Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 117 V 248



117 V 248

32. Arrêt du 19 juin 1991 dans la cause Office fédéral de l'industrie,
des arts et métiers et du travail contre Département neuchâtelois de
l'Economie publique et Tribunal administratif du canton de Neuchâtel dans
la cause F. Regeste

    Art. 335b Abs. 1 und 2 OR: Probezeit. Im Rahmen eines unbefristeten
Temporärarbeitsverhältnisses beginnt die Probezeit bei jedem Einsatz neu
zu laufen. Vereinbarkeit dieses Grundsatzes mit dem OR (Erw. 3).

    Art. 8 Abs. 1 lit. b, 11 Abs. 3, 29 Abs. 1 und 2 AVIG: Zweifel über
Ansprüche aus Arbeitsvertrag. Unanwendbarkeit von Art. 29 AVIG, wenn
vorfrageweise jeder Anspruch des Versicherten aus seinem Arbeitsvertrag
ausgeschlossen werden muss (Erw. 4).

Sachverhalt

    A.- Jeanine F., née le 10 mars 1950, employée de bureau, a conclu le
1er septembre 1989 un contrat de mission temporaire de durée indéterminée
avec l'agence de travail intérimaire B. SA. Sur cette base, elle a
été placée pour une durée indéterminée auprès de la maison J. dès le 4
septembre 1989. Cette mission, consistant dans l'exécution de travaux de
manutention divers, a pris fin le 24 novembre 1989.

    Sans emploi, l'assurée a sollicité et obtenu des indemnités de
l'assurance-chômage, qui lui ont été versées par la Caisse cantonale
neuchâteloise d'assurance contre le chômage (ci-après: la caisse de
chômage).

    Dès le 22 janvier 1990, elle a été à nouveau placée pour une durée
indéterminée par B. SA, cette fois auprès de l'entreprise C., afin
d'effectuer des travaux de triage. Cette seconde mission a pris fin le
16 mars 1990, de sorte que l'assurée a derechef sollicité le versement
d'indemnités de chômage à partir du 19 mars jusqu'au 4 avril 1990.

    Constatant que le temps d'essai de trois mois était arrivé à son terme,
la caisse de chômage, par décision du 19 avril 1990, a refusé d'indemniser
Jeanine F. au motif que celle-ci pouvait faire valoir un droit au salaire
à l'encontre de son employeur, ou lui réclamer une indemnité en raison
d'une résiliation anticipée de son contrat de travail.

    B.- En temps utile, l'assurée a recouru contre cette décision en
alléguant qu'un nouveau temps d'essai de trois mois était applicable à la
seconde mission. Partant, elle estimait que le délai de congé conventionnel
avait été respecté par son employeur, contre lequel elle ne pouvait dès
lors plus faire valoir de prétentions.

    Par décision du 9 août 1990, le Département neuchâtelois de l'Economie
publique, en sa qualité d'autorité inférieure de recours en matière
d'assurance-chômage (ci-après: l'autorité inférieure de recours),
a annulé la décision litigieuse. Dans le cas d'espèce, il a considéré
que la nouvelle mission était, comme la première, soumise à la règle
légale du temps d'essai et que, par ailleurs, la caisse eût dû verser les
prestations d'assurance et se subroger au droit de l'assurée conformément
à l'art. 29 LACI.

    Le recours interjeté contre cette décision par l'Office fédéral de
l'industrie, des arts et métiers et du travail (ci-après: l'OFIAMT) a été
rejeté le 29 octobre 1990 par le Tribunal administratif neuchâtelois. Sans
trancher la question relative au délai de congé applicable, les premiers
juges ont considéré que la créance en salaire de l'assurée était douteuse
et appliqué l'art. 29 LACI.

    C.- L'OFIAMT interjette un recours de droit administratif contre ce
jugement, concluant à son annulation, et demande au Tribunal fédéral des
assurances de déclarer qu'aucune indemnité de chômage ne doit être versée
à l'assurée pour la période s'étendant du 19 mars au 4 avril 1990.

    L'autorité inférieure de recours renonce à formuler des observations et
renvoie tant à sa propre décision du 9 août 1990 qu'au jugement entrepris.

    Jeanine F. conclut à la confirmation du jugement cantonal.

