Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 116 IV 14



116 IV 14

4. Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation pénale du 8 février 1990
dans la cause S. c. Procureur général du canton de Genève (pourvoi en
nullité) Regeste

    Art. 68 Ziff. 1 und Ziff. 2 StGB: retrospektive und gewöhnliche
Realkonkurrenz.

    - Hat der Richter nebst neuen Straftaten mehrere strafbare Handlungen
zu beurteilen, die der Täter begangen hat, bevor er wegen anderer Taten zu
mehreren Freiheitsstrafen verurteilt worden ist, hat er eine Gesamtstrafe
auszusprechen (E. 2b).

    - Grundsätze für die Bemessung dieser Gesamtstrafe (E. 2c ff.).

Sachverhalt

    A.- Au mois de septembre 1988, S. a comparu avec d'autres accusés
devant la Cour d'assises du canton de Genève. Son casier judiciaire
mentionnait les condamnations suivantes:

    "a.- 21.5.1984 Juge d'instruction Genève: vol d'usage d'une auto le

    21.3.84: 15 jours d'emprisonnement, sursis 3 ans (révoqué le 16.11.84).

    b.- 16.11.1984 Tribunal correctionnel Morges: vol d'usage d'une auto,
   diverses infractions LCR, les 29.7.84 et 16.09.84: 3 mois
   d'emprisonnement (révocation sursis accordé le 21.5.84).

    c.- 24.1.1985 Tribunal de police Genève: injures et menaces, infraction

    LCR, le 20.12.1984: 2 mois d'emprisonnement, sursis 2 ans (prolongé
d'un
   an le 19.2.1986), amende Fr. 200.--.

    d.- 19.2.1986 Cour d'assises Genève: brigandage et infraction LCR les 3
   et 4.11.1985: 18 mois de réclusion, sursis 3 ans (sursis accordé le

    24.1.1985 prolongé d'un an).

    e.- 20.11.1986: Tribunal de police Genève: infraction LCR le 14.5.1986:

    15 jours d'arrêts, amende Fr. 500.-- (pas de révocation des sursis
   accordés les 24.1.1985 et 19.2.1986)."

    Statuant le 21.9.88, la Cour d'assises genevoise a reconnu S. coupable
des infractions suivantes:

    "1.- dans la nuit du 17-18 juin 1984: incendie intentionnel (art. 221
   al. 1 CP).

    2.- le 9 septembre 1985: complicité d'un abus de confiance (art. 25 et

    140 ch. 1 al. 1 et 3 CP).

    3.- en octobre 1987: recel (art. 144 al. 1 CP).

    4.- le 1er novembre 1987: infraction aux règles de circulation (art. 34
   al. 4, 35 al. 1, 40 et 90 ch. 1 LCR).

    5 et 6.- le 17 février 1987: deux infractions de lésions corporelles
   simples (art. 123 ch. 1 al. 1 CP)."

    Fondée sur le fait que certaines infractions avaient été commises
avant le jugement du 19 février 1986, l'avocate de S. a demandé que soit
fixée une peine complémentaire à celle prononcée par la Cour d'assises le
19 février 1986, ceci en application de l'art. 68 ch. 2 CP. Cette autorité
ne l'a cependant pas suivie; elle a considéré que la jurisprudence citée
par la défense (ATF 80 IV 223) avait trait à une situation différente et
qu'une peine d'ensemble se justifiait; appliquant l'art. 68 ch. 1 CP,
elle a condamné S. à une peine de 2 ans de réclusion sous déduction de
la détention préventive subie, a révoqué le sursis accordé le 24 janvier
1985 mais n'a pas révoqué celui du 19 février 1986.

    Par un arrêt du 28 avril 1989, la Cour de cassation du canton de
Genève a rejeté le recours du condamné.

    S. se pourvoit en nullité au Tribunal fédéral. Il demande l'annulation
de l'arrêt du 28 avril 1989 et le renvoi de la cause à l'autorité cantonale
pour nouvelle décision. Il a requis l'effet suspensif.

Auszug aus den Erwägungen:

                    Considérant en droit:

Erwägung 1

    1.- D'après le recourant, la cour cantonale de cassation a violé
l'art. 68 ch. 2 CP en refusant de prononcer une peine complémentaire
à celle prononcée le 19 février 1986, ce qui le défavoriserait; il
se réfère à l'arrêt publié aux ATF 80 IV 223 (voir JT 1955 IV 2) et à
l'opinion de HANS SCHULTZ exprimée à la p. 83 de son ouvrage Einführung
in den allgemeinen Teil des Strafrechts, vol. II, 4e éd. Berne 1982;
il admet que la jurisprudence est quelque peu incertaine mais que le
problème doit être résolu selon la méthode de l'auteur précité; ainsi,
une peine complémentaire au sens de l'art. 68 ch. 2 CP s'imposerait aux
deuxième juge lorsque les actes commis par l'accusé avant le premier
jugement sont d'une gravité supérieure ou au moins égale à celle des
autres nouvelles infractions à juger, ce qui serait manifeste en l'espèce
(incendie intentionnel et complicité d'abus de confiance en concours avec
4 infractions commises postérieurement, mais qui sont de peu de gravité).

Erwägung 2

    2.- a) Aux termes de l'art. 68 ch. 2 CP, si le juge doit prononcer
une condamnation à raison d'une infraction (punie d'une peine privative
de liberté) commise antérieurement à une condamnation déjà prononcée
pour une autre infraction, punie également d'une peine privative de
liberté, il fixera la peine de manière que le délinquant ne soit pas plus
sévèrement puni que si les diverses infractions avaient fait l'objet d'un
seul jugement.

