Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 119 IA 21



119 Ia 21

5. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit public du 15 janvier 1993
dans la cause G. contre Syndicat d'améliorations foncières de Lignerolle
et Commission centrale en matière d'améliorations foncières du canton de
Vaud (recours de droit public) Regeste

    Güterzusammenlegung.

    1. Prinzip des vollen Realersatzes - oder Äquivalenzprinzip -
als aus der Eigentumsgarantie fliessender Grundsatz (E. 1a). Nach
dem Gleichbehandlungsgebot müssen die Vor- und die Nachteile der
Güterzusammenlegung angemessen auf die beteiligten Grundeigentümer
verlegt werden (E. 1b). Stellt das Bundesgericht fest, dass sich
ein Grundeigentümer nach der Neuzuteilung in einer zwar nicht völlig
unhaltbaren, aber doch klar unbefriedigenden Lage befindet, weil die
kantonalen Instanzen wesentliche Gesichtspunkte ausser acht gelassen oder
nicht alle zur Verfügung stehenden technischen Mittel zur Verbesserung
dieser Situation ergriffen haben, wird der angefochtene Entscheid wegen
Rechtsverweigerung aufgehoben (E. 1c).

    2. Werden im Güterzusammenlegungsverfahren zwei landwirtschaftliche
Gewerbe aufgrund eines zwischen den Eigentümern geschlossenen
Pachtvertrages als ein einziges behandelt, ohne der Möglichkeit einer
Auflösung des Pachtverhältnisses Rechnung zu tragen, so liegt hierin eine
formelle Rechtsverweigerung (E. 2dd).

Sachverhalt

    A.- Le Conseil d'Etat du canton de Vaud a ordonné la création d'un
syndicat d'améliorations foncières sur le territoire de la commune de
Lignerolle en corrélation avec la construction de la route nationale N9. Le
périmètre général de ce syndicat d'améliorations foncières d'autoroute no
45 (ci-après: le syndicat), défini d'abord en fonction de l'entreprise de
grands travaux, puis étendu, à l'initiative de propriétaires intéressés,
au village de Lignerolle et à la presque totalité des terres agricoles de
la commune situées aux alentours, a été mis à l'enquête publique en 1980
et en 1981; une enquête publique portant sur l'avant-projet des travaux
collectifs et les taxes-types pour l'estimation des terres a eu lieu du
12 au 23 décembre 1983 (cf. art. 63 de la loi vaudoise du 29 novembre
1961 sur les améliorations foncières - LAF). Les organes du syndicat ont
ensuite préparé un projet de nouvel état, comprenant une estimation des
terres et des valeurs passagères, une répartition des nouveaux biens-fonds,
une adaptation des servitudes et un tableau des soultes. Ce projet a été
mis à l'enquête publique du 5 au 30 octobre 1987.

    Charles G. est propriétaire d'un domaine agricole à Lignerolle. Selon
le tableau de l'ancien état de propriété, ses terrains compris dans
le périmètre général du remaniement représentent une surface totale de
119'466 m2, pour une valeur d'estimation de Fr. 237'724.50. Le centre de
l'exploitation se trouve sur la parcelle no 153 de l'ancien état (AE),
qui est située à l'extrémité ouest du village, en bordure de la route
cantonale. Le domaine est encore constitué de sept autres parcelles, dont
en particulier un bien-fonds de 19'461 m2, à 200 m au nord de la ferme
(parcelle no 331 AE, au lieu-dit "Fin-Derrière"), et d'autres terrains,
situés à l'est et au sud-est du village.

    Selon le projet de nouvel état mis à l'enquête publique, Charles
G. devait conserver la parcelle de sa ferme (no 12.05 nouvel état - NE);
par ailleurs, d'une façon générale, le reste de ses prétentions était
groupé dans une parcelle no 12.01 NE, à la limite est du territoire
communal. Charles G. a formé plusieurs réclamations contre ce projet,
en se plaignant en substance du mauvais regroupement et du plus grand
éloignement des terrains par rapport à la ferme, à laquelle il n'était en
outre pas assuré un dégagement suffisant. La commission de classification
du syndicat, chargée de statuer sur les réclamations (cf. art. 33 al. 3
LAF), a modifié partiellement son projet et a rendu le 17 août 1988 une
décision, aux termes de laquelle le nouvel état de propriété de Charles
G. se résume de la façon suivante:

