Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 119 V 171



119 V 171

25. Arrêt du 25 août 1993 dans la cause X contre Caisse cantonale
valaisanne de compensation et Tribunal des assurances du canton du
Valais Regeste

    Art. 7 Abs. 1 IVG, Art. 32 Abs. 1 lit. e des Übereinkommens Nr. 128
der Internationalen Arbeitsorganisation (IAO) und Art. 68 lit. f der
Europäischen Ordnung der Sozialen Sicherheit (EOSS): Leistungskürzung
infolge Grobfahrlässigkeit.

    Die Kürzungsregeln der beiden Abkommen sind direkt anwendbar und
setzen sich auch bei Anwendung von Art. 7 Abs. 1 IVG durch. Folglich
sind die bisherigen Leistungskürzungen bei Grobfahrlässigkeit durch den
Versicherten nicht mehr möglich (Änderung der Rechtsprechung).

Sachverhalt

    A.- X, né en 1933, marié, est atteint d'éthylisme chronique apparemment
contracté dans l'exercice de la profession de cafetier-restaurateur et
qui a entraîné une diminution de la capacité de travail significative à
partir de 1978 en tout cas.

    X a requis des prestations de l'assurance-invalidité en mars 1984. Se
fondant sur un prononcé de la commission de l'assurance-invalidité qui
avait fixé le taux d'invalidité à 50 pour cent, la Caisse cantonale
valaisanne de compensation lui a alloué, par décisions des 23 juillet
et 27 novembre 1985, une demi-rente simple, assortie de deux demi-rentes
complémentaires pour l'épouse et une fille, à partir du 1er juin 1984. La
rente de l'ayant droit fut toutefois réduite de 50 pour cent pour faute
grave, au motif que les troubles de santé à l'origine de l'invalidité
provenaient de l'éthylisme chronique.

    B.- Par la suite, le médecin traitant de l'assuré ayant attesté que son
patient était devenu abstinent, la commission de l'assurance-invalidité,
à l'issue d'une procédure de révision du droit à la rente, a maintenu le
taux d'invalidité de 50 pour cent, mais supprimé à dater du 1er septembre
1986 la réduction pour faute grave. En conséquence, par décision du 24
avril 1987, la caisse de compensation alloua à X une demi-rente simple
non réduite, dès le 1er septembre 1986.

    L'épouse de l'assuré ayant atteint l'âge de 62 ans le 26 mars 1988,
la caisse de compensation accorda une rente entière de couple à l'assuré,
à partir du 1er mars 1988.

    Le droit à la rente d'invalidité fut révisé et confirmé par un prononcé
du secrétariat de l'assurance-invalidité du 6 mars 1990.

    C.- Le 12 août 1991, l'assuré déclara par écrit, dans un document
intitulé "procuration", qu'il autorisait son médecin traitant "à
entreprendre les démarches nécessaires pour l'obtention d'une rente AI
complète". La commission de l'assurance-invalidité considéra ce document
comme une demande de révision du droit à la rente d'invalidité. A l'issue
de l'instruction de cette demande, constatant que l'état de santé de
l'assuré s'était aggravé parallèlement à une récidive de l'éthylisme
chronique, elle fixa le degré d'incapacité de gain à 74 pour cent à partir
du 1er avril 1992, mais réduisit la rente d'invalidité de 35 pour cent
pour faute grave.

    En conséquence, par décision du 19 février 1992, la caisse alloua à
l'assuré une demi-rente de couple réduite de 35 pour cent et à son épouse
une demi-rente de couple non réduite, dès le 1er avril 1992.

    D.- X a recouru contre cette décision en contestant toute réduction
de son droit à la rente. Par jugement du 8 juin 1992, le Tribunal des
assurances du canton du Valais a rejeté le recours.

    E.- X interjette un recours de droit administratif dans lequel il
conclut derechef à la reconnaissance de son droit à une rente d'invalidité
non réduite.

    La caisse de compensation conclut implicitement au rejet du recours. Au
terme de son préavis, l'Office fédéral des assurances sociales (OFAS)
déclare s'en remettre à justice.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Selon l'art. 33 LAI, ont droit à la rente d'invalidité pour
couple entière, notamment, les hommes invalides mariés dont l'épouse a
62 ans révolus. En d'autres termes, lorsque cette dernière condition est
remplie, il suffit que le mari puisse prétendre une rente d'invalidité -
peu importe qu'il s'agisse d'un quart de rente, d'une demi-rente ou d'une
rente entière (art. 28 al. 1 LAI) - pour avoir droit à une rente pour
couple entière (cf. aussi le tableau 2 annexé au message du Conseil
fédéral concernant la deuxième révision de l'AI, du 21 novembre 1984,
FF 1985 I 86 ou RCC 1985 p. 10).

