Sammlung der Entscheidungen des Schweizerischen Bundesgerichts
Collection des arrêts du Tribunal fédéral suisse
Raccolta delle decisioni del Tribunale federale svizzero

BGE 116 II 33



116 II 33

5. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile du 8 janvier 1990 dans la
cause W. contre W. et consorts (recours en réforme) Regeste

    Art. 608 und 621bis Abs. 1 ZGB.

    1. Befindet sich im Nachlass ein landwirtschaftliches Gewerbe, so
richtet sich die Teilung nach den Bestimmungen des bäuerlichen Erbrechts,
die galten, als der Erblasser starb (E. 3a).

    2. Es obliegt dem Teilungsrichter, nach freiem Ermessen zu entscheiden,
ob ein Gewerbe ein landwirtschaftliches im Sinne von Art. 620 ZGB ist;
Kriterien, die dabei zu berücksichtigen sind (E. 5a).

Sachverhalt

    A.- Charles W., maraîcher, était propriétaire d'un domaine d'environ
18 000 m2 sis sur le territoire de la commune de L. (parcelles Nos 411,
412, 434, 435 et 437); 257 m2 sont bâtis, 353 m2 sont en vignes et le
reste est en nature de prés-champs ou places-jardins.

    Charles W. est décédé le 2 janvier 1968; il laissait pour héritiers
son épouse Rosa et ses sept enfants: Lilas R., Marguerite, René, Marcel,
Rodolphe, Edouard et André W.; son testament attribuait à son épouse la
propriété des 3/16 de sa succession et l'usufruit des 13/16 restants, qui
revenaient à parts égales à ses enfants. André W. est décédé intestat
le 9 juin 1974, laissant pour héritiers sa mère et ses six frères et
soeurs; sa succession consiste en une parcelle (No 410) non bâtie de 1287
m2. Rosa W. est décédée le 14 janvier 1986, sans laisser de testament;
sa succession, acceptée, se compose essentiellement de ses parts de
propriété sur les immeubles des successions susmentionnées; ses seuls
héritiers sont ses six enfants.

    Les parcelles 410, 411 et 412 sont classées en zone de villas,
secteur maraîcher. Les autres sont comprises dans une zone constructible
de faible densité. Elles sont toutes reliées à une voie publique. La
plupart des parcelles avoisinantes sont bâties. Les parcelles 410 et 411
sont grevées d'une servitude de canalisation en faveur de la commune de
L. L'acte constitutif précise que cette canalisation devra être déplacée
par le bénéficiaire en cas de construction.

    Edouard W. exploite ces terrains depuis plusieurs années. Marcel
W. exploite un domaine maraîcher à M.

    B.- Le 5 octobre 1983, Lilas R., Marguerite, René et Marcel W. ont
requis le partage des successions de Charles et André W. Le curateur
de Rosa et Rodolphe W. ainsi qu'Edouard W. ont souscrit au principe du
partage. Le 22 décembre 1983, le président du Tribunal du district a
ordonné le partage des successions de Charles et André W.

    a) Par requête incidente du 26 mars 1985, Marcel W. a conclu,
principalement, à ce qu'il soit prononcé que la succession de Charles
W. est régie par le droit successoral dans sa teneur antérieure au 15
février 1973, celui-ci étant déclaré inapplicable du fait de la règle de
partage figurant dans le testament; subsidiairement, il a conclu à ce que
les art. 630 ss CC soient déclarés inapplicables aux immeubles formant
les successions de Charles et André W., ceux-ci ne constituant pas une
exploitation agricole. Le même jour, Lilas R., Marguerite et René W. ont
pris les mêmes conclusions. Edouard W. a conclu au rejet des conclusions
susmentionnées.

    b) Le 31 juillet 1985, le président du Tribunal du district a suspendu
la cause et imparti un délai de trente jours à Edouard W. pour saisir
la Commission foncière rurale. Le 21 mars 1986, celle-ci a assujetti
les terrains successoraux aux lois fédérales du 12 décembre 1940 sur le
désendettement de domaines agricoles et du 12 juin 1951 sur le maintien
de la propriété foncière rurale.

    c) Le 17 juin 1986, Marcel W. a conclu au partage de la succession de
Rosa W. et à sa jonction à celui des successions de Charles et André W. Il
demandait en outre que soit tranchée à titre préalable, après disjonction,
la question du droit applicable, en ce sens que les successions de Charles,
André et Rosa W. ne sont pas régies par le droit successoral paysan,
ancien ou nouveau. Peu après, Lilas R., Marguerite et René W. ont pris
des conclusions semblables.