    Parcelle no 12.01 Vy-de-Valeyre       79'302 m2      Fr. 158'178.50

    Parcelle no 12.02 Les Binses          21'128 m2      Fr.  36'774.40

    Parcelle no 12.03 Au Fochau (bois)     1'812 m2      Fr.     362.40

    Parcelle no 12.05 Au Fochau (ferme)   12'054 m2      Fr.  49'474.20

    Total sous-périmètre à bâtir           5'949 m2      Fr.  39'263.40

    Total sous-périmètre agricole        106'535 m2      Fr. 205'173.70

    Total sous-périmètre forestier         1'812 m2      Fr.     362.40

    Total nouvel état                    114'296 m2      Fr. 244'789.50

    Par rapport au projet mis à l'enquête, cette répartition agrandit de
6'105 m2 la parcelle de la ferme (no 12.05 NE); plus aucune parcelle au
nord du village n'est en revanche attribuée à Charles G.

    Charles G. a déféré la décision de la commission de classification à la
Commission centrale en matière d'améliorations foncières du canton de Vaud
(ci-après: la commission cantonale), qui a rejeté son recours par prononcé
rendu le 4 juillet 1990. Elle a considéré que le compte de Charles G. était
équilibré, tant en surface qu'en valeur, et que tous ses terrains étaient
en moyenne de bonne qualité. Elle a examiné une possibilité de modifier
la configuration de la parcelle no 12.05 NE, en contrebas de la ferme,
en empiétant sur la parcelle no 37.01 NE attribuée à un tiers, P.; elle
a toutefois renoncé à cette solution, préjudiciable à l'exploitation de
P. Elle a aussi retenu que les organes du syndicat avaient pris en compte
le fait que le domaine de Charles G. était affermé à son neveu Louis G. Ce
dernier a obtenu en particulier, dans le nouvel état, une parcelle no
13.05, de 20'592 m2 - qui fait face, de l'autre côté de la route cantonale,
à la parcelle no 12.05 NE de son oncle - ainsi qu'un terrain de 8 ha (no
13.01 NE) adjacent à la parcelle no 12.01 NE de son oncle. La commission
cantonale a encore considéré que l'augmentation de la distance entre la
ferme et les parcelles du nouvel état, élément non négligeable en soi
(en moyenne, elle passait de 1'043 m [AE] à 1'303 m [NE]), revêtait en
l'espèce une importance moindre, dès lors que Charles G. n'exploitait pas
personnellement ses terres; elle a néanmoins expliqué que cet élément
serait pris en considération par le syndicat ultérieurement, au moment
de calculer la participation du propriétaire aux frais d'exécution des
travaux collectifs (cf. art. 44 et 63 let. f LAF).

    Contre la décision de la commission cantonale, Charles G. a formé un
recours de droit public au Tribunal fédéral, se plaignant de violations
des principes de l'équivalence, applicable aux remaniements parcellaires,
et de l'égalité de traitement. Le Tribunal fédéral a admis partiellement
le recours au sens des considérants.

Auszug aus den Erwägungen:

                  Extrait des considérants:

Erwägung 1

    1.- Le recourant se plaint d'une violation des principes à respecter
dans une procédure de remaniement parcellaire, soit les principes de
l'équivalence et de l'égalité de traitement, et il invoque les art. 4 et
22ter Cst.

    a) La jurisprudence a dégagé de la garantie de la propriété le principe
de la compensation réelle - ou de l'équivalence - qui régit la confection
du nouvel état de propriété dans les remaniements parcellaires. Selon
ce principe, les propriétaires intéressés à une telle entreprise ont une
prétention à recevoir dans la nouvelle répartition des terrains équivalant,
en quantité et en qualité, à ceux qu'ils ont cédés, pour autant,
naturellement, que le but du remaniement et les nécessités techniques
le permettent (ATF 100 Ia 227 consid. 3a, 99 Ia 495 consid. 3, 95 I
372 consid. 4 et les arrêts cités; cf. RENÉ A. RHINOW, BEAT KRÄHENMANN,
Schweizerische Verwaltungsrechtsprechung, Ergänzungsband, Bâle/Francfort
1990, Nr. 125/III p. 382; FULVIO ANTOGNINI, Le respect de la garantie
de la propriété dans les remaniements parcellaires, ZBl 72/1971, p. 3
ss). S'agissant d'un remaniement agricole qui touche aux bases mêmes de
l'existence d'une exploitation, l'autorité doit tenir compte non seulement
de l'emplacement des terres, de leur nature et de leur qualité, mais
aussi de l'organisation de l'entreprise et de ses particularités (ATF
95 I 524 consid. 4). Les autorités chargées de la confection du nouvel
état doivent rechercher toutes les solutions objectivement concevables
pour résoudre les difficultés techniques susceptibles de compromettre
la mise en oeuvre du principe de la compensation réelle. Ce n'est que
lorsqu'elles se heurtent à des difficultés insurmontables dans un cas
particulier qu'il y a lieu de résoudre le problème par le versement d'une
indemnité en argent, qui doit être calculée non pas à la valeur d'échange
adoptée pour la réalisation de l'ouvrage, mais à la valeur vénale car
on se trouve en présence d'une restriction à la propriété équivalant à
une expropriation (art. 22ter al. 3 Cst.; cf. ATF 116 Ia 109 consid. 2,
105 Ia 327 consid. 2d et les arrêts cités).

