Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 117 IB 347



117 Ib 347

42. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile du 17 octobre 1991 dans la
cause L. contre dame B. (recours de droit public) Regeste

    Art. 17 Abs. 1 Ziff. 2 des Vertrags zwischen der Schweiz und Frankreich
über den Gerichtsstand und die Vollziehung von Urteilen in Zivilsachen,
vom 15. Juni 1869; ordentliche Vorladung.

    1. Der Beklagte kann darauf verzichten, die Unrechtmässigkeit der
Vorladung geltend zu machen, indem er sich vorbehaltlos auf die Sache
einlässt. Doch wird der Mangel durch die Einlassung nur geheilt, wenn der
Beklagte davon Kenntnis hatte (Bestätigung der Rechtsprechung; E. 2b/aa).

    2. Da durch das Erfordernis der ordentlichen Vorladung der Anspruch
auf rechtliches Gehör geschützt wird, bildet es für das schweizerische
Verfahrensrecht Teil des Ordre public. Dieser ist verletzt durch ein
Urteil, das gegen einen schweizerischen Beklagten ergangen ist, der innert
der kurzen ihm zur Verfügung stehenden Zeit (im vorliegenden Fall ein
einziger voller Tag) zwischen der Vorladung und der Gerichtsverhandlung
nicht in der Lage gewesen ist, seine Rechte in Frankreich zu wahren
(E. 2b/bb).

Sachverhalt

    A.- Le 13 février 1989, dame B. a ouvert action contre B.  devant le
Tribunal de commerce d'Aubenas (France) en paiement de 38'693.01 et
5'000 FF. Le défendeur a contesté la prétention, affirmant n'avoir
été que le "porte-parole" de L., "lequel a été le seul bénéficiaire de
la commande". La demanderesse a dès lors requis l'assignation de L.,
par acte remis le 1er juin 1989 au Procureur de la République auprès du
Tribunal de Grande Instance de Privas. L'assignation à comparaître devant
le Tribunal de commerce le 13 juin 1989 lui a été notifiée le 9 juin 1989.

    Statuant en contradictoire le 27 juin 1989, le Tribunal de commerce
a mis hors de cause B. et condamné L. à payer 38'693.01 FF avec intérêts
et mis à sa charge les frais et dépens. Ce jugement lui a été notifié le
27 octobre 1989.

    Le 16 juillet 1990, dame B. a fait notifier à L. un commandement de
payer la somme de 10'506 francs avec intérêts à 12% dès le 1er juin 1989,
auquel le poursuivi a fait opposition.

    Par jugement du 29 janvier 1991, le Président du Tribunal du district
d'Yverdon a rejeté la requête de mainlevée définitive, au motif que le
débiteur n'avait pas été régulièrement assigné. Statuant le 21 mars 1991,
la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal vaudois a admis
le recours de la poursuivante et prononcé la mainlevée définitive.

    Agissant par la voie du recours de droit public, L. requiert
l'annulation de l'arrêt rendu le 21 mars 1991.

    Le Tribunal fédéral a admis le recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Considérant en droit:

Erwägung 2

    2.- b) Selon l'art. 17 al. 1 ch. 2 de la Convention franco-suisse
(RS 0.276.193.491), l'autorité saisie de la demande d'exécution peut
refuser de l'ordonner si la décision a été rendue sans que les parties
aient été dûment citées et légalement représentées, ou défaillantes.

    Le recourant et la cour cantonale s'accordent pour admettre que la
citation était bien irrégulière, l'assignation n'ayant pas été délivrée
quinze jours au moins avant la date de l'audience, comme le prescrit
l'art. 856 du nouveau Code de procédure civile français (NCPC). Mais
contrairement au recourant, l'autorité cantonale estime que ce dernier
a couvert le vice en procédant sans réserve sur le fond, sans exciper de
l'irrégularité de procédure.

