Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 117 IB 450



117 Ib 450

53. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public du 12 décembre 1991
en la cause André Clerc SA, à Genève c. Département fédéral de l'économie
publique (recours de droit administratif) Regeste

    Art. 23 Abs. 1 lit. c Landwirtschaftsgesetz vom 3. Oktober 1951
(LwG; SR 910.1) und Geflügelverordnung vom 22. März 1989 (SR 916.335);
Pflicht der Importeure zur Übernahme von inländischem Geflügel.

    1. Die Geflügelimporteure, die dem privatrechtlichen Vertrag zwischen
Importeuren und der Geflügelproduzentenvereinigung (Vereinigung SEG der
schweizerischen Geflügelwirtschaft) beigetreten sind, sind gegenüber
dieser Vereinigung verpflichtet, eine bestimmte Menge an einheimischem
Geflügel zu übernehmen; diese Menge bestimmt sich nach ihrem Anteil an
den Einfuhren. Im Gegenzug sind sie berechtigt, beliebige Mengen von
ausländischem Geflügel einzuführen (E. 2a).

    Demgegenüber unterstehen diejenigen Geflügelimporteure, die nicht an
diese privatrechtliche Kartellabsprache gebunden sind, den Bestimmungen
der Geflügelverordnung, welche die Erteilung einer Einfuhrbewilligung
davon abhängig macht, dass der Importeur einheimisches Geflügel übernimmt
(E. 2b).

    2. Begriff und Tragweite der Pflicht der Importeure, inländisches
Geflügel zu übernehmen; weite Auslegung des Begriffs Lieferung (E. 3
und 4).

    3. Die unterschiedliche Behandlung der beiden Kategorien von
Importeuren ausländischen Geflügels stellt keine Art. 4 BV verletzende
Ungleichbehandlung dar (E. 5).

Sachverhalt

    A.- La société André Clerc SA est spécialisée dans l'importation
et le commerce de volaille. Elle n'a pas adhéré au contrat conclu le
29 avril 1981 entre la majorité des importateurs de volaille et les
producteurs regroupés au sein de la Fédération SEG de l'aviculture suisse
(Union suisse des sociétés coopératives pour la vente des oeufs et de la
volaille) ni au nouvel accord général conclu entre les mêmes parties et
ouvert à la signature depuis le 1er mai 1991.

    Afin de se conformer, en tant qu'importateur indépendant, à
l'Ordonnance du Conseil fédéral du 22 mars 1989 concernant la prise en
charge de volaille indigène (ordonnance sur la volaille; RS 916.335),
André Clerc SA a conclu avec les abattoirs Lehnherr SA à Marin un contrat
par lequel il s'engage à prendre en charge régulièrement de la volaille
indigène. Se fondant sur ce contrat particulier, la société a présenté vers
la fin de 1989 à l'Office vétérinaire fédéral des demandes d'importation
portant sur un poids total de 1800 kg de volaille.

    Contrôlant la réalité des prises en charge annoncées, la Division
des importations et des exportations (DIE) a constaté que les quantités
prises en charge ne pouvaient pas être prouvées en l'espèce dès lors que
la société indiquait que la volaille indigène lui était livrée depuis
l'abattoir et repartait le même jour vers un restaurant dont elle ne
voulait pas dévoiler le nom et que le paiement se faisait par un surprix
sur des foies importés livrés audit restaurant. Elle a accordé à la société
des permis d'importation sous la condition que la preuve de prises en
charge physiques et effectives de volaille indigène soit établie.

    Saisi d'un recours, le Département fédéral de l'économie publique a
confirmé la décision de la DIE en considérant que l'obligation de prise en
charge impose en particulier à l'importateur de transporter physiquement
et effectivement la volaille achetée dans ses entrepôts pour l'expédier
ensuite aux clients et qu'ainsi le système de facturation utilisé ne
garantirait pas le dégagement du marché qui est à la base de tout le
système d'importation de volaille.

    Agissant par recours de droit administratif, la société André Clerc SA
demande au Tribunal fédéral d'annuler les décisions du Département fédéral
de l'économie publique et de la DIE, de renvoyer la cause à la DIE pour
qu'elle lui délivre la totalité des permis d'importation requis. La société
estime contraire au droit fédéral l'interprétation que les autorités
donnent à la notion de prise en charge et se plaint d'une inégalité de
traitement entre les importateurs ayant adhéré à l'accord général et ceux
qui prennent en charge de la volaille sur une base individuelle. Dans son
mémoire cependant, la recourante admet qu'elle n'a pas pris livraison de
la marchandise indigène mais que les abattoirs l'ont livrée directement
à la cliente après que l'importatrice la leur eut refacturée.

