Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 118 II 74



118 II 74

15. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 21 janvier 1992 dans la
cause Finanziaria Les Copains S.p.A. contre Office fédéral de la propriété
intellectuelle (recours de droit administratif) Regeste

    Familiennamen als Marken oder Markenbestandteile und ersonnene Firmen
(Art. 14 Abs. 1 Ziff. 4 MSchG).

    1. Voraussetzungen, unter denen es zulässig ist, als Marke bzw.
Markenbestandteil zu gebrauchen: einen in der Schweiz verwendeten oder
zumindest bekannten Familiennamen, einen ausländischen, in der Schweiz
unbekannten Familiennamen sowie eine Phantasiebezeichnung, die auf einen
in der Schweiz nicht existierenden Familiennamen schliessen lässt (E. 2).

    2. Zulässigkeit der Marke "MISS ELLECI" (E. 3).

Sachverhalt

    A.- La société Finanziaria Les Copains S.p.A., dont le siège est à
Bologne, a fait enregistrer, en Italie, la marque verbale "MISS ELLECI"
pour des produits de la classe internationale 25 (articles d'habillement,
souliers, chapellerie).

    Par décision du 20 juin 1991, l'Office fédéral de la propriété
intellectuelle (ci-après: l'Office) a refusé d'enregistrer ladite marque
au motif qu'elle renvoie à une tierce personne dont l'usage du patronyme
à titre de marque n'est pas justifié.

    B.- Saisi d'un recours de droit administratif, le Tribunal fédéral
a annulé cette décision et invité l'Office à enregistrer la marque en
question.

Auszug aus den Erwägungen:

                  Extrait des considérants:

Erwägung 2

    2.- a) L'insertion d'un nom patronymique dans une marque induit
le public en erreur sur les relations commerciales du titulaire de la
marque lorsqu'elle donne à penser qu'il existe un lien entre le produit
ainsi désigné et le porteur du nom. C'est toujours le cas si le public
connaît le nom en question et qu'il soit possible que celui qui le porte
ait exercé ou exerce encore une influence sur la qualité du produit,
par exemple en tant qu'inventeur, chercheur ou utilisateur renommé (ATF
98 Ib 10 consid. 3, 77 I 77 ss; TROLLER, Immaterialgüterrecht, 3e éd.,
vol. I, p. 317; MARBACH, Die eintragungsfähige Marke, thèse Berne 1983,
p. 104/105). Au demeurant, abstraction faite du risque que l'on vient
d'évoquer, l'emploi comme marque d'un patronyme connu du public suisse
est en principe inadmissible, selon la jurisprudence et la doctrine,
car, même s'il n'en tire aucune conclusion quant à la qualité du produit
qui lui est présenté sous une telle marque, l'acheteur risque toutefois
d'établir à tort un lien entre ce produit, d'une part, et le porteur
du nom ou une raison de commerce incluant ce patronyme, d'autre part
(ATF 98 Ib 10 consid. 4 "Santi"; arrêt non publié du 25 janvier 1985,
en la cause J. Schoeff c. l'Office, reproduit dans la Feuille suisse
des brevets, dessins et marques [FBDM] 1985 I 35/36 "Monsieur Dupont";
MATTER, Commentaire de la LMF, p. 83; DAVID, n. 46 ad art. 3 LMF; MARBACH,
ibid.; BITZI, Der Familienname als Marke, p. 104 ss; CURCHOD, Famille et
propriété intellectuelle, in: Problèmes de droit de la famille, Neuchâtel
1987, p. 49).

