LAMA, les droits de l'assuré sont plus étendus dans le
temps. En effet, si l'indemnité journalière doit être allouée pendant 720
jours dans une période de 900 jours consécutifs (art. 12bis al. 3 LAMA),
il est logique, comme l'a jugé le Tribunal fédéral des assurances,
d'admettre qu'une indemnité réduite doit être accordée pendant une
période d'indemnisation augmentée dans une proportion adéquate. Ainsi,
en cas de réduction de 50 pour cent, les indemnités partielles doivent
être fournies pendant 1440 jours au moins (cf. ATF 98 V 75, 81; RAMA 1989
no K 823 p. 391).

Erwägung 4

    4.- Il suit de là que le recours de droit administratif est mal fondé.