Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 118 IV 319



118 IV 319

56. Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation pénale du 10 juillet 1992,
dans la cause K. c. Procureur général du canton de Genève et consorts
(pourvoi en nullité) Regeste

    1. Art. 28 Abs. 1 StGB. Fortbestehen von höchstpersönlichen Rechten
des Verletzten nach dem Tode.

    Die Feststellung des physischen Todes betrifft eine Tatfrage,
die Bestimmung des Augenblicks, in dem die mit der Person verbundenen
Rechte wegfallen, ist dagegen Rechtsfrage. Der Tote bleibt unter dem
strafrechtlichen Gesichtspunkt noch während einer gewissen Zeit seit
dem Eintritt des physischen Todes, normalerweise bis zur Bestattung,
Inhaber von höchstpersönlichen Rechten (E. 2).

    2. Art. 179quater Abs. 1, Art. 186 StGB; Art. 28 StGB,
Strafantragsrecht der Angehörigen in bezug auf Straftaten, die nach dem
Ableben des Verletzten begangen worden sind.

    Der soeben Verstorbene kann noch Opfer von strafbaren Handlungen
gegen den Geheim- oder Privatbereich und von Hausfriedensbruch sein;
die Angehörigen sind insoweit zum Strafantrag berechtigt (E. 3).

    3. Art. 24, Art. 25 und Art. 58 StGB. Verantwortlichkeit von
Medienunternehmungen oder von Dritten, die Journalisten beschäftigen oder
deren Berichte und Recherchen veröffentlichen.

    Begeht ein Journalist im Rahmen seiner Recherchen strafbare Handlungen,
so sollte sich die Strafuntersuchung, wenigstens zu Beginn, gegen alle
Personen, insbesondere Arbeitgeber oder Herausgeber, richten, die sich der
Mittäterschaft, Anstiftung oder Gehilfenschaft zu den Straftaten schuldig
gemacht haben könnten, und sollten überdies gegenüber den involvierten
Medienunternehmungen die Voraussetzungen einer Einziehung geprüft werden
(E. 4).

Sachverhalt

    A.- Ensuite d'un scandale politique qui avait éclaté en
Allemagne en fin d'été 1987, Uwe Barschel, premier ministre du Land
de Schleswig-Holstein et chef de file du parti démocrate chrétien de ce
Land, a été contraint de démissionner de ses fonctions à la fin du mois de
septembre sous la pression de l'opinion publique et de son propre parti. Il
a pris quelques jours de vacances aux Iles Canaries le 6 octobre 1987,
mais il a été rappelé à Kiel et cité devant la commission parlementaire
chargée de l'enquête au sujet de son rôle dans ledit scandale politique. Le
9 octobre 1987, il annonça par télex son intention de rentrer à Kiel le
12 octobre et de profiter de la fin de semaine pour vérifier certaines
informations lui permettant de se disculper. C'est sur la base de ce
télex, rendu public à Kiel, que le magazine "Stern" en arriva à désigner
Genève comme l'endroit où Barschel comptait faire escale lors de son
voyage de retour. La rédaction du "Stern" envoya un journaliste, K.,
et un photographe, A., à Genève pour y attendre le passage de Barschel
avec la mission d'obtenir de lui une interview. Elle a de plus appris par
un collaborateur suisse chargé d'intercepter Barschel dès son arrivée à
l'aéroport que celui-ci séjournerait à l'hôtel Beau-Rivage. Logés dans ce
même hôtel, K. et le photographe ont essayé à plusieurs reprises mais en
vain de contacter Barschel dans sa chambre. Après de nouvelles tentatives
et après avoir surveillé la chambre de Barschel - sur la porte de laquelle
figurait une pancarte "ne pas déranger" - K. y a pénétré, la porte n'étant
pas verrouillée.

    Ne voyant personne dans la chambre, K. l'a visitée et s'y est emparé
de documents qu'il est allé photographier à l'extérieur. Revenant ensuite,
après avoir téléphoné à la rédaction de son journal, il y a, selon ses
déclarations, découvert le corps inanimé de Barschel dans la baignoire
pleine d'eau. Il n'a alerté que plus tard la direction de l'hôtel,
laquelle a appelé la police.

    Lors de ses deux passages dans la chambre de Barschel, K. a pris 51
photographies montrant la pièce, les notes et le corps du défunt. Plusieurs
de ces photographies ont été publiées dans la presse et notamment dans le
"Stern". Certaines vues du corps de Barschel ont même servi de sujet
pour l'impression de tee-shirts.

    B.- Le 8 janvier 1988, l'épouse du défunt, sa mère ainsi que ses
frères et soeurs ont déposé plainte pénale pour violation de domicile
(art. 186 CP) et atteinte à la paix des morts (art. 262 CP). Le 26
novembre 1990, le Tribunal de police a condamné K. à une peine de trois
mois d'emprisonnement avec sursis pendant cinq ans et à une amende de
10'000 francs pour violation du domaine secret ou du domaine privé au
moyen d'un appareil de prise de vue (art. 179quater CP) ainsi que pour
violation de domicile (art. 186 CP). Sur appel du condamné, la Cour de
justice a confirmé le jugement qui précède par arrêt du 24 juin 1991.