    L'art. 14 al. 1 ch. 4 LMF prohibe, en outre, l'enregistrement d'une
marque qui porte une raison de commerce fictive. Tombe, en particulier,
sous le coup de cette disposition la marque contenant des mots qui
sont susceptibles d'être compris comme patronymes, même si ces derniers
n'existent pas en Suisse (MARBACH, op.cit., p. 101 et 105). Les décisions
relatives à cette question sont délicates. L'Office a dès lors jugé utile
d'exposer quelle serait dorénavant sa pratique en la matière. Il a indiqué
qu'il appliquerait à l'avenir le critère suivant afin de donner plus
de clarté et d'assise à cette pratique: lorsque la patronyme n'existe
pas en Suisse ou n'y est pas connu, la marque est acceptée à moins que
le mot qui la compose ne soit accompagné d'une adjonction au point de
rendre le renvoi à une tierce personne comme évident. L'adjonction pourra
être un prénom, une particule ("by", "de", "création", "and Co.") ou le
portrait d'un personnage. Selon l'Office, cette conception plus objective
de la raison de commerce fictive constitue une nouvelle étape dans le
processus de libéralisation concernant l'examen des marques (FBDM 1990 I
61/62). Le critère retenu par l'Office est assurément valable et conforme
au droit fédéral, mais il est trop absolu dans sa formulation. En effet,
il donne à penser que la marque comprenant un patronyme qui n'est pas
connu en Suisse doit être refusée dès qu'elle renvoie clairement à une
tierce personne. Ce n'est toutefois le cas que si ledit patronyme et
l'adjonction qui l'accompagne confèrent à la marque visée l'apparence
d'une raison de commerce, autrement dit s'ils donnent l'impression de
faire partie intégrante d'une raison de commerce, généralement de la
raison sociale d'une personne morale (cf., mutatis mutandis, l'ATF 98 Ib
190 consid. 2a où le Tribunal fédéral a appliqué ce principe à la marque
"Sheila Diffusion"). A ce défaut, c'est-à-dire si, selon l'expérience
générale, le public qui examine la marque incluant un patronyme étranger
n'établit aucune relation entre ce patronyme et une raison de commerce -
individuelle ou sociale - déterminée, l'enregistrement de la marque ne
saurait être refusé même si le risque d'une confusion avec une raison de
commerce ne peut en soi jamais être totalement écarté (dans le même sens,
à propos des termes de fantaisie, cf. MATTER, op.cit., p. 177, et DAVID,
n. 11 ad art. 14 LMF).

    b) Cela étant, il convient de faire les distinctions suivantes en ce
qui concerne le risque de tromperie:

    aa) Un patronyme qui est utilisé en Suisse ou qui y est un tant soit
peu connu pourra être employé comme marque ou comme élément constitutif
d'une marque aux trois conditions alternatives suivantes:

    - si le public l'associe immédiatement à une chose (par ex. "Zeppelin",
"Bocca") ou si sa présentation en fait essentiellement un signe descriptif
(par ex. des noms comme "Loup", "Lièvre" ou "Renard" accompagnés de
l'animal stylisé; cf. MARBACH, op.cit. p. 101);

    - si le titulaire de la marque et le porteur du nom ne forment qu'une
seule et même personne et que la marque en question ne soit pas déceptive
à un autre égard (au sujet de cette dernière réserve, cf. l'ATF 77 I 79
"Kübler");

    - si le porteur du nom consent à l'emploi de son patronyme comme
marque et qu'il existe entre le déposant et lui un lien de nature à
exclure le risque d'une tromperie du public (TROLLER, ibid.; MARBACH,
op.cit., p. 104/105 et les références).

    bb) L'emploi, comme marque ou dans une marque, d'un patronyme étranger
qui n'est pas connu en Suisse portera peut-être atteinte au droit au nom
de tierces personnes et sera subordonné, le cas échéant, à l'accord des
intéressés (MARBACH, op.cit., p. 86). En revanche, il ne sera propre à
induire le public en erreur que si la marque ainsi constituée revêt le
caractère d'une raison de commerce fictive. Pour en juger, on appliquera
le critère susmentionné (cf. let. a).