    Qu'il s'agisse d'un jugement rendu en contradictoire ou par défaut,
la convention exige la réalisation d'une condition préalable: la citation
régulière des parties (ATF 115 Ib 199 consid. 4a/aa, 58 I 186). Cette
condition n'est respectée que si la citation du défendeur satisfait aux
exigences de forme et de fond posées par la lex fori et si elle lui est
notifiée dans les formes requises par la législation du lieu de résidence
et assez tôt pour lui permettre de défendre ses intérêts aux débats (ATF
115 Ib 199 consid. 4a/aa, 75 I 149 consid. 4a, 58 I 186, 50 I 423). Comme
l'irrégularité de la citation n'est pas douteuse en l'espèce, il s'agit
d'examiner si ce vice a été couvert.

    aa) Selon la jurisprudence, le défendeur peut renoncer à exciper de
l'irrégularité de la citation en procédant au fond sans faire de réserves
(ATF 75 I 154 consid. 5, 58 I 187 ss). Ce principe, consacré notamment
par l'art. 27 al. 2 let. a LDIP, est du reste unanimement admis (cf.
PETITPIERRRE, La reconnaissance et l'exécution des jugements civils
étrangers en Suisse, Paris 1925, p. 189/190; PERRET, La reconnaissance
et l'exécution des jugements étrangers à Genève, in SJ 105/1983, p. 264;
PROBST, Die Vollstreckung ausländischer Zivilurteile in der Schweiz nach
den geltenden Staatsverträgen, thèse Berne 1936, p. 107/108 et 108/109;
STAEHELIN, Die Staatsverträge über Zivilprozess und Zwangsvollstreckung
nach der neueren Praxis des Bundesgerichts, in Festgabe Bundesgericht,
Bâle 1975, p. 584). L'exigence d'une citation régulière vise en effet
à sauvegarder les intérêts du défendeur, qui peut dès lors renoncer à
cette protection (PROBST, op.cit., p. 108/109; STOJAN, Die Anerkennung
und Vollstreckung ausländischer Zivilurteile in Handelssachen, thèse
Zurich 1986, p. 129). Mais cette renonciation suppose, logiquement, que
le défendeur connaisse le vice en question; on ne saurait renoncer à une
garantie à laquelle on ne sait avoir droit. La jurisprudence va dans ce
sens: selon l'ATF 58 I 187, il faut que la partie "ait été citée dûment
ou, du moins, ait pu couvrir et ait couvert, le sachant et le voulant,
le vice de procédure consistant dans l'absence de citation régulière. Tel
sera notamment le cas lorsque, n'ayant pas été citée dûment et ayant
connaissance de cette irrégularité...", elle procède au fond. L'ATF 75 I
154 consid. 5 part des mêmes prémisses. En l'espèce, rien dans le dossier
ne permet d'affirmer que tel serait le cas et l'on ne saurait déduire une
telle attitude du seul fait, pour le recourant, de s'être présenté devant
le tribunal (contra LERESCHE, L'exécution des jugements civils étrangers
en Suisse et des jugements civils suisses dans quelques Etats étrangers,
Aarau 1927, p. 37). En effet, le seul jour ouvrable à sa disposition -
le lundi 12 juin - ne lui permettait guère de se renseigner à temps sur
la régularité d'une citation française.