    Par conséquent, contrairement à ce qu'il semble avoir cru lorsqu'il
chargea son médecin traitant d'entreprendre des démarches en vue d'obtenir
une rente "complète", le recourant ne pouvait toucher plus que la rente
de couple entière qu'il recevait déjà depuis le 1er mars 1988, même si,
par hypothèse, le degré de son invalidité avait augmenté. C'est pourquoi,
si la commission de l'assurance-invalidité s'était bornée à se prononcer
sur le taux d'invalidité de l'assuré, sans remettre en cause le droit
de ce dernier à une rente d'invalidité, la juridiction cantonale aurait
dû refuser d'entrer en matière sur un recours de l'assuré contre la
décision ultérieure de la caisse de compensation, faute d'intérêt digne de
protection du recourant (ATF 115 V 418 consid. 3b/aa, 106 V 92 consid. 1).

    Toutefois, dans le cas particulier, la commission de
l'assurance-invalidité n'a pas seulement fixé l'invalidité à un degré plus
élevé (74 pour cent au lieu de 50 pour cent) - ce qui en soi, on vient
de le voir, n'a aucune incidence sur la quotité de la rente - mais elle
a aussi réduit de 35 pour cent le droit propre du recourant sur la moitié
de la rente de couple qui lui est allouée (v. sur ce dernier point ATFA
1962 p. 106 consid. 4a; RCC 1990 pp. 309 ss consid. 4b). Ce dernier a,
dès lors, un intérêt digne de protection à recourir.

Erwägung 2

    2.- a) Selon l'art. 7 al. 1 LAI, les prestations en espèces peuvent
être refusées, réduites ou retirées, temporairement ou définitivement,
à l'assuré qui a intentionnellement ou par faute grave, ou en commettant
un crime ou un délit, causé ou aggravé son invalidité.

    Par cette disposition, l'on vise à empêcher que l'assurance-invalidité
ne soit par trop mise à contribution pour couvrir les dommages que
les intéressés auraient pu éviter en faisant preuve de la prudence
nécessaire. Ce but est atteint en privant l'assuré de l'intégralité ou
d'une partie des prestations, proportionnellement à la faute commise
(ATF 111 V 187 consid. 2a; RCC 1990 p. 308 consid. 2a).

    b) Dans les cas d'abus d'alcool, il y a faute grave lorsque l'assuré
était en mesure de comprendre à temps, en disposant d'une instruction
moyenne et en faisant preuve de la prudence qu'on pouvait attendre de lui,
que l'abus de boissons alcooliques des années durant risquait de porter
une atteinte grave à sa santé, et qu'il aurait été capable de s'abstenir,
en conséquence, de tels abus (ATF 111 V 189 consid. 2c; RCC 1990 p. 308
consid. 2b).

    Le fait de causer ou d'aggraver son invalidité par sa propre faute
n'entraîne pas, en principe, la suppression totale des prestations en
espèces, mais seulement une réduction appropriée de celles-ci. Le taux de
réduction est déterminé uniquement d'après la faute commise par l'assuré
(ATF 111 V 196 consid. 5a, 104 V 2 consid. 2b, 97 V 229 consid. 1b;
voir aussi ATF 106 V 23 consid. 1a et les arrêts cités).

    En pratique, on considère comme justifiée une réduction de 50 pour cent
au plus lorsque l'invalidité a été causée uniquement par l'alcoolisme et
que l'assuré en est entièrement responsable. Si ce dernier présente encore
une autre atteinte à la santé qui a contribué à provoquer l'invalidité,
il faut examiner les relations des divers facteurs ayant entraîné celle-ci;
on tiendra alors compte de l'alcoolisme, en tant que facteur de causalité,
pour fixer la quotité de la réduction (ATF 111 V 196 consid. 5a; RCC 1990
p. 308 consid. 2b; ECHENARD, Les risques exclus de l'AVS/AI, in: IRAL,
Colloque de Lausanne 1989, Risques totalement ou partiellement exclus de
l'assurance sociale [y compris la prévoyance professionnelle], p. 11).