    Le 4 novembre 1986, les parties ont admis, par convention, le principe
du partage de la succession de Rosa W. et de sa jonction au procès en
partage des successions d'André et de Charles W. Elles sont également
convenues qu'un jugement préjudiciel serait rendu sur la question du
droit applicable.

    Le 30 septembre 1987, Edouard W. a conclu au rejet des conclusions
incidentes prises par les requérants; il a notamment demandé que les
art. 620 ss CC soient déclarés applicables, dans leur teneur actuelle,
aux trois successions familiales. Les autres parties ainsi que Rodolphe
W., représenté par son curateur, ont conclu au rejet de ces conclusions.

    C.- Par jugement préjudiciel du 27 juillet 1988, le président du
Tribunal a déclaré le droit successoral paysan inapplicable aux successions
de Charles, André et Rosa W. Le recours interjeté par Edouard W. contre
ce jugement a été rejeté le 15 mars 1989 par la Chambre des recours du
Tribunal cantonal.

    E.- Edouard W. exerce un recours en réforme au Tribunal fédéral;
il conclut notamment à ce que le droit successoral paysan soit déclaré
applicable. Les intimés Lilas R., Marguerite, René et Marcel W. concluent
au rejet du recours dans la mesure où il est recevable. Rodolphe W. n'a
pas déposé de réponse.

    Le Tribunal fédéral rejette le recours.

Auszug aus den Erwägungen:

                  Extrait des considérants:

Erwägung 3

    3.- Selon la cour cantonale, la succession de Charles W. doit être
réglée selon le droit successoral paysan en vigueur au décès du de cujus,
à savoir avant le 15 février 1973. Par une règle de partage testamentaire
(art. 608 CC), le père du recourant a exclu l'attribution de son
exploitation à la valeur de rendement.

    a) Le recourant critique cette application du droit transitoire pour
tirer argument de l'actuel art. 621bis al. 1 CC; un héritier disposé
et apte à exploiter l'entreprise personnellement ne peut être privé de
son droit à l'attribution préférentielle ni par testament, ni par pacte
successoral.

    Le droit successoral paysan, régi par les art. 620 ss CC, a été modifié
à plusieurs reprises: d'abord par la loi fédérale du 12 décembre 1940 sur
le désendettement de domaines agricoles (LDDA; RS 211.412.12), ensuite par
la loi fédérale du 12 juin 1951 sur le maintien de la propriété foncière
rurale (LPR; RS 211.412.11), enfin par une loi fédérale du 6 octobre 1972.

    Alors que la loi fédérale sur le désendettement de domaines agricoles
prévoyait à son art. 108 l'application des art. 620 ss modifiés à toute
succession comprenant un domaine agricole non encore attribué par le
partage à son entrée en vigueur, la loi fédérale du 6 octobre 1972,
comme la loi fédérale sur le maintien de la propriété foncière rurale
d'ailleurs, ne contient pas de règle de droit transitoire. Il faut donc
appliquer en ce qui la concerne les règles du titre final du Code civil
(ATF 96 II 11, 94 II 245 et les références).

