Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 116 V 1



116 V 1

1. Arrêt du 26 janvier 1990 dans la cause Office fédéral des assurances
sociales contre X et Commission cantonale genevoise de recours en matière
d'AVS Regeste

    Art. 30 Abs. 2 und 30ter AHVG, Art. 23bis, 135 Abs. 1 und 140
Abs. 1 AHVV: Eintragung eines der Sonderbeitragspflicht unterliegenden
Einkommens im individuellen Konto. Der Sonderbeitrag, der bei einer
Betriebsliquidation im Jahr der Entstehung des Anspruchs auf eine
Altersrente geschuldet ist, muss bei der Berechnung dieser Rente
berücksichtigt werden; das entsprechende Einkommen ist im individuellen
Konto dem Jahr vor der Entstehung des Rentenanspruchs gutzuschreiben.

Sachverhalt

    A.- X, né en 1921, marié, a exploité, dès le mois d'août 1968 et
jusqu'au 30 mai 1986, un établissement public. Il a vendu cet établissement
par acte du 21 mars 1986, en exécution d'une promesse de vente du 10
décembre précédent. Il a cessé depuis lors toute activité professionnelle.

    X ayant accompli sa 65e année le 29 mars 1986, la Caisse de
compensation WIRTE lui a accordé, le 30 avril 1986, une rente ordinaire
de vieillesse pour couple de 1'555 francs, fondée sur une durée complète
de cotisations de 38 années et un revenu annuel moyen de 27'648 francs.

    Le 23 novembre 1987, l'administration fiscale du canton de Genève a
informé la caisse de compensation que le bénéfice de liquidation réalisé
en 1986 par l'assuré, en raison de la remise de son commerce, et soumis
à l'impôt fédéral direct, s'était élevé à 2'814'680 francs. Se fondant
sur cette communication, la caisse de compensation a rendu une décision,
le 25 novembre 1987, par laquelle elle réclamait à X une cotisation
spéciale de 261'564 fr. 40. La cotisation était due pour l'année 1986,
durant laquelle le bénéfice avait été réalisé.

    L'assuré s'étant étonné que la cotisation spéciale ne fût pas prise
en compte dans le calcul de sa rente, la caisse de compensation lui a
signifié, par une nouvelle décision, du 21 décembre 1987, qu'une révision
de son droit était exclue au regard des dispositions légales.

    B.- X a recouru contre cette dernière décision devant la Commission
cantonale genevoise de recours en matière d'AVS, faisant valoir que
le bénéfice soumis à cotisation spéciale résultait de l'activité
professionnelle qu'il avait déployée entre 1968 et 1986.

    Dans sa réponse, la caisse de compensation a exposé que, dès
l'instant où l'assuré était au bénéfice d'une rente depuis le 1er avril
1986, seules les cotisations versées avant le 31 décembre 1985 devaient
être prises en considération. Dans une écriture ultérieure, elle s'est
toutefois ravisée, en indiquant que l'intéressé avait "travaillé à perte",
durant les quinze années environ d'exploitation de son établissement
(il n'avait acquitté que la cotisation minimum pendant cette période);
comme le produit de son travail n'était devenu apparent qu'au moment de la
vente de l'établissement, il se justifiait, en définitive, de considérer
la cotisation spéciale comme étant formatrice de rente.

    Par jugement du 26 août 1988, la commission cantonale a admis le
recours et elle a invité la caisse de compensation à répartir sur un
compte individuel "complémentaire", pour la période de janvier 1969 à
décembre 1985, le revenu ayant servi de base au calcul de la cotisation
spéciale. Elle a relevé que l'assuré avait eu l'intention de vendre
son commerce en 1985 déjà, de sorte que, s'il avait été conscient
de l'importance que pouvait revêtir la date de la liquidation, il se
serait vraisemblablement efforcé de réaliser son bénéfice avant la fin
de l'année 1985. D'autre part, si l'intéressé avait effectivement payé
la seule cotisation minimum durant plusieurs années, cela était dû,
selon la commission, non pas à une volonté d'éluder les règles de l'AVS,
mais au fait qu'il avait investi tous ses gains dans la transformation
et l'embellissement de son auberge.

    C.- Contre ce jugement, l'Office fédéral des assurances sociales (OFAS)
interjette un recours de droit administratif dans lequel il conclut au
rétablissement de la décision du 21 décembre 1987. A titre subsidiaire,
il demande que le revenu soumis à cotisation spéciale soit inscrit au
compte individuel de l'assuré pour la seule année 1985, et non pas réparti
sur l'ensemble des années d'activité.