Erwägung 3

    3.- a) Aux termes de l'art. 32 § 1 let. e de la Convention OIT no 128
concernant les prestations d'invalidité, de vieillesse et de survivants
du 29 juin 1967, en vigueur pour la Suisse depuis le 13 septembre 1978
(RO 1978 II 1493) et de l'art. 68 let. f du Code européen de sécurité
sociale (CESS) du 16 avril 1964, en vigueur pour notre pays depuis
le 17 septembre 1978 (RO 1978 II 1518), les prestations d'assurances
sociales auxquelles une personne aurait droit peuvent être "suspendues",
c'est-à-dire refusées, réduites ou retirées, lorsque l'éventualité a été
provoquée "par une faute grave et intentionnelle", selon la Convention
no 128, ou "par une faute intentionnelle de l'intéressé", selon le CESS.

    Ces normes internationales visent notamment les prestations d'assurance
selon la LAI (partie II de la Convention OIT no 128 et partie IX CESS;
cf. RAMA 1989 no U 63 p. 56, consid. 4c non publié dans ATF 114 V 315).

    b) Dans l'arrêt Courtet du 23 octobre 1985 (ATF 111 V 201), le Tribunal
fédéral des assurances a jugé, contre l'avis de la doctrine dominante
(VILLARS, Le Code européen de sécurité sociale et le Protocole additionnel,
1979, p. 16; BERENSTEIN, La Suisse et le développement international de
la sécurité sociale, SZS 1981 p. 186; GREBER, Droit suisse de la sécurité
sociale, 1982, p. 228), que ces dispositions conventionnelles ne sont
pas directement applicables ("self-executing"); elles ne font donc pas
obstacle à une réduction d'une rente d'invalidité en raison d'une faute
grave non intentionnelle commise par l'assuré.

    Le recourant, ainsi qu'il l'avait déjà fait en première instance,
conteste le bien-fondé de cette jurisprudence. Il fait valoir qu'elle
a été condamnée par la doctrine unanime, ce qui lui paraît une raison
suffisante pour l'abandonner.

    c) L'arrêt Courtet a suscité, en effet, de nombreux commentaires et
critiques en doctrine.

    Le premier auteur à s'être exprimé à son sujet semble avoir été le
professeur MAURER. Dans un article paru dans la Neue Zürcher Zeitung
le 2 juillet 1986, l'auteur - qui avait déjà antérieurement exprimé
des réserves au sujet de la jurisprudence en matière de réduction des
rentes d'invalidité pour faute grave, notamment dans les cas d'alcoolisme
(Fragwürdige Kürzungen der Invalidenrenten wegen grober Fahrlässigkeit,
SZS 1984 pp. 65 ss, spéc. p. 87) - préconise des directives de l'autorité
fédérale de surveillance afin, écrit-il, d'éviter à la Suisse de violer
plus longtemps ses engagements internationaux (voir aussi, du même
auteur, Schweizerisches Unfallversicherungsrecht, Ergänzungsband, p. 65
et Bundessozialversicherungsrecht, 1993, p. 21; le commentaire précité
dans la NZZ est assez longuement évoqué par FISCHLI dans sa chronique
annuelle de jurisprudence, in: RJB 123 [1987] pp. 576 ss).

    Un autre commentaire consacré à cet arrêt s'inquiète aussi du
refus par le Tribunal fédéral des assurances d'appliquer les normes
de droit international, qui, de l'avis de son auteur, rend illusoires
les engagements pris par la Suisse en ce domaine (DESPLAND, Droit des
assurances sociales et conventions internationales: A propos d'un arrêt
du Tribunal fédéral des assurances, Journal de la Fédération suisse des
employés d'assurances sociales [FEAS] no 3/1986 pp. 4 ss).

