Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 120 II 400



120 II 400

73. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 16 novembre 1994 dans la
cause M. contre République Arabe d'Egypte (recours en réforme) Regeste

    Arbeitsvertrag. Gerichtsbarkeits-Immunität ausländischer Staaten.

    Sind Entsendestaat und Staat des Gerichtsstands nicht durch einen
Staatsvertrag gebunden, so ist nur mit grösster Zurückhaltung auf ein
Übereinkommen - hier das Europäische Übereinkommen vom 16. Mai 1972
über Staatenimmunität - Bezug zu nehmen, das der beklagte Staat nicht
unterzeichnet hat, wenn es die Gerichtsbarkeits-Immunität dieses Staats
zu beurteilen gilt (E. 3).

    Zusammenfassung der von der Rechtsprechung entwickelten
Grundsätze bezüglich der Gerichtsbarkeits-Immunität, namentlich für den
Arbeitsvertrag (E. 4a). Die Tatsache allein, dass der Kläger Angehöriger
des beklagten Staats ist, rechtfertigt eine Gutheissung der Einrede der
Gerichtsbarkeits-Immunität nicht (E. 4b).

Sachverhalt

    A.- M. est un ressortissant égyptien. Il a épousé une marocaine,
est père de deux enfants et est arrivé en Suisse en 1979 pour y suivre
des études pendant quatre ans. Après quoi, il a travaillé à Genève pour
le compte du Consulat d'Arabie Saoudite, de 1984 à 1987, puis pour celui
du Consulat d'Egypte, en 1987 et 1988.

    En 1988, sieur M. a été engagé à plein temps comme deuxième chauffeur
de la Mission permanente de la République Arabe d'Egypte auprès de l'Office
européen des Nations Unies, à Genève. A la fin janvier ou au début février
1992, le chef de cette Mission l'a congédié avec effet au 1er mars de la
même année.

    B.- Le 10 juin 1992, M. a ouvert action contre la République Arabe
d'Egypte pour obtenir le paiement de son salaire de février et mars 1992,
d'heures supplémentaires et d'un solde de vacances, soit un total 15'045
fr. 10. D'entrée de cause, la défenderesse a excipé de son immunité
diplomatique.

    Par jugement du 2 février 1993, le Tribunal des prud'hommes du canton
de Genève a admis cette exception et déclaré la demande irrecevable.

    Saisie par le demandeur, la Chambre d'appel des prud'hommes du
canton de Genève a confirmé ce jugement par arrêt du 9 novembre 1993. A
son avis, un Etat étranger peut invoquer valablement son immunité de
juridiction lorsqu'il est cité devant les tribunaux suisses par l'un
de ses ressortissants employé comme agent, même subalterne, dans son
ambassade ou sa mission diplomatique en Suisse.

    C.- Le demandeur interjette un recours en réforme. Il conclut à ce
que le Tribunal fédéral annule l'arrêt cantonal et dise que la Chambre
d'appel des prud'hommes du canton de Genève est compétente pour connaître
du litige divisant les parties.

    Le Tribunal fédéral admet le recours, annule l'arrêt attaqué, rejette
l'exception d'immunité de juridiction soulevée par la défenderesse et
renvoie le dossier à la cour cantonale pour nouveau jugement.

Auszug aus den Erwägungen:

                   Extrait des considérants:

Erwägung 2

    2.- Aucune convention à laquelle la République Arabe d'Egypte et la
Suisse seraient parties ne règle la question litigieuse. En ce domaine,
il n'existe pas de principes généraux de rang supranational qui régiraient
la matière de manière exhaustive. Les conceptions varient selon les époques
ou les groupes culturels. Le droit des immunités est dans une large mesure
un droit de rang national, même si l'on peut rattacher au droit coutumier
international un minimum de protection en faveur des Etats étrangers (EGLI,
L'immunité de juridiction et d'exécution des Etats étrangers et de leurs
agents dans la jurisprudence du Tribunal fédéral, in: Festschrift 100
Jahre SchKG/Centenaire de la LP, p. 202). Aussi la question de savoir si
la défenderesse est soumise ou non à la juridiction suisse doit-elle être
résolue à la lumière des principes généraux du droit international public
tels qu'ils peuvent être dégagés de la jurisprudence, de la doctrine,
ainsi que des solutions qui ont été retenues dans les conventions
internationales réglant les conflits de juridiction entre Etats.