    X se rallie à la conclusion subsidiaire de l'OFAS. La caisse de
compensation en fait de même.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- Au titre de revenu provenant d'une activité lucrative indépendante
(art. 4 al. 1 en relation avec l'art. 8 LAVS) et conformément à
l'art. 23bis RAVS, une cotisation spéciale est prélevée sur les bénéfices
en capital et les augmentations de valeur au sens de l'art. 17 let. d
RAVS, s'ils sont soumis à l'impôt annuel spécial selon l'art. 43 AIFD
(al. 1). Cette cotisation est due pour l'année durant laquelle le bénéfice
en capital ou l'augmentation de valeur ont été réalisés (al. 2).

    L'obligation d'acquitter une cotisation spéciale n'est en l'espèce
pas en cause. Ne l'est pas non plus le montant de 261'564 fr. 40 mis
à la charge de l'intimé. Le litige se résume ainsi au point de savoir
si, et le cas échéant de quelle manière, un revenu soumis à cotisation
spéciale durant l'année de l'ouverture du droit à la rente de vieillesse
(en l'espèce l'année 1986) peut être pris en compte dans le calcul de
celle-ci. Dans un arrêt récent en la cause L., du 5 mai 1988, le Tribunal
fédéral des assurances a jugé, sans autre développement, qu'une telle
possibilité n'était pas compatible avec l'art. 30 al. 2 LAVS: selon cette
disposition, le revenu annuel moyen - sur la base duquel la rente est
calculée (art. 30 al. 1 LAVS) - s'obtient en divisant le revenu total
sur lequel des cotisations ont été payées par le nombre des années de
cotisations; on ne tient compte toutefois que des cotisations que l'assuré
a payées du 1er janvier de l'année suivant celle où il a accompli sa 20e
année au 31 décembre de l'année qui précède l'ouverture du droit à la
rente, et des années de cotisations correspondantes.

    La question soulevée ici mérite toutefois un réexamen à la lumière
de l'argumentation des premiers juges, ainsi que des avis exprimés
respectivement par la caisse de compensation et l'OFAS.

Erwägung 2

    2.- (Pouvoir d'examen)

Erwägung 3

    3.- Conformément à l'art. 9 al. 4 LAVS, le revenu de l'activité
indépendante est établi, en règle ordinaire, par les autorités fiscales
cantonales. Les caisses de compensation sont liées par les données
communiquées par ces dernières (art. 23 al. 4 RAVS). Cela vaut aussi
dans le cas de la cotisation spéciale sur les bénéfices en capital et
les augmentations de valeur (ATF 113 V 7 consid. 2; RCC 1986 p. 655
consid. 2b).

    L'OFAS invoque, précisément, la force contraignante des données
fiscales pour l'administration de l'AVS. Il rappelle aussi que le
législateur a institué, pour les assurés de condition indépendante,
un système de perception des cotisations fondé sur les règles du droit
fiscal fédéral. Or, pour ce qui est de la perception de l'impôt annuel
spécial selon l'art. 43 AIFD, c'est la date de la réalisation du gain
qui est déterminante, même si l'impôt a le caractère "d'un décompte
final avec le fisc au sujet des réserves dissoutes au cours des dernières
années d'exploitation et jusqu'alors non imposées" (cf. MASSHARDT/GENDRE,
Commentaire IDN, note 2 ad art. 43). Il ne saurait donc, selon l'office,
en aller autrement en matière d'AVS, où la cotisation est prélevée au
moment de l'obtention du bénéfice; ici également les périodes de calcul
et de cotisations se recouvrent, l'une et l'autre englobant l'année durant
laquelle le bénéfice a été obtenu: la cotisation spéciale est non seulement
due au moment de l'encaissement du bénéfice, mais aussi pour l'année de
sa réalisation. Par conséquent, il ne serait pas possible, en l'espèce,
d'inscrire le revenu soumis à cotisation pour les années (antérieures)
de l'activité professionnelle.

    Au surplus, ajoute l'OFAS, si l'on opérait la répartition prescrite
par la juridiction cantonale, cela permettrait de combler artificiellement
des années de cotisations manquantes et conduirait, inévitablement, à
des abus. Sur le plan de la technique administrative, il en résulterait
des difficultés pratiquement insurmontables, liées à la correction des
comptes individuels. Dès lors, si l'on devait malgré tout considérer la
cotisation en cause comme formatrice de rente, il faudrait inscrire le
gain obtenu en regard de la seule année 1985.