    Les parties eurent encore l'occasion dans une séance d'instruction
d'exposer en détail le système en vigueur dans le domaine de l'importation
de volaille et son fonctionnement notamment au regard des différences
existant entre le statut d'importateur lié par un contrat de prise en
charge individuel et celui de l'importateur ayant adhéré à l'accord
général.

    Le tribunal fédéral a rejeté le recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                  Extrait des considérants:

Erwägung 2

    2.- En Suisse, le marché de la volaille importée est en main de deux
catégories d'importateurs.

    a) Les premiers, détenant environ 90% du marché, membres pour
la plupart de l'Association suisse des importateurs de volaille et
de gibier, ont adhéré à un contrat de droit privé qui les lie à la
Fédération SEG de l'aviculture suisse, association de producteurs de
volaille. Considéré comme une mesure d'entraide au sens de l'art. 31bis
al. 4 Cst. (cf. HEUSSLER, Rechtliche Fragen der Einfuhrregelung für
landwirtschaftliche Erzeugnisse, in: Communications de droit agraire,
1983 p. 25), ce contrat, dont l'origine remonte aux années trente, a fait
l'objet de plusieurs versions successives, notamment le 29 avril 1981 -
en vigueur lorsque se sont produits les faits litigieux - et le 1er mai
1991. Il prévoit pour les importateurs une obligation globale vis-à-vis de
la Fédération des producteurs de prendre en charge une certaine quantité
de volaille indigène - de qualité standard - calculée au prorata de leurs
importations. En échange, les importateurs peuvent importer librement
la quantité de volaille étrangère qu'ils désirent. Leurs importations
totales seront prises en considération l'année suivante, dans le cadre
de l'accord général, pour déterminer la quantité globale de volaille
du pays à écouler; chaque entreprise importatrice devra, par la suite,
participer à l'écoulement de cette volaille indigène en fonction de sa
quote-part à l'importation totale de volaille.

    Dans la mesure où cette obligation de prise en charge concerne
les importateurs dans leur ensemble, ces derniers ont la possibilité
de s'organiser entre eux pour satisfaire globalement au contrat; cela
signifie qu'un importateur, ayant des difficultés à écouler les stocks
de marchandises du pays qui lui sont en principe attribués compte tenu
de ses importations, peut s'arranger avec un autre importateur ayant,
lui, suffisamment de débouchés pour de la volaille suisse, afin que ce
dernier se substitue à lui.

    Les importateurs, membres de l'accord cartellaire, sont tenus de
maintenir les prix de la volaille suisse à écouler tels qu'ils ont été
fixés par les organes contractuels (comité, commission paritaire). Ils
financent par ailleurs une caisse de compensation contractuelle -
constituée par des taxes perçues sur la volaille d'abattage qu'ils
importent - servant à abaisser le prix de la volaille suisse des
producteurs cocontractants. Enfin, selon le nouveau contrat de 1991, les
importateurs s'engagent à ne prendre en charge de la volaille indigène
que dans le cadre du contrat, c'est-à-dire qu'auprès de producteurs
cocontractants. Cette clause d'exclusivité ne figurait pas dans les
versions précédentes du contrat, et notamment dans l'acte de 1981 en
vigueur lorsque se sont déroulés les faits de la présente cause, car,
avant l'introduction de l'ordonnance sur la volaille, les membres du
cartel n'y avaient aucun intérêt (cf. consid. 5b); antérieurement, les
importateurs s'engageaient simplement à renoncer à la production et à
l'abattage de volaille indigène et les producteurs à la commercialisation
de cette même volaille (art. 1 al. 3 du contrat de 1981).

    Parmi les entreprises les plus importantes liées à l'accord général
se trouve notamment la Fédération des coopératives Migros. Compte tenu
toutefois de son poids économique particulièrement grand dans le secteur de
la volaille, cette fédération a été mise au bénéfice d'un statut spécial;
contrairement aux autres importateurs liés à l'accord général, elle ne
fait pas partie du Fonds de compensation contractuel et ses importations
n'entrent pas dans le calcul de la quantité totale de volaille importée,
déterminant pour la fixation de la prise en charge globale imposée, l'année
suivante, aux importateurs dans leur ensemble. La société alimente, en
fonction de ses propres importations, un fonds de compensation spécial
dont les prestations ne servent qu'à abaisser le prix de la volaille
indigène qu'elle produit elle-même par le biais de la société Optigal
et qui représente 60% de ses ventes de volaille. Elle dispose donc
d'un système d'importation et de prise en charge parallèle au système
applicable aux autres importateurs liés à l'accord général. Malgré cette
situation très spéciale, il faut cependant constater que, sur le principe,
la Fédération des coopératives Migros se soumet aux mêmes règles que
les autres partenaires à l'accord général. A ce titre, elle fait partie
intégrante de la première catégorie d'importateurs.

