Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 120 II 412



120 II 412

75. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile du 8 décembre 1994 dans la
cause Congrégation des soeurs de charité de la Sainte-Croix d'Ingenbohl
contre Fondation des Buissonnets (procès direct) Regeste

    Art. 41 Abs. 1 lit. c OG. Klage auf Auflösung einer Stiftung; Begriff
der vermögensrechtlichen Zivilrechtsstreitigkeit.

    Die Abgrenzung zwischen zivilrechtlichen und öffentlichrechtlichen
Streitigkeiten ist nach den Kriterien vorzunehmen, die den konkreten
Umständen am besten entsprechen (E. 1).

    Die Auflösung einer Stiftung nach dem Willen des Stifters fällt
in die Zuständigkeit der Verwaltungsbehörde, nicht in diejenige
des Richters; es handelt sich daher nicht um eine zivilrechtliche
Streitigkeit. Obwohl die Klägerin im konkreten Fall beantragt, dass
ihr das Stiftungsvermögen anfalle, liegt auch keine vermögensrechtliche
Zivilrechtsstreitigkeit vor. Die Parteien können daher nicht aufgrund
einer Gerichtsstandsvereinbarung mit ihrer Streitsache direkt an das
Bundesgericht gelangen (E. 2).

Sachverhalt

    A.- La Fondation des Buissonnets (ci-après: la Fondation), à Sierre,
a été constituée le 12 octobre 1949. Elle a pour but l'exploitation d'un
immeuble destiné à l'Ecole commerciale des jeunes filles du district
de Sierre, dirigée par la Congrégation des Soeurs de la Sainte-Croix
d'Ingenbohl (ci-après: la Congrégation).

    Les statuts prévoient deux cas de dissolution de la Fondation
(art. 24):

    "a)  si l'Ecole cesse d'exister;

    b)   si la Direction de l'Ecole n'est plus confiée à la Congrégation
des

    Soeurs de la Sainte-Croix d'Ingenbohl ou si, pour des raisons majeures,
   celle-ci ne peut plus l'assumer."

    L'art. 25 des statuts précise en outre qu'"en cas de dissolution,
les avoirs de la Fondation reviennent à la Congrégation des Soeurs de la
Sainte-Croix d'Ingenbohl qui en disposerait à son gré".

    B.- Par lettre du 25 août 1993, la Congrégation a demandé à la
Fondation de constater sa propre dissolution, l'école dont elle avait la
charge ayant cessé d'exister; elle l'invitait en outre "à requérir Monsieur
le Sous-Préfet du district de Sierre, Maître Paul-Albert Clivaz, autorité
de surveillance", de rendre une décision officielle en ce sens. Lors de sa
séance du 27 septembre 1993, l'assemblée générale de la Fondation s'est
estimée incompétente pour se prononcer sur une éventuelle application de
l'art. 24 précité.

    C.- Le 19 septembre 1994, la Congrégation a assigné la Fondation
directement devant le Tribunal fédéral. Invoquant la réalisation de
l'une ou l'autre des causes prévues par les statuts, elle conclut à
la dissolution de la défenderesse et à la dévolution de ses biens en
sa faveur.

Auszug aus den Erwägungen:

                   Extrait des considérants:

Erwägung 1

    1.- Par convention de prorogation des 29 mars et 12 avril 1994, les
parties sont convenues de porter le présent litige devant le Tribunal
fédéral statuant en instance unique. Ce dernier examine d'office la
recevabilité de l'action (art. 1er al. 1 et art. 3 al. 1 PCF [RS 273]).

    a) Selon l'art. 41 al. 1 let. c OJ, le Tribunal fédéral connaît
en instance unique des contestations de droit civil lorsque les deux
parties saisissent le tribunal à la place des juridictions cantonales
et que la valeur litigieuse est d'au moins 20'000 fr. Cette disposition
confère au Tribunal fédéral une compétence légale et non pas arbitrale,
qui suppose la réalisation des conditions posées par la loi. Ce n'est
que si ces conditions sont remplies que les parties peuvent convenir
de saisir directement la juridiction fédérale, qui est alors tenue de
statuer. L'une de ces conditions concerne la nature de la cause. C'est
ainsi qu'une prorogation de for n'est possible que pour les contestations
pécuniaires de droit civil au sens étroit. S'il s'agit d'un litige de
droit public, la prorogation n'est pas valable et l'action doit être
déclarée irrecevable (J.-F. POUDRET/S. SANDOZ-MONOD, Commentaire de la
loi fédérale d'organisation judiciaire, n. 1.5, 4.1 et 4.2 ad art. 41 OJ;
ATF 103 II 316 ss).

    b) Par contestation civile, la jurisprudence entend une procédure
qui vise à provoquer une décision définitive sur des rapports de droit
civil et qui se déroule en instance contradictoire, devant un juge ou
une autre autorité ayant pouvoir de statuer, entre deux ou plusieurs
personnes physiques ou morales agissant comme titulaires de droits privés,
ou entre une telle personne et une autorité à laquelle le droit civil
confère la qualité de partie (ATF 118 II 528 consid. 2a p. 530 et les
références). Savoir si l'on se trouve en présence d'une contestation
relevant du droit civil ou du droit public se détermine d'après l'objet
du litige (ATF 103 II 314 consid. 2c p. 317).

