Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 120 IA 61



120 Ia 61

8. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile du 8 février 1994 dans la cause
S. contre dame S. et Vice-Présidente du Tribunal de première instance de
Genève (recours de droit public) Regeste

    Art. 86 Abs. 1 und Art. 87 OG; Art. 387 Abs. 3 und Art. 393 des Genfer
Zivilprozessgesetzes; Erschöpfung des kantonalen Instanzenzuges.

    Die für einen Ehegatten bestehende Möglichkeit, einen Entscheid
betreffend vorsorgliche Massnahmen für die Dauer des Scheidungsprozesses
zu verlangen, der eine entsprechende superprovisorische Verfügung des
Gerichtspräsidenten ersetzt, stellt einen kantonalrechtlichen Rechtsbehelf
dar, vor dessen Ergreifung die staatsrechtliche Beschwerde unzulässig ist.

Auszug aus den Erwägungen:

                  Extrait des considérants:

Erwägung 1

    1.- Selon l'intimée, le recours est irrecevable, faute d'être dirigé
contre une décision rendue en dernière instance cantonale.

    Il n'est pas contesté en l'espèce que l'ordonnance critiquée a été
rendue en application de l'art. 387 LPC/GE, selon lequel, dès le dépôt
de l'assignation et jusqu'à l'audience d'introduction, le président, sur
requête écrite d'un des conjoints et s'il y a urgence, statue en chambre
du conseil et sans délai sur les autres mesures provisoires permises par
l'art. 145 CC (al. 1). Le jugement est immédiatement exécutoire et n'est
susceptible d'aucun recours; si la cause est introduite, chaque époux peut
agir selon l'art. 393 LPC/GE pour requérir un jugement qui se substitue
au précédent (al. 3). Sur requête de l'une des parties, ce jugement peut
être modifié par le président jusqu'à l'audience d'introduction de la
cause devant le tribunal (al. 4).

    a) En vertu des art. 86 al. 1 et 87 OJ, le recours de droit public
pour violation de l'art. 4 Cst. n'est recevable que contre des décisions
prises en dernière instance cantonale. Selon la jurisprudence constante,
la notion de moyen de droit cantonal est large; elle comprend non
seulement les voies de recours ordinaires et extraordinaires, mais,
d'une façon générale, "toutes les voies de droit qui sont ouvertes au
recourant lui-même afin de faire disparaître le préjudice juridique
allégué et qui sont de nature à obliger l'autorité saisie à statuer"
(ATF 94 I 459 consid. 2 p. 461 in fine; cf. ATF 110 Ia 136 consid. 2a,
90 I 201 consid. 1 p. 204 et les arrêts cités).

    Le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de se prononcer sur le moyen
soulevé par l'intimée. Dans un arrêt non publié en la cause D. c. dame
D. du 1er juin 1989, il a jugé que la possibilité - courante en matière
provisionnelle - de demander la modification de l'ordonnance de mesures
préprovisoires, selon l'art. 387 al. 4 LPC/GE, n'a pas pour effet,
comme le ferait une voie de droit, de faire contrôler la première
décision, mais bien d'adapter celle-ci aux circonstances nouvelles;
partant, les nouvelles mesures ainsi requises ne sauraient corriger
celles qui ont été rendues précédemment et constituer une voie qui
permet d'éliminer le préjudice allégué dans le recours de droit public
(consid. 1c; cf. KÄLIN, Das Verfahren der staatsrechtlichen Beschwerde,
p. 283 in fine et les références). Cet arrêt a toutefois laissé indécise
la question de savoir si les mesures provisoires prévues par l'art. 393
LPC/GE constituent un moyen de droit cantonal à l'encontre de l'ordonnance
de mesures préprovisoires. Il n'en serait ainsi "que dans l'éventualité
où le prononcé rendu en application de l'art. 393 LPC/GE annulerait la
première décision avec effet ex tunc"; or, le seul fait que le législateur
ait utilisé les termes de "se substituer à" ne signifie pas qu'il ait voulu
conférer un effet rétroactif aux mesures provisoires en cause (consid. 1d;
cf. ATF non publiés C. B. c. dame C. B. du 22 septembre 1992, consid. 3;
L. c. dame L. du 5 février 1990, consid. 1, dans lesquels la question
fut également réservée).

    b) L'art. 387 LPC/GE est le résultat d'une évolution législative,
qu'il convient de retracer.