    b) Dans la mesure où le système cartellaire décrit ci-dessus repose sur
une base contractuelle, aucune obligation légale ne force une entreprise
importatrice à y adhérer ni les membres de l'accord à accepter de nouveaux
venus (cf. HEUSSLER, op.cit. p. 25; pour les conditions d'admission
au contrat: voir art. 2 al. 2 du projet de contrat d'avril 1990);
cette situation a entraîné, spécialement depuis une dizaine d'années,
la constitution d'une seconde catégorie d'importateurs comprenant tous
ceux qui se trouvent en dehors de l'accord général.

    Avant la mise en vigueur de l'ordonnance sur la volaille, le 31 mars
1989, ces importateurs pouvaient importer librement de la volaille sans
devoir participer à l'équilibrage du marché de la volaille suisse. En
pratique, ils effectuaient cependant, sans y être tenus, des versements
volontaires au Fonds de compensation mis en place dans le cadre de
l'accord général, afin d'éviter une intervention de l'Etat à leur
égard. Au fil des années, toutefois, une part toujours plus importante
d'importateurs indépendants a refusé de procéder à ces paiements
volontaires, tout en profitant pleinement de la liberté d'importer de
la volaille étrangère. Prenant acte de ce déséquilibre qui menaçait à
terme de rendre sans effet la mesure d'entraide concrétisée par l'accord
cartellaire, le Conseil fédéral a édicté à l'intention des importateurs
indépendants l'ordonnance sur la volaille, qui conditionne désormais
l'octroi de leur permis d'importation à une prise en charge obligatoire
de volaille indigène. Dans ce but, les intéressés doivent conclure avec
des producteurs ou des abattoirs du pays des contrats de prise en charge
dont le contenu minimal est prévu par l'art. 4 de l'ordonnance sur la
volaille édictée par le Département fédéral de l'économie publique le 23
mars 1989. Les permis d'importation ne leur sont attribués par la suite
qu'en fonction de la volaille indigène qu'ils ont permis d'écouler ainsi.

    Pour la période allant du 1er mai 1989 au 30 avril 1990 - période
dont dépend le présent litige -, l'art. 1 al. 2 de l'ordonnance du 23
mars 1989 fixait le rapport entre marchandise indigène et marchandise
importée à 0,365 parts pour une part (RO 1989 p. 464). La reprise
de volaille du pays dans la proportion ainsi déterminée visait à ce
que la charge pour les importateurs non liés à l'accord général soit
comparable à celle supportée en moyenne par les partenaires du cartel
(cf. OFFICE FÉDÉRAL DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES EXTÉRIEURES, Commentaire
relatif au projet d'ordonnance du Conseil fédéral concernant la prise en
charge de volaille indigène p. 7/8). Depuis, ce taux de prise en charge
a été progressivement élevé, passant à 0,42 pour 1990 (RO 1990 p. 629),
puis à 0,81 pour 1991 (RO 1991 p. 1070).

Erwägung 3

    3.- En l'occurrence, le litige porte essentiellement sur
l'interprétation de la notion de "prise en charge" contenue dans
l'ordonnance sur la volaille. Alors que la recourante prétend remplir ses
obligations par une simple transaction comptable, l'autorité intimée a
exigé une prise en charge physique et effective de la volaille indigène
qui implique le transport de la marchandise dans des entrepôts de
l'importateur.

    Pour déterminer le sens de la notion litigieuse, il faut, d'une part,
considérer les choix législatifs faits par les Chambres et le Conseil
fédéral et, d'autre part, examiner les moyens mis en oeuvre pour assurer
la réalisation des buts du législateur en les comparant aux contingences
pratiques.