    Dans un article intitulé "L'applicabilité directe des traités
internationaux en Suisse: histoire d'un détour inutile" (ASDI, vol. XLV
[1989] pp. 129 ss), JACOT-GUILLARMOD, après avoir résumé l'argumentation
du Tribunal fédéral des assurances, qualifie celle-ci d'"inquiétante",
parce "qu'elle s'écarte délibérément d'un texte clair au profit de
considérations politico-juridiques"; à cet égard, il estime que le
tribunal a accordé trop de poids au préavis de l'OFAS "qui était, en
l'espèce, juge et partie, puisqu'il avait participé aux négociations"
(loc.cit., p. 139). Dans une autre étude (Strasbourg, Luxembourg, Lausanne
et Lucerne: méthodes d'interprétation comparées de la règle internationale
conventionnelle, in: Les règles d'interprétation. Principes communément
admis par les juridictions, Fribourg 1989, pp. 109 ss), ce même auteur
reproche à nouveau au tribunal, à la lumière cette fois des principes
d'interprétation consacrés par la Convention de Vienne, d'avoir donné
la préférence à la règle de droit interne, quand bien même la règle
internationale remplissait en l'occurrence toutes les conditions de
l'applicabilité directe (loc.cit., pp. 112 ss).

    Plusieurs autres auteurs se sont exprimés dans un sens analogue ou se
sont joints à ces critiques (SPIRA, L'application du droit international de
la sécurité sociale par le juge, in: Mélanges Berenstein, Lausanne 1989,
pp. 475 ss; GREBER, Le principe de la légalité considéré en droit suisse
de la sécurité sociale, in: Le droit des assurances sociales en mutation,
Mélanges pour le 75e anniversaire du TFA, pp. 273 ss, à partir du no
53; BERENSTEIN, Le droit international de la sécurité sociale dans la
jurisprudence du Tribunal fédéral des assurances, étude également publiée
dans les Mélanges pour le 75e anniversaire du TFA, pp. 13 ss; MEYER-BLASER,
Die Bedeutung von Art. 4 BV für das Sozialversicherungsrecht, RDS 1992
[111] II 446; CATTANEO, Les mesures préventives et de réadaptation de
l'assurance-chômage, thèse Genève, 1992, pp. 143 s.; DUC, Droit social
européen. Quelques aspects, in: L'espace social européen. Colloque
de Lausanne 1992, IRAL, 1993, p. 24; AGIER, La réduction des rentes
d'invalidité ... des toxicomanes, SZS 1988 pp. 122 ss; voir aussi les
remarques de SCARTAZZINI, in: Les rapports de causalité dans le droit
suisse de la sécurité sociale, thèse Genève, 1991, p. 252 s.).

Erwägung 4

    4.- a) L'arrêt Courtet ne met pas en cause la jurisprudence constante
du Tribunal fédéral des assurances qui donne au droit international
conventionnel de la sécurité sociale la primauté sur le droit national
(consid. 2b, p. 202; voir également, dans la jurisprudence récente: ATF
118 V 79, 117 V 268, 115 V 16; dans le même sens: J.-F. AUBERT, Un droit
social encadré, RDS 1991 [110] I 162 no 18; GREBER, Sécurité sociale, in:
Le droit suisse et le droit communautaire: convergences et divergences,
Zurich 1990, pp. 630 ss).

    Au demeurant, sur un plan plus général, le principe de la primauté du
droit international n'est plus guère contesté aujourd'hui, en particulier
s'agissant de l'application des art. 113 al. 3 et 114bis al. 3 Cst. (ATF
118 Ib 281 consid. 3b, 117 Ib 372 consid. 2e et les références; Publication
commune de l'Office fédéral de la justice et de la Direction du droit
international public, du 26 avril 1989, intitulée "Rapports entre le droit
international et le droit interne au sein de l'ordre juridique suisse",
JAAC 53/IV [1989] no 54 p. 460 ad § 13b; KRAFT, Quelques observations sur
l'attitude de la Suisse à l'égard du droit international, in: Mélanges
Grossen, pp. 429 ss, spéc. p. 433; voir également les art. 26 et 27 de la
Convention de Vienne sur le droit des traités, du 23 mai 1969, entrée en
vigueur pour la Suisse le 6 juin 1990 [RS 0.111; RO 1990 1112]; contra,
mais très minoritaire: SEILER, Das völkerrechtswidrige Bundesgesetz;
Artikel 113 Absatz 3 BV im Verhältnis zu Völkerrecht, EG und EWR, RSJ 1992,
pp. 377 ss).