    Pour délimiter ces deux domaines du droit, le Tribunal fédéral s'appuie
sur diverses théories dont aucune ne l'emporte a priori sur les autres. Il
examine au contraire, dans chaque cas, quel critère de distinction est
le plus approprié aux circonstances concrètes. Ainsi, il tient compte
du fait que la délimitation entre droit privé et droit public répond
à des fonctions totalement différentes suivant les nécessités de la
réglementation et, en particulier, selon les conséquences juridiques en
cause dans chaque affaire; ces éléments ne peuvent pas être théoriquement
réunis en un seul critère distinctif (ATF 109 Ib 146 consid. 1b p. 149,
101 II 366 consid. 2b p. 369).

Erwägung 2

    2.- La demanderesse soutient que ses prétentions relèvent du droit
civil fédéral, dans la mesure où elles sont fondées sur les art. 50 à 52
et 80 à 89 CC ainsi que sur les art. 24 et 25 des statuts de la Fondation;
il appartient dès lors au juge civil de résoudre le litige.

    a) Il est en général admis que le fondateur a la possibilité de prévoir
dans l'acte de constitution une ou plusieurs conditions résolutoires
(RIEMER, n. 60 ad art. 88/89 CC; EGGER, n. 1 ad art. 88/89 CC; THOMAS
MANHART, Die Aufhebung mit Liquidation von Stiftungen, insbesondere von
Personalvorsorgestiftungen, thèse Zurich 1986, p. 84; RUDOLF SCHWEIZER,
Die Beaufsichtigung der Stiftungen nach schweizerischem Recht, thèse Zurich
1927, p. 20). De telles clauses se confondent souvent avec la cause de
dissolution prévue à l'art. 88 al. 1 CC, selon lequel la fondation est
dissoute de plein droit lorsque son but a cessé d'être réalisable. Mais il
est possible d'en prévoir d'autres, du moment qu'elles ont un lien avec
le but de la fondation et la volonté du fondateur (SCHWEIZER, op.cit.,
p. 20; MARC-ANTOINE SCHAUB, in JT 1952 I p. 32). De plus, elles doivent
être exprimées de manière précise et concrète car ni le fondateur, ni
des tiers, ni les organes de la fondation ne peuvent décider librement
de la durée d'existence de cette dernière (RIEMER, n. 60 ad art. 88/89
CC et les nombreuses références; MANHART, op.cit., p. 84). Une condition
résolutoire peut notamment consister dans la survenance d'un événement.

    b) La dissolution d'une fondation selon la volonté du fondateur
doit être constatée formellement et officiellement, de manière
analogue à la procédure prévue à l'art. 88 al. 1 CC, auquel on peut
se référer. D'éventuelles décisions des organes de la fondation n'ont,
dans ce cas, qu'un caractère déclaratoire et doivent être confirmées par
l'autorité de surveillance (RIEMER, n. 66 ad art. 88/89 CC; MANHART,
op.cit., p. 87). Or, selon la doctrine unanime, la dissolution de plein
droit d'une fondation dont le but a cessé d'être réalisable (art. 88 al. 1
CC) relève de la compétence de l'autorité administrative et non pas de
celle du juge (MANHART, op.cit., p. 47; RIEMER, n. 17 ad art. 88/89 CC;
PEDRAZZINI/OBERHOLZER, Grundriss des Personenrechts, 4e éd., p. 271). Le
Tribunal fédéral a par ailleurs jugé que les dispositions du Code civil
sur la surveillance des fondations, qui confèrent à l'autorité compétente
le pouvoir d'intervenir d'office ou sur requête dans les affaires de ces
dernières, sont des règles de droit public (ATF 110 II 436 consid. 1 p.
439, 96 I 406 consid. 2 pp. 408/409), sous réserve des contestations
qui ont pour objet principal un droit subjectif (ATF 112 II 97 consid. 3
p. 98); toutefois, si de tels droits sont touchés par une décision prise
en application de l'art. 88 al. 1 CC, le litige conserve un caractère de
droit public car il a trait principalement à l'existence de la fondation
et concerne ses relations avec les autorités administratives, relations
qui ressortissent au droit public (RIEMER, n. 154 ad art. 84 CC).

    La jurisprudence a en outre admis que, dans l'hypothèse où un
tiers bénéficiaire demande la liquidation de la personne morale et la
dévolution du produit qui en résulte, son action relève des droits de
la personnalité et n'a pas de but économique, l'attribution de biens
n'étant que la conséquence de la suppression de la personne morale. Dès
lors, une telle contestation n'est pas de nature pécuniaire (ATF 112 II
1 consid. 2 p. 3 et 191 consid. 2b p. 192).

    c) En l'espèce, l'action tend à faire prononcer la dissolution
de la Fondation et la dévolution de ses biens à la demanderesse. Elle
concerne ainsi principalement l'existence juridique et, le cas échéant,
les conséquences financières de la fin de cette personne morale. Par
conséquent, l'objet du litige relève du droit public. De plus, comme il a
été exposé ci-dessus, la demanderesse ne peut se prévaloir d'aucun droit
subjectif à la dissolution de la défenderesse, qui dépend uniquement de la
volonté du fondateur. Enfin, quelle que soit l'importance des intérêts
économiques en jeu, la contestation n'est pas de nature pécuniaire,
car la question prépondérante à résoudre est celle de la dissolution
de la Fondation qui doit être préalablement constatée dans l'intérêt
public. Il s'ensuit que la demanderesse n'est pas recevable à intenter
un procès direct au Tribunal fédéral, sa cause ne constituant pas une
contestation civile au sens de l'art. 41 al. 1 let. c OJ.