    La compétence de la juridiction suisse a été reconnue pour trancher un
litige issu des rapports de travail d'un ressortissant italien occupé comme
radiotélégraphiste, puis comme aide de bureau, à l'ambassade indienne en
Suisse (ATF 110 II 255 ss). Le Tribunal fédéral a considéré que, si des
doutes pouvaient exister quant au caractère subalterne de l'activité de
radiotélégraphiste, il n'en allait pas de même pour celle d'aide de bureau,
exercée en second lieu et pendant plusieurs années par le travailleur
en question. Il en a déduit que, dans son ensemble, le travail exécuté
par cette personne ne relevait pas du domaine d'activité souverain de
l'Etat accréditant (acta jure imperii) mais constituait une activité
semblable à celle que tout particulier aurait pu déployer (acta jure
gestionis). Cette cause se distingue de la présente affaire tant en ce
qui concerne le travail confié à l'employé qu'au regard de la nationalité
de celui-ci. L'arrêt cité et la cause en litige ont, en revanche, ceci de
commun que l'Etat défendeur n'est pas partie à la Convention européenne
sur l'immunité des Etats conclue à Bâle le 16 mai 1972 (RS 0.273.1;
ci-après: la Convention). Dans ledit arrêt, la portée de cette convention
a néanmoins été examinée. La décision attaquée s'y réfère aussi. Il
convient donc de rechercher, en premier lieu, si et, le cas échéant,
dans quelle mesure les règles contenues dans la Convention peuvent être
prises en considération lorsque l'Etat accréditant n'y est pas partie
(consid. 3). Il s'agira ensuite de rappeler les autres principes dégagés
par la jurisprudence en matière d'immunité diplomatique dans les litiges
portant sur des prétentions issues d'un contrat de travail (consid. 4).

Erwägung 3

    3.- a) La Convention énonce, à son article 4, le principe selon
lequel, sous réserve des dispositions de l'article 5, un Etat contractant
ne peut invoquer l'immunité de juridiction devant un tribunal d'un autre
Etat contractant si la procédure a trait à une obligation de l'Etat qui,
en vertu d'un contrat, doit être exécutée sur le territoire de l'Etat du
for, sauf dans trois hypothèses non réalisées en l'espèce.

    L'article 5 règle de manière spéciale la question de l'immunité en
matière de litiges ayant pour objet un contrat de travail. Aux termes
de son paragraphe 1, un Etat contractant ne peut invoquer l'immunité
de juridiction devant un tribunal d'un autre Etat contractant si la
procédure a trait à un contrat de travail conclu entre l'Etat et une
personne physique, lorsque le travail doit être accompli sur le territoire
de l'Etat du for. Ce principe ne s'applique toutefois pas dans certaines
hypothèses, en particulier lorsque la personne physique a la nationalité
de l'Etat employeur au moment de l'introduction de l'instance (art. 5
par. 2 let. a de la Convention). En l'espèce, le demandeur se trouve dans
une telle situation puisqu'il est ressortissant de l'Etat défendeur.

    b) Quant à la portée de la Convention à l'égard d'un Etat qui ne l'a
pas signée, la jurisprudence a passablement fluctué.

    Dans un premier arrêt, rendu le 15 novembre 1978, le Tribunal fédéral a
jugé que les principes contenus dans la Convention peuvent être considérés
comme l'expression des tendances modernes du développement du droit des
gens, notamment en Europe occidentale, et conduisent à un résultat ne
s'écartant guère de la pratique suisse dominante, encore qu'ils soient
moins larges que celle-ci dans l'admission de l'immunité des Etats
étrangers (ATF 104 Ia 367 consid. 2a et e).