    En droit vaudois, l'art. 55 al. 1 LAF met en oeuvre ces exigences
constitutionnelles pour les remaniements parcellaires agricoles. Cette
disposition pose en effet les principes suivants:

    "a) Chaque propriétaire doit recevoir, autant que possible, en échange
   des biens-fonds qu'il doit abandonner, des terrains de même nature
   et de même valeur. Si un propriétaire ne reçoit pas l'équivalent du
   terrain cédé, la différence en plus ou en moins est compensée par une
   soulte en argent.

    "b) Les terres doivent être regroupées d'une manière intensive.

    "c) Les nouveaux biens-fonds doivent, autant que possible, être
de forme
   régulière et avoir accès à un chemin au moins.

    "d) Si, exceptionnellement, après remaniement parcellaire, un domaine
   subit une moins-value, la commission de classification offre à son
   propriétaire une compensation en terrain ou alloue à celui-ci une
   indemnité équitable en argent."

    Lorsque le recourant ne discute pas la constitutionnalité du droit
cantonal - moyen que le Tribunal fédéral examinerait librement -,
mais se borne à critiquer l'application des principes du remaniement,
en particulier de celui de la compensation réelle tel qu'il a été mis en
oeuvre par le législateur cantonal, le grief de violation de l'art. 22ter
Cst. se confond avec le grief de violation de l'art. 4 Cst.; le Tribunal
fédéral ne revoit en effet que sous l'angle de l'arbitraire l'application
du droit cantonal (ATF 105 Ia 326 consid. 2b, 95 I 523).

    b) L'autorité cantonale doit aussi veiller à une répartition
équitable entre les membres du syndicat, dans la mesure du possible,
des bénéfices et des risques de l'opération de remaniement: c'est là
une exigence qui découle du principe constitutionnel de l'égalité de
traitement. Ce principe, qui n'a en général qu'une portée relative en
matière d'aménagement du territoire (cf. ATF 116 Ia 195 consid. 3b,
114 Ia 257 consid. 4a), a un poids plus important dans le domaine des
améliorations foncières, où les investissements des collectivités publiques
créent des plus-values substantielles (ATF 105 Ia 326 consid. 2c, 95 I 524
consid. 4). Le droit à l'égalité est cependant relativisé en tant que,
selon le cours ordinaire des choses, il est rarement possible d'assurer
à chacun des propriétaires englobés dans le périmètre une participation
proportionnellement identique à l'enrichissement collectif. Pour le
Tribunal fédéral qui, saisi d'un recours de droit public, n'a pas à
substituer son appréciation à celle des autorités cantonales, il suffit que
les disparités révélées à ce propos à l'issue de la confection du nouvel
état ne soient pas manifestes ou choquantes (ATF 105 Ia 326 consid. 2c).

    c) S'il apparaît que la situation faite à un propriétaire dans le
nouvel état n'est pas totalement insoutenable, mais qu'elle est pourtant
clairement insatisfaisante, parce que les autorités cantonales ont omis des
éléments essentiels lors de la confection du nouvel état (par exemple les
particularités de l'exploitation) ou parce qu'elles ont négligé d'utiliser
tous les moyens techniques à disposition pour améliorer cette situation,
la décision cantonale doit alors être annulée pour déni de justice formel
(art. 4 Cst.). Pour déterminer si la situation d'un propriétaire est
insatisfaisante, le Tribunal fédéral fait preuve de retenue dans l'examen
de questions qui relèvent des circonstances locales, voire d'aspects
techniques, que les autorités cantonales sont censées mieux connaître
que lui (ATF 105 Ia 327 consid. 2c et les arrêts cités; cf. aussi arrêt
non publié du 16 décembre 1981, consid. 1a, reproduit in ZBl 83/1984
p. 74-75). L'autorité cantonale de recours jouit en revanche d'un pouvoir
d'examen libre et sans retenue; elle est en mesure d'étudier toutes les
solutions qui permettraient d'améliorer une attribution peu satisfaisante.
C'est pourquoi le Tribunal fédéral peut être exigeant à son égard.

