Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 120 IV 313



120 IV 313

51. Arrêt de la Cour de cassation pénale du 17 juin 1994, dans la cause
S. c. O. et Ministère public du canton de Neuchâtel (pourvoi en nullité)
Regeste

    Art. 270 Abs. 1 BStP: Beschwerdelegitimation bei Strafbefreiung.

    Ein Angeklagter ist zur Beschwerde legitimiert, wenn er zwar von
Strafe befreit, aber schuldig gesprochen worden ist (E. 1).

    Art. 20 StGB, Freispruch bei Strafbefreiung.

    Wird in Anwendung von Art. 20 StGB von Bestrafung Umgang genommen,
weil den Angeklagten kein Verschulden trifft, muss er freigesprochen werden
(E. 2).

Sachverhalt

    A.- O. a été victime, le 9 juillet 1988, d'un grave accident de la
circulation, à la suite duquel elle a été amputée de la jambe droite au
niveau du genou. Elle a été soignée à l'Hôpital Pourtalès, à Neuchâtel et
elle a eu notamment pour médecin traitant le Docteur S., chirurgien-chef
du service d'orthopédie et de traumatologie. Lors d'une consultation, le 10
janvier 1990, elle déclara à S. qu'elle était séropositive et que son ami,
dont elle n'a pas révélé le nom, souffrait du sida. Le 24 janvier 1990, S.
adressa à la Commission de l'Assurance-invalidité du canton de Neuchâtel
un rapport concernant O. dans le cadre de la demande de prestations
formulée par celle-ci. Dans ce document qui fut reçu par la destinataire,
le 26 janvier 1990, S. mentionna, à titre d'information confidentielle,
qu'O. lui avait appris, le 10 janvier 1990, qu'elle avait subi un "test
HIV récemment positif".

    O. a appris, le 22 mars 1990, la divulgation du fait concernant sa
séropositivité, lors d'un entretien avec un membre de l'Office régional
de réadaptation professionnelle du canton de Neuchâtel, lequel lui a
donné connaissance du rapport du 24 janvier 1990. Par pli du 14 juin
1990, son conseil somma S. de s'expliquer au sujet du rapport du 24
janvier 1990 considéré comme constitutif d'une violation du secret
médical. Le 28 juin 1990, ce mandataire relança S., en précisant que
sa cliente envisageait très sérieusement le dépôt d'une plainte pénale
et une dénonciation administrative. Selon lettre du 10 juillet 1990,
l'avocat de S. répondit notamment que son client avait été informé, le
10 janvier 1990, par O. elle-même que celle-ci était séropositive et que
son ami souffrait d'un sida manifeste.

    B.- Le 17 juillet 1990, O. déposa plainte pénale contre S. pour
violation du secret médical au sujet des révélations contenues dans le
rapport du 24 janvier 1990 et dans le pli du 10 juillet 1990 au sujet de
la séropositivité de l'intéressée et du sida dont souffrait son ami. Le
29 août 1990, le suppléant du Procureur général du canton de Neuchâtel
classa l'affaire dans la mesure où elle portait sur la divulgation
faite par S. à son avocat, dans le courant du mois de juin 1990, et
décrite dans la lettre du 10 juillet 1990. La Chambre d'accusation du
canton de Neuchâtel rejeta, le 17 décembre 1991, le recours formé par
O. contre cette décision de classement partiel. Par contre, en ce qui
concerne la révélation contenue dans le rapport destiné aux organes
de l'Assurance-invalidité, S. fut renvoyé en jugement, le 18 décembre
1991. La décision du 17 décembre 1991 a été annulée, le 24 septembre 1992,
par le Tribunal fédéral, saisi d'un pourvoi en nullité formé par O. Par
jugement du 20 avril 1993, le Tribunal de police du district de Neuchâtel a
acquitté S. de l'accusation de violation du secret médical. En substance,
les premiers juges ont considéré qu'au sujet du rapport adressé aux
organes de l'Assurance-invalidité, le 24 janvier 1990, et dont O. avait
appris la teneur en date du 22 mars 1990, la plainte pénale avait été
déposée tardivement et, de toute manière, l'intéressée avait donné, le 29
octobre 1988, à ses médecins l'autorisation de donner les renseignements
nécessaires à l'examen du bien-fondé de sa demande de prestations. Quant
à la divulgation à son avocat des faits rapportés dans la lettre du 10
juillet 1990, elle n'était pas punissable, le prévenu pouvant bénéficier
d'un état de nécessité ou d'une autorisation implicite de la part d'O.

    Par arrêt du 9 novembre 1993, la Cour de cassation pénale du
Tribunal cantonal de Neuchâtel a cassé ce jugement du 20 avril 1993
dans la mesure où il libérait S. du second chef d'accusation, mais sur
le fond, elle a exempté celui-ci de toute peine. Le pourvoi d'O. a été
rejeté pour le surplus. La Cour de cassation a maintenu la décision du
Tribunal de police quant à la péremption du droit de porter plainte au
sujet du rapport adressé par S., le 24 janvier 1990, à la Commission de
l'Assurance-invalidité. Par contre, s'agissant de la divulgation faite
par S. à son avocat et faisant l'objet de la lettre écrite par celui-ci,
le 10 juillet 1990, la Cour cantonale a considéré que le prévenu avait
enfreint l'art. 321 ch. 1 al. 1 CP. En effet, selon elle, les conditions
relatives à l'admission d'un état de nécessité et à l'existence d'une
autorisation implicite de divulgation n'étaient pas réalisées. Cependant,
l'intimé pouvait être mis au bénéfice d'une erreur de droit selon l'art. 20
CP et, en conséquence, être exempté de toute peine.