Auszug aus den Erwägungen:

                     Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- a) Le droit à l'indemnité de chômage n'est donné que si
l'assuré, du fait de son chômage, subit une perte de travail à prendre
en considération (art. 8 al. 1 let. b LACI). Cependant, la perte de
travail pour laquelle le chômeur a droit au salaire ou à une indemnité
pour cause de résiliation anticipée des rapports de travail n'est pas
prise en considération (art. 11 al. 3 LACI).

    b) Les nouvelles dispositions légales régissant la résiliation du
contrat de travail, en vigueur dès le 1er janvier 1989, prévoient que
pendant le temps d'essai, dont la durée maximale ne peut dépasser trois
mois et qui couvre ordinairement le premier mois de service, le délai de
résiliation est en principe de sept jours, mais peut être modifié par un
accord écrit (art. 335b al. 1 et 2 CO).

    Après le temps d'essai, et durant la première année de service,
le contrat ne peut être résilié que pour la fin d'un mois moyennant un
délai de congé d'un mois au moins (art. 335c al. 1 CO).

Erwägung 2

    2.- Si la caisse a des doutes fondés quant au droit qu'a le chômeur
de faire valoir, pour la durée de la perte de travail, des prétentions
de salaire ou d'indemnisation au sens de l'art. 11 al. 3 LACI envers
son ancien employeur ou s'il y a des doutes sur la satisfaction de ces
prétentions, elle verse l'indemnité de chômage (art. 29 al. 1 LACI).

    En opérant le versement, la caisse se subroge au chômeur dans tous ses
droits, y compris le privilège légal, jusqu'à concurrence de l'indemnité
de chômage versée par la caisse (art. 29 al. 2 LACI, première phrase).

Erwägung 3

    3.- Le point de savoir si l'assurée a droit aux indemnités de chômage
litigieuses dépend d'abord de la réponse à une question relevant du
droit du travail et qui est de savoir si, dans le cadre d'un rapport de
travail intérimaire de durée indéterminée, le temps d'essai reprend ou
non à chaque nouvelle mission. Contrairement à l'opinion des premiers
juges, cette question doit être tranchée à titre préjudiciel, attendu
qu'aucune disposition légale - en particulier l'art. 29 LACI - ne dispose
le contraire et que le litige qui s'y rapporte n'est pas pendant devant
l'autorité compétente pour en connaître à titre principal (KNAPP, Précis de
droit administratif, 3e éd., 1988, n. 40, p. 10; GRISEL, Traité de droit
administratif, 1984, p. 188 et la jurisprudence citée par ces auteurs).

    a) A l'appui de son recours, l'office recourant invoque que les temps
d'essai successifs résultant des diverses missions temporaires doivent
être additionnés, car une reconduction du temps d'essai pour une période
totale de plus de trois mois irait à l'encontre des dispositions claires du
CO. Partant, il estime que le délai de congé prévu par l'art. 335c CO est
applicable au cas présent, de sorte que l'assurée intimée peut faire valoir
des prétentions salariales résultant de ses rapports de travail avec B.
SA et que son droit à l'indemnité de chômage doit être nié. Il relève
toutefois que, selon sa pratique, une solution différente pourrait aussi
être applicable lorsque le travailleur intérimaire change d'entreprise
utilisatrice et de fonction, conditions cumulatives qui ne sont pas
remplies en l'espèce puisque les tâches confiées à l'assurée intimée lors
de ses deux missions ne nécessitaient pas des qualifications différentes.

    Ce point de vue est contesté par l'assurée intimée, qui allègue que
des temps d'essai successifs ne contredisent pas les principes du CO et
se justifient en raison de la nature des rapports de travail intérimaire
et par l'intérêt même des parties, qui doivent pouvoir apprécier
réciproquement leurs prestations et conserver une liberté suffisante.

    b) Au cas présent, on constate que le premier contrat de mission
conclu entre l'assurée et B. SA comprenait une clause spéciale précisant
expressément que "les trois premiers mois de la mission sont considérés
comme une période d'essai ...".

    Une telle disposition n'est en revanche plus prévue par le second
contrat. Cette différence n'est toutefois pas déterminante, puisqu'aux
termes de l'art. 2 du Règlement du personnel temporaire établi par B. SA
- prescription qui constitue un contrat-cadre et fait partie intégrante
de tout contrat de mission particulier conclu postérieurement - il est
disposé notamment ce qui suit:

    "Lors d'une mission de durée indéterminée, le temps d'essai est
de trois
   mois, durant lesquels le délai de congé est de 2 jours ouvrables. Le
   temps d'essai recommence à courir chaque fois que le travailleur
   temporaire accepte une nouvelle mission temporaire dans une autre
   entreprise ou s'il exerce une autre fonction ou s'il exécute un travail
   différent au sein de la même entreprise."

    aa) La doctrine ne fournit aucune réponse claire à la question
préjudicielle litigieuse; pour sa part, le Tribunal de Prud'hommes
du district de La Chaux-de-Fonds, dans un arrêt du 29 juin 1989 (RJN
1989 p. 71 ss), confirmé par la Cour de cassation civile du Tribunal
cantonal neuchâtelois (arrêt non publié du 30 novembre 1989), a statué
"qu'en principe, chaque mission, qui représente chaque fois un nouveau
contrat de travail, fait partir un nouveau temps d'essai, légal ou
conventionnel". En substance, les juges neuchâtelois ont considéré que
c'est entre le travailleur intérimaire et l'entreprise utilisatrice
que s'établissent, le cas échéant, un rapport de confiance et le désir
de continuer la collaboration, de sorte que le temps d'essai ne peut
s'apprécier qu'à leur égard.