    Lors de la révision des dispositions de la loi de procédure civile
relatives au divorce et à la séparation de corps, le législateur genevois
a procédé par étapes et réglé en premier lieu les mesures provisoires
(Mémorial des séances du Grand Conseil 1967 p. 116). La réforme devait
permettre au juge de prendre en cas d'urgence, dès le dépôt de la
citation en conciliation, sans enquêtes ni instruction préalable, mais
après avoir entendu les parties et examiné les pièces produites, des
mesures provisoires immédiatement exécutoires, sans être susceptibles
d'opposition ou d'appel (ibid. p. 117/118). Ces mesures, qualifiées de
"préprovisoires", ne privaient cependant pas les parties d'apporter, dans
la procédure sur mesures provisoires, "les éléments probatoires dont elle
disposent, pour permettre à leur juge de rendre une décision équitable et
correspondant à la situation réelle" (ibid. p. 118). Un nouvel art. 434A
a dès lors été adopté, en vertu duquel, s'il accorde l'autorisation de
citer, le président, à la demande d'un des conjoints et s'il y a urgence,
ordonne les mesures provisoires prévues à l'art. 145 CC, ou transmet la
demande au juge délégué, qui statuera également en chambre du conseil dans
le plus bref délai et en dernier ressort, après avoir entendu les parties
préalablement invitées à présenter toutes pièces utiles. Ce jugement
déploiera ses effets sous réserve de l'introduction de la demande au fond
et d'un nouveau jugement exécutoire éventuellement rendu en application
de l'art. 441 al. 1 LPC (ibid. p. 120/121 et 127). La jurisprudence a
toutefois précisé que le renvoi visait en réalité, non l'al. 1er, mais
bien l'al. 2, de la disposition précitée, selon lequel, si des mesures
d'urgence ont été ordonnées, le Tribunal, à la demande d'une des parties,
doit ordonner une instruction sur mesures provisoires (SJ 1972 p. 123).

    L'art. 434A a ensuite été modifié par l'art. 436, qui a profondément
remanié, "dans sa présentation", la norme abrogée. La portée de la décision
sur mesures préprovisoires a été "précisée", en ce sens que, si la cause
est introduite, cette décision "peut être remplacée par un jugement sur
mesures provisoires" (Mémorial 1975 p. 2255). Le nouveau texte a dès lors
prévu, à l'al. 2, que "chaque époux peut agir selon l'art. 441, al. 1, pour
requérir un jugement qui se substitue au précédent" (ibid. p. 2264). Cette
formulation est reprise telle quelle dans les versions successives de
la loi, c'est-à-dire l'art. 424 al. 3 (Mémorial 1981 p. 2491/2492), puis
l'actuel art. 387 al. 3 (Mémorial 1987 p. 1686/1687), lequel correspond
textuellement au précédent.

    c) L'expression de "se substituer à", qui figure à l'art. 387 al. 3
LPC/GE, a été clairement définie dans une décision rendue, certes, en
application des art. 434A et 441 aLPC/GE (cf. supra, let. b), mais qui
n'en dicte pas moins en l'espèce l'interprétation du texte actuel. La
Cour de justice y avait affirmé que, "le Tribunal, saisi à la première
audience utile après l'introduction du procès au fond de la demande
(...) d'ouverture d'une instruction sur mesures provisoires, avait le
droit et l'obligation d'examiner entièrement à nouveau la situation
des parties, sans qu'il ait été lié par les modalités de la décision
présidentielle, pouvant ainsi augmenter la pension fixée par le Président
ou au contraire la diminuer, ce qui impliquait nécessairement que le
nouveau jugement rétroagissait et remplaçait la décision présidentielle
sur mesures préprovisoires". Des faits nouveaux ne sont, a fortiori, pas
indispensables pour le nouveau jugement sur mesures provisoires (SJ 1972
p. 121 ss, spéc. 123 et note BARDE). Selon cette jurisprudence, le juge
appelé à statuer sur mesures provisoires (art. 145 CC), peut dès lors
modifier les mesures préprovisoires ordonnées par le Président, même en
l'absence de faits nouveaux; le jugement sur mesures provisoires remplace,
avec effet rétroactif, l'ordonnance de mesures préprovisoires. Les termes
consacrés par le législateur dès l'adoption de l'art. 436 aLPC/GE sont
idoines, et manifestent sa volonté de concrétiser un principe que la
jurisprudence avait déjà déduit d'un texte moins explicite (cf. supra,
let. b).

    En conclusion, la voie des mesures provisoires de l'art. 393 LPC/GE
ouvre au recourant la possibilité d'obtenir une décision de l'autorité
saisie, propre à supprimer le préjudice qui découle de l'ordonnance
d'urgence prise en vertu de l'art. 387 LPC/GE. Cette voie, l'intéressé
l'a du reste suivie, selon les déterminations de l'autorité cantonale. La
décision attaquée n'a donc pas été rendue en dernière instance cantonale;
le recours est dès lors irrecevable.