    a) Ainsi, on doit constater que, bien qu'ils disposassent des
compétences législatives suffisantes, ni le législateur fédéral, ni
le Conseil fédéral n'ont prévu que les permis d'importation seraient
accordés sur la base de simples paiements aux producteurs destinés
à abaisser leurs coûts; une telle solution aurait facilement pu être
réalisée par le biais d'autres moyens d'action que la prise en charge,
tels par exemple, la perception de droits de douane supplémentaires. Au
contraire, les art. 31 et 32 de l'ordonnance générale sur l'agriculture
(RS 916.01) stipulent expressément que les importateurs doivent acquérir la
marchandise indigène à prendre en charge. Cette marchandise doit en outre
satisfaire à des normes de qualité qui sont déterminées par le Département
fédéral de l'économie publique ou les services qu'il désigne. En d'autres
termes, dans la mesure où la législation ne se limite pas à ordonner un
subventionnement des producteurs par les importateurs, mais exige de la
part de ces derniers une acquisition des produits dont la qualité est
déterminée, on doit admettre que la notion de prise en charge implique
pour l'importateur qu'il assure l'écoulement du produit. A défaut,
on ne voit pas pourquoi la qualité de la marchandise nécessiterait une
spécification, ni pourquoi la règlementation elle-même ne se limiterait
pas d'emblée au paiement d'une simple taxe à l'importation. La solution
du clearing préconisée par la recourante ne peut donc pas être retenue
puisqu'elle revient à restreindre l'activité de l'importateur à un paiement
au producteur, qui doit, dans ce cas, porter lui-même la responsabilité
de l'écoulement de sa marchandise.

    b) La même conclusion s'impose si l'on examine les moyens légaux et
réglementaires mis en oeuvre pour accomplir la volonté du législateur.

    Lorsque le législateur fédéral a introduit, à l'art. 23 al. 1 let. c
de la loi sur l'agriculture (LAgr), le concept de prise en charge de
marchandises indigènes, c'est à l'importateur qu'il a imposé cette
obligation. De même, au vu des art. 31 et 32 de l'ordonnance générale
sur l'agriculture, c'est également sur l'importateur uniquement que
le Conseil fédéral a centré toute sa réglementation générale relative
aux prises en charge; les producteurs - auxquels sont assimilés les
organismes de mise en valeur, par exemple les abattoirs (art. 23 al. 4
LAgr) - ne sont manifestement pas concernés par cette réglementation et
aucune disposition ne prévoit une intervention de l'Etat auprès d'eux
pour s'assurer du bon déroulement des prises en charge. D'ailleurs,
hormis un simple devoir d'information (art. 7 de l'ordonnance du 23
mars 1989), les producteurs livrant la marchandise prise en charge n'ont
aucune obligation dans ce domaine envers l'Etat. Cela signifie que si l'on
admettait que la recourante puisse se libérer de son obligation par une
opération comptable qui laisse à l'abattoir la complète responsabilité
de l'écoulement, on arriverait à la situation absurde que l'importateur,
principal sujet de la législation en cause, pourrait obtenir des permis
d'importation sans qu'aucune garantie existe sur l'écoulement subséquent
des volailles prétendument prises en charge; l'abattoir, dans le même
temps, deviendrait le promoteur principal de la prise en charge alors
même que l'ordonnance sur la volaille ne s'adresse pas directement à lui.

    Il est essentiel dans le système en vigueur que les importateurs
gardent la responsabilité de la prise en charge; à défaut, l'obligation
imposée aux importateurs n'irait pas au-delà d'un paiement au
producteur. Or, dans cette hypothèse, on ne voit pas comment l'Etat
pourrait refuser un permis d'importation à l'entreprise importatrice
qui a dûment rempli ses obligations purement pécuniaires lorsqu'il
se révèle que, par la suite, l'abattoir bénéficiaire n'a pas mis sur
le marché, directement et au nom de l'importateur, la viande indigène
subventionnée. L'idée du législateur étant de lier les permis d'importation
à l'équilibrage du marché par le biais des prises en charge, il est
logique que ce soit l'importateur, bénéficiaire des permis, qui endosse la
responsabilité d'un écoulement réel sur le marché suisse des marchandises
indigènes prises en charge. Dans un tel système, on ne saurait admettre
qu'un importateur puisse limiter son intervention à une simple manoeuvre
comptable; il doit lui-même veiller à l'écoulement des volailles du pays
qui lui donnent droit à ses permis d'importation.

    c) Enfin, il ne faut pas perdre de vue que, lors de la séance
d'instruction, toutes les parties ont été d'accord pour reconnaître qu'un
contrôle de la prise en charge de volailles mortes uniquement auprès
des abattoirs, plutôt qu'auprès des importateurs, se heurterait à des
difficultés pratiques majeures puisque, dans ce cas, aucune garantie ne
peut en principe être fournie que la même volaille indigène ne sert pas
abusivement à l'obtention de plusieurs permis d'importation.

