Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 119 IV 238



119 IV 238

45. Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation pénale du 26 août 1993 dans
la cause C. c. Ministère public du canton de Vaud (pourvoi en nullité)
Regeste

    Art. 292 StGB; Ungehorsam gegen eine amtliche Verfügung; Vorsatz.

    Gegen diese Bestimmung verstösst nur, wer vorsätzlich handelt, d.h. die
Tat im Wissen um die amtliche Anordnung und die strafrechtlichen Folgen
begeht. Die blosse rechtsgenügliche Eröffnung der Verfügung genügt nicht,
wenn der Betroffene deren Inhalt nicht kannte (E. 2).

Sachverhalt

    A.- Par lettre recommandée du 17 juin 1991, l'Office des poursuites
de Lausanne-Est a sommé l'avocat C. de présenter sa comptabilité pour le
début de l'année 1991, sous la menace des peines prévues par l'art. 292
CP. Cette injonction est demeurée vaine.

    B.- Traduit en jugement sous l'accusation d'insoumission à une décision
de l'autorité (art. 292 CP), C. affirma qu'il n'avait pas pris connaissance
de l'avis recommandé en raison de ses voyages professionnels.

    Observant qu'il s'était engagé, le 29 avril 1991 déjà, à fournir
les pièces demandées et considérant qu'il ne pouvait ignorer, vu sa
profession, les conséquences de sa carence, le Tribunal de police
du district de Lausanne, par jugement du 11 février 1993, l'a reconnu
coupable d'insoumission à une décision de l'autorité et l'a condamné à
la peine de quatre jours d'arrêts avec sursis pendant un an, mettant à
sa charge les frais de la procédure.

    Par arrêt du 3 mars 1993, la Cour de cassation cantonale a rejeté,
avec suite de frais, le recours formé par le condamné. Sur l'affirmation
de celui-ci selon laquelle il n'avait pas pris connaissance de l'avis
comminatoire, la cour cantonale a émis le considérant suivant: "peu
importe que le recourant n'ait pas pris ou voulu prendre connaissance de
son courrier. (...) En toute hypothèse, un administré ne saurait faire
échec à l'application de l'art. 292 CP en s'abstenant volontairement de
prendre connaissance des décisions qui lui sont adressées valablement".

    C.- Contre cet arrêt, C. s'est pourvu en nullité à la Cour de cassation
pénale du Tribunal fédéral. Soutenant qu'il ne pouvait être condamné en
application de l'art. 292 CP dès lors qu'il n'avait pas eu connaissance de
l'injonction comminatoire, il conclut, avec suite de dépens, à l'annulation
de l'arrêt attaqué et sollicite par ailleurs l'assistance judiciaire.

    D.- La cour cantonale a renoncé à formuler des observations.

    Se référant aux considérants de l'arrêt attaqué, le Ministère public
a conclu au rejet du recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                  Extrait des considérants:

Erwägung 2

    2.- a) Selon l'art. 292 CP, "celui qui ne se sera pas conformé à une
décision à lui signifiée, sous la menace de la peine prévue au présent
article, par une autorité ou un fonctionnaire compétents sera puni des
arrêts ou de l'amende".

    Pour que l'infraction soit réalisée, il faut que l'insoumission soit
intentionnelle (ATF 78 IV 239; STRATENWERTH, Bes. Teil II, 3e éd., p. 291
no 10; TRECHSEL, Kurzkommentar StGB, art. 292 no 9; HAUSER/REHBERG,
Strafrecht IV p. 282). L'intention suppose la connaissance de
l'injonction, de sa validité et des conséquences pénales de l'insoumission
(HAUSER/REHBERG, op.cit., p. 282). Le dol éventuel suffit (STRATENWERTH,
op.cit., p. 291 s. no 10).

    b) En l'espèce, la cour cantonale n'a nullement exclu que le recourant
ait omis de prendre connaissance de l'injonction comminatoire et qu'il
ait ignoré encourir les peines de l'art. 292 CP s'il ne remettait pas
sa comptabilité. Elle a considéré que ces points de fait étaient sans
pertinence et qu'il appartenait au recourant de prendre connaissance du
courrier reçu à l'adresse qu'il avait lui-même indiquée.