    On peut toutefois se demander si le rapport de confiance ne devrait
pas plutôt s'apprécier en fonction de la seule relation contractuelle
qui s'instaure entre l'agence de travail intérimaire et le travailleur,
à l'exclusion de l'entreprise utilisatrice.

    L'admettre découle d'une part du fait que c'est l'agence de travail
intérimaire qui est l'employeur au sens du CO (THÉVENOZ, Le travail
temporaire, thèse Genève 1987, n. 197, p. 84 et les références citées),
à qui il incombe de sélectionner du personnel intérimaire compétent, apte à
entretenir l'"image de marque" du service qu'elle commercialise (THÉVENOZ,
op.cit., n. 172, p. 76; VON BÜREN, Teilzeitarbeit und temporäre Arbeit
als neue Formen von Dienstleistungen im schweizerischen Recht, thèse Berne
1971, p. 55 s.) et qui pourra seule résilier les rapports contractuels de
travail (NEF, Temporäre Arbeit, thèse Zurich 1971, p. 82 ss; THÉVENOZ,
op.cit., n. 241, p. 100; n. 715, p. 242). D'autre part, il est ainsi
tenu compte de la situation particulière de l'entreprise utilisatrice,
laquelle n'exerce des droits envers le travailleur intérimaire qu'en raison
du mandat la liant à l'agence de travail temporaire (THÉVENOZ, op.cit.,
p. 121 ss; n. 357, p. 139), de sorte que la personne même du travailleur
n'est pas un élément déterminant pour elle (THÉVENOZ, op.cit., n. 239,
p. 99).

    Quoi qu'il en soit, et sous réserve des motifs invoqués, on ne peut
que se rallier à cette jurisprudence cantonale.

    En effet, le renouvellement du temps d'essai à l'occasion des
différentes missions exécutées dans le cadre d'un rapport de travail
intérimaire est conforme à la conception du législateur (cf.: travaux
parlementaires relatifs à l'élaboration des nouvelles règles en matière
de résiliation du contrat de travail, BO 1987 CdE 341) et résulte aussi
des relations triangulaires particulières, propres au rapport de travail
intérimaire (JAR 1989 p. 258 consid. 3, non publié aux ATF 114 V 336). Les
effets du contrat-cadre passé entre une agence de travail intérimaire
et un travailleur sont soumis à la condition suspensive qu'un contrat
de mission soit conclu (THÉVENOZ, op.cit., n. 643, p. 221), c'est-à-dire
qu'une mission particulière soit proposée, et acceptée par le travailleur
intérimaire. Il en découle par conséquent qu'aux contrats de mission
successifs correspond bien une suite de contrats indépendants (dans ce
sens également: JAR 1984 p. 113), à l'occasion desquels le temps d'essai
se renouvellera chaque fois.

    bb) Bien qu'il résulte clairement de l'art. 2 du Règlement de B. SA
que le temps d'essai reprend à chaque nouvelle mission acceptée par
le travailleur intérimaire, on n'en doit pas moins s'interroger plus
spécialement sur la validité de cette disposition et sur sa conformité
au CO. La volonté du législateur est certes de protéger chacune des
parties au contrat de travail, et plus particulièrement le travailleur,
qui ne doit pas, par une prolongation excessive du temps d'essai, voir
éludée à son détriment la protection contre le licenciement (Message du
Conseil fédéral du 9 mai 1984 concernant l'initiative populaire "pour la
protection des travailleurs contre les licenciements dans le droit du
contrat de travail" et la révision des dispositions sur la résiliation
du contrat de travail dans le code des obligations: FF 1984 II 617 et 620).

    De la stricte limitation du temps d'essai découle par conséquent
l'interdiction des "contrats en chaîne" conclus dans un but frauduleux ou
abusif, et qui rendraient illusoire cette protection (v. p.ex.: AUBERT,
Le travail à temps partiel irrégulier in: Mélanges Alexandre Berenstein,
1989, p. 223 s. et les références citées; idem, Quatre cents arrêts
sur le contrat de travail, 1984, n. 160-162; REHBINDER, Schweizerisches
Arbeitsrecht, 10e éd., 1991, p. 106; IDEM, Commentaire bernois, VI/2,
Der Arbeitsvertrag, n. 36 ad art. 319 CO; ATF 109 II 449).