    bb) La garantie d'une citation régulière a pour but d'assurer à chaque
partie le droit de ne pas être condamnée sans avoir été mise en mesure de
défendre ses intérêts (ATF 115 Ib 201, 105 Ib 46/47, 102 Ia 311 let. a,
97 I 254 consid. 3, 58 I 187). L'art. 17 al. 1 ch. 2 de la convention
ne fait dès lors que concrétiser un postulat de justice élémentaire
(PILLET, Les conventions internationales relatives à la compétence
judiciaire et à l'exécution des jugements, Paris 1913, p. 241): celui
du droit d'être entendu (ATF 38 I 547, 36 I 711 consid. 2, 19 p. 731
consid. 2; CURTI, Der Staatsvertrag zwischen der Schweiz und Frankreich
betreffend den Gerichtsstand und die Urteilsvollziehung, thèse Zurich
1879, p. 159 let. b; PERRET, op.cit., p. 264; DARBELLAY, Le droit d'être
entendu, in RDS 83/1964 II, p. 481). Aussi, la régularité de la citation
fait-elle partie de l'ordre public formel ou procédural (ATF 116 II 629
let. a; STOJAN, op.cit., p. 123; SCHNYDER, Das neue IPR-Gesetz, 2e éd.,
Zurich 1990, p. 40/41); l'art. 27 al. 2 let. b LDIP érige d'ailleurs ce
postulat en motif distinct de refus de l'exequatur (cf. ATF 116 II 629
let. a). Or, selon la jurisprudence constante, un jugement étranger peut
être incompatible avec l'ordre public suisse non seulement à cause de son
contenu matériel, mais également en raison de la procédure dont il est issu
(ATF 116 II 629 let. a, 111 Ia 14 consid. 2a, 107 Ia 199 consid. 3, 105
Ib 47 let. b, 103 Ia 201 let. b, 102 Ia 313 consid. 5 et les arrêts cités).

    Tel est à l'évidence le cas en l'espèce. Dans un arrêt du 16 mars 1960,
le Tribunal fédéral a jugé le cas d'un plaideur, domicilié en Allemagne,
dont l'assignation à comparaître devant le juge le 21 novembre 1959 avait
été mise à la poste le 17 novembre 1959 et ne lui était parvenue que le
matin même du jour fixé pour l'audience. Il a considéré que ce délai,
déjà très bref pour une personne résidant en Suisse, était absolument
insuffisant pour une partie habitant à l'étranger, qui était dès lors
dans l'impossibilité de faire valoir ses arguments. Or, cette partie avait
le droit de consulter un homme de loi, ce qui lui était impossible en un
temps si bref. Enfin, on ne pouvait lui faire grief de ne pas avoir avisé
le juge de sa situation et lui demander le renvoi de l'audience. Et le
Tribunal fédéral de conclure: "Assignée si tard qu'elle n'a pas pu faire
valoir ses moyens, la recourante a été privée du droit d'être entendue"
(ATF 86 I 3).

    Cette solution se justifie également dans le cas présent. L'assignation
à comparaître à l'audience du mardi 13 juin 1989 est parvenue au recourant
le vendredi 9 juin; le délai, qui comprenait un samedi et un dimanche,
ne comptait donc qu'un seul jour utile plein. La procédure devant les
Tribunaux de commerce est certes peu formaliste et orale (art. 871
al. 1 NCPC); lorsque l'affaire est simple, elle peut être jugée à la
première audience déjà (VINCENT/GUINCHARD, Procédure civile, 21e éd.,
Paris 1987, p. 620/621 Nos 694 et 695). Il n'en demeure pas moins qu'un
si bref délai d'assignation ne permettait pas au recourant de consulter
avocat et de défendre pleinement ses intérêts - en particulier dans la
procédure probatoire - devant un tribunal étranger appliquant la lex fori
au fond du litige. Il faut en outre relever que l'action a été ouverte
contre B., non contre le recourant; avant sa citation à comparaître,
ce dernier n'avait pas à s'attendre à être recherché (cf. ATF 115 Ib
201), bien qu'il n'apparaisse pas véritablement comme un tiers au procès.
Dans ces conditions, le jugement du Tribunal de commerce d'Aubenas viole
manifestement l'ordre public procédural suisse, le recourant n'ayant pas
été en mesure de défendre ses intérêts. Partant, l'exequatur ne pouvait
lui être accordé et c'est à tort que l'autorité cantonale a prononcé la
mainlevée définitive de l'opposition.