Erwägung 2

    2.- c) cc) La commission cantonale a retenu que l'éloignement des
terres du recourant par rapport à sa ferme était partiellement compensé
par le regroupement de ses propres attributions avec celles de son neveu
Louis G.; ce dernier exploite en effet le domaine de son oncle à titre de
fermier. Pour l'autorité intimée, le nouvel état permet une rationalisation
de l'exploitation considérée globalement.

    La ferme de Louis G. se trouve dans le village, et la majeure partie de
ses terrains, dans l'ancien état, se situaient à l'est de la localité. Dans
le nouvel état, les deux parcelles les plus importantes de l'oncle et
du neveu (nos 12.01 et 13.01 NE), s'étendant au total sur 16 ha, sont
adjacentes et séparées uniquement par un chemin. D'une façon générale,
une appréciation d'ensemble des deux domaines traités comme une seule
exploitation conduit à la conclusion que la situation de l'exploitant
unique, après le remaniement, est tout à fait satisfaisante.

    dd) La seule question qui se pose dès lors est celle de savoir
dans quelle mesure l'autorité cantonale pouvait, au regard du principe
d'équivalence, se fonder, pour la confection du nouvel état, sur le contrat
de bail à ferme conclu entre Charles et Louis G. et traiter les deux
domaines comme une seule exploitation. Les organes du syndicat ne sauraient
être critiqués pour avoir cherché à regrouper les attributions du bailleur
et celles du fermier: ils pouvaient légitimement donner une certaine
importance, parmi d'autres éléments, à ce lien contractuel. Les autorités
cantonales n'ont cependant pas suffisamment pris en compte l'éventualité
qu'il soit mis un terme au rapport de location et que le domaine de Charles
G. doive être considéré comme une entité indépendante. C'est d'ailleurs
à tort que la décision attaquée laisse entendre que ce domaine n'aurait
plus de véritable centre d'exploitation et que le bâtiment existant sur
la parcelle no 12.05 NE ne serait plus qu'un dépôt; l'inspection locale
a révélé que l'étable et la grange étaient encore, en l'état, affectées
à leur destination propre.

    Il faut dès lors constater, en examinant les attributions du seul
recourant tant du point de vue de la nature et de la valeur des terres
que de celui de l'organisation de l'exploitation, que la situation faite
à Charles G. dans le nouvel état, sans être choquante ou insoutenable,
est néanmoins clairement insatisfaisante. Ses attributions à l'ouest du
village sont notablement insuffisantes en comparaison avec la situation
antérieure; l'adjonction d'une surface de 0,6 ha au bien-fonds comportant
la ferme ne suffit pas à compenser la perte de la parcelle no 331 AE,
d'une surface de près de 2 ha, de forme allongée, particulièrement propre
à la culture et proche du centre de l'exploitation. Or il ne résulte pas
du dossier que toutes les possibilités techniques de remédier à cette
situation aient été épuisées. La commission de classification a certes
élaboré diverses variantes, avant de statuer sur les réclamations de
Charles G., puis au stade de l'instruction du recours devant la commission
cantonale; ces variantes, qui tendaient toutes à un agrandissement du
bien-fonds autour de la ferme (et qui ont conduit à modifier la parcelle no
12.05 NE après l'enquête publique), n'ont abouti en définitive à aucune
solution satisfaisante. Or d'autres variantes ne sont pas exclues: on
pourrait concevoir, à titre de simple exemple, l'attribution à Charles
G. d'une bande de la parcelle no 13.05 NE de Louis G., celui-ci obtenant
parallèlement une partie de la parcelle no 12.01 NE de son oncle,
au lieu-dit "Vy-de-Valeyres", à proximité de ses autres terrains. Il
n'appartient toutefois pas au Tribunal fédéral, statuant sur un recours
de droit public qui, sous réserve d'exceptions non réalisées en l'espèce,
ne peut tendre qu'à l'annulation de la décision attaquée (ATF 117 Ia 338
consid. 1b, 345 consid. 2d et les arrêts cités), de modifier le nouvel
état de propriété. L'attribution d'une surface suffisante à l'ouest du
village est un élément déterminant pour l'exploitation du recourant; cette
question ne saurait être simplement réglée au stade de la répartition des
frais, comme le retient la décision attaquée. L'autorité cantonale, qui
n'a pas suffisamment tenu compte de cet élément et qui n'a pas examiné
toutes les possibilités d'amélioration, a violé à cet égard l'art. 4
Cst. (cf. consid. 1c supra). Le recours doit être partiellement admis
pour ce motif.