    C.- K. se pourvoit en nullité devant la Cour de cassation pénale
du Tribunal fédéral. Il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et,
subsidiairement, à la réduction de la peine. De même que devant les
autorités cantonales, il conteste la recevabilité de la plainte et
l'existence même des infractions retenues contre lui.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 2

    2.- Les actes reprochés au recourant ne sont poursuivables que sur
plainte. Il convient donc de déterminer d'abord si une telle plainte a été
valablement déposée par les intimés, ce que l'autorité cantonale affirme
mais que le recourant conteste. Ayant constaté, au bénéfice du doute,
ce qui lie le Tribunal fédéral, que les actes reprochés au recourant ont
été commis par celui-ci postérieurement au décès de Barschel, l'autorité
cantonale en a déduit, conformément à la jurisprudence (ATF 87 IV 106,
102 IV 149), que les intimés ne pouvaient faire valoir les intérêts
de leur parent et conjoint, en application de l'art. 28 al. 4 CP,
mais seulement les leurs propres conformément à l'art. 28 al. 1 CP. Le
recourant partage cette manière de voir mais considère que les intimés
n'ont aucun intérêt propre dont la lésion justifierait en l'espèce le dépôt
d'une plainte pénale. Il saute aux yeux que le lésé direct est Barschel,
aussi convient-il dans un premier temps de décider si les droits qui lui
appartenaient de son vivant ont survécu au moins un certain temps après
qu'il fut décédé du point de vue médical. En effet, si tel n'est pas
le cas, en vertu de la jurisprudence pertinemment citée par l'autorité
cantonale, l'art. 28 al. 4 CP ne pourra trouver application mais seulement,
le cas échéant et à d'autres conditions, l'art. 28 al. 1 CP.

    Si la constatation de la mort physique relève de l'établissement
des faits, il n'en va pas de même de la fixation du moment où les droits
attachés à la personnalité prennent fin. Du point de vue du droit civil,
et plus particulièrement des droits patrimoniaux, la réponse est claire
dès lors que par le jeu des art. 11 et 31 CC les droits s'éteignent
avec la personnalité (ATF 101 II 191 et 104 II 236) pour passer aux
héritiers en vertu de la saisine (art. 560 CC; y compris le droit à la
réparation du tort moral à certaines conditions, cf. ATF 81 II 385). Du
point de vue du droit pénal en revanche, dont les notions ne coïncident
pas nécessairement avec celles du droit civil et qui est plus proche du
droit public, la jurisprudence n'a pas rendu de décision de principe dès
lors que la question ne se pose que dans le cas des infractions poursuivies
sur plainte exclusivement et que, dans ces cas, les dispositions figurant
aux art. 28 al. 4 et 175 al. 1 CP règlent le plus souvent la difficulté
à satisfaction. Dans son commentaire (art. 137 N. 61-63), SCHUBARTH pose,
sans la trancher, la question de la titularité de la propriété de la chose
volée à une personne décédée. Il convient cependant d'admettre comme
semble le faire cet auteur que le mort est entouré d'une "zone tabou"
pendant un certain laps de temps après son décès, zone à l'intérieur de
laquelle ses droits éminemment personnels subsisteraient. Cette solution
trouve un appui dans l'arrêt paru aux ATF 97 Ia 228 ss, où la Cour de
droit public, pour des motifs convaincants, sur lesquels elle n'est pas
revenue par la suite, a jugé que, du point de vue de la constitution,
il se justifie d'admettre qu'un droit de la personnalité qui est en
rapport avec la forme des funérailles peut durer au-delà de la mort et
que rien en soi ne s'oppose à ce que d'autres droits en rapport avec les
funérailles soient considérés comme non éteints par la mort. Si l'on s'en
tient à cette conception qui coïncide avec le sentiment général selon
lequel un cadavre ne saurait être ni un objet de propriété, ni un bien
sans maître que l'on peut traiter n'importe comment, il faut admettre
que, jusqu'à ses funérailles en principe, le défunt est titulaire de
droits de la personnalité protégeant sa dépouille et ce qui l'entoure
des atteintes contraires aux moeurs et aux usages. Cette persistance de
l'existence de certains droits se justifie d'autant plus que le moment
de la disparition de toute trace de vie dans le corps de l'individu est
très difficile à fixer et que la solution retenue par l'Académie suisse
des sciences médicales n'a pas été élaborée avant tout pour définir la
fin de la personnalité ou la perte de la jouissance de droits, mais bien
pour déterminer le moment où il est possible de prélever des organes sur
un cadavre et non plus sur un être susceptible de revenir à la vie. Il
s'ensuit que la famille de Barschel était habilitée à déposer plainte en
vertu de l'art. 28 al. 4 CP. De toute manière, on observe que si la zone
de persistance de certains droits après la mort n'avait pas été retenue,
la plainte aurait été déposée valablement par la famille de la victime,
en vertu des droits propres découlant notamment de la saisine et de
l'art. 28 CC. Le pourvoi ne peut ainsi qu'être rejeté sur ce point.