    Certes, la recourante a proposé de pallier cette difficulté en adoptant
un autre système de contrôle qui consisterait à surveiller le poids à vif
de la volaille indigène livrée à l'abattoir. Outre que cette méthode de
contrôle n'est pas celle retenue par le Département fédéral de l'économie
publique - qui dispose en cette matière d'une subdélégation législative
que respecte le Tribunal fédéral -, il faut constater que la proposition
de la recourante suppose d'aller rechercher les factures de poussins et
de fourrage ou de déterminer les surfaces des halles de l'engraisseur;
pareille méthode est d'une complexité disproportionnée par rapport au
personnel dont dispose la division des importations et des exportations
pour accomplir sa tâche. De plus, au vu des explications reçues, on peut
douter que le résultat de telles investigations donne autre chose qu'un
simple ordre de grandeur sur la quantité de volaille effectivement livrée
à l'abattoir.

    d) Il n'y a donc pas lieu de reporter sur les producteurs ni sur les
abattoirs la responsabilité de la prise en charge des volailles indigènes,
ni de réduire cette prise en charge à un simple paiement. Il incombe à
l'importateur de s'assurer de l'écoulement réel de la volaille indigène
qu'il revendique pour obtenir un permis d'importation.

Erwägung 4

    4.- a) La manière dont doit se dérouler cette prise en charge peut
varier en fonction des circonstances et l'importateur soumis à cette
obligation peut l'exécuter en respectant par ailleurs les principes d'une
gestion rationnelle de son entreprise; la prise en charge qui lui est
imposée n'a pas pour but d'augmenter sans raison ses frais. En particulier,
aucune raison sérieuse tenant au dégagement du marché de la volaille
ne justifie d'exiger une livraison physique de la marchandise indigène
auprès de l'entreprise importatrice qui en est devenue propriétaire. Il
serait en effet absurde d'obliger un importateur genevois ayant des
clients à Zurich et un contrat avec un centre d'abattage à Neuchâtel de
transporter la marchandise de Neuchâtel à Genève avant de la livrer à sa
clientèle; l'importateur doit pouvoir ordonner à l'abattoir de conserver
la marchandise jusqu'à la livraison, voire de la livrer lui-même à la
clientèle.

    Il est vrai que, selon l'art. 3 al. 1 let. b en relation avec
l'art. 4 al. 1 let. d de l'ordonnance du 23 mars 1989, le Département
fédéral de l'économie publique exige une attestation de livraison de
l'entreprise d'abattage qui doit contenir cette donnée utile sur le
genre, l'état et le conditionnement de la volaille lors de sa livraison
à l'importateur de volaille partie au contrat. Cette condition, visant
à s'assurer du placement de la marchandise par l'importateur lui-même,
n'est pas en contradiction avec les considérations précédentes; la notion
de livraison, étroitement liée à celle de transfert de la possession au
sens des art. 922 ss CC, n'exige pas toujours que le nouveau propriétaire
se saisisse physiquement de la marchandise; il peut agir par le biais
d'intermédiaires ou de représentants les plus divers. Il convient donc
d'interpréter largement la notion de livraison figurant à l'art. 3 de
l'ordonnance du 23 mars 1989, qui ainsi respecte clairement les limites de
la délégation contenue à l'art. 3 al. 5 de l'ordonnance sur la volaille;
au surplus, une telle interprétation s'avère conforme au principe de
la proportionnalité puisqu'elle laisse aux importateurs concernés la
possibilité de choisir d'exécuter la prise en charge obligatoire de la
manière la plus rationnelle, sans leur imposer des frais de transport
inutiles.

    Dans le même sens, l'art. 5 al. 1 de l'ordonnance du 23 mars
1989 n'impose pas aux importateurs d'être propriétaires d'un certain
volume de locaux ou d'installations. Il faut uniquement qu'ils aient à
disposition des locaux suffisants par rapport au volume et à la nature
de leurs affaires; peu importe qu'il s'agisse de leurs propres locaux ou
d'installations appartenant à des entreprises tierces.

    b) Cela étant, l'importateur doit toutefois demeurer le responsable
de l'écoulement de la marchandise (cf. consid. 3). Quelle que soit la
forme juridique choisie pour ses rapports avec l'entreprise d'abattage ou
le producteur, il ne peut pas se décharger de cette obligation, dont le
respect se juge sous l'angle économique. Il faut voir si l'importateur
peut prouver que les produits du pays dont il revendique la prise en
charge ont été effectivement proposés aux consommateurs. L'intensité
d'un tel contrôle varie en fonction de la structure juridique choisie par
l'importateur; si ce dernier prend physiquement en charge la marchandise
dans ses entrepôts et utilise ses propres canaux de distribution, le
contrôle sera aisé et rapide; en revanche, si l'intéressé choisit une voie
moins immédiate pour placer la volaille, les investigations auxquelles
devront se livrer les autorités avant d'accorder les permis d'importation
seront plus complexes et plus attentatoires au secret d'affaires. Compte
tenu des différentes formes juridiques et économiques que peut prendre
le placement de la marchandise, il est exclu d'établir a priori une
liste exhaustive des renseignements que peut requérir l'autorité sur
la base de l'art. 7 de l'ordonnance du 23 mars 1989. En cette matière,
les besoins dépendent étroitement des circonstances. Néanmoins, si les
informations nécessaires ne sont pas fournies par l'importateur ou si
les investigations à entreprendre par les autorités impliquent des frais
disproportionnés, les permis sollicités doivent être refusés.