    La jurisprudence s'est ensuite montrée plus restrictive. Dans un arrêt
de 1979, rendu en matière d'immunité d'exécution, le Tribunal fédéral a
précisé qu'en l'absence de tout traité liant l'Etat recourant et la Suisse
en matière d'immunité, il convient de s'en tenir à la jurisprudence de
la Suisse dans ce domaine. En conséquence, toute référence éventuelle
à la Convention, en tant qu'expression de tendances récentes du droit
international public, doit tenir compte de ce que, sur des points
importants, ce traité repose sur des conceptions qui divergent de celles
qui fondent la jurisprudence du Tribunal fédéral (arrêt du 20 juillet 1979,
dans la cause République Arabe d'Egypte c. Cinetelevision International
Registred Trust (Cinetel), consid. 4c, publié partiellement in: Annuaire
suisse de droit international [ASDI], 37/1981, p. 207 ss, 211). Se
référant à ce précédent, le Tribunal fédéral a souligné ultérieurement,
dans un arrêt du 22 mai 1984, que le considérant 2a de l'ATF 104 Ia 367
ne signifiait pas que la Convention reflétait l'état actuel du droit des
gens, ajoutant qu'elle ne saurait, en particulier, traduire l'état du droit
coutumier dans les domaines qu'elle a réglés justement afin d'éviter les
difficultés qui étaient apparues dans le passé relativement à l'étendue de
l'immunité de juridiction dans ces domaines-là (ATF 110 II 255 consid. 4c).

    Cependant, dans un autre arrêt rendu deux mois plus tôt, le Tribunal
fédéral en était revenu à sa conception première qui permettait de prendre
en considération la Convention, en tant qu'expression de la tendance la
plus récente du droit des gens, même lorsqu'elle ne s'appliquait pas dans
un cas donné (ATF 110 Ia 43 consid. 4b p. 45 in fine). Il a exprimé la
même opinion l'année d'après (ATF 111 Ia 52 consid. 3).

    Depuis lors, la jurisprudence a pris à nouveau un tour plus restrictif.
Ainsi, dans un arrêt rendu en matière d'exécution des jugements, le
Tribunal fédéral, après avoir souligné que le système de la Convention
constitue une unité, en a tiré la conclusion qu'un tel système ne peut
être appliqué de manière raisonnable qu'en tant qu'ensemble cohérent ou
ne pas être appliqué du tout, partant que l'application de dispositions
isolées de ce traité international à des Etats qui ne l'ont pas signé n'est
pas justifiée (consid. 4, non publié, de l'ATF 111 Ia 62, traduit in:
SJ 1986 p. 38/39). Par la suite, la jurisprudence n'a plus changé de cap
(ATF 113 Ia 172 consid. 2, 112 Ia 148 consid. 3a).

    c) En doctrine, MATHIAS-CHARLES KRAFFT, (La Convention européenne
sur l'immunité des Etats, in: ASDI 42/1986, p. 16 ss, 26) relève les
nuances rencontrées dans la jurisprudence. Selon lui, la Convention
devrait pouvoir servir, à certaines conditions, de source d'inspiration
pour les tribunaux suisses et exercer à ce titre une certaine influence
sur la jurisprudence, même dans les relations avec des Etats qui ne sont
pas liés par elle. Ce serait en particulier le cas de ses dispositions,
très détaillées, relatives à l'immunité de juridiction, dans la mesure où
elles énumèrent une série d'actes et d'activités de l'Etat qui peuvent être
considérés comme entrant dans la catégorie des acta jure gestionis. Pour
JEAN-FRANÇOIS EGLI (op.cit., p. 205), le droit conventionnel ne saurait
s'appliquer aux relations internationales non soumises à la Convention dans
la mesure où il déroge aux règles qui seraient applicables en l'absence
de convention; en revanche, sur les points où elle ne comporte pas de
dérogation de ce genre, on peut voir dans la Convention une tentative
commune d'exprimer les tendances du droit des gens qui prévalent auprès
des Etats signataires et, dans cette mesure, la Convention sera sans doute
utile, de l'avis de l'auteur. Quant à WERNER GLOOR (Employeurs titulaires
de l'immunité de juridiction, in: Le juriste suisse face au droit et
aux jugements étrangers, Enseignement de 3e cycle de droit 1987, publié
sous la direction du professeur Knoepfler, p. 263 ss), il n'aborde pas,
dans son étude, la question de la prise en considération de la Convention
dans les litiges mettant en cause un Etat qui ne l'a pas signée. Enfin,
ROLANDO FORNI (Die Gerichts- und Vollstreckungsimmunität fremder Staaten
in der bundesgerichtlichen Rechtsprechung, in ASDI 42/1986, p. 9 ss)
présente une étude de la jurisprudence en la matière et de son évolution
depuis 1918, mais il ne prend pas position sur le problème de la portée
de la Convention lorsque l'Etat défendeur n'y est pas partie.