    Certains auteurs ont d'autre part vu dans l'arrêt Courtet une
confirmation de l'arrêt Schubert (ATF 99 Ib 39 plus spéc. p. 44 consid. 4),
selon lequel une exception à la prééminence du droit international doit
être admise lorsque le législateur, en toute connaissance de cause, a voulu
s'écarter de la norme internationale en édictant une norme qui la viole
(exception rappelée récemment dans l'arrêt ATF 118 Ib 281 consid. 3b). Mais
l'opinion de ces auteurs (par ex.: CAFLISCH, ASDI 1986 p. 43; ZIMMERMANN,
Le contrôle préjudiciel en droit fédéral et dans les cantons suisses,
thèse Genève, 1987, p. 102) n'est pas justifiée, le tribunal ayant
expressément admis (p. 204) qu'en l'occurrence - et contrairement à la
situation examinée dans l'arrêt Schubert - on ne pouvait déduire des
travaux préparatoires une volonté délibérée du législateur d'accorder la
préférence au droit national en dépit des engagements internationaux de
la Suisse.

    b) Cela étant, pour autant qu'elles apparaissent directement
applicables, les règles conventionnelles sont susceptibles d'imposer des
obligations et de conférer des droits non seulement aux autorités, mais
également aux particuliers. Cela implique qu'elles soient suffisamment
précises et claires pour constituer le fondement d'une décision
concrète. Inversement, l'applicabilité directe doit être déniée aux normes
qui se bornent à esquisser la réglementation d'une matière ou aménagent
un pouvoir d'appréciation considérable; de telles normes s'adressent en
priorité au législateur national (ATF 118 Ia 117, 116 Ib 303, 112 Ib 184 et
la doctrine citée; KÄLIN, Das Verfahren der staatsrechtlichen Beschwerde,
pp. 119 sv.; JACOT-GUILLARMOD, L'applicabilité directe ..., pp. 132 ss;
DUPUY, Droit international public, Précis Dalloz, Paris 1992, pp. 297 ss).

    En l'espèce, la Convention OIT no 128 et le CESS contiennent tout à
la fois des dispositions qui fixent des lignes directrices en matière de
sécurité sociale et des règles à caractère "self-executing" (Berenstein,
Le droit international de la sécurité sociale ..., p. 17). Presque tous
les auteurs suisses qui se sont exprimés à ce sujet - en particulier ceux
qui ont commenté l'arrêt Courtet - soutiennent que parmi cette seconde
catégorie de dispositions figurent les art. 32 § 1 let. e de la Convention
OIT no 128 et 68 let. f CESS (par exemple: BERENSTEIN, ibidem; GREBER, Le
principe de la légalité ..., p. 274, no 55; SPIRA, loc.cit., p. 475). Leur
opinion emporte la conviction: selon les règles conventionnelles, une
faute grave non intentionnelle ne permet pas la "suspension" (et donc,
en particulier, une réduction) des prestations d'assurance. Ces règles
n'exigent pas l'adoption par le législateur national de normes plus
précises d'exécution; elles peuvent au contraire s'appliquer comme telles
et constituer le fondement d'une décision concrète.

    En conséquence, la jurisprudence critiquée ne peut pas être
maintenue. Les normes de droit international sont en l'occurrence
directement applicables. Elles l'emportent sur l'art. 7 al. 1 LAI, dans
la mesure où cette norme du droit fédéral permet, notamment, la réduction
de prestations pour une faute grave commise par négligence.

    c) Au demeurant, dans l'arrêt Courtet, le tribunal n'a pas considéré
que lesdites normes conventionnelles étaient imprécises ou peu claires. Il
a tiré argument, pour l'essentiel, du fait que le législateur fédéral -
non qu'il eût sciemment refusé de respecter les obligations internationales
de la Suisse (cf. supra let. a) - avait maintenu, dans la nouvelle LAA,
le principe d'une réduction des prestations (en espèces seulement) en
cas d'accident provoqué par une négligence grave (art. 37 al. 2 LAA) et
que, par ailleurs, il n'avait pas prévu de modifier l'art. 7 al. 1 LAI à
l'occasion de la deuxième révision de l'AI alors en cours (les dispositions
de la loi révisée sont entrées en vigueur, pour la plupart d'entre elles,
le 1er janvier 1988); le tribunal a accordé aussi un poids tout particulier
au fait que la réduction pour faute grave non intentionnelle était un
principe profondément ancré dans le droit fédéral des assurances sociales.