    c) En l'espèce, la prise en charge dont se prévaut la recourante pour
obtenir des permis d'importation est des plus discutables. La société
importatrice a tout d'abord varié dans ses allégations puisque, devant
les autorités administratives, elle a prétendu qu'une prise en charge
physique de la volaille avait eu lieu avec livraison de la marchandise
à un restaurant dont elle désirait taire le nom; selon ses allégations
d'alors, la preuve de ces livraisons ne pouvait pas être apportée
directement du moment que la marchandise, objet de la prise en charge,
n'avait pas été facturée à ce client, le paiement s'étant opéré par le
biais d'une majoration du prix de la volaille importée livrée par la
suite à ce même client. Devant le Tribunal fédéral, la recourante change
soudain d'explication pour déclarer qu'elle n'a pas pris livraison de la
marchandise qui a été en réalité refacturée aux abattoirs, ces derniers
s'étant chargés eux-mêmes de la livraison à la clientèle.

    Les explications contradictoires de la recourante sur la manière dont
s'est déroulée la prise en charge de la volaille indigène suscitent la
plus grande prudence. Son mutisme obstiné sur le nom du restaurant dont
la divulgation permettrait de faire aisément la part de la vérité et
du mensonge s'avère peu compréhensible et autorise tous les doutes sur
sa bonne foi. A première vue, les manoeuvres de l'importateur visent
uniquement à tourner la loi en obtenant frauduleusement les permis
désirés; on pourrait même s'interroger sur le caractère pénal de ces
agissements. Dans ces conditions, c'est à juste titre que l'autorité
a tenté d'obtenir des renseignements plus précis sur l'opération, en
exigeant notamment la production d'une liste des clients de l'importateur;
bien qu'on puisse douter qu'à elle seule cette liste soit de nature
à prouver la réalité d'une prise en charge de volaille indigène, cette
mesure d'instruction constitue une base indispensable à l'enquête que les
autorités doivent mener dans une pareille situation en vue de s'assurer
que l'importateur assume réellement la responsabilité de l'écoulement des
quantités annoncées de marchandises du pays. Face au refus de la recourante
de coopérer, l'autorité n'a pas violé le droit fédéral en accordant des
permis d'importation calculés en fonction des seules prises en charge
qui auront été prouvées de manière incontestable.

    En tout état de cause, les nouvelles explications fournies dans
le mémoire de recours de droit administratif - dont les autorités
administratives n'ont pas eu connaissance avant de statuer - ne
modifient pas les considérations précédentes. Le système de facturation
et refacturation de la volaille indigène prétendument mis en place par
la recourante est tout aussi douteux. A première vue, cette méthode ne
sert qu'à se soustraire à la responsabilité d'écoulement de la marchandise
qui incombe à l'importateur en vertu des ordonnances sur la volaille. Si,
contre toute vraisemblance, tel ne devait pas être le cas, rien n'empêche
un importateur de bonne foi de présenter les documents aptes à prouver
ses dires. Tant que ces renseignements ne sont pas à la disposition des
autorités, celles-ci n'ont pas à délivrer de permis d'importation.

Erwägung 5

    5.- La recourante estime, par ailleurs, qu'en édictant l'ordonnance
sur la volaille, le Conseil fédéral aurait créé une discrimination au
préjudice des importateurs indépendants par rapport à ceux qui ont adhéré
à l'accord général.