    d) L'évolution de la jurisprudence révèle qu'il est extrêmement délicat
de tenter de se prononcer sur l'immunité d'un Etat en s'inspirant d'une
convention qui ne le lie pas. Cela est d'autant plus vrai que la convention
invoquée n'a pour parties qu'un petit nombre d'Etats européens et que
l'Etat qui allègue son immunité dans le présent litige appartient à un
autre continent. Au surplus, la Convention est conçue comme un catalogue
qui indique les points de rattachement retenus pour éviter qu'un Etat
puisse être attrait devant un tribunal étranger lorsque l'objet du
litige n'a pas de relations suffisantes avec le territoire de l'Etat
du for (Message du Conseil fédéral du 27 mai 1981; FF 1981 II 937 ss,
943/944). Pour limiter la possibilité des Etats contractants d'invoquer
l'immunité de juridiction, elle ne se réfère pas à la distinction entre
les actes jure gestionis et jure imperii, mais ne fait que définir une
série de situations dans lesquelles cette exception ne peut être invoquée
(Message précité, FF 1981 II 945). Aussi, lorsque, comme c'est ici le cas,
la Convention n'est pas applicable, la plus grande réserve s'impose même
pour de simples références aux solutions fournies par ce traité. Une telle
réserve est d'autant plus de mise si la disposition à laquelle il est fait
appel constitue une exception ponctuelle à une solution de principe, elle
aussi ponctuelle, ce qui est le cas du paragraphe 2 lettre a de l'article
5 de la Convention par rapport au paragraphe 1 de la même disposition,
ainsi que dudit article par rapport à l'article 4. Les mêmes réserves
doivent être formulées en ce qui concerne d'éventuelles références à des
conventions qui seraient encore à l'état de projets.

    En l'absence de convention internationale applicable en l'espèce,
le problème controversé sera donc résolu à la lumière des principes qui
ont été posés par la jurisprudence du Tribunal fédéral, laquelle n'est,
au demeurant, nullement immuable puisqu'elle ne fait que refléter l'état
actuel de l'évolution des conceptions dans le domaine considéré.

Erwägung 4

    4.- a) Il est admis, d'une manière générale, que le privilège de
l'immunité diplomatique n'est pas une règle absolue. L'Etat étranger
n'en bénéficie que lorsqu'il agit en vertu de sa souveraineté (jure
imperii). Il ne peut, en revanche, s'en prévaloir s'il se situe sur le
même plan qu'une personne privée, en particulier s'il agit en qualité de
titulaire d'un droit privé (jure gestionis).

    Les actes accomplis jure imperii, ou actes de souveraineté, se
distinguent des actes accomplis jure gestionis, ou actes de gestion, non
par leur but mais par leur nature. Pour qualifier un acte donné, l'autorité
appelée à statuer peut également recourir à des critères extérieurs à cet
acte. Elle procédera aussi, dans chaque cas d'espèce, à une comparaison
de l'intérêt de l'Etat étranger à bénéficier de l'immunité avec celui
de l'Etat du for à exercer sa souveraineté juridictionnelle et celui du
demandeur à obtenir une protection judiciaire de ses droits. Enfin, de
tout temps, la jurisprudence suisse a marqué une tendance à restreindre
le domaine de l'immunité (pour l'ensemble de ces principes, cf. l'ATF
113 Ia 172 consid. 2 et les arrêts cités).