    A l'appui de sa conception juridique, la cour cantonale s'est référée
à HAUSER/REHBERG et à TRECHSEL.

    En ce qui concerne HAUSER/REHBERG, il est vrai que ces auteurs
affirment, dans un passage qui semble plutôt viser la validité de
l'injonction du point de vue du droit administratif, qu'elle doit être
reçue, mais qu'il n'est pas nécessaire que le destinataire en prenne
connaissance (HAUSER/REHBERG, op.cit., p. 281). Ils se réfèrent cependant,
à l'appui de cette affirmation, d'une part à IMBODEN/RHINOW et d'autre part
à un arrêt cantonal. L'arrêt cantonal se rapporte à l'art. 291 CP (rupture
de ban), qui ne contient pas la formule "à lui signifiée" et qui n'est
donc guère transposable ici; de toute manière, il ressort de cet arrêt que
l'intéressé avait connaissance de la décision prise à son encontre (SJZ 55
(1959) 312). Quant à IMBODEN/RHINOW, ces auteurs affirment, au contraire
de la cour cantonale, que celui qui ne va pas chercher le pli à la poste
n'est pas punissable, l'intention délictueuse supposant la conscience et
la volonté de transgresser l'injonction comminatoire (IMBODEN/ RHINOW,
Schweizerische Verwaltungsrechtsprechung, 5e éd., I no 51 p. 306).

    On ne saurait d'ailleurs admettre que HAUSER/REHBERG soutiennent la
thèse de la cour cantonale. En effet, ces auteurs, lorsqu'ils traitent
de l'intention requise par l'art. 292 CP, indiquent très clairement
qu'elle suppose la connaissance de l'injonction et de la punissabilité
de l'insoumission (HAUSER/REHBERG, op.cit., p. 282).

    Pour ce qui est de TRECHSEL, également cité par la cour cantonale,
il traite de la question à la note 9 et considère, en ce qui concerne
l'intention, que l'auteur n'est pas punissable s'il n'a pas eu connaissance
de l'injonction comminatoire, même s'il a refusé de recevoir le pli et
s'il est réputé l'avoir reçu selon les règles de procédure (TRECHSEL,
op.cit., art. 292 no 9).

    Les auteurs cités par la cour cantonale à l'appui de sa thèse ne se
prononcent donc pas dans le même sens qu'elle.

    c) L'art. 292 CP réprime pénalement l'insoumission à une décision d'une
autorité. Il résulte clairement des mots "une décision à lui signifiée,
sous la menace de la peine prévue au présent article" que le législateur
a attaché une importance décisive au fait que l'intéressé soit avisé
des conséquences pénales d'un refus d'obtempérer. La jurisprudence
a insisté sur la précision que doit avoir la menace (ATF 105 IV 249
s.). L'infraction, qui est intentionnelle, consiste à passer outre à
une telle injonction comminatoire; elle suppose donc que l'auteur ait
été prévenu des conséquences pénales d'une insubordination. Celui qui,
pour quelque motif que ce soit, n'a pas connaissance de l'injonction
ou des conséquences pénales d'une insubordination ne peut pas réaliser
l'intention délictueuse requise par l'art. 292 CP, la question du dol
éventuel étant réservée.

    La doctrine et la jurisprudence cantonale publiée se sont d'ailleurs
également prononcées dans ce sens (TRECHSEL, op.cit., art. 292 no 9;
HAUSER/REHBERG, op.cit., p. 282; IMBODEN/RHINOW, op.cit., p. 306; SJZ 64
(1968) 226).

    d) En l'espèce, la cour cantonale n'a pas constaté en fait que le
recourant savait, à partir d'un certain moment, qu'il encourait les peines
de l'art. 292 CP en cas d'insubordination, ou qu'il ait accepté cette
éventualité. L'état de fait retenu ne permet donc pas de constater une
infraction à l'art. 292 CP. En suivant strictement la théorie procédurale
de la réception, la cour cantonale est partie d'une fausse conception de
l'intention délictueuse requise par l'art. 292 CP, et son arrêt, violant
le droit fédéral, doit donc être annulé.