    Mais cette motivation a perdu de sa justification. Le projet de loi
sur la partie générale du droit des assurances sociales, adopté par le
Conseil des Etats au cours de sa session d'automne 1991 (BO 1991 CdE II
773 ss), prévoit de limiter le refus ou la réduction des prestations aux
cas où la réalisation du risque est provoquée intentionnellement ou par
un comportement délictueux (art. 27; FF 1991 II 188), pour tenir compte,
justement, des règles du droit conventionnel (FF 1991 II 250). Pour la
même raison, la nouvelle loi sur l'assurance militaire du 19 juin 1992
(FF 1992 III 880 ss), qui entrera prochainement en vigueur, contient une
semblable limitation à son art. 65 (voir le message du Conseil fédéral,
FF 1990 III 236 s.).

    d) Quant aux conséquences du présent changement de jurisprudence
dans d'autres régimes d'assurance sociale, elles n'ont pas à être
examinées ici. Il convient, bien plutôt, d'en réserver l'examen de
cas en cas. Pour le moment, l'on se contentera de rappeler, en ce qui
concerne l'assurance-accidents, que cette nouvelle jurisprudence ne fait
pas obstacle à une réduction des prestations pour négligence grave en cas
d'accident non professionnel. En effet, les normes de droit international
applicables en matière d'assurance-accidents visent uniquement les
accidents du travail et ne s'appliquent donc pas aux accidents non
professionnels (art. 31 de la convention OIT no 102 et art. 31 CESS;
ATF 118 V 309 consid. 4).

Erwägung 5

    5.- Admettant, sur le vu de la restriction apportée par les deux
règles du droit international à considérer, que seule une faute grave et
intentionnelle permet de réduire la part de la rente de couple revenant au
recourant, en application de l'art. 7 al. 1 LAI, il convient de se demander
maintenant si cette double condition est remplie dans le cas particulier.

    L'évolution qui a conduit le recourant à devenir un alcoolique
chronique est retracée dans un rapport d'expertise du professeur A., du 2
décembre 1991. Il s'agit d'un cas classique de ce que l'expert lui-même
qualifie d'"alcoolisme professionnel" chez un cafetier qui a débuté
dans cette activité professionnelle en 1970 et a dû changer d'occupation
lucrative à partir de 1980. Aucun élément du dossier ne permet de conclure
à l'existence, chez le recourant, d'une volonté délibérée et consciente
(SCHAER, Das Verschulden als Zurechnungskriterium, in: SCHAER/DUC/KELLER,
La faute au fil de l'évolution du droit de l'assurance privée, sociale
et de la responsabilité civile, Bâle 1992, pp. 23 ss) de s'adonner à
l'alcool dans une mesure propre à provoquer un état maladif d'une telle
gravité. On peut d'ailleurs se demander si, dans les cas d'alcoolisme ou de
tabagisme chronique, il est possible de réaliser l'état de fait de la faute
intentionnelle. Jusqu'à présent en tout cas, la jurisprudence a toujours
considéré les cas de réduction des prestations pour abus d'alcool ou de
nicotine sous l'angle, uniquement, de la négligence grave (voir par ex. ATF
111 V 189 consid. 2c, 104 V 1 consid. 2a, 98 V 31 consid. 1, 97 V 229
consid. 1b; cf. aussi MAURER, Fragwürdige Kürzungen ..., pp. 74 ss, ainsi
que SCHÖN, Juristische Aspekte der Kürzung von Krankenkassenleistungen bei
Grobfahrlässigkeit, Zeitschrift für öffentliche Fürsorge 1990 pp. 173 ss).

    Quoi qu'il en soit, s'il faut admettre que le comportement du
recourant, considéré dans son ensemble, procède d'une faute grave, en
raison de la durée de la consommation abusive d'alcool et de l'échec -
attesté par le dossier - de tous les traitements de désintoxication,
en revanche, cette faute ne peut être considérée comme intentionnelle,
même par dol éventuel. Au reste, il est certain, sur le vu du dossier,
que l'état psychique du recourant s'est fortement dégradé au cours des
dernières années et qu'il n'était, très probablement, plus capable de
discernement, en ce qui concerne ses habitudes alcooliques, lors des
récidives les plus récentes.

Erwägung 6

    6.- En conclusion, il n'y a pas lieu de réduire la moitié de la rente
de couple allouée au recourant. Il convient, par conséquent, d'annuler
le jugement attaqué et de réformer la décision administrative litigieuse
en ce sens que X a droit à la moitié d'une rente de couple non réduite.