Erwägung 4

    4.- a) Selon l'art. 30ter LAVS, il est établi pour chaque assuré tenu
de payer des cotisations des comptes individuels où sont portées les
indications nécessaires au calcul des rentes, le Conseil fédéral étant
chargé de régler les détails. D'après l'art. 135 al. 1 RAVS, chaque caisse
de compensation tient, sous le numéro d'assuré, des comptes individuels
des revenus d'activités lucratives pour lesquelles les cotisations lui
ont été versées jusqu'à l'ouverture du droit à une rente de vieillesse.
L'inscription comprend notamment l'année de cotisations et la durée
de cotisations en mois, ainsi que le revenu annuel en francs (art. 140
al. 1 let. d et e RAVS).

    Le Tribunal fédéral des assurances a déjà eu l'occasion de constater
que, selon le système légal, le revenu soumis à cotisations d'une personne
exerçant une activité lucrative dépendante doit être inscrit au compte
individuel pour l'année durant laquelle l'assuré a exercé l'activité
en question, car c'est au cours de cette même année qu'a pris naissance
l'obligation de cotiser (ATF 111 V 165 consid. 3b et 166 consid. 4). En
cas de versement ultérieur du salaire, l'inscription au compte individuel
pour l'année du paiement n'est admissible que si une telle opération ne
peut influer défavorablement sur les droits de l'assuré lors du calcul
futur d'une rente ou si elle ne conduit pas à éluder l'obligation légale
de cotiser des personnes n'exerçant aucune activité lucrative (ATF 111 V
169 consid. 4d). Par la suite, la jurisprudence a précisé que le principe
susmentionné du rattachement à la période d'activité était applicable,
également, aux assurés exerçant une activité indépendante (arrêt non
publié S. du 3 avril 1986). Autrement dit, l'année de l'activité est
déterminante, en principe, pour la naissance de la dette de cotisations
et pour l'inscription au compte individuel, cela indépendamment de la
perception des cotisations, qui intervient au moment de la réalisation
du revenu (ATF 111 V 166 consid. 4a).

    b) En cas de liquidation d'une entreprise à l'âge de 65 ans (ou de
62 ans pour les femmes) le bénéfice en capital provient entièrement - ou
presque exclusivement - d'une activité professionnelle pratiquée avant le
31 décembre de l'année qui précède l'ouverture du droit à la rente. Il
est donc logique, sur le vu des principes ci-dessus exposés et comme
l'admettent les premiers juges, d'inscrire le gain frappé d'une cotisation
spéciale au compte individuel de l'assuré et, partant, de l'englober
dans le calcul du revenu annuel moyen. Le rattachement à l'année de la
réalisation du bénéfice aurait souvent pour conséquence de faire dépendre
l'inscription de circonstances fortuites ou de pures coïncidences, liées à
l'avancement des pourparlers en vue de la liquidation. La présente espèce
semble du reste le démontrer, puisqu'il est écrit, en préambule de la
promesse de vente du 10 décembre 1985, que "le notaire chargé de la vente
immobilière n'est pas en mesure d'établir son acte avant janvier 1986",
ce qui donne à penser que les parties étaient désireuses de conclure le
contrat de vente avant la fin de l'année 1985 déjà, mais qu'elles en ont
été empêchées par des raisons indépendantes de leur volonté.

    Au demeurant, en adoptant l'art. 23bis RAVS, le Conseil fédéral
voulait introduire une procédure qui permît à coup sûr la perception
d'une cotisation sur un élément de revenu soumis à l'impôt spécial au
sens de l'art. 43 AIFD. Selon la procédure ordinaire de perception des
cotisations, la cotisation annuelle est calculée en général d'après le
revenu net moyen d'une période de calcul qui comprend la deuxième et la
troisième année antérieure de cotisations et se recouvre avec une période
de calcul de l'impôt fédéral direct (art. 22 al. 2 RAVS). Par conséquent,
les bénéfices réalisés à la suite de la liquidation d'une entreprise, en
cas de cessation simultanée de l'activité professionnelle indépendante,
ne peuvent pas être taxés dans le cadre de cette procédure, ni d'ailleurs
dans celui de la procédure extraordinaire au sens de l'art. 25 RAVS. Sous
l'empire des dispositions en vigueur jusqu'au 31 décembre 1983, le Tribunal
fédéral des assurances a donc constaté qu'il n'était pas possible, en
pareille hypothèse, de prélever une cotisation, faute d'une base légale
ou réglementaire adéquate (ATF 106 V 193 ss). L'introduction de l'art.
23bis RAVS, en vigueur depuis le 1er janvier 1984, avait pour but de
combler cette lacune: il s'est agi d'éviter qu'un assuré n'échappe
à l'obligation de cotiser lorsqu'il vend son entreprise, pour raison
d'âge notamment (au sujet de la genèse de l'art. 23bis RAVS, voir RCC
1983 p. 291). Or, dans une situation de ce genre, il n'est pas rare
que l'intéressé, pour des motifs personnels ou économiques, veuille
faire coïncider, dans la mesure du possible, le moment de la remise
de son exploitation avec celui de l'ouverture de son droit à une rente
de l'AVS. Il serait dès lors inéquitable, pour ne pas dire choquant, de
prélever une cotisation, parfois très élevée, sans prendre en considération
ce revenu dans la fixation de la rente, au seul motif que le gain eût dû
être réalisé une année plus tôt. Ni la genèse de l'art. 23bis RAVS ni le
sens et le but de celui-ci ne permettent de conclure qu'une inscription
au compte individuel est exclue dans ce cas.