    Ce cas se présente notamment lorsque le tribunal saisi en premier
lieu était dans l'ignorance d'infractions qui ont été découvertes
plus tard. Se pose alors le problème résultant d'un concours réel dit
rétrospectif. Le législateur l'a résolu en adoptant le principe d'une
peine fixée de façon que l'auteur ne soit pas défavorisé en comparaison
avec le châtiment qu'eût prononcé un seul tribunal saisi de l'ensemble
des infractions connues. Cette peine, qui vient d'une certaine manière
s'ajouter à la première, est appelée peine complémentaire ou additionnelle,
voire supplémentaire (Zusatzstrafe, pena addizionale) par opposition à
une peine dite d'ensemble - Gesamtstrafe, pena unica; voir art. 49 ch. 2
al. 2 CPM, ATF 80 IV 223 = JT 1955 IV 2, LOGOZ/SANDOZ p. 376 ch. 4.

    b) Le CP laisse en revanche dans l'ombre la question de la nature de
la peine à fixer lorsque le juge est en présence de deux infractions dont
l'une a été commise avant une précédente condamnation et l'autre après
celle-ci. Il y a d'une part un concours rétrospectif, d'autre part une
infraction nouvelle qui font l'objet du même jugement.

    D'après la jurisprudence, c'est une peine d'ensemble qui doit être
prononcée (ATF 115 IV 24 consid. b). Cependant, la quotité de cette peine
d'ensemble sera fixée en tenant compte aussi de la règle de l'art. 68
ch. 2 CP, dans la mesure suivante.

    Dans un premier temps du raisonnement, on détermine l'infraction
pour laquelle la loi prévoit la peine la plus grave; ensuite, on évalue
la sanction qu'elle mérite dans le cas concret. Enfin, ce châtiment sera
augmenté en fonction de la peine évaluée pour l'autre infraction à juger.

    Il convient de préciser que l'élément de la peine d'ensemble
relatif à l'acte en concours rétrospectif sera déterminé comme une peine
additionnelle (voir TF 69 IV 59 consid. 4).

    En d'autres termes, si l'acte ancien est le plus grave, on raisonnera
à partir de la peine - théoriquement additionnelle - qui le concerne; à
celle-ci on ajoutera la peine - théorique aussi - relative à l'infraction
nouvelle. Si l'acte nouveau est le plus grave, la peine qu'il mérite
servira de base; elle sera augmentée de celle - théoriquement additionnelle
- concernant l'acte ancien.

    Cette méthode permet d'appliquer l'art. 68 ch. 1 CP sans négliger
l'art. 68 ch. 2 CP. Sur le plan formel, la sanction est toujours une
peine d'ensemble mais, sur celui de sa quotité, il est tenu compte du
concours rétrospectif.

    c) Face à plusieurs condamnations antérieures, la démarche est la
même. Il faut cependant rattacher chacune des infractions anciennes
à la condamnation qui suit la commission de l'acte délictueux; en
effet, un jugement pénal doit - en principe - sanctionner tous les
actes répréhensibles commis avant son prononcé; cela est corroboré par
l'institution de la peine additionnelle dont il résulte que le juge qui
prononce la seconde condamnation doit toujours tenir compte de la première,
si l'acte découvert précédait celle-ci.

    Le rattachement des actes anciens à la condamnation qui les suit
permet de former des groupes d'infractions.

    Pour fixer la peine d'ensemble, on recherche l'infraction (ou le groupe
d'infractions) la plus grave. On en détermine la peine qui servira de base;
à celle-ci viennent s'ajouter les peines relatives aux autres groupes;
pour celles qui concernent les groupes d'infractions anciennes, on les
évalue comme des peines additionnelles.

    d) En l'espèce, l'infraction la plus grave est l'incendie intentionnel
passible de la réclusion dont la durée est d'un an au moins, de 20 ans
au plus (art. 221 al. 1 et 35 CP): elle a été commise en juin 1984. Elle
doit être rattachée à la condamnation du 16 novembre 1984, qui suit
immédiatement la commission de l'acte. La peine relative à l'incendie
intentionnel doit être évaluée comme une peine additionnelle à cette
condamnation (intervenue pour vol d'usage d'une automobile et diverses
infractions à la LCR). C'est le premier élément de la peine d'ensemble.

    La complicité d'abus de confiance commise le 9 septembre 1985 précédait
immédiatement la condamnation prononcée le 19 février 1986 (18 mois de
réclusion pour brigandage et infraction à la LCR). Là encore, on appréciera
la sanction comme une peine additionnelle à cette condamnation. C'est le
deuxième élément de la peine d'ensemble.

    Enfin, les infractions commises en 1987 sont nouvelles (recel,
infractions aux règles de la circulation, 2 infractions de lésions
corporelles simples). On évaluera la peine relative à ce groupe en
concours réel simultané (art. 68 ch. 1 CP). C'est le troisième élément
de la peine d'ensemble.

    e) Ainsi, l'autorité cantonale devait fixer une peine d'ensemble en
raisonnant à partir de la sanction de l'incendie intentionnel, complétant
celle de 3 mois d'emprisonnement prononcée le 16 novembre 1984; cette
peine, théoriquement additionnelle, devait être aggravée une première
fois en fonction de la complicité d'abus de confiance et une seconde fois
à cause du groupe des infractions nouvelles. Compte tenu de ces facteurs,
on ne saurait considérer une peine de 2 ans de réclusion comme incompatible
avec une application équitable de la méthode exposée ci-dessus.

    f) Le moyen tiré de l'absence d'une peine complémentaire au sens de
l'art. 68 ch. 2 CP est mal fondé au regard de la jurisprudence précitée. Il
doit être rejeté.