    cc) C'est également sur cette base que devra être appréciée la validité
d'une désignation de fantaisie formée d'une suite de lettres ou de syllabes
susceptible d'évoquer un nom de famille qui, en réalité, n'existe pas en
Suisse (MARBACH, op.cit., p. 106). Il n'est, en effet, pas toujours facile
pour le public de savoir si les termes qu'il a sous les yeux constituent
un nom de famille ou une désignation de fantaisie: cela se vérifie déjà à
propos de vocables qui lui sont familiers (par ex. la marque "Varazzi" qui
est très proche du patronyme "Marazzi", connu en Suisse; MARBACH, op.cit.,
p. 106); mais c'est encore plus vrai lorsqu'il s'agit d'analyser des mots
aux consonances se distinguant nettement, au point de vue phonétique,
de celles de l'une des quatre langues nationales de la Suisse ou, plus
généralement, de celles des langues indo-européennes (par ex. des mots
de type extrême-oriental, tels que "Wan" ou "Wun"). Aussi faut-il savoir
gré à l'Office d'avoir posé un critère sûr permettant de faire le départ
entre les désignations de fantaisie admissibles comme marques et celles
qui ne le sont pas. Le processus de libéralisation dans l'examen des
marques, qu'il a instauré avec sa pratique actuelle, est d'autant moins
critiquable que la difficulté de former de nouvelles marques verbales ne
cesse de s'accroître avec le temps. Dans ces conditions, il est conforme à
cette pratique de n'assimiler une désignation de fantaisie à une raison de
commerce fictive, et partant d'en refuser l'enregistrement en application
de l'art. 14 al. 1 ch. 4 LMF, que si, du fait de sa présentation, elle est
propre, selon l'expérience générale, à tromper le public en éveillant chez
lui l'idée, erronée, que la marque considérée se rapporte à une personne -
physique ou morale - individualisée.

Erwägung 3

    3.- a) Le terme "ELLECI", qui figure dans la marque litigieuse,
a été formé à partir des premières lettres, prononcées en italien,
des mots "Les Copains", lesquels constituent l'élément essentiel de la
raison sociale de la recourante et ont été également enregistrés comme
marque à l'instar desdites lettres (L&C). Ce terme n'est pas utilisé
comme patronyme en Suisse (RÉPERTOIRE DES NOMS DE FAMILLE SUISSES, 3e
éd., vol. I, p. 496). Aux dires de la recourante, qui se fonde à cet
égard sur l'examen des annuaires téléphoniques de Zurich, Berne, Genève,
Lausanne, Bâle, Lugano, New York, Londres, Madrid, Milan et Rome, un tel
patronyme n'existerait tout simplement pas, de sorte qu'il ne saurait
être question ici d'un risque de confusion de noms. Pour l'Office, cette
circonstance n'est pas déterminante, le mot "ELLECI" donnant déjà, à lui
seul, l'impression - fausse - qu'il correspond au nom du titulaire de la
marque, impression que le terme "MISS" ne ferait que renforcer.

    b) L'emploi de titres tels que "Miss", "Mademoiselle", "Missis",
"Madame", "Mister", "Monsieur", "Lady" ou "Sir", pour la formation des
raisons de commerce, à le supposer admissible, n'est en tout cas pas
d'usage courant (MARBACH, op.cit., p. 105). Ces termes, du fait de leur
large diffusion, ne sont généralement pas perçus comme un renvoi à une
personne ou à une entreprise déterminée par le public, lequel y voit bien
plutôt un argument publicitaire destiné à une clientèle ciblée. Aussi
ne sont-ils de nature à tromper l'acheteur que si le terme qui les
accompagne (nom, prénom ou désignation de fantaisie) leur confère un
pouvoir d'individualisation suffisant, en particulier s'il s'agit d'un
nom patronymique connu en Suisse (par ex. "Monsieur Dupont") ou d'un
prénom renvoyant manifestement à une seule personne (par ex. "Lady Di",
la référence à la couronne d'Angleterre étant ici évidente).

    En l'occurrence, contrairement à l'opinion de l'Office, la marque
litigieuse ne donne pas à penser qu'il existe une relation entre le produit
désigné par elle et une entreprise fictive portant le même nom. Le terme
de fantaisie "ELLECI" ne correspond, en effet, à aucun patronyme suisse
ou étranger et ne possède pas non plus un pouvoir d'individualisation
tel que, joint au titre "MISS", il conduirait immédiatement le public
à faire le rapprochement entre ladite marque et une raison de commerce
inexistante. Dès lors, le recours doit être admis et l'Office invité à
procéder à l'enregistrement requis.