    En matière de contrat de travail, la jurisprudence admet que,
si l'Etat accréditant peut avoir un intérêt important à ce que les
litiges qui l'opposent à des membres de l'une de ses ambassades exerçant
des fonctions supérieures ne soient pas portés devant des tribunaux
étrangers, les circonstances ne sont pas les mêmes lorsqu'il s'agit
d'employés subalternes. En tout cas lorsque l'employé n'est pas un
ressortissant de l'Etat accréditant et qu'il a été recruté puis engagé
au for de l'ambassade, la juridiction du for peut être reconnue dans la
règle. L'Etat accréditant n'est alors pas touché dans l'exercice des tâches
qui lui incombent en sa qualité de titulaire de la puissance publique
(ATF 110 II 255 consid. 4 p. 261).

    b) En l'espèce, le demandeur a travaillé comme chauffeur, ce qui est
une fonction subalterne. Les tâches accomplies par un chauffeur ne sont, en
effet, pas de celles qui relèvent de l'exercice de la puissance publique;
sa situation s'apparente à celle des portiers, jardiniers, cuisiniers,
etc. (cf. PHILIPPE CAHIER, Le droit diplomatique contemporain, 2e éd.,
p. 87; GLOOR, op.cit., p. 275, note 79). La défenderesse ne tente
d'ailleurs pas de démontrer le contraire.

    Cependant, cette circonstance ne suffit pas à elle seule pour que
la Suisse puisse connaître du litige. Tout rapport de droit privé assumé
par un Etat étranger ne peut pas donner lieu à des mesures de procédure
en Suisse. Encore faut-il que le rapport de droit en cause ait certains
liens avec le territoire suisse ("Binnenbeziehung"), c'est-à-dire qu'il
y soit né ou doive y être exécuté ou, tout au moins, que le débiteur ait
accompli certains actes de nature à y créer un lieu d'exécution (ATF 106
Ia 142 consid. 3b; EGLI, op.cit., p. 208 et les autres arrêts cités). En
l'occurrence, le demandeur a été recruté à Genève, ville dans laquelle
il a exercé son activité et où il vit avec son épouse marocaine. Il
y habitait depuis 1979 alors que l'engagement litigieux est intervenu
en 1988. Après quatre ans d'études, il avait travaillé dans cette ville
pour le Consulat d'Arabie Saoudite puis pour celui d'Egypte. La relation
avec la Suisse est ainsi incontestable dans le cas particulier. Que
le demandeur soit ressortissant de l'Etat accréditant, dans lequel il
ne retourne qu'occasionnellement pour des vacances, ne paraît dès lors
pas suffisant pour faire échec au principe selon lequel un litige tel
que celui qui est à l'origine de la présente procédure relève de la
juridiction suisse. Au surplus, le dossier ne révèle pas quel intérêt
la défenderesse pourrait avoir à se prévaloir de son immunité dans ces
conditions, alors que l'intérêt du demandeur à pouvoir plaider à Genève
résulte déjà de simples considérations d'ordre pratique.

    La solution retenue ici est d'ailleurs conforme à la tendance
générale qui va dans le sens d'une limitation du champ d'application
de l'immunité des Etats étrangers. La Convention, à laquelle la
défenderesse n'est pas partie, n'est, au demeurant, pas applicable en
l'espèce. L'exception tirée de la nationalité du travailleur ne saurait
donc être accueillie dans toute sa rigueur et sans nuances. Le fait que
le demandeur est un ressortissant de l'Etat défendeur ne constitue dès
lors qu'une circonstance parmi d'autres, qu'il convient de prendre en
considération, non pas pour elle-même, mais bien plutôt dans le cadre de
l'examen global de la situation. A cet égard, il ne ressort pas de l'arrêt
attaqué que la nationalité de l'intéressé ait joué un rôle déterminant
lors de l'engagement du demandeur. De plus, toutes les circonstances qui
viennent d'être rappelées, notamment la nature de l'activité exercée par
le demandeur et le fait que celui-ci a aussi travaillé comme chauffeur
pour un pays tiers, confirment que la nationalité du travailleur ne revêt
pas en l'occurrence une importance décisive pour trancher la question de
l'immunité de juridiction. Pour le reste, point n'est besoin de tenter de
définir in abstracto les cas dans lesquels le fait qu'un travailleur a la
nationalité de l'Etat qui l'a engagé permet à ce dernier de se prévaloir
de son immunité.

    Force est ainsi de constater, au terme de cet examen, que l'exception
d'immunité soulevée par la défenderesse est mal fondée.