    C.- S. se pourvoit en nullité au Tribunal fédéral. Il reproche à
l'autorité cantonale de l'avoir reconnu coupable de violation de l'art. 321
ch. 1 al. 1 CP et conclut à la nullité de l'arrêt du 9 novembre 1993. Le
Ministère public quant à lui propose l'admission du pourvoi. En revanche
l'intimée en demande le rejet.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Bien qu'exempté de toute peine, le recourant est en droit de se
pourvoir en nullité, un accusé étant légitimé à recourir dans une telle
hypothèse, lorsque, comme en l'espèce, il conteste le principe de sa
culpabilité (ATF 119 IV 44 consid. 1a).

Erwägung 2

    2.- A l'appui de son pourvoi, le recourant fait notamment valoir
que le recours à un avocat pour se défendre contre la menace de plainte
formulée par sa patiente et la divulgation à son conseil de l'ensemble des
circonstances intéressant l'affaire ne procédaient pas d'un comportement
pénalement répréhensible.

    L'autorité cantonale a considéré, comme l'avait d'ailleurs envisagé le
premier juge, que le recourant s'est trouvé au moment de la divulgation,
sous l'empire d'une erreur de droit qu'elle a qualifié d'excusable.
L'examen de son argumentation ne fait apparaître sur ce point ni
méconnaissance, ni violation du droit fédéral et l'intimée, dans ses
écritures, n'a nullement démontré que l'autorité cantonale aurait commis
la moindre faute dans ses considérants. Le Tribunal fédéral peut en
conséquence se référer purement et simplement à ceux-ci, tout en relevant
que l'on ne saurait déduire le caractère excusable d'une erreur de droit du
seul fait que dans le cours de la procédure dans son ensemble, le Tribunal
fédéral a déjugé l'autorité cantonale sur le point considéré. Pour le reste
toutefois, l'argumentation de l'autorité cantonale emporte l'adhésion.

    Cela dit, dès lors que l'on admet que le recourant s'est trouvé
dans une erreur de droit excusable au point que l'autorité cantonale
a estimé devoir l'exempter de toute peine, ainsi que l'art. 20 CP l'y
autorisait expressément et dès lors que l'on ne saurait sur ce point,
au vu des circonstances, lui reprocher d'avoir abusé de son pouvoir
d'appréciation, il se pose la question de savoir si une déclaration de
culpabilité peut encore être rendue contre lui. Autrement dit, l'autorité
cantonale pouvait-elle sans violer le droit fédéral annuler la décision
du premier juge libérant purement et simplement le recourant des fins de
l'action pénale.

    Si l'on s'en tient au texte de la loi qui se réfère expressément à la
peine, atténuée librement ou dont le prévenu peut être même totalement
exempté, il semble à première vue que l'admission de l'erreur de droit
ne peut pas conduire à l'abandon de toute charge pénale. Le contenu des
travaux préparatoires tel qu'il est résumé par LOGOZ (Commentaire du
Code pénal suisse), partie générale, deuxième éd., p. 106 b) ne conduit
pas non plus à une autre conclusion, qui est également celle de la
jurisprudence parue jusqu'ici (cf. ATF 92 IV 73, 97 IV 66, 104 IV 217
et 116 IV 67, notamment). Toutefois, dans la mesure où le juge estime
juste de faire abstraction de toute peine, c'est qu'il considère que
l'auteur n'a pas commis de faute, si minime soit-elle. Il est dès lors
insupportable, dans un système entièrement dominé par le principe selon
lequel la répression est fonction de la faute, que l'accusé soit reconnu
coupable d'une infraction sans avoir commis la moindre faute. Il y a
là une contradiction qui a été critiquée par la majorité de la doctrine
(SCHULTZ, Einführung in den allgemeinen Teil des Strafrechts, 4ème éd.,
p. 232, f.; RJB 1982 p. 30; REHBERG, Strafrecht I 5ème éd., § 25 p. 173;
NOLL/TRECHSEL, Schweizerisches Strafrecht, partie générale I 3ème éd.,
p. 134 ss; STRATENWERTH, Schweizerisches Strafrecht, partie générale I
p. 260 b; SCHWANDER, Strafgesetzbuch 2ème éd., p. 100, no 205, lequel ne
préconise toutefois l'assimilation des conséquences de l'erreur de droit
à celles de l'erreur de fait que de lege ferenda; etc.) et qu'il convient
de résoudre dans toute la mesure du possible en posant le principe que
dans une telle situation, lorsque le juge décide de prononcer l'exemption
de toute peine, il doit prononcer une libération pure et simple des fins
de la poursuite pénale. Le pourvoi doit en conséquence être admis dans la
mesure où l'autorité cantonale a annulé le premier jugement qui libérait
l'intimé de la prévention de violation du secret médical.