    Tandis que l'art. 1er Tit.fin. CC pose le principe général de la
non-rétroactivité, l'art. 15 dispose que les rapports de droit successoral
sont régis par le droit en vigueur au moment de la mort du de cujus. Cette
règle s'applique d'une manière générale à tous les effets de la dévolution
et en particulier aux droits et aux devoirs des héritiers (ATF 94 II 248
et les références). Certes, le Tribunal fédéral s'est écarté de ce principe
dans l'arrêt cité en ce qui concerne le droit des cohéritiers à une part du
gain (ATF 94 II 249/250). Cette exception se justifie toutefois: ce n'est
pas le décès du de cujus qui donne naissance directement et immédiatement à
ce droit à une part de gain, mais le fait qu'un héritier se voit attribuer
un immeuble à un prix inférieur à la valeur vénale. La situation est
différente s'agissant du droit d'un héritier de demander que l'exploitation
agricole lui soit entièrement attribuée au sens de l'art. 620 CC. Ce droit
prend naissance avec la mort du de cujus qui ouvre sa succession. Il faut
donc lui appliquer sans restriction l'art. 15 Tit.fin. CC (ATF 108 II 177,
107 II 39; TUOR/PICENONI, n. 3 des remarques préliminaires ad art. 620 ss
CC; ESCHER, Ergänzungslieferung zum bäuerlichen Erbrecht, n. 2 précédant
l'art. 620 CC; BENNO STUDER, Die Integralzuweisung landwirtschaftlicher
Gewerbe nach der Revision des bäuerlichen Zivilrechts von 1972, thèse
Fribourg 1975, p. 151; NEUKOMM/CZETTLER, Le droit successoral paysan,
5e éd. 1983, p. 32).

    L'art. 621bis CC n'est donc pas applicable en l'espèce (ATF 108 II
177/178 consid. 3, a contrario).

    L'argumentation du recourant selon laquelle cette jurisprudence
est discutable et pourrait être revue n'est pas convaincante. La règle
générale du droit transitoire ne doit pas céder le pas parce que c'est la
loi fédérale sur le désendettement de domaines agricoles qui a innové en
droit successoral paysan, que l'art. 621bis a été édicté dans l'intérêt
public, encore qu'il faille tenir compte de la durée de l'exploitation
agricole ou de la crise que traverserait l'agriculture.

    b) L'art. 608 CC est donc applicable, sans égard au nouvel
art. 621bis. Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir mal
saisi la nature des règles de partage et d'avoir ainsi mal interprété la
volonté du testateur Charles W.; le testament ne se prononcerait pas sur
le mode de partage, mais se bornerait à indiquer "des proportions", sans
individualiser des parts du patrimoine successoral. Mais il ne conteste
pas que lesdites règles de partage ont le pas sur le droit successoral
paysan des art. 620 ss CC (ATF 97 II 209 No 28, 90 II 4 ss consid. 2,
81 II 596, 80 II 208).

    La liberté du testateur s'étend à toutes les règles de partage,
qu'elles aient pour objet l'attribution du domaine à un héritier, le
morcellement de l'exploitation ou la valeur à laquelle elle doit être
portée en compte; c'est à cette fin que l'on a revisé la loi et introduit
le nouvel art. 620bis al. 1 (ATF 90 II 7/8 consid. 2). Dans la cause
citée, le de cujus avait aussi conféré un usufruit viager à son épouse
(art. 473 al. 1 CC) - qui n'exclut pas l'attribution préférentielle à un
autre héritier (ATF 92 II 319 ss, 108 II 177) - et ordonné que, dans le
partage, chacun de ses six enfants reçoive une part égale, notamment 1/6
des immeubles. Dans la présente espèce, Charles W. a, de plus, donné à sa
femme 3/16 en propriété. Il paraît clair que la disposition pour cause de
mort exprime, dans l'un et l'autre cas, la volonté de préférer l'égalité
entre les descendants à l'application du droit successoral paysan (ATF
90 II 8 consid. 3) et rien dans l'arrêt déféré, ni d'ailleurs dans le
dossier, ne permet de penser que le défunt aurait abusé de son droit de
tester en violation des règles de la bonne foi, ce que le recourant ne
prétend du reste pas. Les enfants W. doivent recevoir des "parts égales
entre eux", égalité à laquelle déroge précisément le droit successoral
paysan (ATF 50 II 330 in fine). Prise par un maraîcher, la disposition
prévoit apparemment un partage par division en nature ou en valeur,
sans quoi l'attribution à tel enfant eût été normalement évoquée. Si le
testateur a avantagé son épouse, cela ne sous-entend pas nécessairement
que le domaine devrait être maintenu pour qu'elle puisse y rester. Le
premier juge déjà l'a bien vu, ajoutant deux indices en faveur de la règle
de partage: l'attribution à la veuve d'une part en propriété incline à
penser que son mari envisageait un morcellement; de même la constitution
en 1952 d'une servitude préservant les possibilités de construire sur
les parcelles. Si le testateur n'a pas lui-même divisé son domaine ni
attribué à chaque héritier une parcelle déterminée, il n'en a pas moins
voulu un résultat, qui est l'égalité entre ses enfants.