Erwägung 3

    3.- a) Le recourant considère que l'arrêt attaqué viole le droit
fédéral dans la mesure où, selon lui, son acte ne constitue ni une
violation du droit de domicile d'Uwe Barschel ni de celui de ses proches,
puisque le premier avait perdu toute maîtrise sur la chambre louée
à l'hôtel Beau-Rivage au moment de sa mort, alors que ses héritiers
n'avaient jamais accédé à cette maîtrise. Cet argument ne peut qu'être
rejeté si l'on admet que le mort est entouré d'une zone tabou pendant un
certain laps de temps suivant son décès et pendant laquelle sa dépouille
et ce qui l'entoure sont protégés par les droits de la personnalité qui
étaient les siens de son vivant. En pénétrant sans droit dans une chambre
d'hôtel occupée par un autre hôte - même mort - et dont la porte était en
outre munie d'une pancarte "ne pas déranger", le recourant a donc commis
un acte de violation de domicile réprimé à l'art. 186 CP.

    b) Le recourant fait valoir qu'Uwe Barschel ne pouvait plus être
atteint dans son domaine secret ou privé du fait qu'il était déjà décédé
au moment où les photos incriminées ont été prises. Comme plus haut, cette
argumentation tombe à faux dès lors que Barschel était malgré sa mort
encore titulaire de la protection découlant des droits de la personnalité.

    Quant à la question de savoir si les photographies prises du cadavre
étaient licites en vue de la notoriété d'Uwe Barschel, il convient de
rappeler que cette mort n'est nullement survenue dans un endroit accessible
au public, et que les photos ne pouvaient être prises qu'à la suite d'une
intrusion illicite dans la chambre d'hôtel. Elles violaient dès lors non
seulement le domaine privé d'Uwe Barschel, mais virtuellement son domaine
secret le plus strict (cf. ATF 118 IV 46 consid. 4 let. a; Kommentar
SCHUBARTH, Art. 179quater, n. 10). Or dans cette sphère, toute violation
du domaine privé est illicite sans égard à l'éventuelle notoriété de la
victime, puisque celle-ci n'a d'incidences en tant que fait justificatif
que dans la mesure où les faits montrés sur les photos et relevant
du domaine privé se sont déroulés en public (cf. REHBINDER, Schweiz.
Presserecht, p. 85). Cela n'étant manifestement pas le cas, l'acte
incriminé reste punissable quelle que soit la conception éventuellement
divergente du Haut Conseil surveillant l'éthique de la presse allemande
qui ne saurait influer sur l'application du droit suisse en Suisse.

Erwägung 4

    4.- a) Le recourant fait valoir enfin que la peine infligée par la
Cour de justice est disproportionnée. Il reproche à l'autorité intimée
d'avoir méconnu qu'il avait agi avec un mobile honorable et sans chercher
un gain matériel. Son mobile principal ayant été selon lui la recherche
de preuves permettant d'exculper Uwe Barschel.

    b) L'art. 179quater CP prévoit une peine allant jusqu'à trois ans
d'emprisonnement et une amende jusqu'à 40'000 francs. La même peine
est prévue pour la violation de domicile (art. 186). En l'occurrence,
le concours de ces deux infractions n'entraîne pas une augmentation du
maximum de la peine (art. 68 ch. 1 al. 1 et art. 36 CP), mais doit être
considéré, dans le cadre légal de la peine, comme un élément aggravant. Il
s'ensuit que la peine infligée au recourant - trois mois d'emprisonnement
avec sursis et une amende de 10'000 francs - se situe plutôt en bas de
l'échelle des sanctions possibles et ne peut être taxée de manifestement
excessive. Le recourant ne montre d'ailleurs ni en quoi son agissement
aurait été dicté par un mobile honorable au sens de l'art. 64 CP, ni en
quel sens l'autorité intimée se serait laissé guider par des critères sans
pertinence ou non conformes au droit fédéral (cf. ATF 117 IV 112 ss). De
plus, rien dans le dossier ne permet de déceler en quoi tel serait le
cas. Le pourvoi ne peut ainsi qu'être rejeté dans son entier. Cela dit,
il saute aux yeux que, d'une manière générale, lorsqu'un journaliste
commet des infractions dans le cadre d'une enquête, il est rarement
seul en cause, soit qu'il agisse sur mandat ou comme envoyé salarié,
soit qu'ayant opéré sous sa propre responsabilité, il soit publié malgré
l'évidente illicéité de la manière dont le reportage a été fait. Il serait
normal que, dans de telles hypothèses, l'enquête pénale soit dirigée,
au moins dans un premier temps, contre toutes les personnes qui ont pu
se rendre coupables d'instigation, de coactivité ou de participation aux
infractions, et que les conditions d'application de l'art. 58 CP soient
examinées à l'encontre de médias impliqués. Qu'il n'en ait pas été ainsi
en l'occurrence ne saurait toutefois rien changer au sort du pourvoi.