    Cette critique est sans pertinence. Le régime différent appliqué aux
deux catégories d'importateurs est motivé par des raisons juridiques et
pratiques qui excluent une violation de l'art. 4 Cst.

    a) Tout d'abord, il faut constater que le contrat général que critique
la recourante est, sur son principe, largement antérieur à la nouvelle
législation sur la prise en charge obligatoire de volaille puisque son
origine remonte aux années trente. Les importateurs liés à cet accord
cartellaire prennent en charge de la volaille indigène sur une base
volontaire, ce qui, pendant longtemps, a rendu inutile toute intervention
de l'Etat dans ce secteur. L'introduction d'une réglementation de droit
public s'est avérée indispensable au moment où un nombre non négligeable
d'importateurs - parmi lesquels la recourante - a refusé de se plier aux
contraintes qui découlent de l'accord général de droit privé et a préféré
profiter des avantages qu'il pouvait tirer d'un marché d'importation
libre. Face à ce déséquilibre menaçant à terme de détruire le système
de droit privé qui fonctionnait jusque-là à satisfaction, le Conseil
fédéral a dû prendre des mesures pour que les importateurs indépendants
participent également au dégagement du marché de la volaille indigène;
il a, par conséquent, décidé de soumettre ces derniers - et eux seuls -
à une réglementation de droit public qui subordonne l'octroi de permis
d'importation à une prise en charge individuelle de volaille. Dès lors que
l'ordonnance sur la volaille vise exclusivement à rétablir l'équilibre du
marché rompu par le comportement des importateurs indépendants, il était
normal que les règles ainsi édictées ne s'adressent qu'à ces derniers. Sur
le principe, le fait que les normes de droit public ne concernent que
cette catégorie d'importateurs est donc pleinement justifié.

    b) La recourante voit également une inégalité de traitement contraire
à l'art. 4 Cst. dans les méthodes différentes de contrôle des prises
en charge appliquées aux deux catégories d'importateurs. Dans le cas
des importateurs indépendants, l'administration exige des preuves d'une
prise en charge effective alors que, pour les importateurs liés à l'accord
général, un contrôle des factures suffit.

    Dans sa critique, la recourante perd de vue que les nécessités du
contrôle ne sont pas les mêmes pour les deux catégories d'importateurs, les
importateurs liés à l'accord général reprenant globalement la production
indigène entière de leurs partenaires producteurs.

    Les importateurs ayant adhéré à l'accord cartellaire ne s'adressent
qu'à leurs partenaires producteurs pour s'approvisionner en volaille
indigène; réciproquement, les producteurs, partie à l'accord, ne livrent
qu'à leurs cocontractants importateurs la volaille qu'ils produisent. Il
s'ensuit que l'accord général crée un système clos, dans lequel le
circuit commercial mis en place entre les groupes de partenaires
économiques (producteurs et importateurs) est rigide; cette rigidité
facilite grandement les contrôles, surtout si l'on tient compte du rôle
central attribué au Fonds de compensation contractuel qui centralise
les informations.

    Il est vrai qu'avant la signature du contrat de 1991, aucune clause
contractuelle expresse n'exigeait des partenaires l'exclusivité des
relations liées à la prise en charge de volaille. Cette circonstance
ne change rien toutefois à la nature fermée du système qui prévalait
également dans les versions antérieures du contrat, et notamment dans celle
de 1981. Il n'est pas apparu, en effet, au cours des enquêtes, que des
producteurs ou importateurs, parties à l'accord général, auraient conclu
avant 1989 - année de mise en vigueur de l'ordonnance sur la volaille -
des contrats de prise en charge avec des partenaires indépendants en
dehors de l'accord général. On ne voit pas d'ailleurs quel avantage un
importateur, partie à l'accord cartellaire et, à ce titre, versant des
contributions au Fonds de compensation contractuel, aurait pu trouver à
s'approvisionner auprès d'un autre producteur dont le prix des volailles
ne bénéficie pas des prestations du Fonds de compensation.

    Lorsqu'on veut déterminer l'intensité nécessaire du contrôle des
prises en charge, il ne faut pas perdre de vue que les services de
l'administration disposent d'une place privilégiée dans les organes mis
en place par l'accord général puisque la Division des importations et des
exportations, l'Office fédéral du contrôle des prix et l'Office fédéral de
l'agriculture siègent dans la Commission paritaire chargée de surveiller
l'application de l'accord et qu'ils y assument en général les fonctions
de président et vice-président. Leur pouvoir est encore accru par le fait
que ces dernières personnes sont également membres du Comité exécutif de la
commission et que le président dispose dans ce cadre d'un droit de veto. La
Division des importations et des exportations gère en outre le Fonds de
compensation de la volaille qui centralise toutes les informations sur les
importations et les prises en charge. L'administration se trouve donc dans
une position privilégiée qui lui facilite le contrôle des prises en charge.

    Dans ces conditions très particulières tenant, d'une part, au circuit
commercial rigide entre producteurs et importateurs liés à l'accord et,
d'autre part, à la place de l'administration dans les organes de contrôle
contractuels, on peut admettre qu'une appréciation de la réalité des
prises en charge sur la base des factures et des bons de livraisons suffit.