    c) La référence au principe selon lequel les caisses de compensation
et, dans une certaine mesure, le juge des assurances sociales sont liés par
la taxation fiscale entrée en force n'est pas pertinente en l'espèce. Cette
force contraignante ne vaut - et sous certaines réserves encore - que
pour la fixation des cotisations (voir ATF 114 V 75 consid. 2, 110 V
86 consid. 4 et 370 consid. 2a, 102 V 30 consid. 3b et les références).
Savoir si et dans quelle mesure ces cotisations sont formatrices de rente
et selon quels principes les revenus doivent être inscrits au compte
individuel des assurés sont des questions sur lesquelles les règles du
droit fiscal n'ont aucun caractère préjudiciel. Au reste, on ne conçoit
guère qu'il puisse en être autrement: l'impôt est perçu sans condition,
c'est-à-dire sans contrepartie d'une prestation fournie par l'Etat, ce
qui - sauf exceptions clairement définies par la loi - n'est pas le cas
des cotisations d'assurances sociales (ATF 114 V 188 consid. 5a).

Erwägung 5

    5.- En conclusion, il faut considérer comme formatrice de rente la
cotisation spéciale versée par l'intimé. Contrairement à ce qui est dit
dans l'arrêt L., l'art. 30 al. 2 LAVS ne ferme pas la porte à une telle
solution. Le mot "payées" dont use cette disposition ne saurait être pris
à la lettre. Il peut arriver que des cotisations arriérées ne soient pas
acquittées avant la date limite (p.ex. en cas d'insolvabilité du débiteur
et de compensation ultérieure avec une rente; cf., p.ex., ATF 111 V 2
consid. 3) et rien ne s'oppose à ce qu'elles soient versées après coup,
sous réserve de la péremption quinquennale de l'art. 16 al. 1 LAVS;
le cas échéant, la rente en cours sera augmentée avec effet rétroactif
(v. dans ce sens: ch. 469 des directives de l'OFAS sur les rentes).

    Cependant, compte tenu des risques d'abus et des difficultés d'ordre
pratique évoqués par l'OFAS, une répartition rétroactive du gain sur
l'ensemble des années de l'activité professionnelle, telle qu'elle a
été ordonnée par les premiers juges, doit être exclue. L'on peut donc se
rallier à la proposition subsidiaire de l'OFAS, qui préconise d'inscrire
le revenu au compte individuel pour la seule année précédant celle de la
naissance du droit à la rente (en l'espèce l'année 1985). Cette solution
n'est pas moins favorable à l'intimé que celle adoptée par la juridiction
cantonale et, du reste, elle eût été appliquée si la vente du commerce
avait eu lieu en 1985 déjà.

    En conséquence, la conclusion subsidiaire du recours se révèle bien
fondée. La cause doit dès lors être renvoyée à la caisse de compensation
pour qu'elle procède aux inscriptions nécessaires, conformément aux
considérants qui précèdent, et qu'elle rectifie sa décision de rente du
30 avril 1986.

    Quant au point de savoir si un bénéfice en capital accumulé à la fois
avant et après l'âge d'ouverture du droit à la rente (p.ex. dans le cas
d'une cessation d'activité plusieurs années après l'âge de 62 ans ou de
65 ans) devrait être partiellement pris en considération dans le calcul de
la rente (p.ex. en proportion des années d'activité antérieures à l'âge de
62 ans ou de 65 ans), il ne fait pas l'objet de la présente procédure. Il
n'y a dès lors pas lieu de le trancher ici, mais il convient d'en réserver
l'examen le cas échéant.

Erwägung 6

    6.- (Frais de justice)