    Il faut toutefois se demander si le besoin d'une telle protection
existe aussi en matière de travail intérimaire.

    En effet, le travail intérimaire est une forme précaire d'emploi
(NEF, op.cit., p. 8 ss; THÉVENOZ, op.cit., n. 625, p. 216). D'autre part,
le travailleur intérimaire met sa capacité de travail à la disposition
de l'employeur pour un temps généralement limité et accepte d'être placé
auprès d'entreprises qui, chaque fois, peuvent différer, pour y exécuter
des travaux qui ne seront pas obligatoirement toujours les mêmes. Ainsi,
si le travailleur devait s'engager successivement auprès de ces diverses
entreprises sans passer par l'intermédiaire d'une agence de travail
intérimaire, un nouveau temps d'essai recommencerait à s'écouler lors
de chaque prise d'emploi, en tout cas lorsqu'il ne s'agit pas du même
employeur; et dans l'hypothèse où il s'agirait de la même entreprise,
encore conviendrait-il d'examiner la durée des interruptions entre deux
engagements successifs.

    Quelques auteurs apportent une réponse nuancée à cette question,
en proposant que, en certaines circonstances, une requalification
des contrats soit effectuée par le juge, "qui devra cumuler la durée
(déterminée ou indéterminée) des missions successives, lorsqu'elles se sont
succédé sans aucun délai, avec une interruption résultant de l'exercice
d'un droit (vacances, maladie ou accident) ou de l'accomplissement d'une
obligation légale (service militaire) ou encore avec les quelques jours,
voire quelques semaines d'inoccupation qui résultent de la nature même
de l'emploi temporaire" (THÉVENOZ, op.cit., n. 714, p. 241; dans ce sens
également: BRENDER, Rechtsprobleme des befristeten Arbeitsvertrages,
thèse Zurich 1976, p. 39, 110 ss; contra: HUG, Rechtliche Probleme der
Teilzeitarbeit: Ferienregelung und Lohnzahlung bei Krankheit, SJZ 70
[1974] 188).

    Cependant, des débats parlementaires relatifs tant à l'adoption des
nouvelles dispositions régissant la résiliation du contrat de travail dans
le CO (BO 1985 CN 1120-1122; BO 1987 CdE 341) qu'à celle de la nouvelle
loi fédérale sur le service de l'emploi et la location de services du 6
octobre 1989 (BO 1989 CN 251-254), il résulte clairement que la volonté
du législateur est de tenir compte des impératifs du travail intérimaire,
en lui réservant un traitement juridique particulier qui tient compte de
sa spécificité et du besoin particulier de souplesse dans l'intérêt même
des travailleurs (cf. aussi: art. 19 de la loi fédérale précitée, dont
l'entrée en vigueur a été fixée au 1er juillet 1991: RO 1991 I 392 ss,
spéc. 407).

    Les dispositions des conventions qui prévoient des temps d'essai
successifs en cas de travail intérimaire ne signifient donc pas
nécessairement que les parties à de tels contrats ont l'intention d'éluder
la loi. Aussi, la conformité au CO de l'art. 2 du Règlement du personnel
temporaire de B. SA doit-elle être admise, de sorte que le principal
argument avancé par l'office recourant tombe à faux.

Erwägung 4

    4.- Sur la base des considérations qui précèdent, le droit de l'assurée
intimée à un salaire ou à une indemnité pour cause de résiliation anticipée
des rapports de travail au sens de l'art. 11 al. 3 LACI est exclu.
Partant, en l'absence de doutes quant aux droits découlant du contrat
de travail, point n'est besoin d'examiner si, dans le cas d'espèce,
la caisse de chômage aurait dû procéder conformément à l'art. 29 LACI
(sur cette question: ATF 114 V 342 consid. 6).

    C'est dès lors à bon droit, quoique pour des motifs erronés, que le
recours cantonal a été rejeté.

    La perte de travail subie par l'assurée intimée pour la période
s'étendant du 19 mars au 4 avril 1990 doit être prise en considération;
il s'impose donc de rejeter le recours de l'OFIAMT, de confirmer - par
substitution de motifs - le jugement déféré à la Cour de céans, et de
renvoyer le dossier de la cause à l'administration afin qu'elle procède
conformément aux présents considérants.

Erwägung 5

    5.- (Frais et dépens)