Erwägung 5

    5.- Le recourant prétend, contre l'avis des autorités cantonales,
que les parcelles de la succession de son père, Charles W., constituent
une exploitation agricole au sens de l'art. 620 al. 1 et 2 CC. Certes,
il traite le problème comme si la parcelle d'André W. y était incluse.
Mais le second alinéa de l'art. 620 actuel, fût-il applicable selon
le droit transitoire à la succession de son père, ne concerne que la
détermination des moyens d'existence suffisants pour l'exploitant, ce
qui a été admis et n'est pas discuté dans le recours.

    a) Il incombe au juge du partage de dire librement si une
exploitation est agricole au sens de l'art. 620 CC et si les autres
conditions de l'attribution préférentielle sont réunies (ATF 83 II 112
s. consid. 4). Seule le lie la valeur fixée par l'autorité administrative
en application de la loi sur le désendettement de domaines agricoles
(art. 620 al. 3 CC, anciennement al. 2; ATF 87 II 74 ss, 82 II 4 ss).

    Est décisif l'état de la succession à l'époque du partage (art. 617
CC). Toutefois, le seul fait qu'un fonds était à ce moment-là affecté à
l'agriculture ne suffit pas à le considérer comme un immeuble agricole.
L'exploitation agricole doit correspondre durablement à la nature
du fonds et à sa situation; d'après le cours normal des choses, son
affectation ne doit pas changer, sauf circonstances extraordinaires,
notamment à des fins spéculatives; mais il ne perd pas son caractère
initial parce qu'il est seulement possible qu'il soit compris un jour ou
l'autre dans la zone, toujours en extension, des terrains à bâtir (ATF
83 II 113/114 consid. 4; 50 II 330). Mais le droit successoral paysan
ne saurait en tout cas être appliqué à des terrains sis en zone à bâtir
et immédiatement constructibles qui, pour cette raison, présentent une
valeur vénale sans commune mesure avec celle de rendement, de sorte qu'il
est devenu improbable et déraisonnable de les réserver à la culture.

    La volonté d'un ayant droit ne joue pas de rôle, mais seulement les
critères objectifs, tels le rapport entre la valeur vénale et de rendement,
l'affectation à une zone à bâtir, la possibilité de construire sans délai
ou dans un proche avenir en raison du degré d'équipement et des prévisions
concernant le développement futur de la région ou des projets concrets de
construction. Les mesures d'aménagement revêtent une grande importance,
d'autant plus qu'elles ne sont modifiées qu'après nombre d'années et que
la demande de terrains à bâtir subsiste dans une agglomération urbaine et
à sa périphérie (ATF 111 II 326 ss; cf. aussi la jurisprudence relative
à l'art. 218bis CO: ATF 93 I 602 consid. 6; 92 I 338 consid. 4).

    Le pronostic doit donc prendre en compte tout ce qui peut
influencer les possibilités d'utilisation dans un proche avenir. Il
peut arriver que l'inclusion dans une zone à bâtir ou industrielle ne
soit exceptionnellement pas décisive, notamment si une telle zone est
surdimensionnée (arrêt, non publié, Sch. c. Sch. du 3 mars 1977, cité
par NEUKOMM/CZETTLER, op.cit., p. 439).

    Un domaine reste agricole s'il comprend des accessoires en rapport
raisonnable avec les terres et bâtiments ruraux, ainsi deux logements
outre celui du paysan (ATF 83 II 120 consid. 7). Mais lorsque l'élément
non agricole l'emporte en importance, valeur ou rendement, ce caractère
agricole fait défaut à l'ensemble (ATF 50 II 327/328).