    A l'inverse, les importateurs non liés à l'accord cartellaire sont
libres de s'adresser à toute exploitation paysanne qui veut bien leur
livrer de la volaille indigène. Etant par définition indépendants,
ces importateurs peuvent disposer d'une seule source de volaille ou de
plusieurs; ils peuvent également partager cette source avec d'autres
importateurs indépendants. Le circuit commercial étant ainsi totalement
ouvert et dispersé, il n'est pas injustifié d'exiger de celui qui prétend
avoir réalisé une prise en charge qu'il prouve la réalité de ses dires
autrement que par présentation d'un contrat et d'une facture. Le contrôle
doit être d'autant plus serré que l'administration ne participe absolument
pas à la gestion réelle de ces prises en charge comme elle le fait dans
le cadre du Fonds de compensation contractuel.

    La situation des deux catégories d'importateurs justifie dès lors la
différence de traitement dont se plaint la recourante.

    c) Les autres moyens que la recourante a soulevés dans le cadre
du grief de violation de l'art. 4 Cst. sont sans rapport avec l'objet
du litige.

    Le fait que les importateurs ayant adhéré à l'accord général puissent
transférer dans certains cas leurs contingents de volaille à prendre en
charge auprès d'autres contractants est sans aucun lien avec la question
litigieuse qui tient en l'espèce aux contrôles et à l'étendue de la prise
en charge; elle ne concerne pas d'éventuels transferts de contingents. Il
est donc inutile de se prononcer sur cette critique.

    Pour la même raison, le Tribunal fédéral n'a pas à statuer sur le
fait que certains producteurs liés à l'accord général livrent en guise
de volaille prise en charge de la marchandise issue d'exploitations
non paysannes et obtiennent sur cette base des paiements du fonds
de compensation contractuel. Cette situation - des plus choquantes -
n'est pas en cause dans le cas particulier puisque le présent litige ne
porte pas sur la qualité de la volaille prise en charge. Rien ne justifie
dès lors d'examiner la question. Tout au plus convient-il d'inviter la
Division des importations et des exportations à faire pression sur les
parties à l'accord général pour que de la volaille non protégée ne soit
plus prise en charge par les importateurs.

    Enfin, quelle que soit leur valeur, les critiques concernant le taux
de prise en charge fixé pour 1991 (0,81 part de volaille indigène pour 1
part de volaille importée; RO 1991 p. 1070) sont également hors de propos
puisque ce taux n'était pas en vigueur au moment de la survenance du
litige et qu'à cette époque, les importateurs indépendants ne devaient
prendre en charge que 0,365 part de volaille indigène pour 1 part de
volaille importée.

    d) Quant à l'inégalité de traitement entre importateurs indépendants
que relève la recourante en comparant sa situation à celle de l'entreprise
Grand comestibles à Carouge, il faut constater que, si les contrats
de prise en charge de la volaille qui lient ces deux importateurs
aux abattoirs Lehnherr SA sont identiques, l'exécution effective de
l'obligation a été réalisée de manière différente, la maison Grand
comestibles n'ayant pas choisi de recourir à un système douteux de
facturation et refacturation pour assurer le placement de la volaille.

    La recourante n'est donc pas victime d'une inégalité de traitement
contraire au droit fédéral.

Erwägung 6

    6.- Lors de l'audience d'instruction ainsi que dans son dernier
mémoire, la recourante s'est aussi plainte du fait que les membres à
l'accord cartellaire ont posé des conditions draconiennes à une éventuelle
adhésion des importateurs indépendants, rendant, dans son cas, cette
démarche impossible.

    Même si la recourante ne parvient pas à écouler annuellement les 25
tonnes de volaille indigène nécessaires pour prétendre à une adhésion à
l'accord général, cela ne signifie pas encore qu'il faut la dispenser
d'observer les règles de l'ordonnance sur la volaille. Ces règles
ont été établies pour ceux qui se situent, volontairement ou non, en
dehors de l'accord cartellaire. Elles tendent à mettre à la charge des
importateurs indépendants des obligations équitables, compte tenu des
efforts déployés de leur côté par les parties à l'accord général. Si les
statuts des deux catégories d'importateurs diffèrent profondément, il faut
cependant souligner que chacun bénéficie d'avantages et d'inconvénients
qui, en fin de compte, s'équilibrent. Ainsi, le fait que, dans certains
cas, un importateur ne puisse pas adhérer à l'accord général en raison
de la taille trop restreinte de son entreprise ne saurait être considéré
comme un handicap justifiant de ne pas appliquer la législation édictée
en matière d'importation de volaille.